Catégorie : Politiques

Non à la répression des militants anti-chlordécone ! Jugez les empoisonneurs ! Indemnisez les victimes !

— Déclaration du CNCP —

Que notre cri soit unanime ! Qu’il soit puissant ! Il est temps de mettre fin au scandale. Sous la houlette de l’État colonial français, des tonnes de poisons ont été sciemment déversés sur notre sol et ont provoqué une catastrophe sanitaire qui concerne 95 % de notre peuple. Les appels à justice et réparation ont été mis au placard par leurs tribunaux depuis plus de trente ans. Des ouvriers agricoles ont été tués et blessés par les balles de leurs forces armées en 1974 alors qu’ils réclamaient l’interdiction des produits toxiques dans les bananeraies. Et aujourd’hui, pour avoir exigé que les coupables de l’empoisonnement soient jugés, des militants pacifiques sont gazés, matraqués, raflés, gravement violentés, poursuivis par leurs tribunaux ! Nous devrions accepter cela sans taper du poing sur la table ? Quel que soit le prétexte qu’on pourrait prendre, se tapir dans le silence reviendrait à se faire complices des empoisonneurs.
Le jeudi 27 août, le pouvoir colonial a décidé de tenir un énième procès de la honte. En exerçant leur violence policière et judiciaire contre des militants anti-chlordéconne, choisis arbitrairement, le gouvernement français et la caste qu’il protège, veulent détourner l’attention de la cible principale.

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La Martinique parle le présent

— Par Monchoachi
« A travers l’action RVN (Rouge Vert Noir) de ces dernières semaines, la Martinique parle le présent. Elle le parle doublement : elle parle le présent de son histoire coloniale. Elle parle en même temps le présent de la terre entière dont l’espace est au même titre dévasté par un technicisme productiviste débridé et le temps embrigadé dans l’historiographie, pressuré par l’exigence d’un développement (d’un progrès) dont la seule destination est la marchandisation complète du monde, son nivellement et son engloutissement dans le totalitarisme technologique. Elle le fait dans un langage qui lui est propre faisant écho à un contexte qui lui est propre : celui d’un colonialisme qui s’exaspère avec la cristallisation de deux phénomènes parallèles : d’un côté une jeunesse émigrée massivement, en quête d’emplois vers la métropole coloniale (un peuple une nouvelle fois déraciné, désertant sa terre, mué en ombre) ; d’un autre côté, une active colonisation de peuplement qui ne cesse de se renforcer depuis deux décennies. S’ajoute à cela, le resserrement colonial d’un encerclement administratif et répressif.

Par conséquent, s’entêter de renvoyer à tout prix à l’histoire et à ses chères études ce qui parle le présent avec une telle insistance, c’est, contre toute évidence, prendre option de tourner la tête, de se voiler la face pour ne pas voir la présence de ce présent certes suffoquant, continuer de s’abuser à bon compte et préférer en quelque sorte se raconter des histoires.

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Profanation de la statue de Gandhi

— Par Pierre Catayée —
Dimanche 26 juillet 2020… Quelle triste journée ! Après avoir démantelé les statues de Joséphine et de d’Esnambuc, des manifestants « activistes », en se dirigeant vers le Parc Aimé-Césaire, ont profané la statue de Gandhi en la piétinant et en y inscrivant des insanités du genre « Gandhi, le négrophobe ! »

Comment peut-on écrire une telle ineptie quand on sait que Gandhi a mené une lutte sans concession contre le colonialisme britannique, une campagne nationale pour l’aide aux pauvres, pour la libération des femmes, pour la fraternité entre les communautés de différentes religions ou ethnies, pour la fin de l’intouchabilité et de la discrimination des castes ! Et pour parvenir à ce but, il s’est fait l’apôtre de la non-violence : « Je suis prêt à souffrir n’importe quelle humiliation, n’importe quelle torture, un ostracisme absolu et la mort même, pour empêcher ce mouvement de devenir violence ou précurseur de violence…

La profanation de sa statue en ce dimanche de juillet n’est rien moins qu’une hérésie, un nonsens. En réalité, à travers cet acte répréhensible, nous mesurons tout le mépris et la haine que certains affichent et entretiennent (encore !)

