Janine Bailly

« Saveurs confondantes » : exposition éphémère.

Exposition éphémère, proposée par l’association « Conquérantes Intemporelles »

Vendredi 31 janvier 2020 à 18h30 à la bibliothèque Schoelcher

« Fondre de plaisir ! » 

 

6 FEMMES et 1 CONCEPT : FAIRE SENS AUTOUR DES MOTS :

 

Les « Conquérantes Intemporelles » proposent depuis décembre 2016, dans un propos intellectuel et artistique, une alternative au mode d’expression lié à la nécessité de compétition, de comparaison de nos sociétés. « Dans cette formule six femmes placent l’expression de leur féminité, de leurs attentes, de leurs interrogations intimes, de celles qui fondent leur rapport au monde dans une expérience artistique inédite où les arts font sens. Conquérir mais conquérir quoi et pourquoi, pour qui, avec qui et comment ? Comment ? Mais dans l’empathie. L’empathie absolue, érigée en principe, en principe fondateur, en principe moteur… Nous sommes vraiment dans un enchevêtrement et une continuité, une chronique annoncée de ce qui doit venir. Métaphore filée du sens qu’on peut donner à nos vies, à travers l’art. »

 Autour des mots de la poétesse Françoise FOUTOU : une musicienne : Giliane COQUILLE et quatre plasticiennes : Roseline EMONIDES, Nathalie MILIA, Jade AMORY et Nadia BURNER présentent, l’espace d’une soirée, leur vision du monde.

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Au théâtre Aimé Césaire : Femmes combattantes, Femmes influentes

Le 8 février 2020, à 19h30, au Théâtre Aimé Césaire de Fort-de-France

— par Marie Alba —

« Femmes combattantes, Femmes influentes » est un spectacle présenté par « Les BUV’ART », une troupe composée d’une dizaine de comédiennes et comédiens qui chaque année se retrouvent dans un esprit de convivialité et de partage, pour mettre en scène une ou plusieurs pièces de théâtre. Cette troupe fait partie de l’association loi 1901 « L’Art Gonds Tout », présidée par Fabrice Gérardin, domiciliée à Case-Pilote, et dont l’objet est la promotion des arts et de la culture sous toutes ses formes, mais aussi la création de lien social par le biais des rencontres, des échanges et du partage.

Partant de l’adage chinois selon lequel « les femmes portent sur leurs épaules la moitié du ciel et elles doivent le conquérir », Marie Alba a imaginé le spectacle après avoir fait des recherches sur les Figures de Femmes dans l’histoire. Parce que leur combat l’a particulièrement interpellée, elle a sélectionné six d’entre elles, et les faisant parler à la première personne, a écrit leur vie de combattantes.

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« La forêt des illusions » : faisons un rêve !

— par Janine Bailly —

Il fallait, pour entrer dans « La forêt des illusions » laisser au seuil du chapiteau les certitudes de l’âge adulte, se défaire des règles que la raison impose et retrouver, à défaut de son âme d’enfant, sa capacité à croire et à s’émerveiller. Accepter de faire le voyage dans le monde des Esprits, descendre avec l’auteur et metteur en scène Grégory Alexander « dans le tréfonds de l’imaginaire guyanais », se laisser guider par deux acteurs merveilleux au cœur de la verte forêt hantée de mythes et de légendes : c’est à cela que nous conviait la Compagnie des Cueilleurs de Brume, venue de Cayenne, et ce nom seul déjà invite au rêve !

L’histoire, inspirée des mythes créoles et amérindiens, a tous les aspects du conte traditionnel, du conte qui fait peur, du conte qui étonne et émerveille. Elle nous dit le chemin d’apprentissage du garçon, joué avec ce qu’il faut de candeur par Devano Bathooe, quand il s’enfonce au cœur de la forêt profonde et sombre, ce domaine de Massala où a disparu sa grand-mère.

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Ghislaine OZIER-LAFONTAINE : Imageries Rupestres. Création contemporaine.

Au nouvel espace « Art et Vin par Boko Concept », jusqu’au 31 janvier 2020. 

