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Avignon 2018 : « Trans » (Mes Enlla)

POUR : :Michèle Bigot

Trans (Mes Enlla)
Festival d’Avignon 2018,
Gymnase du Lycée Mistral, 8>16/7/2018

Programmée dans le festival IN d’Avignon, la pièce se jouait à guichet fermé avant même d’avoir démarré. Difficile d’obtenir des places.
Tant il est vrai que le sujet du transformisme, aussi bien que celui de l’homosexualité et en général de l’indétermination sexuelle touche au vif des questions sociétales.
C’est vrai aussi parce que la réputation de Didier Ruiz l’a précédé. Moins en France qu’en Espagne, mais néanmoins il s’est fait connaître pour ses spectacles que d’autres appellent « théâtre documentaire » mais que lui préfère appeler « Théâtre politique, du monde , de l’humanité ». Il a déjà réalisé ce genre de performance théâtrale (« Dale recuerdos ») sur la question de la vieillesse, comme il a aussi travaillé avec des ouvriers, des scientifiques et des détenus.
Écoutons-le : « Avec ces spectacles, je cherche à faire entendre une réalité que le public ne connaît pas afin de changer sa perception du monde, voire qu’il se fasse l’écho de cette parole libérée et qu’il la répande ».

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« Mary Prince » disponible en DVD!

Mary Prince, spectacle salué unanimement par la critique et plébiscité par le public est désormais disponible en DVD sur la boutique du site de la compagnie Man Lala www.ciemanlala.com et à partir du 1er avril sur le site de Colaco pour les médiathèques et les établissements scolaires.

Le coffret comprend :

— la recréation de la pièce Mary Prince

— des bonus sur Mary Prince aux Bermudes, à Turks-et-Caïcos, à Londres…

— un livret pédagogique L’histoire de Mary Prince, la condition d’esclave et les abolitions dans la Caraïbe.

Un bel outil et une superbe idée de cadeau!

Ce spectacle présenté en 2015 à l’Albatros, dans le cadre du festival d’Avignon par la compagnie Man Lala, présente une séquence de textes extraits d’un récit autobiographique. Il s’agit du premier témoignage publié en 1831 à Londres, sur les conditions de vie de son auteur, Mary Prince dans les colonies britanniques. Née esclave dans une colonie des Bermudes vers 1790, elle est vite séparée de ses parents lors d’une vente des esclaves de la maison. Ses premiers maîtres la traitent avec humanité; elle bénéficie même d’un enseignement rudimentaire, et elle est trop jeune pour comprendre sa condition d’esclave.

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« Tertullien » d’après le traité « Sur les spectacles », adaptation et interprétation : Hervé Briaux

— Par Michèle Bigot —

À partir d’une lecture du traité de Tertullien Sur les spectacles, rédigé au début du troisième siècle par un nouveau converti au christianisme, Hervé Briaux opère une réécriture qui puise dans le traité les passages les plus éloquents pour en faire un montage simple, cohérent et lisible pour la scène. Il s’agit de transformer un traité en matière théâtrale, d’en extraire la substance sans le trahir. Pari réussi car le texte théâtral ainsi produit ne souffre d’aucune obscurité. Il se déroule implacablement, et progresse dans l’intensité. Il culmine dans une détestation absolue de tous les arts. En fait le texte épouse la même progression qui a gouverné la vie de Tertullien, de la conversation tardive à la radicalisation absolue à la fin de sa vie. A partir de 197, cet homme, brillant lettré et épicurien raffiné, destiné à une carrière d’avocat, tourne le dos au monde dans une ascèse impitoyable qui cherche à entraîner les chrétiens dans son puritanisme. Son traité témoigne d’une fièvre fanatique servie par une éloquence éprouvée. Paradoxalement, sa charge contre les arts et en particulier contre le théâtre témoigne d’une parfaite maîtrise de l’art de convaincre les esprits, d’émouvoir les cœurs, bref du meilleur de l’art théâtral.