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Quelle mission pour les activistes ?

— Par Guy Lordinot, ex-député —
Les événements violents que nous vivons depuis quelques mois nous invitent à une réflexion sur le devenir de la Martinique. S’il est vrai selon Frantz Fanon que « chaque génération doit, dans une relative opacité, trouver sa mission, la remplir ou la trahir » quelle est celle des acteurs qui sous l’étiquette de « Martiniquais éclairés » ou de « militants RVN » (rouge vert noir) ont conduit les récentes opérations-commando ? La réponse à cette question peut être éclairée par les missions des trois générations qui se sont succédé depuis la fin de la deuxième guerre mondiale.

Au sortir de cette guerre, juste après l’administration cruelle de l’amiral Robert, les Martiniquais vivent pour l’immense majorité dans un état préoccupant de grande pauvreté et de précarité. Sur ce terreau favorable, le Parti Communiste prospère. Il mène vigoureusement les luttes syndicales et politiques pour conquérir l’amélioration des conditions de vie des travailleurs. Dans la même période, les instituteurs œuvrent sans relâche pour aider leurs élèves à acquérir des diplômes leur ouvrant l’accès à une meilleure situation sociale.

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Sur la situation politique que nous vivons

— Par Philippe Pierre-Charles et Gilbert Pago —
Lorsqu’une situation est complexe, la prise en compte de la totalité de ses aspects est la seule façon de voir clair et d’éviter de sombrer dans un opportunisme ou un autre. Voyons ces éléments sans les hiérarchiser ni oublier leur imbrication.

1). Un mouvement martiniquais et mondial de dénonciation du grand mensonge colonial européen (pour l’essentiel), de rétablissement de quelques vérités occultées par les dominants secoue la planète. Nous disons Eya ! Woulo ! Bravo ! Nous en sommes partie prenante comme bien d’autres de nos prédécesseurs. Mener ce travail de vérité ne peut aller sans débats et controverses. Refuser ces débats, en se prétendant détenteur unique et prétentieux de la vérité, reviendrait à accepter le risque que des contrevérités soient légitimées en lieux et place (et à la manière de l’encrage) du mensonge colonial. Rarement la petite phrase de Lénine a été aussi importante : seule la vérité est révolutionnaire !

2). Ce contexte idéologique enveloppe des sociétés dans lesquelles le colonialisme est maintenu sous toutes sortes de déguisements avec son cortège de domination sociale, de dépossession politique, de maldéveloppement chronique.

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«Les Trois âges du constitutionnalisme haïtien», de Claude Moïse

Indépendance, occupation étrangère, démocratie : ruptures et continuités

— Par Thomas Lalime —

Depuis près d’une quarantaine d’années, l’historien haïtien de renommée internationale, Claude Moïse fait de la constitution haïtienne son principal objet de recherche. Il s’est jeté à cette eau par nécessité éditoriale en 1983 quand il avait été sollicité par la direction de la revue Collectif Paroles, éditée à Montréal, en vue de faire le point sur le prompt changement de Constitution opéré en une nuit par le gouvernement de Jean-Claude Duvalier. N’étant pas un juriste de formation, il s’attache plutôt aux aspects historiques et politiques des Constitutions haïtiennes. Comme en témoignent ses différents ouvrages : Constitutions et luttes de pouvoir en Haïti, Tomes 1 et 2, (1988, 1990); Une Constitution dans la tourmente (1994) ; Le Pouvoir législatif dans le système politique haïtien (1999) ; Le Rapport au président de la République sur la question constitutionnelle (2007) en collaboration avec Cary Hector, de regrettée mémoire ; La question électorale – Jeux de pouvoir, péripéties et enjeux démocratiques (2015).

Plus récemment, en 2019, le professeur Claude Moïse a livré au grand public : «Les Trois âges du constitutionnalisme haïtien».

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« La rue ou la société civile peut jouer son rôle de contre-pouvoir… »

Marcelin Nadeau, maire du prêcheur, accorde une interview à Hervé Brival à lire dans France-Antilles du 10 août 2020, dont on trouvera ci-après les premières lignes. Il réaffirme sa volonté de dialogue avec  » un mouvement spontané et non encarté »

Entretien mené par  Hervé Brival

Ces dernières semaines il y a eu des destructions de plaques de rue et des déboulonnages de statues au nom de la décolonisation de notre espace. Marcelin Nadeau, co-président de Péyi-A et maire du prêcheur, livre sa vision sur ces événements.