Ouvert du lundi au samedi : lundi 10h-16h, mardi au samedi 10h-18h

— par Michèle ARRETCHE, amateur d’art —

Déjà le titre ! Deux phrases qui annoncent toute l’ambiguïté, la dualité du propos de l’artiste .

Ghislaine Ozier-Lafontaine revendique travailler sur les arts de la préhistoire, être dans la préhistoire, créer comme tout sapiens au delà des siècles, au delà des époques. « L’âge d’une image ne dit strictement rien des choix formels dont elle est le produit ». 

Dans cette démarche l’artiste nous parle d’art rupestre, mais nous ne voyons pas de roches ni de rochers, elle nous parle d’art pariétal, mais les œuvres ne sont pas peintes sur les parois, elles sont au contraire bien encadrées, bien présentées, bien accrochées comme pour une exposition contemporaine d’arts plastiques.

Et le matériau sur lequel elle travaille essentiellement est synthétique ! Du polystyrène expansé ! Vu sur le livre d’or: « L’art de réconcilier ce matériau moderne s’il en est un, le polystyrène, avec les origines de l’art pariétal, aux supports des plus naturels, terre et coquillages, est un exploit de créativité … » *

Oui la créativité est au centre de cette exposition, elle associe du figuratif stylisé, des symboles, des traces qu’ont laissé en elle l’histoire du monde et de l’humanité, dont l’espace caribéen et amérindien occupe une place fondatrice.

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« Le collier d’Hélène », généreuse ouverture au Festival des Petites Formes

— par Janine Bailly —

Dramaturge québécoise, Carole Fréchette a imaginé « Le collier d’Hélène » en mai 2000, à la suite d’un séjour d’un mois au Liban où elle résidait dans le cadre du projet « Écrits nomades », en compagnie de huit autres auteurs issus de la francophonie. Dans une interview, elle dit y avoir perdu un collier, que cela lui a donné l’idée de la pièce, que par le théâtre elle « prend la parole pour interpeller les contemporains ».

Interpellés, nous le sommes d’emblée par la scénographie qu’adopte Lucette Salibur pour cette nouvelle mise en scène à la salle Frantz Fanon de Tropiques Atrium — après celles de 2007, de 2009 dans ce même  lieu et au festival d’Avignon, de 2017 à nouveau à l’A’Zwel. Ici, quelques blocs gris épars sur le plateau, bientôt reliés par des rubans de chantier rouges et blancs, qui se croiseront et qui entremêlés en tous sens par le contremaître évoqueront le labyrinthe d’une ville à reconstruire, défigurée par la guerre, mais tout autant l’esprit d’Hélène dont la confusion se marque par des interrogations, des hésitations en points de suspension, des affirmations d’ignorance — « Pourquoi j’ai fait ça, je ne sais pas, c’était plus fort que moi » —, ou des cris de colère et de plainte.

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« OFFRANDES », de Philippe Bourgade

Exposition de photographies, Galerie André Arsenec, à Tropiques Atrium

« Offrandes », l’exposition vue par…

Claude Cauquil

Un parcours artistique s’évalue sur la durée d’une vie et l’on ne peut appréhender l’Œuvre d’un créateur que dans sa totalité ; pourtant certaines périodes, séries s’identifient dès leur réalisation comme marquantes. Il est des expositions charnières qui s’imposent comme l’aboutissement d’une recherche avant même d’accéder aux cimaises.

OFFRANDES que nous soumet Philippe Bourgade est de celles-là. Elle baigne d’un éclairage nouveau son travail photographique et l’ancre définitivement dans le patrimoine culturel caribéen.

Sa grande sensibilité plastique est évidente dans la somme d’images qu’il nous a livrée depuis trois décennies, mettant en place la transmission visuelle d’une Martinique des Mornes, travail en noir et blanc pour pérenniser le souvenir. Philippe nous a raconté son pays d’une manière qui a permis à beaucoup d’éclairer leurs propres réminiscences d’une aura de poésie. Aujourd’hui, les personnages ont déserté le visuel pour laisser la place à de simples éléments de nature. Ici ce n’est plus le photographe qui tel un réalisateur construit son image. Il se fait observateur, passeur de l’infini vers le visible.