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L’âme humaine sous le socialisme d’après l’essai d’Oscar Wilde,

— Par Michèle Bigot —

« Une carte du monde ne faisant pas mention du royaume d’Utopie ne mérite même pas un coup d’oeil, car elle laisse à l’écart le seul pays où l’humanité finit toujours pas aborder. »
Voici l’inspiration maîtresse de cet essai signé Oscar Wilde, et aucun sujet ne peut se prétendre plus actuel que celui-là. Où sont passées les utopies dont nous avons un si pressant besoin ? Doit-on au nom du pragmatisme néo-libéral et d’une logique comptable de la rentabilité, laisser dire que les utopies sont condamnables parce qu’irréalistes ? Qu’est-ce que ce réalisme dont se prévaut le capitalisme financier et la société de contrôle qu’on nous prépare, sinon un facteur de désolation ?
Ce texte écrit en 1891 résonne aujourd’hui comme un écho surprenant des recherches actuelles des historiens, sociologues et philosophes concernant les « communs ». On en trouve un exemple éclairant dans l’essai de Rutger Bregman « Utopies réalistes, en finir avec la pauvreté », qui propose, en vrac : l’ouverture des frontières, la semaine de 15 heures, le revenu universel, et montre à partir de l’exemple de Wikipedia que non seulement les utopies sont réalistes, mais que certaines sont en cours d’accomplissement en dépit qu’on en ait.

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« J’étais dans ma maison et j’attendais que la pluie vienne » de Jean-Luc Lagarce, m.e.s. Chloé Dabert

— Par Michèle Bigot —

Le retour du retour du fils ! Dans la série des bouclages qui fondent l’écriture de Jean-luc Lagarce, le motif du fils prodigue occupe une place centrale. Et contrairement à celui d’Ulysse, ce retour à la matrice est synonyme de mort, ou d’annonce de mort. Car pour le sujet la mort n’a d’autre réalité que son annonce, sa venue prochaine et tout le système d’échos que cette annonce engendre dans la famille, semblable aux ricochets de cet étang (ou ce marigot) qu’est le cercle familial.

Écriture intimement liée à la maladie du sida. Car cette affection fait entrer la logique de mort au cœur de la jeunesse, et porte sur le devant de la scène un coming out double dans lequel coïncident l’officialisation de l’homosexualité et l’annonce de la mort. Et dispose au premier plan la panoplie des relations affectives avec les parents, dans toute leur douloureuse complexité.

Écrite quatre ans après Juste la fin du monde, cette avant-dernière pièce (la dernière étant Le Pays lointain) représente une sorte d’épure de la précédente. Car le fils prodigue est bien mal en point, il brille par son absence au cœur même de sa présence supposée.

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Prison possession

Du 30 janvier au 04 février 2018 à La Maison des Métallos. Horaires

1ère mise en ligne le 09/07/2017

De et par François Cervantes

— Par Michèle Bigot —
A partir d’une correspondance avec Erik Ferdinand
F. Cervantes, debout, seul, noir sur fond noir. Pas d’objets, pas de décor, la nudité. Il prend la parole, à moins que ce soit la parole qui s’empare de lui. Hésitant, mais calme et déterminé, commence le récit. Comme un balbutiement de l’enfance. Récit autobiographique : l’enfance à Tanger, la mère, l’apprentissage de l’alphabet, à partir de quoi le verbe va le hanter pour ne plus le lâcher. De là, l’histoire d’une formation, qui est aussi l’histoire d’un corps à corps avec les mots : « Je cherche les mots » dit-il, « Je découvre un volcan caché en moi et j’ai peur ». Jusqu’à ce qu’il découvre le théâtre. Le théâtre comme voix et comme médiateur entre les corps et les mots. L’écriture comme dramaturgie et la scène comme une passe entre auteur et lecteur, incarnée par une double présence vivante : l’acteur et le spectateur. Donc un vrai dialogue prend naissance, non pas une parole adressée par un homme seul à une multitude indéfinie, mais comme un homme qui parle à un homme.