Marcelin Nadeau, le devoir de mémoire doit-il passer par ces destructions ?

Comme Péyi-A a eu l’occasion de le préciser dans un communiqué, les méthodes d’expression ou de résolutions des questions politiques ont toujours opposé les militants de générations différentes. Celle utilisé dans le cadre de la destruction des statues n’est pas la nôtre, mais ce désaccord sur la forme ne peut occulter le fond, c’est-à-dire les légitimes questions sur les clés de lecture des événements passés, les aménagements mémoriels et le modèle économique à construire. Il faut indiquer également que si nous assistons depuis quelques mois à une recrudescence d’actes militants paraissant violents à certains, c’est parce que la dernière génération d’élus a été particulièrement négligente par rapport à notre devoir de mémoire laissant perdurer cette trop flagrante surreprésentation des symboles coloniaux dans l’espace public martiniquais.

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La traite négrière, passé occulté par les entreprises françaises

— Par Julien Bouissou —

Axa, Banque de France, Marie Brizard… A un degré moindre que leurs homologues britanniques, des entreprises françaises ont elles aussi bénéficié plus ou moins directement du commerce des esclaves.

 Illustration : Récolte de la canne à sucre dans une plantation de la Compagnie des Antilles au XIXe siècle. Collection KHARBINE-TAPABOR

Bien avant son apparition dans les rayons de supermarchés, la célèbre anisette Marie Brizard, née à Bordeaux au milieu du XVIIIe siècle, remplissait les cales des navires négriers. Elle s’échangeait sur les côtes africaines contre des esclaves, transportés ensuite de l’autre coté de l’Atlantique pour travailler de force dans des plantations de canne à sucre. La liqueur figurait sur la liste des « marchandises de traite » chargées dans les ports français. La traite négrière n’a pas laissé en héritage que des statues ou des plaques de rue. Elle a donné naissance à des fortunes discrètes, dont la trace a été perdue au gré des fusions, acquisitions et changements de nom.

Pour la première fois, la Royal Bank of Scotland, la Lloyds Bank, la Bank of England (BoE) ou encore le brasseur Greene King ont reconnu en juin, dans le sillage du mouvement Black Lives Matter, qu’une partie de leurs fondateurs ou ex-administrateurs avaient bénéficié de la traite des Noirs.

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Martinique Avenir : 80% d’élus s’opposent et s’imposent à 90% de citoyens

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Au moment de publier cette chronique, je prends connaissance de l’article écrit par Philippe Pierre-Charles sous le titre : « Prendre en compte la totalité de la situation politique que nous vivons ! ». La belle ambition ! Cependant j’observe que l’un des aspects essentiels de la situation politique que nous vivons n’y figure pas : l’inadéquation du peuple et de sa représentation politique, s’agissant de l’avenir de la Martinique. C’est précisément l’objet de ce papier.

Nation, peuple et identité.

Une nation, une nano-nation comme le proclame Édouard Glissant après l’avoir dénoncée dans le Monde, comme pour ne pas faire fausse note dans le Landerneau. Un peuple, un peuple à hauteur d’autres peuples. De préférence de grands peuples comme ceux du Japon ou de la France plutôt qu’à ceux de Ste Lucie ou de Dominique. Un grand peuple, donc, dans une nano-nation. Pourquoi pas ? S’ajoute une identité à sauvegarder même si elle est essentiellement fuyante. En effet, le Martiniquais de l’an 2000 n’est pas celui de 1950, qui n’avait rien à voir avec celui de 1900 et encore moins celui de 1848.

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“Tricentenaire”, l’imposture politico-médiatique

— Par Pierre Alex Marie-Anne —

Les cérémonies dites du “Tricentenaire”ont consacré solennellement ,le rattachement de la Martinique à la France.