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« Cri des Nago », une île en danse et en transe

— par Janine Bailly —

Dix ans après le séisme qui ébranla Haïti, Tropiques-Atrium nous propose de porter notre attention sur l’île voisine. De l’appréhender non seulement par le cinéma, mais aussi par la danse et la musique.

Cri des Nago, présenté par le chorégraphe Jeanguy Saintus, nous invite à suivre une heure durant dix-neuf danseurs et musiciens présents sur scène, à décentrer notre regard, à oublier un instant notre culture et nos préjugés, bref à ouvrir notre esprit sur une conception autre du monde. Entre danse et cérémonie, entre profane et sacré, entre ombre et lumière, ce qui nous est donné à voir et à entendre — à comprendre peut-être —, parce qu’il est fait appel à l’irrationnel, que « les chorégraphies explorent aussi le vaudou », garde une aura de mystère qui déstabilise et remet en cause les certitudes. Les Nago, ethnie africaine installée au Bénin, proche des Yoruba, sont à l’origine de religions pratiquées en Haïti et au Brésil, où vit une diaspora importante. Ainsi les orishas peuvent se comparer aux loas haïtiens, esprits priés, honorés et servis au moyen de chansons, de danses et d’offrandes diverses, chacun ayant droit à ses rythmes particuliers.

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Rendre hommage à Haïti

« L’homme sur les quais », film de Raoul Peck

« Antony Phelps à la frontière du texte », documentaire d’Arnold Antonin

— par Janine Bailly —

Parce qu’elle fut la première île caribéenne à obtenir en 1804 son indépendance, que les figures héroïques de la lutte pour la liberté — le Roi Christophe, Toussaint Louverture, Dessalines — hantent nos mémoires, Haïti objet de bien des fantasmes est une source vive pour les artistes, qu’ils soient plasticiens, peintres, musiciens, écrivains, poètes ou cinéastes. La « semaine haïtienne » proposée à Fort-de-France ouvre bien des fenêtres sur ce pays voisin, que l’on admire ou que l’on plaint, que l’on envie aussi pour avoir été la première « République Noire ». Un pays à qui l’on rend hommage pour son courage et sa résistance aux méchants coups du sort, de la nature et des hommes.

L’homme sur les quais :

Résister, le verbe est au cœur du film L’homme sur les quais, réalisé par Raoul Peck et présenté en 1993 au Festival de Cannes. Une voix ouvre la narration, celle de Sarah qui devenue adulte, trente ans après tente de recomposer le puzzle d’une enfance brisée : « J’avais huit ans, et le monde s’ouvrait déjà sur un désastre ».

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Quand le cinéma nous parle des femmes

Kenji Mizoguchi : « La Rue de la Honte »

Karim Aïnouz : « La Vie invisible d’Eurídice Gusmão » 

— Par Janine Bailly —

Le cinéma, en plus d’être un art à part entière sait aussi défendre des causes essentielles, que ce soit – comme on a pu le voir récemment sur les écrans de Madiana – au Japon, au Brésil, au Bangladesh, ou sous tous autres cieux… Que ce soit chez Kenji Mizoguchi, dont « La Rue de la Honte » paraît en 1956, ou chez Karim Aïnouz qui en 2019 reçoit à Cannes le prix Un certain regard pour « La Vie invisible d’Eurídice Gusmão », les femmes visibles ou invisibles sont au centre du sujet, au centre de l’image, au centre des discours : ces films l’un comme l’autre, défenses illustrées et vivantes de la cause des femmes, sont empreints d’un féminisme intelligent, lucide et dénué de tout sectarisme.

Kenji Mizoguchi observe, en un noir et blanc triste et lumineux, tragique et glacé, cinq des femmes qui vivent dans une maison de tolérance, située au quartier des plaisirs de Tokyo.

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« La Vie invisible d’Euridice Gusmão », des femmes au Brésil 

Séances VO le Vendredi 20 à 19h15 et le jeudi 26 à 19h à Madiana

La Vie invisible d’Euridice Gusmão, film réalisé par Karim Aïnouz (auteur en 2002 de Madame Sata) d’après le roman de Martha Batalha, a remporté en 2019 au festival de Cannes le prix Un certain regard. Présenté sur l’affiche comme un « sublime mélo tropical », le film est en réalité une fresque familiale qui montre la difficile émancipation des femmes au Brésil dans les années cinquante, une réflexion aussi sur l’autorité masculine et sur le poids  des traditions.