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« Actrice » texte, mise en scène et scénographie Pascal Rambert

—Par Michèle Bigot —
Après Clôture de l’amour en 2011 et Répétition en 2014, Pascal Rambert continue d’explorer les deux voies parallèle du théâtre et des affres de la condition humaine. L’originalité de son approche, c’est cette façon singulière de nouer ces deux arguments. Il ne s’agit pas seulement de théâtre dans le théâtre, quoique cette dimension ne soit pas absente. Il s’agit de représenter un univers dont les acteurs soient des comédiens, qui portent au plus profond de leur cœur la passion du théâtre. Les titres le disent assez. Ce qui est en jeu, c’est la vie des acteurs en tant que personnes comme en tant que comédiens. Les deux étant inséparables. D’où une réflexivité permanente dans l’écriture, qui fait de l’objet théâtral la première des passions humaines, gouvernant toutes les autres. Eugenia, l’actrice par excellence le dit bien, qui affirme avoir fait passer l’amour du théâtre avant ses enfants et ses amants. Pascal Rambert aime ses actrices. Et leur donne les moyens d’exprimer leur talent de manière superlative. Audrey Bonnet, sa complice irremplaçable, et Marina Hands, dont on ne dira jamais assez le pouvoir d’émotion.

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« La Fuite » Mikhail Boulgakov, m.e.s. Macha Makeïeff,

— Par Michèle Bigot —

Comédie fantastique en 8 songes
Un spectacle de Macha Makeïeff,
La Criée, Marseille, création 2017, 6>20 octobre

Aucun spectacle créé par Macha Makeïeff ne témoigne autant que celui-ci de son double talent de metteure en scène et de plasticienne. La musique (avec une prééminence de l’accordéon) la lumière, les couleurs et les costumes ont fait l’objet d’une attention toute particulière. La scénographie digne d’un opéra, les lumières dont le jeu a été confié à Jean Bellorini, les évolutions chorégraphiques, dessinées avec la complicité d’Angelin Preljocaj, l’ensemble contribue à faire de cette comédie fantastique un spectacle total.
L’inspiration que Macha Makeïeff puise dans l’histoire familiale est tout à fait fidèle à la veine de cette pièce de Boulgakov. Outre qu’on y raconte des histoires similaires, celle de la fuite des Russes blancs en déroute jusqu’aux confins de la Crimée, à Constantinople et en France, l’ambiance rêveuse et nostalgique qu’elle a connue auprès des siens correspond parfaitement à la veine de Boulgakov. Le fantastique, les visions oniriques, le burlesque allié au tragique se répondent remarquablement.
Dans la débâcle de leur fuite les personnages se transforment en spectres.

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« L’Avenir dure longtemps » d’après Louis Althusser, adaptation Michel Bernard, jeu Angelo Bison

— Par Michèle Bigot —
Festival d’Avignon off 2017, Théâtre des Doms, 06 => 26/07

Le trio Michel Bernard (adaptation), Thomas Delord (mise en scène) et Angelo Bison (interprétation) fait merveille dans ce seul en scène proposé par Unités/nomade.
C’est d’abord un condensé du texte poignant de Louis Althusser.
Au petit matin du dimanche 16 novembre 1980, Louis Althusser, dans un état de totale confusion mentale, étrangle sa femme sans le vouloir. En fait il était en train de lui prodiguer un massage, selon leur commune habitude, quand il prend brusquement conscience que le regard d’Hélène est fixe et qu’un petit morceau de langue dépasse de ses dents. Crime pathologique, acte délirant. On a aussi parlé de suicide altruiste : emmener l’autre dans la mort, comme il semble bien que Hélène l’y invitait.
Le livre d’Althusser et son adaptation théâtrale représente des tentatives de réponse à la question : pourquoi ? Tout commence par ce passage à l’acte qui échappe à la conscience et reviendra sur cet acte pour terminer. Entre l’ouverture et le final se déroule le récit d’une vie, marquée par un profonde mélancolie.