Dès lors les manifestations en chaîne que nous voyons aujourd’hui , cherchant à, faire disparaître toute trace mémorielle de cet évènement historique ne peuvent revêtir qu’une signification , éminemment politique : le rejet par leurs auteurs et ceux qui les soutiennent de leur appartenance à la communauté nationale française et par extension ,de leur qualité de citoyen de cette même République .; ils doivent donc en tirer ,s’ils ne sont pas des imposteurs ,toutes les conséquences et renoncer à tous les avantages qu’elle leur procure : garantie des libertés publiques et de la solidarité nationale,en particulier dans le domaine financier ,protection sociale étendue à tous les risques et à tous les stades de l’existence , standard de vie comparable à celui des pays développés d’Europe en matière sanitaire, éducative, d’habitat , d’ infrastructures et équipements structurants ,sans oublier les droits et protection juridiques des travailleurs ,bref tout ce qui suscite l’envie de nos proches voisins de la Caraïbe cherchant à en bénéficier au prix d’une entrée illégale sur notre territoire.

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Wajdi Mouawad, dramaturge libano-québécois : « À Beyrouth, cette explosion pose un point final à toutes les mascarades. »

Wajdi Mouawad, né en 1968 à Deir-el-Qamar au Liban, est homme de théâtre, metteur en scène, dramaturge, comédien, directeur artistique, plasticien et cinéaste libano-québécois. Il dirige le Théâtre national de la Colline à Paris depuis 2016. Il exprime aujourd’hui son indignation face à l’explosion qui a détruit Beyrouth.

Les créations de Wajdi Mouawad sont toujours d’une grande puissance, qui évoquent en la transcendant l’actualité tragique de notre monde. Des œuvres, textes et mises en scène, au souffle épique : on se souviendra de la trilogie Littoral / Incendies / Forêts, qui fit dire au magazine Télérama : « Mouawad est l’artisan d’un théâtre qui raconte le monde, le déploie, le déroule comme une fresque, celui qui fait danser sans honte aucune, l’émotion et la fable, la vie des gens avec le tragique immémorial de la condition humaine. »

Plus près de nous en 2017, ce fut le choc du spectacle Tous des oiseaux, donné en plusieurs langues par des acteurs polyglottes, qui appartiennent à plusieurs cultures, à plusieurs mondes. Un spectacle ainsi annoncé : « Dynamitée par la violence du monde, l’histoire intime d’Eitan, un jeune scientifique allemand d’origine israélienne confronté à un violent conflit avec son père, montre comment, dans les luttes fratricides, il n’existe aucune réalité qui puisse dominer une autre.

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Relever le défi des jeunes activistes

— Par Raphaël Constant —
Combien de martiniquais savaient que l’entrée du Parc Aimé Césaire avait été construit en 1935 pour le tricentenaire de la conquête française de la Martinique. A la même période que l’érection de la statue de d’Esnambuck ?

Peu de monde.

Au moins l’action des jeunes activistes aura permis cela.

Moins d’un an avant leur émergence sur la scène politique, ce courant a clarifié la scène politique martiniquaise mieux que des milliers de discours : dénonciation du rôle de l’état français dans le scandale du chlordécone, implication des békés dans ce même empoisonnement, démonstration du système « deux poids, deux mesures de la justice française, mise en cause du « schoelchérisme » et de ses contempteurs actuels etc…..

Elles ont aussi permis de clarifier le rôle des forces politiques en présence.

La réaction préfectorale n’a rien de bien étonnant. Dénoncer la violence, dénoncer une minorité sont les discours traditionnels des gouverneurs et préfets depuis 1635 quand l’ordre colonial et la présence française sont contesté.

Quelle ironie : le représentant d’un état qui a commis une série de crimes et de meurtres impunis sur cette terre martiniquaise et protège un ordre injuste qui ose donner des leçons de démocratie à une jeunesse en révolte !

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Bataille mémorielle : match nul à Reims

— Par Cheikh Sakho(*) —
La ville natale de Colbert est aussi celle du Monument des héros de l’armée noire, rappelle l’historien. Selon lui, il est plus utile de conserver les statues, plutôt que de les déboulonner, afin de les appréhender de manière critique.

