Janine Bailly

Regards sur la Martinique en temps de confinement

Covid-19, révélateur de notre dépendance : la Banque Postale assiégée

D’ordinaire, les 50% de Martiniquais qui vivent plus ou moins correctement ne remarquent pas les autres 50% qui survivent dans une terrible précarité.

Le confinement suite au Covid-19 a soudainement mis en lumière ces derniers. En effet, ils ont littéralement assiégé depuis ce matin les Banques Postales afin de « toucher la CAF », cette somme plus que modique sans laquelle ils ne pourraient ni manger ni payer l’eau et l’électricité ni envoyer leurs enfants à l’école. Ne respectant évidemment pas les fameux gestes barrière dont on nous rebat les oreilles dans les médias et ne portant pas de masques, mêmes artisanaux. Mais pouvaient-ils faire autrement ? NON ! Il y avait bien sûr des vigiles devant chaque agence mais s’il avait fallu respecter la distance de protection d’un mètre, les files se seraient étendues sur des kilomètres et lesdites agences auraient dû rester ouvertes jusqu’à minuit.

Comment en sommes-nous en arrivés là ? Pourquoi les espoirs mis dans la loi de Départementalisation/Assimilation de 1946 se sont-ils révélés vains ? Pourquoi ni la Droite ni les Autonomistes ni les Indépendantistes qui, tout à tour, ont été au pouvoir n’ont-ils jamais réussi à combler ce fossé qui divise la société martiniquaise en deux et qui est gros de violences futures ?

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De la solidarité, et de son exact contraire

De la solidarité individuelle envers l’autre

Ce matin 6 avril, la « Lettre d’Intérieur », lue sur France Inter par Augustin Trapenard, était celle de Christiane Taubira.

« Christiane Taubira est née à Cayenne. Elle a été Garde des sceaux entre 2012 et 2016. Dans cette lettre adressée à une jeune femme sans abri, elle use de son art de la digression, pour mieux exprimer son inquiétude concernant la vulnérabilité des personnes sans domicile face à l’épidémie. » (France Inter)

« Quelle façon intelligente et belle de dire son amour, du monde et de l’autre, dire sa compassion, sa solidarité ! Parce qu’avec le confinement, elle ne peut plus la mettre en œuvre pareillement ! » (Janine Bailly)

« Cayenne, le 6 avril 2020

Hello Julie,

Avant tes mots, c’est ta moue puis ton sourire puis une légère raideur vertébrale qui me répondent… m’auraient répondu. Car je ne peux plus passer te voir. C’est ainsi depuis plus de quatre mois maintenant. Je vis à des milliers de kilomètres. Ici, nous n’avons pas besoin de guetter un printemps capricieux. Il fait beau toute l’année. Et ce n’est pas un cliché.

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Masques : Errements justifiés, ou pieux mensonges ?

Depuis plusieurs semaines « ils » nous disent tout et son contraire… Est-ce dû aux errements compréhensibles liés à l’inconnu encore insondable de ce nouveau virus ? Porteraient-ils déjà des masques… autres que ceux destinés à faire barrière à la pandémie ? Bas les masques, dit l’adage populaire… Seraient-ils en train de laisser tomber les leurs ?

Lu ce jour sur le site de l’« Intern@ute » (extraits)

Faut-il des masques pour tous contre le coronavirus ?

Alors que les autorités ont longtemps assuré que le port du masque par la population était inutile dans un cadre préventif et que les masques devaient être réservés aux soignants, le discours est en train de s’infléchir depuis la fin de la semaine dernière. L’Académie de Médecine a préconisé le port généralisé du masque, y compris pour des modèles moins perfectionnés que celui utilisé dans les hôpitaux (voir aussi : à quoi ressembleront les masques pour le grand public ?). Elle va même jusqu’à recommander « que les indications pratiques pour la fabrication d’un tel masque soient largement portées à la connaissance de la population ».

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Festival éphémère de cinéma : Session 4

#CultureChezVous

Pour notre plus grand plaisir, Tropiques Atrium Scène Nationale continue le « Festival éphémère ». Cette fois-ci découvrez, entre autres, 4 films de réalisatrices caribéennes.

« Cette nouvelle session continue notre exploration du cinéma antillais dans sa diversité.