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« Tabula rasa » une création écrite et dirigée par Violette Pallaro

— Par Michèle Bigot —

Ils sont cinq à table. Ou plutôt quatre, car il y a toujours une place vide pour la mystérieuse narratrice. La table est le symbole du cercle familial ; en tout cas, elle représente le lieu de la relation : on y mange, on y parle, on s’y retrouve ou bien on s’y querelle. Au fond, c’est comme un nouveau lieu scénique imbriqué dans le premier, car chacun joue un rôle dans la configuration familiale. Les caractères s’y affirment, les conflits y naissent : la place qu’occupe chacun autour de la table fonde et symbolise son rôle. La mère est près de la cuisine, le père trône en bout de table, et les enfants mâles tentent de se rapprocher de la place du père ou à la lui usurper en cas d’absence. Et les filles, elles ont ce qui reste : variables d’ajustement. Les révoltes et les insurrections commencent à table, lorsqu’il y en a un qui veut changer de place. Pour tout changer ne dit-on pas « renverser la table » ? c’est ce que fera la mère quand elle sera venue au sommet de son exaspération.

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« Is there life on Mars ? » Héloïse Meire, Compagnie What’s up? Théâtre national Wallonie-Bruxelles

— par Michèle Bigot —
Festival d’Avignon off 2017, Théâtre des Doms, 06 => 26/07

Bonne question ! Que sait-on de Mars, en dehors de ce que le nom véhicule de connotations viriles issues de la mythologie grecque ? Et des martiens, ou supposés tels ? Et de l’autisme, que sait-on ? C’est la question que posent les quatre comédiens aux spectateurs avant le spectacle. Munis d’un enregistreur, chacun d’eux choisit quelques spectateurs pour l’interviewer sur ce problème et la réponse des spectateurs fournira l’ouverture du spectacle, réinterprété par les comédiens, installés à une table d’enregistrement. On ne peut s’empêcher de penser qu’entre « autiste » à « artiste » les consonances sont riches. Mais voyons!
D’emblée nous sommes embarqués pour un autre univers : le voyage se fera en lumière, en sons et en images. Le texte ne sera autre que les paroles recueillies des personnes avec autisme, ou de leurs proches. Les acteurs écoutent les montages des interviews qu’ils retransmettent aux spectateurs. La dimension proprement créatrice et artistique est dans cette transposition qui se fait par la voix, le jeu des acteurs, mais aussi par toute une chorégraphie de leurs corps habités par une vitalité surprenante et une force mystérieuse.

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« Le garçon incassable » d’après le roman de Florence Seyvos adaptation et m.e.s. Laurent Vacher

— par Michèle Bigot —
Festival d’Avignon off 2017

Sur scène trois coffres à roulettes, deux acteurs et une actrice qui joue du ukulélé. En fond de scène un rideau de franges qui dissimule un écran vidéo. Au son de la musique, commence l’histoire de Buster Keaton, de son vrai nom Joseph Keaton. Il est né en 1895 dans le Kansas, ses parents sont saltimbanques, musiciens et acrobates. Enfant de la balle, à l’instar de Chaplin, il va connaître une enfance aussi difficile. A six mois, il dévale les escaliers. Cette chute mémorable arrache à son père l’exclamation : « What a buster ! ». Le surnom lui restera. A peine a-t-il appris à marcher que son père l’enrôle dans ses numéros où il joue le rôle d’une chose. Il se sert de lui comme d’un projectile. Buster se fracasse, se blesse mais retourne à son rôle. Il apprend à tomber et il va devenir le spécialiste de la chute. Mais un second récit avance en parallèle : c’est celui de Henry, le demi-frère de la narratrice, lui aussi enfant martyr, né handicapé, auquel son père va faire subir la plus cruelle des rééducations.