Karim Aïnouz décrit son film comme « chargé de sensualité, de musique, de drame, de larmes, de sueur et de mascara. Mais aussi un film imprégné de cruauté, de violence et de sexe. Un film qui n’a jamais peur d’être sentimental, excessif. Un film dont le cœur bat à l’unisson de mes deux protagonistes chéries, Guida et Euridice ».

Synopsis : Rio de Janeiro, 1950. Euridice, 18 ans, et Guida, 20 ans, sont deux sœurs inséparables. Elles vivent chez leurs parents et rêvent, l’une d’une carrière de pianiste, l’autre du grand amour.

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 « Cendrillon », héroïne des temps modernes

— par Janine Bailly —

« Qu’est-ce que raconter une histoire ? » Si l’on en croit ce que dit Joël Pommerat, travailler sur les mythes est pour lui une façon de poursuivre cet apprentissage. Lui qui déjà a porté sur trois de nos contes traditionnels, Le petit Chaperon Rouge, Pinocchio et Cendrillon, son regard neuf et décapant, dit aussi vouloir contrairement à un certain courant du théâtre actuel « revenir au récit, quitte à le re-questionner de façon différente ». Le conte en effet, parce qu’il est de tous les temps, de tous les pays et de tous les âges, qu’il touche à ce qu’il y a en nous de plus secret, s’est toujours prêté à de multiples ré-écritures, à d’autres interprétations. Il répond à notre besoin d’écouter des histoires, d’inventer des histoires, et pourquoi pas, de « se raconter des histoires », comme le fait Cendrillon elle-même pour avoir mal compris les derniers mots prononcés par sa mère sur son lit de mort.

Dans le Cendrillon que Pommerat nous donne à entendre, ce mot « histoire » revient en leitmotiv, il ouvre et ferme le récit pris en charge par la conteuse, narratrice et personnage à la fois, incarnation de la mère absente auprès de « la très jeune fille » : « Je ne me rappelle plus si cette histoire est la mienne ou bien l’histoire de quelqu’un d’autre.

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« Made in Bangladesh », le dilemme

— par Janine Bailly —

Cet été, j’ai l’occasion de visiter l’exposition Banksy, superbe, dans les locaux de la l’ancienne Corderie de Lisbonne. Ce matin de décembre, je choisis de porter mon tee-shirt gris acheté à cette occasion, illustré d’un dessin noir de l’artiste susnommé, celui qui montre, comme tombant du ciel, le caddie auquel s’accroche la célèbre petite fille, et dont jaillissent quelques produits de supermarché. Mais l’étiquette du vêtement me gênant, je décide de la découper et d’en prendre connaissance. C’est alors que j’y découvre la mention « Made in Bangladesh » : hasard ou coïncidence ? Récemment je me suis rendue à Madiana voir en version originale le film éponyme, où si on ne le savait pas encore, on peut découvrir comment et à quel point les femmes là-bas — dans ce pays que dirige cependant une des leurs — sont exploitées, humiliées, infériorisées, soumises à la dictature des patrons, des époux, des conventions sociales et religieuses, victimes innocentes, dans notre monde capitaliste, de la mondialisation et du libéralisme économique.

Alors que faire, quand tu as entendu l’une des protagonistes du film dire à l’héroïne Shimu que « le prix de deux ou trois tee-shirt sortis de tes mains équivaut à ta paie mensuelle » ?

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Décembre, le temps des concerts

L’ensemble vocal aKapela et le chœur Harmon’îles proposent ensemble trois concerts les 6, 7 et 8 décembre 2019 au profit d’œuvres caritatives.

Créé fin 2018, le jeune septuor aKapela regroupe des chanteurs avertis spécialisés dans le chant polyphonique. Au programme de cette première partie de concert : des œuvres sacrées de la Renaissance à nos jours ainsi que des chants de Noël. 