Des comédies, des drames. Nous avons aussi voulu vous proposer un focus sur des réalisatrices à travers quatre œuvres. Le cinéma sous nos latitudes s’est souvent décliné au féminin !

Continuons aussi à poser un regard bienveillant sur notre avenir avec un nouveau film de lycéens, et puis un générique réalisé par les étudiants de l’école d’animation Parallel 14. »

 

Une sélection « Femmes et Cinéma » » dédiée à Osange Silou Kieffer.

 

Ti Coq, de Nadia Charlery (Martinique 2016), avec Sohan Geneviève et Mayou Luc

Josué, un garçonnet espiègle a développé avec son coq des rapports de complicité particuliers, et il s’est mis en tête de faire de lui un coq de combat redoutable… Mais malgré tous ses efforts et l’aide de sa mamie, qui l’élève avec tout son amour, une suite d’événements inattendus va invariablement contrarier ses projets.

 

La femme qui passe, de Véronique Kanor (Martinique 2010), avec Mayou Luc, Alliou  Cissé

Dans un vieux cimetière créole, un homme et une femme trompent leur solitude en se racontant des histoires d’amour.

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Décès d’Osange Silou-Kieffer, « encyclopédie du cinéma antillais et africain »

—  Publié le 1 avril 2020 à 14h10, par Louis Otvas, sur « Outre-mer la 1ère »  —

C’est une grande dame qui a oeuvré pour le cinéma ultramarin qui vient de s’éteindre. La journaliste Osange Silou-Kieffer, née en Guadeloupe, est morte mercredi 1er avril, à Paris. Elle avait 73 ans.

Osange Silou-Kieffer s’est éteinte dans la nuit du 31 mars au 1er avril. Malade depuis plusieurs mois, elle était âgée de 73 ans.

Pour Firmine Richard, Osange Silou-Kieffer « c’était l’encyclopédie du cinéma antillais et africain. C’est comme si je perdais ma mère pour la seconde fois. Ma seule consolation est de me dire qu’elle connaissait bien Manu Dibango et qu’il saura l’accueillir », soupire la comédienne.

« Irremplaçable »

Car dans le petit milieu du cinéma ultramarin, tout le monde connaissait cette Guadeloupéenne, journaliste, productrice, toujours disponible et« irremplaçable dans le domaine dans  lequel elle évoluait », juge Marijosé Alie. « C’était une soeur d’une extrême solidité intellectuelle et morale et d’une extraordinaire générosité. Elle voyait tout le temps ce qu’elle pouvait faire pour les autres ».

A tel point que la phrase qu’elle a le plus entendue est : « Osange que penses-tu de mon scénario? 

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Quelques nouvelles pour l’Outre-Mer

Edouard Philippe et Olivier Véran s’expliquent devant l’Assemblée cet après-midi (LCI – Le Figaro)

Le gouvernement aurait-il dû décréter le confinement plus tôt ? Prendre des mesures sanitaires plus en amont ? Bref, a-t-il pris les bonnes mesures pour gérer la crise du coronavirus ?

Le premier ministre, Édouard Philippe, et le ministre de la Santé, Olivier Véran, sont auditionnés ce mercredi à 18h par l’Assemblée nationale sur la gestion de la crise de l’épidémie de coronavirus en France, vertement critiquée par une partie de l’opposition et certains professionnels de santé.

Le chef du gouvernement s’exprimera en visioconférence devant les 31 députés de la mission d’information appelée à contrôler chaque semaine les mesures prises par l’exécutif face à l’épidémie qui a bouleversé la vie des entreprises et fait plus de 3500 morts en France.

Cette mission parlementaire, dont le président de l’Assemblée, Richard Ferrand, est le rapporteur, vise à étudier «l’impact, la gestion et les conséquences» de l’épidémie et n’a pas vocation à ce stade à mener des investigations.

Rappel fait ce jour par Christophe Castaner : 

«On ne part pas en vacances pendant la période de confinement», a déclaré le ministre de l’Intérieur.