Reims, son champagne, sa cathédrale, son Ange au sourire – et ses batailles mémorielles par statues interposées, avec, en ligne de front, Colbert et les tirailleurs sénégalais. S’en souvient-on ? La cité des sacres est la ville natale de Colbert, convoqué sur le banc des accusés du tribunal de l’histoire pour avoir codifié l’esclavage dans le Code noir. Reims n’a pas oublié d’honorer sa mémoire. Une rue porte son nom, avec une plaque commémorative apposée sur un mur de sa maison natale.
Deux statues du ministre de Louis XIV jalonnent autant d’endroits symboliques de la ville : le jardin public devant la gare et le rectorat de l’académie. Aux dernières nouvelles, ces monuments ont échappé aux soulèvements planétaires du mouvement Black Lives Matter qui a pris pour cible notamment les statues de Léopold II, en Belgique, et de Christophe Colomb, aux États-Unis.

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Radicalités identitaires : La démocratie face à la radicalisation islamiste, indigéniste et nationaliste

Ces dernières années, des extrémistes identitaires percutent les valeurs républicaines de la société française. Voyant l’avenir de l’humanité comme un « choc des civilisations » et une « guerre de races », ces mixophobes ethno-différencialistes partagent la théorie du « grand remplacement » en Occident : les identitaires nationalistes et anti-cosmopolites, de même que les identitaristes décoloniaux et islamistes. Les crispations identitaires ont ainsi fait couler beaucoup d’encre : les uns dénoncent le « défaut d’assimilation » des populations immigrées, tandis que les autres accusent la « panique identitaire ». Cet ouvrage ne se situe dans aucun de ces camps idéologiques mais décrit ces radicalités identitaires et les enjeux pour la cohésion sociale au sein des sociétés démocratiques.

  • Date de publication : 29 mai 2020
  • Broché – format : 15,5 x 24 cm • 406 pages
  • ISBN : 978-2-343-20323-2
  • EAN13 : 9782343203232
  • EAN PDF : 9782140150531
  • EAN ePUB : 9782336901282
  • Lire l’interview de Manuel Boucher=>

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Les Éveillés, Rouge, Vert, Noir

— Par Marie-Laurence Delor —

Rien ne peut plus nous étonner !. Et voilà nos insurgés du dimanche se réclamant de A. Cesaire, de F. Fanon et de Koko René-Corail, qui se coulent dans le modèle anglo-saxon en vogue, le très controversé « woke attitude», traduire « rester éveillé » (de veille informatique). Le terme d’origine argotique afro-américain,  popularisé il y a une dizaine d’années par la chanteuse Erykah Badu a été repris sur les campus des grandes universités états-uniennes. Son usage s’est étendu, parallèlement, dans les milieux mondains et marketing (woke-washing)”.

L’Urban Dictionnary qui fait autorité pour les parlers argotiques le définit comme suit: « The act of being very pretentious about how much you care about a social issue » (comportement très prétentieux sur le fait que vous vous préoccupez d’un problème social). 

Pour ses adeptes, le « woke » serait une attitude d’éveil face à toutes inégalités (de classe, de genre, de race…) et aux questions environnementales. Bon nombre d’observateurs soulignent toutefois une recherche effrénée de la visibilité. Elle est consubstantielle à la « woke attitude » et se traduit par l’hystérisation scénarisée de l’indignation;  relayée en cela par les réseaux sociaux.

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Se protéger de nous-mêmes

— Par François Gabourg —
La question de la Mémoire est un sujet qui divise les Martiniquais. En plein 20e siècle, on parle encore de communauté béké. Contrairement à ce qu’en pense l’un d’entre eux, Alain Hugues Despointes lors d’une interview sur Canal +, cette communauté n’aurait-elle pas dû avoir une tête « métissée » plutôt que toute blanche depuis tout ce temps passé à côté des Noirs ? Le mot béké ne devrait-il pas se contenter de trouver sa place dans des livres d’histoire ?

Côté politique locale, la lenteur des décisions fait qu’en plein 20e siècle les statues de Joséphine de Beauharnais et de Pierre Belain d’Esnambuc culminaient fièrement sur la Place de la Savane de Fort-de-France. Les autorités ont fait le choix de ne pas s’opposer à leur déboulonnage en remettant les clés de la ville à des activistes pour détruire les statues de la honte.

Certains pays comme la Belgique ont préféré retirer les statues de colons de leurs places publiques. Ces activistes, connus sur le nom de Rouge Vert Noir (RVN), sont critiqués non pas sur le fond mais sur la forme.