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Festival d’Avignon : les critiques de Madinin’Art

« Vivre » texte et m.e.s. Hugo Paviot avec David Arribe

— Par Michèle Bigot —

Festival d’Avignon off 2017, Présence Pasteur 7>30 juillet

Vivre est l’histoire d’Alexandre, un ancien peintre célèbre, qui a investi sa fortune dans une fondation destinée à recueillir les enfants victimes de maltraitance. Il est en ce moment invité par l’ambassade de France d’un pays du Moyen-Orient. Ce pourrait être l’Irak, ou la Syrie. Pour cette ville en guerre où il débarque, on pense aussi à Beyrouth, ou à Kaboul. Aucun détail ne ne permettra d’identifier le pays, tant la situation est identique dans tous ces pays du Moyen Orient dévastés par la violence meurtrière. Un attentat suicide vient d’avoir lieu en pleine réception de l’ambassadeur. Un enfant Kamikaze s’est fait exploser en tuant avec lui une dizaine de personnes. Alexandre en réchappe par chance ; il a assisté à la cérémonie, il a vu l’enfant kamikaze s’avancer vers la tribune, et au moment fatal il s’est retourné et à échanger un regard avec une fillette qui s’apprêtait à faire actionner le déclencheur de sa ceinture d’explosif. Mais le déclencheur n’a pas fonctionné. Depuis lors, Alexandre, au péril de sa vie, erre dans la ville à la recherche de cette fillette qu’il veut ramener à la lumière de l’enfance.

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« Vive les animaux spectacle forain », d’après Vinciane Despret

— Par Michèle Bigot —

M.E.S. Thierry Bedard
Festival Villeneuve en Scène 2017, Villeneuve lez Avignon

Une baraque foraine sur laquelle sont installés des rangées d’animaux en peluche. Des rangées de singes alternent avec des chiens et des moutons.. Devant cet éventaire, une estrade où vont se produire trois acteurs : un musicien et deux conteurs-conférenciers qui se disputent la parole. L’actrice (Sabine Moindrot) représente une conférencière (Vinciane Despret) qui raconte les démêlés de la science et des chercheurs sur la question des animaux. Le spectacle a pour motif une conférence savante animée par une philosophe passionnée d’éthologie. La question animale est aux cœur des préoccupations de nos contemporains et un enjeu crucial pour la société de demain. Depuis 1970 elle parcourt le champ des sciences humaines (F. Burgat) de la littérature (J.-C. Bailly) et de la philosophie ( E. de Fontenay). Le fond du propos consiste à promouvoir une nouvelle forme d’attention au monde animal : « Sans doute devrait-on envisager de penser les termes de notre histoire dans ceux d’une écologie de l’attention et du tact, une écologie qui pense les êtres dans les liens qu’ils tissent ensemble, et qui les rendent, avec un peu de chance, moins dangereux les uns pour les autres » avance V.

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« L’Apprenti » de Daniel Keene, m.e.s. Laurent Crovella

— Par Michèle Bigot —

Festival d’Avignon off 2017, Présence Pasteur, 7 =>28 juillet

En 2012, Laurent Crovella avait déjà mis en scène la trilogie de D. Keene : « Entre aujourd’hui et demain », « Avis aux intéressés », et « La Visite », abordant la question de la filiation.La rencontre de sa troupe avec ce nouveau texte, « L’Apprenti » fut immédiate et décisive. La mise en scène fut précédée par des lectures publiques. Elle conservera quelque chose de ce moment de partage avec le public dans sa scénographie. En effet, les spectateurs sont distribués en cercle sur des rangs de chaises blanches qui dessinent un espace circulaire. L’image du cercle symbolise le partage de l’expérience avec le public mais aussi la révolution de la terre pendant une année et la clôture de l’histoire. Les acteurs joueront au centre du dispositif et quelquefois parmi les spectateurs (des chaises noires leur ont été réservées).

L’action se déroule, la majeure partie du temps, dans l’espace public, un café, un parc, au cinéma, dans une église. Le public est donc témoin potentiel des conversations entre acteurs. Il peut être client dans un bar, spectateur au cinéma, promeneur dans un parc.