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Tropiques Atrium, #Culturecheznous

En cette période de confinement, Tropiques Atrium – Scène Nationale continue sa mission, souhaite favoriser l’accès aux contenus artistiques, et vous apporte la culture en ligne.

 https://tropiques-atrium.fr/actualites/tropiques-atrium-vous-apporte-la-culture-en-ligne/

LE THÉÂTRE

https://tropiques-atrium.fr/actualites/culturecheznous-cahier-dun-retour-au-pays-natal/

Aimé Césaire, « Cahier d’un Retour au Pays Natal »

Découvrez en intégralité la pièce de théâtre « Cahier d’un Retour au Pays Natal », mise en scène par Daniel Scahaise, du fameux texte d’Aimé Césaire, jouée le mardi 04 avril 2017, à Tropiques-Atrium Scène nationale.

Texte : Aimé Césaire
Avec : Etienne Minoungou 
Mise en scène : Daniel Scahaise
Assistant à la mise en scène : François Ebouelé
Coproduction : Cie La Charge du Rhinocéros, Théâtre en Liberté & Cie Falinga
Production La Charge du Rhinocéros ; Théâtre en Liberté ; Compagnie Falinga
Le Canard Enchaîné : « Minoungou, magnétique, nous touche »

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« Lettres d’intérieur », par Augustin Trapenard

Annie Ernaux & Léonora Miano

Sur France Inter, dans sa nouvelle chronique intitulée « Lettres d’intérieur », chaque matin à 8h55 Augustin Trapenard lit une lettre qu’un écrivain lui a confiée : c’est une lettre sur le sujet de son choix qu’il adresse à la personne de son choix. Si comme moi vous résidez aux Antilles, que vous n’êtes pas oiseau de nuit ni insomniaque berçant son mal en captant les ondes au tout petit matin, presque « au pipiri chantant » (en raison du décalage horaire actuel), vous pouvez toujours écouter en podcasts ces lettres, superbes, intelligentes, ou tendres, ou indignées, ou justement coléreuses mais toujours teintées d’une humanité véritable… à l’instar de la chronique journalière tenue par Wajdi Mouawad,  le dramaturge et directeur du théâtre de La Colline à Paris, sur le site de ce théâtre précisément. De « Lettres d’intérieur », j’ai retenu aujourd’hui ces deux écrivaines emblématiques : Annie Ernaux, Léonora Miano.

Additif, ce 31 mars : quel bonheur ! Ce matin, dernier jour de mars, je constate que l’émission « Boomerang » d’Augustin Trapenard a été déplacée à 14 heures sur la grille de France-Inter, elle est donc audible en direct aux Antilles à 8 heures du matin !

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Lettre ouverte de Cristina Comencini

— Cristina Comencini, mise en ligne par Janine Bailly —

« Le Masque et la Plume », fidèle sur France-Inter au rendez-vous du dimanche soir, fidèle depuis plus de soixante ans à ses auditeurs, fidèle et précieux en cette période où nous sommes, par la méchanceté d’un méchant virus, interdits de cinémas, de théâtres et de librairies, « Le Masque et la Plume » émission diffusée sous l’égide de Jérôme Garcin depuis 1989, a eu l’heureuse idée de nous parler aujourd’hui littérature.

« Le Masque et la Plume », on aime ou on déteste, on s’en amuse ou s’en agace, on rit ou se fâche de ses excès qui peuvent paraître puérils, de ses enthousiasmes débordants comme de ses critiques, impitoyables ou indulgentes et il faut bien l’avouer, parfois taillées à l’emporte-pièce.… Mais force est de reconnaître l’engagement de ces femmes et de ces hommes au service de la culture, puisqu’en ce jour l’émission a bien eu lieu, faite par téléphone et rebaptisée pour l’occasion  — mais est-il encore de bon goût de rire ? — « le masque, le gel et la plume ».

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Écrire, pour résister !

— Janine Bailly : Textes de Mustapha Dahleb, Ariane Ascaride, Michel Onfray —

En ces temps si tragiques, où chacun enfermé dans sa cellule s’efforce de raison garder, les écrits fleurissent, tant il s’avère qu’ écrire peut être un remède à l’angoisse, à la solitude, à la peur qui, sournoise, s’insinue et ronge… On entend, on lit, on reçoit — et plus encore si l’on fréquente les réseaux sociaux —, tout et n’importe quoi. Du « journal de confinement » assez indécent rédigé par l’écrivaine Leïla Slimani depuis sa chaumière normande et que publie le journal Le Monde, à la lettre si belle de l’actrice engagée Ariane Ascaride lue ce matin sur France Inter chez et par Augustin Trapenard, en passant par ces épanchements anonymes qui courent… sur Facebook par exemple. Voici deux de ces textes, que j’ai d’abord envie de mettre en regard l’un de l’autre, tels qu’ils me sont parvenus, tandis qu’une citation de Michel Onfray viendra clore provisoirement le débat…