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Amnésie ou complexe d’infériorité

— Par Ismaël-Morgan Marie-Luce —
Depuis quelques temps, la Martinique vit un tournant dans son histoire. Plus précisément, elle voit sa mémoire bousculée, remaniée mais vérifiée par une jeunesse martiniquaise, non pas révolutionnaire comme le disent certains, mais une jeunesse consciente et militante. Un militantisme que d’autres ont initié dans le passé et qui aujourd’hui refait surface de plus belle. Oui, une jeunesse soucieuse de ne pas se laisser corrompre par une histoire fallacieuse, une histoire falsifiée au bénéfice de ceux qui l’ont écrite. Une histoire fallacieuse restée dans la mémoire collective comme immuable, impérissable, inaliénable mais une histoire symbole de l’aliénation du peuple martiniquais. Oui, cette histoire assimilationniste que l’Etat Français a servi durant des années à nos aïeux. Ces mêmes aïeux qui aujourd’hui pour certains, refusent, condamnent ou saluent le combat mené par cette jeunesse militante ayant rétabli la vérité sur notre histoire. L’histoire du peuple martiniquais et de ses descendants d’esclaves, l’histoire qui érige l’homme blanc comme notre sauveur, comme le grand abolitionniste, je parle de Victor Schoelcher notamment.

En faisant disparaître toute trace matérielle visible de cette réalité historique, ce comportement infantile prive les générations futures de la possibilité de s’interroger, comme ils ont eu la chance de pouvoir le faire, sur les tenants et aboutissants d’une époque essentielle pour la compréhension de notre destinée.

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Comment concilier histoire et mémoire dans l’espace public ?

— Collectif Bakwa —
Faut-il déboulonner les statues de Victor Schoelcher en Martinique ? Oui. Faut-il déboulonner toutes les figures colonialistes de l’espace public en Martinique ? La réponse est une nouvelle fois positive. A ces affirmations qui nous semblent évidentes, se mêlent en filigrane des questions subsidiaires liées à la légalité et la légitimité des actions de déboulonnage ainsi que celle, plus large encore, de la représentation de la mémoire dans notre espace public.

L’histoire et la mémoire : deux concepts distincts

Le travail de l’historien est une démarche scientifique rigoureuse qui implique une prise de distance vis-à-vis de l’événement qui fait l’objet d’une étude critique. Le travail de mémoire est une démarche sociale qui devrait impliquer l’ensemble de la population et faire l’objet d’un consensus politique autour d’une sélection orientée de notre histoire. Tandis que l’histoire ambitionne d’approcher la vérité en tentant le mieux possible d’expliquer la complexité des événements passés, la mémoire simplifie la réalité et sert plutôt la fidélité à des valeurs. L’histoire se traduit dans nos livres et nos manuels scolaires tandis que la mémoire se grave dans le marbre et s’éructe dans le bronze.

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Prendre en compte la totalité de la situation politique que nous vivons!

— Une contribution de Philippe Pierre-Charles —

Lorsqu’une situation est complexe, la prise en compte de la totalité de ses aspects est la seule façon de voir clair et d’éviter de sombrer dans un opportunisme ou un autre.

Voyons ces éléments sans les hiérarchiser ni oublier leur imbrication.

1). Un mouvement martiniquais et mondial de dénonciation du grand mensonge colonial européen (pour l’essentiel), de rétablissement de quelques vérités occultées par les Dominants secoue la planète. Nous disons Eya ! Woulo ! Bravo ! Nous en sommes partie prenante comme bien d’autres de nos prédécesseurs. Mener ce travail de vérité ne peut aller sans débats et controverses. Refuser ces débats en se prétendant détenteur unique et prétentieux de la vérité, reviendrait à accepter le risque que des contre-vérités soient légitimées en lieux et place (et à la manière de l’encrage) du mensonge colonial. Rarement la petite phrase de Lénine a été aussi importante : seule la vérité est révolutionnaire !

2). Ce contexte idéologique enveloppe des sociétés (celles de Martinique, de Guadeloupe et de Guyane) dans lesquelles le colonialisme est maintenu sous toutes sortes de déguisements avec son cortège de domination sociale, de dépossession politique, de maldéveloppement chronique.