Regroupant une quinzaine de choristes passionnés de musique classique, le chœur Harmon’îles propose chaque année deux programmes de concert. Il est dirigé par Monique Jeannest, Premier Prix de chant et d’art lyrique au Conservatoire national de Toulouse, qui a fait une carrière de soliste spécialisée en art lyrique et baroque. Monique Jeannest a dirigé de nombreux chœurs quasi professionnels et enseigne également la technique vocale. Le chœur est accompagné par la pianiste Antoinette Hartmann, Première Médaille en Ondes Martenot au Conservatoire national supérieur de musique de Paris. Elle enseigne le piano et accompagne des groupes en Martinique depuis quarante ans.

Au cœur du programme de cette deuxième partie de concert : des extraits du Messie de Haendel, avec en alternance des extraits en solo assurés par les choristes et des extraits chantés par le chœur.

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FIAP 2019 : B.B Beloved Baby, de Annabel Guérédrat  

— par Janine Bailly —

Parce que je suis « fan » de son travail et de ses propositions artistiques, que je la sais en attente d’un — comme l’on dit — « heureux événement », je m’interrogeais : Annabel serait-elle là, présente aux côtés d’Henri Tauliaut non pas seulement en tant qu’organisatrice de la deuxième édition du Fiap, mais aussi en tant que performeuse ? Réponse me fut heureusement donnée, ce lundi 11 novembre, au cœur d’une ville que la célébration d’une fin de guerre lointaine avait désertifiée, dans une rue Lamartine aux rideaux de fer obstinément baissés. Seule la Station culturelle de la Coursive, au numéro 118, donnait en ce début d’après-midi signe de vie, et loin de lui ôter quelque force, le lieu paisible s’est fait cadre intime, accueillant à la performance inédite et si personnelle d’Annabel Guérédrat. 

Il y a d’abord son apparition, devant laquelle nous nous écartons, femme statue épanouie dans sa future maternité, l’éclat de sa peau brune à peine contenue par la fine lingerie — peau pleine qui illumine l’espace  ; il y  la rondeur douce et fière de son ventre que ne masque nul vêtement incongru ; la concentration un peu inquiète que laisse transparaître son visage ; et l’auréole de sa chevelure dénouée, qui coule abondante sur son visage, sombre source à bientôt discipliner.

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FIAP 2019 : Chrysalide(s), de Alicja Korek

— par Janine Bailly — 

Pour dire ce à quoi nous a conviés ce vendredi soir, à la Station Culturelle de la Coursive rue Lamartine, la performeuse Alicja Korek, les mots me viennent à manquer tant sont grandes les émotions engendrées, et je me sens sidérée, au sens où l’inattendu de la proposition me cloue sur place et me prive de parole, et je deviens comme un phonème qui irait s’amuissant.

Pour parler de la performance Chrysalide(s), je dirai néanmoins subversion des codes et des tabous, exorcisme intime, courageuse et digne mise à nu des blessures et des failles. Mais aussi miroir auquel nous retrouver, interpellation de nous qui sommes là, assis tranquillement à regarder et à nous croire à l’extérieur de ce qui se joue ici et maintenant, représentation éphémère destinée à n’être qu’une fois, devant un cercle restreint, et de ce privilège nous nous devons d’être conscients ! À chaque étape de ce que je nommerais volontiers « cérémonie », nous serons appelés à participer, sollicités par le geste d’Alicja qui supplée à la parole car de sa bouche, pas un mot ne sortira.

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FIAP 2019 : Quand la ville se fait scène ouverte

— par Janine Bailly —

Islas Cicatrices et Egwe/Egue

Ce midi du vendredi 8 novembre, Isil Sol Vil et Marina Barsy Janer investissent cette partie du Grand Marché, ouverte d’un côté sur la rue et fermée de barreaux par ailleurs, où sur les plaques de contreplaqué provisoires qui ferment les boutiques se lisent encore les traces d’un tout récent incendie. Originaires l’un de Barcelone l’autre de Puerto Rico, c’est une performance intitulée Islas Cicatrices qu’ils déroulent, sans parole aucune, dans ce cadre urbain où les uns passent, où les autres s’arrêtent, rejoignant ceux qui sont venus tout exprès pour assister à la présentation.