À LIRE : Mustapha Dahleb, la plus belle plume tchadienne, a écrit (Mustapha Dahleb est le nom d’auteur du Docteur Hassan Mahamat Idriss): 

https://blogs.mediapart.fr/jecmaus/blog/220320/lhumanite-ebranlee-et-la-societe-effrondree-par-un-petit-machin

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Quand la France passe au stade 3…

— Journal en ligne JÒDIA (Martinique Guadeloupe Guyane La Réunion Monde) —

Voici venu le temps… des interdictions… Ce week-end est une injonction contradictoire : restez chez-vous mais sortez voter !

Edouard Philippe a annoncé la fermeture dès minuit et « jusqu’à nouvel ordre » des lieux recevant du public « non indispensables à la vie du pays ». Cela concerne notamment les restaurants, cafés, cinémas et discothèques. Les lieux de culte resteront ouverts mais « les rassemblements et les cérémonies devront être reportés ». Les commerces sont également concernés par cette fermeture, à l’exception de ceux qui sont jugés « essentiels ». Resteront ouverts les magasins et marchés alimentaires, les pharmacies, les stations-essence, les banques et les bureaux de tabac et de presse. Les services publics restent également ouverts.

« Nous devons montrer plus de discipline dans l’application des mesures » de lutte contre la diffusion du virus, a déclaré Edouard Philippe. Il a appelé les Français à « éviter au maximum de se rassembler, limiter les réunions amicales et familiales, n’utiliser les transports en commun que pour aller au travail et seulement si la présence physique au travail est indispensable » .

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Disparition de la réalisatrice Tonie Marshall

La réalisatrice franco-américaine Tonie Marshall, est morte jeudi 12 mars à l’âge de 68 ans, « des suites d’une longue maladie », a annoncé son agente Elisabeth Tanner.

Premiers pas de comédienne avec Jacques Demy

Fille de l’actrice française Micheline Presle et de l’acteur, réalisateur et producteur américain William Marshall, Tonie Marshall a débuté au cinéma comme actrice en 1972 dans L’Evénement le plus important depuis que l’homme a marché sur la lune de Jacques Demy. Puis a enchaîné une myriade de petits rôles dans les années 1970 et 1980, sans évoquer le théâtre. « J’étais actrice car c’était ce qui me paraissait le plus naturel, mais je m’intéressais beaucoup à l’écriture, à la production », contait-elle.

Le virus du cinéma lui a été transmis par sa mère, qui trouve souvent un petit rôle dans ses films. « Elle m’a communiqué le goût de voir des films, même toute seule, à 2h de l’après-midi », exposait-elle lors d’une rencontre à l’Ecole de cinéma Esra.

Enfant, Tonie Marshall a grandi à côté du cinéma d’art et d’essai le studio des Ursulines à Paris.

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Didier Bezace, comédien et metteur en scène, est mort

Le comédien et metteur en scène Didier Bezace, cofondateur du Théâtre de l’Aquarium et ex-directeur du théâtre de La Commune d’Aubervilliers, est mort à 74 ans des suites d’une longue maladie « qu’il a combattue avec vigueur et courage », a annoncé jeudi 12 mars son attachée de presse.

Le Syndicat national des metteurs en scène a salué « son engagement et l’intégrité de ses spectacles » qui « resteront comme des marqueurs d’une partie de l’histoire de la décentralisation théâtrale dans notre pays ».

Au cinéma, il a joué dans une trentaine de films dont L.627, Ça commence aujourd’hui, de Bertrand Tavernier et La Petite Voleuse, de Claude Miller, ainsi que dans plusieurs dizaines de téléfilms. Comme metteur en scène, il monte des textes d’auteurs classiques et contemporains comme Luigi Pirandello, Molière ou Bertolt Brecht et en 2001, présente sa version de L’Ecole des femmes, de Molière, à la cour d’honneur au Festival d’Avignon, avec Pierre Arditi.