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« Je garde le chien » Jeu, texte et mise en scène Claire Diterzi

—Par Michèle Bigot —

Festival d’Avignon off 2017, La Manufacture, 6 =>26 juillet

 Seule sur le plateau, entourée d’objets fonctionnels, un écran en fond de scène, sur le devant, une colonne de bois qui soutient un ordinateur, au fond un poste radio-cassette, amplis, baffles et en front de scène une statue de berger allemand en porcelaine. L’ambiance est en place. L’actrice arrive. Elle commence pas une chanson a cappella : 69 battements par minute. « J’avance au rythme de mon cœur », chante-t-elle. Claire Diterzi vient partager avec le public le journal de bord de sa dernière création 69 battements par minute, celle qu’elle a présentée aux Bouffes du Nord en 2015, et qu’elle a tournée depuis dans sa version concert. Car l’actrice est aussi et avant tout chanteuse-guitariste : elle a fondé le groupe rock « Forguette-Mi-Notte » mais elle a aussi étudié le chant lyrique. Compositrice, metteuse en scène, elle possède tous les arts du spectacle. Mais tout ce talent ne la dispense pas d’être en outre follement drôle.

Son journal de bord est l’occasion d’un retour en arrière sur son enfance et ses débuts artistiques : elle a aimé le roman contemporain, le théâtre contemporain, la musique contemporaine : « Je voulais faire de la chanson contemporaine, mais ça n’existe pas ».

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« Encre noire » sur une mise en scène de Eric Checco

— Par Michèle Bigot —

avec Filip Calodat, Didier Andenas, Nicolas Mouen, Tania Jovial
Festival d’Avigon off 2017, Chapelle du Verbe incarné, 7=>30 juillet

« Ce spectacle est l’encre noire des hommes libres, indomptables ». Le titre place en exergue l’écriture poétique, celle de la négritude, celle qui chante la révolte et la liberté. En fait, le spectacle mêle ou fait alterner chant, danse et poésie. L’enjeu c’est de révéler l’essence commune de ces trois arts, pris dans un même élan pour chanter la vie libre. Sur le plateau viennent résonner les voix de poètes martiniquais, guadeloupéens, haïtiens et africains. C’est bien de ce passé commun de traite négrière que surgit leur chant. Mentionnons leur nom :
Antilles : Guy Tirolien, Sonny Rupaire, Patrick Rilcy, Joby Bernabe, Aimé Césaire, Frantz Fanon, Edouard Glissant, Léon Gontran Damas, René Depestre.
Afrique : Léoplod Sédar Senghor, Francis Bebey, Thomas Sankara, Jean-Marie Adiaffi, Patrice Lumumba, Nelson Mandela, Camara Laye.
La gageure, c’est de fusionner théâtre et poésie. Pari réussi, à la faveur de la scénographie, du jeu des acteurs et de la danse.
L’argument, c’est l’histoire de trois hommes noirs, trois condamnés à mort pour subversion, qui viennent d’être incarcérés.

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« L’Atrabilaire amoureux » variation autour du Misanthrope de Molière

— Par Michèle Bigot —

de et avec Jacques Kraemer

Festival d’Avignon off 2017, salle Roquille, 8=>22 juillet

Cette variation autour du Misanthrope repose sur un parti-pris d’écriture et de mise en scène qui suffit à ouvrir des perspectives en profondeur sur le théâtre. Un metteur en scène se tient face à nous. Nous représentons les comédiens du Français. Il est là pour distribuer les rôles et délivrer quelques pistes d’interprétation. C’est l’occasion de faire quelques commentaires sur le sens du texte et l’art du comédien. Le spectacle auquel nous assistons figure une répétition . La forme reprend en l’inversant la figure de mise en abyme. Du coup,les principes édictés par le metteur en scène valent pour l’ensemble de la discipline. C’est aussi l’occasion d’apurer quelques comptes avec les gens de théâtre : les acteurs vaniteux, les directeurs et producteurs prétentieux, les scénographes obsessionnels et obtus, tout le monde y trouve trois ou quatre vérités.

C’est une fête pour l’esprit et une fête tout court pour tout passionné de théâtre : il n’est que de voir ce que Jacques Kraemer peut faire sur scène avec un théâtre de marionnettes et deux mains !