Sur un cercle de tissu rouge, vêtus de noir agenouillés, d’abord recueillis ils se font face et complices semblent passer en silence le pacte qui va leur permettre d’agir, l’un sur l’autre, l’un avec l’autre, l’un par l’autre. Au cours de la performance, ils convoqueront les éléments : le feu de bougies blanches, allumées et allumant ces petites torches de plantes aromatiques enroulées au bout de piques qu’Elle disposera, les plantant sous la peau, le long de ses bras à Lui ; l’air, qui portera ce parfum et cette fumée légère, comme d’encens, dans l’espace du marché ; l’eau, qui sera versée des quatre extrémités de la croix d’un tissu noir, dessinant quatre chemins liquides vers le centre qu’occupe un rond de sable blond.

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FIAP 2019 : Découverte de l’Art Performance

— par Janine Bailly —

Après la première édition qui s’est tenue en 2017 à Fort-de-France, le FIAP pour sa manifestation de 2019 a voulu s’ouvrir à de nouveaux horizons, aussi divers que  Russie, Chine, Amériques, Canada, etc, et ce dans le but de créer une plateforme caribéenne dédiée à l’Art Performance.

La conférence de presse, accueillie dans les locaux de Atelier49 rue Moreau de Jonnes, a permis de se faire une première idée de la semaine qui nous attend, riche en événements offerts par tous ces artistes « passionnés de la performance ».

La présentation assurée par Paola Lavra, docteur en anthropologie, enseignante au Campus Caribéen des Arts, a bien heureusement éclairé les novices — dont je suis —, disant en ouverture combien les cofondateurs de la manifestation, Annabel Guérédrat et Henri Tauliaut, sont détenteurs de forces créatrices, combien sont intéressantes les propositions narratives offertes avec leurs corps dans l’espace public, combien l’Art Performance nous fait sortir de notre « zone de confort ». Afin de rendre son discours plus concret, Paola prend l’exemple de Grada Kilomba, psychologue écrivaine et artiste portugaise, et plus précisément de sa performance, Illusions.

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Le FIAP, deuxième édition à la Martinique

Le FIAP 2019 sera la deuxième édition du Festival International d’Art Performance. Il se tiendra du 5 au 12 novembre 2019. Ce festival sur l’art performance est codirigé par Annabel Guérédrat et Henri Tauliaut.

Se déroulant sur une semaine, il a pour objectif de mettre en relation des artistes performers, des critiques d’art, des universitaires, des curateurs internationaux. Grâce à cette deuxième édition, de nouveaux réseaux incluant la Chine, le bassin caribéen, les Amériques, le Canada, la Russie et l’Europe, se mettent en place.

Les objectifs de ce festival sont multiples : 

1. Faire un focus ici en Martinique sur l’Art Performance, qui est très peu connu : qu’est-ce que l’Art Performance ? Quelles sont ses histoires ?

2. Faire se rencontrer, échanger, stimuler de nouvelles collaborations, de nouveaux tissages, des networks autres qu’institutionnels entre les artistes de Martinique et ceux qui viendront des États-Unis et d’Amérique du Sud

3. Susciter des vocations auprès de lycéens, d’étudiants et de très jeunes artistes, toutes disciplines confondues

4. Susciter des débats entre chercheurs, universitaires, artistes, critiques d’art, programmateurs. Ouvrir des pistes de réflexion sur l’importance de l’Art Performance dans la Caraïbe, sur son côté subversif, sur les tabous interrogés à travers cet art

5.

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Un cinéma fait de voyages intérieurs.

— par Janine Bailly —

« Le Jeune Ahmed »

« Le Jeune Ahmed », des frères Dardenne, « Atlantique », de Mati Diop« Antonio das Mortes », de Glauber Rocha : trois films éloignés par le lieu, le temps et l’intrigue, mais qui pareillement savent joindre à la transcription d’une réalité sociale, politique ou géopolitique, le récit de cheminements intérieurs personnels et initiatiques. Un cinéma universel, à l’instar de ses réalisateurs, de nationalité belge, franco-sénégalaise ou brésilienne.