Molière de la meilleure adaptation

Didier Bezace a créé en 2004 Avis aux intéressés, de Daniel Keene, qui a reçu le Prix de la critique pour la scénographie et une nomination aux Molières pour le second rôle.

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Avec « Jane Tonix », sur les traces retrouvées du « Barbershop »

— par Janine Bailly —

Pour la cinquième année, de concert en concert accrochant sa partition singulière au paysage musical de l’île, le sextuor Jane Tonix trace avec bonheur son chemin de ritournelles. Un chemin qui l’a mené, ce samedi 29 février — date exceptionnelle s’il en fut — jusqu’au théâtre Aimé Césaire, devant une salle comble et bientôt conquise ! Cinq filles et un garçon, que l’on pressent liés par une belle complicité. Et les regards de connivence échangés ne nous démentiront pas ! Assorties au costume du garçon, cinq petites robes déclinant dans cinq coupes différentes la couleur noire, élégance féminine à la Coco Chanel. Sur scène, un plateau légèrement surélevé, estrade où se tenir, où monter, d’où descendre au devant du public ou vers un espace réservé côté jardin : là attendent sur un guéridon six verres et une carafe ; le groupe parfois s’y tiendra, dans un instant de repos, pour s’y rafraîchir d’eau, et comme dans un bistro s’y rencontrer. Car pour ceux qui connaissent par avance Jane Tonix, la surprise est bien dans la forme nouvelle donnée au concert par Guillaume Malasné, metteur en scène talentueux de L’autre Bord Compagnie.

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« Adam », de Maryam Touzani : femmes debout !

— par Janine Bailly —

Si les printemps arabes sont restés des bourgeons mal éclos, si l’on peut dire, parodiant François de Malherbe, que les fruits n’ont pas passé la promesse des fleurs, nul ne peut nier que le cinéma en provenance du Maghreb en a gardé le parfum.

Comme le « Noura rêve », de la réalisatrice tunisienne Hinde Boujemaa, le film « Adam », premier long métrage de la marocaine Maryam Touzani, présent en 2019 à Cannes dans la section « Un Certain Regard », vient nous parler des femmes, et au travers elles, par le destin qui leur est fait, de sociétés où elles sont tenues encore et toujours sous la double dépendance et des hommes et de lois iniques faites en leur défaveur. Scénariste et parfois actrice de son compagnon le cinéaste Nabil Ayouch, Maryam Touzani passe derrière la caméra et signe une œuvre sensible, qui sans poings levés mais avec douceur et efficacité, plaide pour la cause des femmes de son pays. Derrière une apparente simplicité, c’est toute la complexité d’une culture, tous le poids des traditions qui nous sont dits.

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« Appuie-toi sur moi », une fort jolie proposition

— par Janine Bailly —

Ce pourrait être une histoire somme toute assez banale : ils se rencontrent, ils se découvrent, ils s’aiment et se haïssent tour à tour… Est-ce qu’ils vont se séparer, et qui, d’Elle ou de Lui, qui donc abandonnerait l’autre ? Mais voilà, derrière l’ordinaire des jours, et si l’on déchire le rideau des apparences, tant de choses essentielles mûrissent et se disent, ou avortent et se taisent, au sein du couple !

Virginie Le Flaouter et Vincent Maillot, dans une mise en piste de Gilles Cailleau (de la « Compagnie Attention Fragile »), échangent pour la première fois leur île de La Réunion contre la nôtre. Cette richesse, cette complexité, ces difficultés et écueils de la vie à deux, ils nous les rendent sensibles, nous permettent de les visualiser par une conjonction d’arts différents et complémentaires : paroles et musiques en live, jeux de lumières, jeux du double corps au sol, acrobaties aériennes sur et autour du mât dressé au centre de la piste. Car piste il y a bien, octogonale, aux côtés délimités par des rampes de spots répondant à ceux disposés en hauteur.