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« Saïgon », m.e.s. de Caroline Guiela Nguyen

— Par Michèle Bigot —

Festival d’Avignon 2017, 8 => 14/07

Écriture Caroline Guiela Nguyen avec l’ensemble de l’équipe artistique

Cette création de la compagnie « Les hommes approximatifs » (implantée à Valence) a pour ambition de mettre en présence des comédiens venant d’horizons lointains pour donner vie à des textes qui racontent l’histoire de la France au-delà des frontières. On aura compris qu’il s’agit de traiter de la (dé)colonisation. Le prisme par où passe cette réflexion collective est l’histoire d’une femme singulière, Marie-Antoinette et de son restaurant à l’enseigne « Saïgon », situé au 176 avenue de Choisy à Paris. C’est là que se retrouvent les vietnamiens de Paris, exilés de leur pays après la défaite de Dien Bien Phu, pour avoir fréquenté les français de trop près. L’histoire commence donc en 1956. Mais elle se déroule en parallèle sur un double front, à distance de 40 ans. Les lieux et les époques sont dédoublés : un restaurant de Saigon en 1956, sa réplique parisienne en 1996.
Et l’intrigue connaît le même dédoublement : c’est l’histoire d’un militaire français, Edouard, qui doit quitter ce pays auquel il s’était attaché, non moins qu’à sa compagne Linh, à qui il promet le mariage et un accueil triomphal en France.

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Antigone de Sophocle, m.e.s. Satoshi Miyagi

— Par Michèle Bigot —

Festival d’Avignon 2017, cour d’honneur du palais des Papes

Miyagi et sa troupe de Shizuoka nous avait déjà éblouis en revisitant le Mahabharata pour la carrière de Boulbon. Il revient aujourd’hui pour notre grand bonheur avec une adaptation libre de Sophocle et de sa tragédie la plus connue Antigone. Ses principes de mise en scène n’ont pas changé : deux acteurs pour un rôle, une gestuelle proche du butō et du clown. Son Antigone n’a rien à envier à celle de Sophocle ou plus près de nous à celle de Cocteau, Anouilh ou Henry Bauchau.

Le parti pris de mise en scène, qui dépouille le texte et rehausse le caractère, les jeux d’ombres et de lumière projetés sur les murs du palais lui confèrent une majesté hiératique.

Lors de sa première mise en scène d’Antigone en 2004, Miyagi mettait l’accent sur la proposition faite à Créon par Antigone : faire de l’amour le principe majeur de la conduite des cités. Le thrène d’Antigone était au cœur de la pièce, l’adieu au soleil dans un élan lyrique auquel la Phèdre de Racine fait écho : « Soleil, je te viens voir pour la dernière fois. » 

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« Sopro », m.e.s. de Tiago Rodrigues

— Par Michèle Bigot —

Tiago Rodrigues

Festival d’Avignon 2017, 7=>16 juillet 2017, cloître des Carmes

Le cloître des Carmes se prête à merveille à la dimension poétique que T. Rodrigues a voulu donner à son spectacle. L’action se déroule sur la scène d’un théâtre en ruine, ou à l’abandon ; or le cloître présente des vestiges de pierre qui encadrent le plateau. Le romantisme reprend ses droits, l’ambiance est celle des tableaux d’ Hubert Robert. Un sol couvert de bois d’où s’échappent quelques herbes folles qui plient dans le souffle du mistral, comme les voiles qui recouvrent les murs. Sur fond de ciel étoilé. Voilà le décor rêvé pour donner vie au drame du théâtre.

Car le drame du théâtre (non moins que sa force) c’est la vie éphémère. Quoique dépourvu de durée, l’art théâtral passe les siècles sans que sa vitalité faiblisse. En ce sens, la pièce de T. Rodrigues est un hymne au théâtre, dans sa dimension la plus pragmatique (le rôle des souffleurs) autant que dans sa dimension littéraire : les grandes tragédies, les grands auteurs de la tradition sont présents par leur texte.

