Sèbi lapawol épi Edwa Glissant

— Par Daniel M. Berté —

Woulé ba-mwen Soley éklérant réyonnant
Ba-mwen lapawol glisant Misié Edwa !

1 é 1 : Dé! Désiyis man Désilap démon de ladévenn!
m’a dérayé, dékalbiché, dépotjolé ek démantibilé
Je pense dans ma kabech-sisi et de ma djel kalé je crie : « La Lézarde »
Ek wou, di mo’w Edwa !
« Les terres ont croulé de cette voix, c’est poésie
Nous crions au sel. Il sert aux plaies. Il convient au supplice…
Encore à nos lèvres ce cri d’avoine, de mort… »
(Le sel noir)

Woulé zo-a Gran-Edwa !
Pa glisé’y ba mwen souplé!

1 é 2 : Twa ! Twa zanchwa zougoulou wawa !
Twazé-mwen si’w lé,men man za manjé pasé twa zé
Je pense dans ma kabech-kolibri et de ma djel pété je crie : « Le quatrième siècle »
Ek wou, pawolé Edwa !
« Je n’ai de cri qu’en cette trace où fut le sel…
Le long cri des enfants précipités dans cette mer ?…
La mer crie mais la mer bientôt s’éteint… »
(Le sel noir)

Soukwé zo-a misié-a ! ou pa la pou fè wol !
Sé pa wou Man Nikol, « C’est vole que tu me voles » alow
 !

2 é 2 : Kat ! Kat ti kato pou kalkilé lé kat pwen kawdino !
O nòw : Léwop; O sid Lafrik; A les Lazi; A lwes Lanmérik
Je pense dans ma kabech-malfini et de ma djel déchiré je crie : « Malemort »
Ek wou, sa’w ka di Edwa ?
« Je tiens veilleur sans cri en la tour assiégée…
Et moi s’ouvre le noir empan. Je tends les mains, je crie…
Sous le silence écoute, ville, un flot un cri… »
(Le sel noir)

Soukwé grenndé-a ti-papa
Pa pitjé’y ! Man ka véyé’y !

1 é 4 : Senk ! Brennzig, Brennzeng, Brennzong ma Biz-de-bonm
Riyé, riyé, dèmen vou seré danmjann sou ma goutièw !
Je pense dans ma kabech-solsouri et de ma djel félé je crie : « La case du commandeur »
Ek wou, ki mo’w Edwa ?
« Voici le dernier cri de ton festin. Tu viens chérir.
En cette éternité le lourd silence que tu fus…
Tu cries ta solitude en ce glacier de toi… »
(Le sel noir)

Woulé ba-mwen gran nonm
Ba-mwen la limièw

3 é 3 : Sis ! Sis Sizàn ma fam ki n’a jamè pèdi en ley
kan li kaka a la wouli panpan
Je pense dans ma kabech-grigri et de ma djel koulé je crie : « Mahogany »
Ek wou, palé misié Edwa !
« Comme à femelle évanouie on crie du sel Scipion
Blafard crie vers ton âme qu’il bafoue…
Toujours laisseras-tu l’ivresse énorme de ton cri… »
(Le sel noir)

Woulé ba-mwen Edwa !
Twa fwa twa koumandè ! Koumandè labitasion

3 é 4 : Set ! Set sèpan san soulié ka sosé an soley an siflan
men « Pour qui sont ses serpents qui sifflent sur nos têtes »
Je pense dans ma kabech-tòti et de ma djel brizé je crie : « Tout -Monde »
Ek wou, répondé souplé, Met Edwa !
« L’humus : la part de moi qui s’acharne, s’inquiète et crie…
Il crie : vous n’êtes que furies sur l’abord de la côte…
Femmes ouvertes au cri du roi…. Je crie. Beauté sur vous ! »
(Le sel noir)

Woulé’y ! Dézapiyé ! lévé lanmen !
Vréyé’y ! Pa frenen’y !

4 é 4 : Wuit ! Wuit boul plat pézé dan lé dé bout
paw fanm-la ki prena la balans pou pézé la chew imèn
Je pense dans ma kabech-zandji et de ma djel krazé je crie : « Sartorius »
Ek wou, sa’w ka di di sa Edwa ?
« Mais ta beauté poussait sous l’écorce pire qu’un cri…
Crier l’arôme, vanter le geste, mesurer l’ire…
Mon cœur, toi cœur secret de cette voix, entend je crie… »
(Le sel noir)

Soukwé’y ba-mwen misié-a !
Ladjé’y franchteman !

5 é 4 : Nef ! Nef chif préféré de Tonton Anj, siwnomé par Tant Lizet :
Devoun-kafé desiwo-lapousiè mal milé-siyak melon-ba’y non vakabon !
Je pense dans ma kabech-zòfi et de ma djel brilé je crie : « Ormerod »
Ek wou, ki mo’w Ton Edwa ?
« Et j’ai vu tressaillir la houle énorme de ton cri…
Et toi la reine lève, voici, dans ton cri je pars
Et comme algue j’amarre à ta racine ma criée… »
(Le sel noir)

Brennen grenndé-a misié souplé !
Pa karése’y ! balansé’y !

6 é 4 : Dis ! Dis piten ka pronmnen pòwt Lachapel a Paris
Pèwsaniz, pitit a Man Pasioniz, pété pwent pyé’y anlè an poto, i kriyé : Patatsa !
Je pense dans ma kabech-zandoli et de ma djel mitilé je crie : « Poétique de la relation »
Ek wou, sa’w kriyé Met Edwa ?
« J’entends l’an marteler sur tes pistes son cri atone…
La maille du vent lèche le brasier, des enfants crient…
Vie dessouchée, tu criais, ciel sans astre… »
(Le sel noir)

A fout ! Frèr Falièr, fet fondre la foudre sur mon fal set fwa si je ne gàn pa !
Pa pitjé’y ! Fésé grenndé-a fò !

6 é 5 : Wonz ! Wonz ! Man sèbi ! La miz é-t-a mwa !
pawol mwen bout isila !
Je pense dans ma kabech-chini et de ma djel mawtirizé je crie : « Le sel noir »
Ek wou, sa’w ni a kriyé ankò papa Edwa?
« Un cri noir, désuni de la noire procession. Ô ce pays…
Impur ce cri. Argile où il a mis son souffle. Il dit : Beauté…
Je t’ai nommé beauté, te commettant ce lourd cri d’ailes où tu passes…
J’ai fait demeure d’un tel cri, où il n’est terre qui se lève…» (Le sel noir)
Daniel M. Berté 250424

 

 

 

 

« Je dis que la poésie est chair.
Et aussi, râpant de son unique dent (d’orage de sang de larme) la grand’lèche de l’acceptation. Une mâchoire de sables de désert de brousse, que l’autre soit d’astre de pollens : qu’il y jette les étoiles les coups brisés le fouet le maître qui sépulcre et les cannes qui sifflent l’attente et la douleur et le sang, sa poésie et son boucan de poésie »
(Le sel noir)