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« Réminiscences » : danser la vie, l’amour, la mort

— par Janine Bailly —

Bruit de couloir

Lui, c’est Clément Dazin. Tellement humain. Tellement proche. Il entre seul en scène, dans le sombre du plateau nu. Seule la lumière viendra dans cette obscurité initiale, que scande l’orage éclaté sur la bande-son, viendra définir des espaces où mouvoir le corps vêtu de noir et ses “partenaires”, trois balles claires de jonglage, que les mains animent mais qui de temps à autre semblent s’échapper pour vivre de leur vie propre. Le danseur-jongleur sera donc comme enserré dans les filets de clarté, faisceau horizontal à suivre, en une marche articulée, décomposée et cassée par des ruptures brusques de rythme, qui évoque — dans sa lenteur et concentration — autant certaines figures du kabuki  ou du bûto, que d’autres issues du hip-hop. Carré à arpenter ainsi sur son périmètre. Cercle où se coucher et continuer au sol la danse jonglée, de souffrance et de solitude.

Car seul, le comédien le restera, interprétant « Bruit de couloir », étrange spectacle à la tonalité tragique, né d’une harmonie entre un homme qui marche lançant les balles au-devant et au-dessus de lui et danse — de ses bras et de ses jambes mais aussi de son dos tout à coup dénudé et curieusement mobile —, une musique inquiétante faite autant de bruits et sons issus d’un quotidien que de notes, des silences soudains, des alternances de ce noir qui sans cesse le disputent à la lumière des projecteurs.

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« Noura rêve », et « Le Miracle du Saint Inconnu » : deux fois le Maghreb

— par Janine Bailly —

De façon régulière Steve Zebina, pour nourrir notre soif de cinéma, nous propose un « focus sur »­­, soit de porter notre regard sur un réalisateur, ou sur un pays, ou sur un continent particulier — de même que le photographe fixe son objectif sur les choses qu’il veut mettre en valeur. Février verra donc sur les écrans de Madiana, dans leur version originale sous-titrée, se succéder quatre films récents en provenance du Maghreb. 

« Noura rêve », de la réalisatrice tunisienne Hinde Boujemaa, reçoit le Tanit d’or en 2019, aux Journées cinématographiques de Carthage. En composant un portrait de femme auquel l’actrice Hend Sabri donne, toute en force apparente et tendresse contenue, une densité surprenante, Hinde Boujemaa lève aussi le voile sur le machisme récurrent qui, en dépit d’avancées certaines, continue à sévir dans son pays d’origine. Certes, sous l’impulsion d’Habib Bourguiba, le Code du Statut Personnel a accordé aux femmes un certain nombre de droits nouveaux. Il n’empêche que l’adultère reste un sujet souvent tabou, et qui peut être puni de cinq ans de prison pour chacun des deux amants.

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« NO » et « Le Cercle des Petits Philosophes » : un cinéma qui pense

— par Janine Bailly —

Avant même les Rencontres Cinéma Martinique de mars, comme en un riche prélude, Steve Zebina nous a concocté en ce mois de février une programmation variée, combinant les séances à Madiana, à la Case à Vent et à la salle Frantz Fanon de Tropiques-Atrium, alliant les nouveautés aux œuvres plus anciennes. Bien sûr, ceci oblige à des choix, parfois douloureux pour ceux qui sont en activité ! Pour les bienheureux fidèles, cinéphiles enragés et bénéficiant d’une retraite méritée — mais hélas mise en péril pour les jeunes générations —, la journée du mardi 4 février fut bien belle à Tropiques-Atrium.

« NO », de Pablo Larrain, présenté à Cannes en 2012 dans la Quinzaine des Réalisateurs, nous plonge dans un épisode particulier de l’histoire tragique du Chili. Le film, qui reste une fiction, fait alterner les séquences imaginées et, pour un tiers, les séquences d’archives. Son originalité tient au fait que le réalisateur a choisi de « filmer avec des caméras d’époque afin d’obtenir une continuité entre ses propres images — qui exacerbent les défauts des images télé de l’époque, troublant les couleurs et les contrastes — et les images d’archives ».

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« Les champignons de Paris­ », pour ne pas oublier…

 — par Janine Bailly —

“1960. La France lance son programme d’essais nucléaires militaires dans le Sahara. Six ans plus tard, elle le poursuit en Polynésie sur les atolls de Mururoa et Fangataufa / 193 tirs, atmosphériques puis souterrains, ont été réalisés sur ce petit bout de monde / Il faudra attendre 1996 pour voir leur arrêt définitif / Sous couvert de protéger la paix, la France s’est dotée d’une arme capable de détruire la Terre”. La réalité constituée de chiffres et de faits précis, très vite s’affichera sur l’écran en fond de plateau ; d’emblée le ton sera donné, il ne s’agira pas de polémiquer ni d’attiser de quelconques ressentiments, mais bien de faire connaître des faits, de dire sans fards et sans haine ce qui fut, et n’aurait pas dû être. Plus tard défilera sous nos yeux la liste des tirs, avec leurs noms —  étrangement poétiques — et leur puissance respective.