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Notre humanité blessée

— Par Gérard Dorwling-Carter, Patrimoine Martinique —
Je ne pouvais rester muet face à la destruction d’éléments importants de notre statuaire martiniquaise en tant que président de l’association Patrimoine Martinique qui jusqu’à ce jour oeuvrait en retrait du tumulte médiatique. Notre silence pourrait s’apparenter à une coupable complicité.

Le passé n’existe plus que dans nos mémoires. En effaçant les traces du passé, c’est notre mémoire d’aujourd’hui que l’on efface. C’est notre humanité que l’on blesse. Dimanche 26 juillet 2020, nous avons assisté impuissants et désolés à la destruction méthodique de plusieurs éléments de notre patrimoine martiniquais : les restes de la statue de Joséphine, impératrice des Français, et la statue de Pierre Belain-d’Esnambuc, créateur de la Martinique coloniale. Nous avons également assisté à l’enlèvement de plusieurs plaques de rues et au saccage de la statue de Gandhi.

Ces faits ont été produits en dehors de toute légitimité démocratique. Ils ont été produits alors même que des commissions mémorielles ont été mises en place dans plusieurs de nos communes.

Le Patrimoine de la Martinique est le bien de tous ; en le sauvegardant, c’est notre mémoire que l’on préserve, c’est notre capacité à débattre que l’on cultive, c’est notre humanité martiniquaise que l’on fait avancer.

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Vous avez dit récit national ?

— Par Anique Sylvestre —
Les récents événements qui troublent encore la Martinique, ont entraîné un sursaut des Martiniquais laissant pousser des prurits aux manifestations diverses : outre un conflit générationnel énoncé et manifeste-dommageable mais libérateur de soutien, chez les uns, de rejet, d’incompréhension, chez les autres, tout cela teinté de mépris voire de haine, je préfère constater une nécessité d’écrire un récit national (martiniquais s’entend) notre, propre.

Nous avons, aux époques décisives de notre histoire « post-coloniale », choisi majoritairement pour le maintien de nos relations avec la France, avec, certes, des sursauts « révolutionnaires » quelquefois, voulant entraîner le peuple martiniquais dans des revendications indépendantistes.

Notre récit national gamberge de cette volonté de sécurité de blaisance à cette velléité de séparation ; se réduisant à la seule époque de l’esclavage, seule mémoire sûre à laquelle il se réfère, il se limite dans le même temps à son unique filiation africaine donc noire, rejetant les autres apports qui ont contribué à la création de notre peuple (atteinte récente à la statue de Gandhi).

A cette unique référence africaine, se greffent des questions majeures qui se posent au pays : chlordécone, sargasses, chômage massif des jeunes, exode des jeunes …problème récurrent de l’eau…

Stop aux leçons, aux injures…

Ces événements mettent sur la table l’ensemble des problèmes de la société martiniquaise.

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Qui sont les vrais casseurs ?

— Par Sylvère Farraudière —

La liste s’allonge de statues mises à terre, taguées, détruites en Martinique, singulièrement à Fort-deFrance, Schoelcher et Trois-Ilets, depuis le 22 mai 2020.

Certains s’en étonnent, d’autres sont scandalisés et accusent. Depuis le saccage survenu sur la place de La Savane à Fort-deFrance, le dimanche 26 juillet, où les statues de Belain d’Esnanbuc et de Joséphine de Beauharnais ont été détruites, les milieux politiques, au plus haut niveau, attribuent ces agissements à des activistes, qui seraient coupés de la population, supposée indignée. Et la suite est prévisible : la routine arrestations-victimisationconstruction-de-martyrs s’installera et accompagnera des débats dans des commissions mémorielles communales. Pendant ce temps, on aura fait l’économie de chercher les vrais activistes dans cette affaire.

Ce n’est pas d’aujourd’hui que les statues de Schoelcher, de d’Esnanbuc, de Joséphine sont régulièrement taguées, amputées, voire décapitées. Ce n’est pas d’aujourd’hui que des citoyens demandent des explications sur le nom des rues de la ville capitale, sans que la commission mémorielle ne se décide à donner une réponse, ce qui revient à imposer le statu quo. Politique de l’autruche ou affirmation d’un choix politique immuable, maintenu de générations en générations, contre vents et marées ?