Sans concession, avec l’objectivité et la froideur oserais-je dire d’un entomologiste, sans porter davantage de jugement sur leur personnage, Jean-Pierre et Luc Dardenne suivent le parcours d’un garçon de treize ans entraîné dans la spirale infernale de la radicalisation par un imam, intégriste et dont l’inconscience, la lâcheté et l’hypocrisie se feront jour au moment du drame. Influençable aussi bien que doté d’une sensibilité à fleur de peau, en révolte contre une mère qui se laisse tenter par l’alcool et refuse d’obéir à la dictature du voile autant qu’à certains autres codes du même tonneau, le jeune Ahmed, parce que persuadé de lutter contre l’impureté des incroyants, applique au pied de la lettre le discours de haine qui lui est servi.

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La Compagnie Nova face à l’Algérie : « Et le cœur fume encore »

— par Janine Bailly —

1961, École Normale de filles. Nos seize ans vont perdre ce matin-là leur tendre insouciance. À Alger, une partie des militaires de carrière vient de tenter un coup d’état, qu’on appellera « le putsch des généraux », en opposition à la politique du général De Gaulle qui prônait pour l’Algérie, alors colonie française, le droit à l’autodétermination. C’est ce que nous dit notre directrice, interrompant le déroulé d’un cours et demandant aux élèves debout une minute de silence. La guerre, dans un beau déni ordinairement nommée « événements d’Algérie », fait son entrée dans notre quotidien, elle y restera jusqu’à 1962, elle dont nous entendions parler depuis sept longues années déjà sans en bien comprendre les enjeux. Tout en voyant autour de nous partir les appelés du contingent, jeunes hommes qui souvent comme le chantait Aragon n’en reviendraient pas, si ce n’est meurtris dans leur chair et leur âme, le plus souvent réfugiés dans le silence, dans le refus de dire, dire ce qu’ils avaient fait, ou ce qu’ils avaient refusé de faire, ou encore ce dont ils avaient simplement été témoins.

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Trois films d’aujourd’hui : « Bacurau »,« Roubaix, une lumière », « Le Daim »

— par Janine Bailly —

Bacurau

Si par hasard vous subissiez le choc de la rentrée, que vous cherchiez un moyen d’adoucir le traumatisme, qu’à la télévision en famille vous préfériez les émotions distillées sur grand écran, alors ne manquez surtout pas la reprise, en cet octobre chaud, des « Séances VO » programmées par Steve Zébina, reparties cette année encore entre les salles de Madiana et celle de Tropiques-Atrium. Une reprise en beauté, avec trois premières projections qui ont fait salle comble, ou presque, qui ont été suivies dans une belle concentration et un profond silence que j’oserai dire assez inhabituel. Et si, en raison de la gravité des sujets abordés, nous n’en sommes pas sortis forcément le cœur léger, remercions le cinéma de nous ouvrir ainsi au monde, qu’il soit le nôtre ou celui des autres, qu’il soit torturé ou apaisé, qu’il nous laisse sidérés ou réconfortés d’une lueur d’espoir.

Les Brésiliens Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles, sans craindre les excès, dans Bacurau prix du jury au festival de Cannes 2019,  nous parlent d’un pays rongé par la violence, la corruption politique et la misère sociale, et ce pays souffrant est le leur.

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À Bussang, la nécessaire transgression de « Suzy Storck »

Théâtre du Peuple de Bussang jusqu’au 7 septembre 2019,

— par Janine Bailly —

De Magali Mougel : « Suzy Storck » et  «Lichen »

De tous les spectacles vus cet été, il me restera indélébile, comme un souvenir stupéfait, les images, la colère et les mots de « Suzy Storck », une pièce écrite par Magali Mougel, jeune dramaturge rentrée au bercail après diverses pérégrinations. Bien lui en prit puisque Simon Delétang a choisi de la mettre en lumière, aux côtés de Calderón de la Barca, renouant par-delà le temps avec la « tradition Pottecher », qui voulait voir chaque année en ce théâtre une production dramatique du cru. Mais non content d’assumer la mise en scène, le directeur du Théâtre du Peuple a décidé d’être présent sur le plateau, aux côtés de ses trois acteurs incarnant Suzy, sa mère et son mari, pour y tenir à lui seul le rôle du chœur. Grave et noir choryphée de lui-même, et sans émotion apparente mais adoptant le ton, la posture et le costume sombres de la tragédie, il commente les faits, guide notre appréhension et notre compréhension de l’histoire.