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Cap au pire

— Par Michèle Bigot —

Samuel Beckett, M.E.S. Jacques Osinski
Avec Denis Lavant
Festival d’Avignon off 2017, Théâtre de Halles, 6=>29 juillet 2017
Cap au pire est l’avant dernière nouvelle de Beckett. Le titre original repose sur un jeu de mots Worstward Ho à partir du titre de l’œuvre de Charles Kingsley Westward Ho ! De « cap à l’ouest » on est passé à « cap au pire », plus d’aventure et plus besoin du point d’exclamation. L’humour grinçant n’étant pas la moindre qualité de Beckett, on appréciera ce que ce nouveau titre contient de désespoir programmé. Crépuscule d’une vie, et crépuscule d’une écriture qui revient en boucle sur elle-même et creuse le sillon de ses obsessions. Ecrire le pire, aller vers sa fin, programmer sa propre disparition : plus d’histoire, plus de personnages : ou, si on veut, l’histoire d’un texte qui s’écrit (s’écrie) en direct, sans pilote et sans gouvernail. Une gageure !
C’est une nuit. Une nuit d’insomnie, une nuit d’écriture. Une lueur brille encore (« une mèche »), assez pour éclairer une page, pour laisser entrevoir des silhouettes : un vieil homme avec un enfant qui s’accroche à sa main (un enfant mort ??),

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Candide, qu’allons-nous devenir ?

— Par Michèle Bigot —
D’après Voltaire, M.E.S. Alexis Armengol
Festival d’Avignon off 2017, La manufacture, 6>26/07

Le conte philosophique se prête à merveille à l’adaptation théâtrale. Sa brièveté (encore que celle de Candide soit toute relative !), son art du récit, avec ses rebondissements, ses types humains, sa causticité et sa force satirique font merveille, surtout quand il s’agit d’une adaptation ingénieuse et audacieuse. On peut faire confiance à Alexis Armengol pour les trouvailles, les astuces de mise en scène, le sens du rythme et de la musique. Tous les ingrédients du langage dramatique sont convoqués pour faire la fête. Dans le texte de Candide, il sait couper les longueurs, mettre en valeur les épisodes cruciaux, dramatiques ou burlesques. On n’a pas peur de lire le texte quand il faut, de résumer, de sauter allègrement des chapitres. Rien n’est plus voltairien que cette irrévérence heureuse.
Avec trois fois rien : la scénographie se résume à une table des sièges, une poubelle qui fera office d’océan quand il faut y plonger. Ainsi transposé pour la scène, le texte est plein d’allégresse et de nervosité.

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Quand j’étais petit je voterai

— Par Michèle Bigot —
Texte de Boris Le Roy, M.E.S. Emilie Capliez
Que nous réserve cette création de la Comédie de Saint-Etienne ? Et que nous réserve ce chamboulement des temporalités annoncé par le titre ? Assurément on est dans une esthétique du déplacement, du pas de côté. Et c’est raison quand il s’agit d’aborder au théâtre des questions aussi lourdes que l’exercice de la démocratie et l’apprentissage de la citoyenneté. Alors le décalage comique est de mise. Voter, un exercice qui soulève les passions quand il ne génère pas l’indifférence !
Et les ados, comment ils voient les choses ? Ils n’ont pas l’âge de voter dans les élections nationales, mais l’élection d’un délégué de classe peut s’avérer un pur exercice électoral : se présenter comme candidat, faire campagne, argumenter, développer un programme, tout cela c’est déjà la vie politique, celle d’un citoyen, quand bien même on n’en comprend pas tous les enjeux. Le pari est réussi. Il est de l’ordre de la métaphore généralisée : c’est drôle et c’est parfaitement pertinent. Deux acteurs de belle envergure soutiennent la gageure. Lui, surnommé Anar, interprété avec drôlerie et finesse par Simon Pineau, elle, surnommée Lune, jouée avec une malicieuse ingénuité par Elsa Verdon.

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