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Une mise au point des Activistes N.R.V. (Noir, Rouge, Vert)

— Communiqué du collectif des Martiniquais.e.s éveillé.e.s —

Suite aux nombreuses actions et manifestations menées à Fort-de-France durant ces derniers mois, la population martiniquaise se retrouve malheureusement troublée, perturbée et parfois manipulée du fait de nombreuses incompréhensions.
Vu les tensions initialement suscitées par l’action du dimanche 2 août au sein du peuple martiniquais, il s’agit aujourd’hui de rétablir la vérité, à l’aide de l’honnêteté.

Suite à l’appel citoyen lancé pour la destruction des statues de Joséphine et Desnambuc, nous nous sommes rendus devant la porte du tricentenaire de la colonisation afin de mettre en lumière son histoire et son rôle tragique, malheureusement méconnus. Initialement, nous avions, devant cette porte, lancé un appel à sa destruction, et nous l’assumons. Dès le lendemain, Lundi 27/07 nous avons amendé l’action, en appelant plutôt au nettoyage et à la rénovation de la fresque de Khokho, et à la distribution de repas aux personnes précaires vivant aux alentours de la porte célébrant les 300 ans de colonisation, le tout en compagnie de Béatrix Renée-Corail, héritière du savoir-faire légendaire de Khokho.

C’est donc dans un esprit de paix, d’amour mais surtout par respect pour le travail de réappropriation, mené par AIMÉ CESAIRE, que nous avons vu toute légitimité dans notre action.

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« Sexe et pouvoir » : Joséphine de Beauharnais l’enjôleuse

— Par Jean-Michel Normand —

Fille de planteurs créoles, l’épouse de Napoléon avait peu de raisons d’aimer le régime républicain. Mais elle ne semble avoir joué ni de son charme ni de son influence politique en vue du rétablissement de l’esclavage, effectif en 1802.

La figure victimaire de l’impératrice répudiée pour n’avoir pas donné d’héritier à Napoléon a longtemps pris le dessus sur l’autre Joséphine de Beauharnais. La femme de réseaux, mobilisée en faveur de la noblesse déchue, voire le bras armé d’un lobby esclavagiste.

Le 26 juillet 2020, à Fort-de-France, sa statue a été déboulonnée par des activistes dénonçant un symbole du passé colonial de la Martinique. La belle Créole avait, il est vrai, peu de raisons d’aimer un régime politique qui avait aboli la traite des Noirs, en 1794.

Lire aussi  Deux nouvelles statues déboulonnées en Martinique

Incarcérée avec son vicomte de mari, qui sera guillotiné en 1794, elle échappe in extremis à l’échafaud grâce à l’arrestation de Robespierre. Par l’intermédiaire de Paul Barras, avec lequel on lui prête une liaison, elle rencontre Napoléon Bonaparte, qu’elle épouse (en se rajeunissant de quatre ans et lui se vieillissant d’un an pour atténuer leur différence d’âge) en 1796.

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Manifeste pour la Martinique

Pour donner la parole au peuple. Pour préserver notre espace démocratique.

—Collectif —

Les derniers mois en Martinique ont été le lieu de manifestations et de prises de position que l’on ne peut ignorer. Elles sont comme autant de symboles de l’inertie et des frustrations silencieuses qui émaillent et déraillent notre société: nul ne peut ignorer les enjeux liés à la pollution à la chlordécone, à la gestion de l’eau ou encore les inquiétudes concernant le développement économique et l’exode des jeunes.

Les évènements du 22 mai 2020 ont permis une mobilisation du politique et de la société sur les questions de nos symboles publics et sur la connaissance de notre histoire. Ce choc entre histoire et mémoire a provoqué un processus de remise en question de notre société.

On aurait pu croire qu’avec les réseaux sociaux, le dialogue entre les différentes réflexions sur notre société aurait pu être facilité. Bien au contraire. Des divisions nous sautent aux yeux et ne cessent de s’exacerber.

Face aux tensions récentes, des espaces et des moments d’échanges ont pourtant été créés, des espaces et des moments dont notre société a le plus grand besoin.

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