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Le Théâtre du Peuple, entre obéissance et transgression

« La vie est un rêve », de Pedro Calderón de la Barca

— par Janine Bailly —

Au bourg de Bussang, quand je sirote mon café matinal au seul petit bar du coin, qu’à l’heure de l’apéritif je me mêle incognito aux buveurs du soir pour un vin d’Alsace obligé, je m’émerveille d’entendre parler théâtre, de trouver là ornant le mur un portrait au fusain d’Antonin Artaud ; d’apprendre qu’il fut autrefois dessiné par cette jeune femme au comptoir : entre douceur et autorité, elle règne autant sur les « natifs » du lieu que sur les « étrangers », amateurs de théâtre venus de nombreux « ailleurs » rejoindre la population locale dans sa ferveur inchangée pour la scène. Car telle est la magie de Bussang, qui vit naître et croître et perdurer le Théâtre du Peuple, qui sur des gradins de bois assez peu confortables si l’on ne s’est pas muni du traditionnel coussin de l’année, réunit des publics issus d’horizons divers, réalisant cette belle utopie d’un « théâtre pour tous ». 

Cette année, Simon Delétang pour sa deuxième saison estivale a choisi de surprendre, en proposant deux pièces très différentes, et pourtant proches en ce sens qu’elles posent l’une et l’autre des questions essentielles.

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Le festival d’Almada, côté monologues

« Si c’est un homme » (Se isto é um homem) & « Jeanne d’Arc » (Joana d’Arc)

— Par Janine Bailly —

Le festival d’Almada ne se limite pas à une forme de spectacle, mais se déploie de la performance exceptionnelle abondamment commentée et saluée d’Isabelle Huppert, dans Mary disse o que disse, jusqu’à des créations plus intimes, pièces sans afféteries, sans déploiements excessifs de décors ni vidéos projetées, mais extrêmement belles, nécessaires et touchantes dans leur volontaire dénuement.

Qui ne connaît, n’a lu, ou n’a eu écho du texte de Primo Levi intitulé « Si c’est un homme », « Se isto é um homem », « Se questo è un uomo ». Le titre de l’ouvrage est extrait du poème Shema, écrit sur une plaque commémorative à Livourne, et qui appelle à la transmission, aux générations futures, de la mémoire de l’holocauste. Témoignage autobiographique, essentiel à notre époque de recrudescence en certains pays de mouvements fascistes ou antisémites ou d’extrême-droite, le livre est considéré comme un des plus importants du vingtième siècle. L’auteur se souvient, suscite la mémoire vive de son internement, parle de sa survie dans le camp d’extermination d’Auschwitz, où il fut déporté et détenu de février 1944 jusqu’à la libération du camp en janvier 1945, après avoir été arrêté parce que membre de la résistance italienne au fascisme.

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À Almada, une question essentielle  : « De quoi sommes-nous faits ?! »

— par Janine Bailly —

Une des qualités du festival d’Almada, et non des moindres, est de faire se rencontrer, sans avoir aucunement à craindre la comparaison, le théâtre lusophone dans sa contemporanéité et les théâtres différents venus d’autres pays, théâtres émergés d’autres continents, certains nous disant être pour la première fois invités hors de leur pays d’origine. Ainsi la proposition « Do que é que somos feitos ?!, De quoi sommes-nous faits ?! », nous est offerte par la « Compagnie 1ER Temps » originaire de Dakar et jointe à la « Compagnie ABC » de Paris. Une création riche de sens, et qui comme tout bon spectacle, ne se donne pas dans l’instant à comprendre tout entière. 

La danseuse Clarisse Sagna, le guitariste Press Mayindou, l’écrivain et pédagogue Kouam Tawa, le danseur chorégraphe Andréya Ouamba composent, sur la mise en scène de Catherine Boskowitz, une sorte d’opéra-rock baroque et déjanté pour nous parler de choses graves et sérieuses, du Congo ou du Sénégal, pour nous dire l’Afrique comme elle va, nous dire aussi le monde dans toutes ses blessures mal cicatrisées comme dans ses problèmes actuels, montée des extrêmes-droites, émergence de nouveaux dictateurs, obéissance aveugle des peuples…

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