La Compagnie du Caméléon, qui pourrait se définir par une appartenance au théâtre citoyen, entend « inviter à l’échange et à l’éveil des consciences… », contribuer à « la libération de la parole et au travail de mémoire dans une recherche de justice et de vérité ».

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« Le retour du Roi Lion » :  un conte contemporain

— par Janine Bailly —

Après La forêt des illusions, voici au Festival des Petites Formes un autre spectacle en provenance de la Guyane, Le retour du Roi Lion, mis en scène par Ewline Guillaume. Une œuvre collective de la compagnie KS and CO, adaptée du roman de Joël Roy, Le Lion Réincarné paru à L’Harmattan en 2014, avec pour sous-titre « un conte contemporain, ce que dit le marronnage ». L’auteur, qui vit en Guyane, « s’intéresse à la culture des “Gens du fleuve”, les descendants des esclaves ayant choisi le marronnage plutôt que la soumission aux colons. Ses recherches l’amènent à écouter des témoignages… pour tenter de remonter le fil de la tradition orale… ». Par l’avant-propos, il nous dit quelle fut l’origine de ce roman, une histoire vraie que je résumerai brièvement. À Amsterdam, dans les années 1980, une femme d’origine surinamaise, victime de crises ressemblant à des possessions, fut prise en charge par la psychiatrie. L’ayant entendue, un Gambien originaire de Georgetown, déclara :« Mais ce que la dame hurle, on appelle ça des djats », cris que les Anciens utilisaient au temps des dynasties mandingues, en Afrique Occidentale, pour chasser les lions.

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« La Nuit des Idées » à la Villa Chanteclerc : « Être vivant »

Le jeudi 30 janvier à 18 heures, à la villa Chanteclerc à Fort-de-France

Évènement national et international sous l’égide de l’Institut Français, La Nuit des Idées aura lieu jeudi 30 janvier 2020, autour du thème « Être vivant », réunissant des intervenants de tous horizons – intellectuels, chercheurs, artistes – invités à débattre dans les lieux partenaires de la manifestation, sur les cinq continents.
Chaque année, la Nuit des idées est une invitation à découvrir l’actualité des savoirs, à écouter celles et ceux qui font avancer les idées en tous domaines, à échanger sur les grands enjeux de notre temps, célébrer la circulation des idées entre les pays et les cultures, les disciplines et les générations, parce que la pensée traverse les frontières…

 

– de 18 h à 19 h : La Guyane en Toutes Lettres
Présentation du roman de Joël Roy CAYENNE-MOSCOU, paru aux éd. Idem.
Intervenants : Suzanne Dracius, Joël Roy.

– de 19 h à 21 h : Une société anxiogène a-t-elle en ultime recours comme mode de rébellion la violence ?
Table ronde, conférence débat :
Intervenants : Nadia Chonville, Raphaël Constant, Suzanne Dracius, Malik Duranty, Philippe Pierre-charles, William Rolle.

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« Jaz », entre cris et murmures, entre aveux et secrets

— par Janine Bailly —

Toujours dans ce Festival des Petites Formes, à la salle Frantz Fanon (bien plus adéquate que le fameux chapiteau installé à Schœlcher), il nous a été donné de voir « JAZ », de Koffi Kwahulé, dans la mise en scène de Ayouba Ali et l’interprétation originale d’Astrid Bayiha et Swala Emati. Une pièce déjà découverte avec bonheur à Fort-de-France en 2017 au Théâtre Aimé Césaire, dans le travail abouti de Jandira Bauer et Jann Beaudry.

Dans cette nouvelle version de « Jaz », il y a — et cela tient à mes préférences personnelles en matière de théâtre et non à la qualité intrinsèque du spectacle — il y a trop de tout, ou trop peu. Trop d’espace, que les deux comédiennes ne peuvent en dépit de leurs déplacements s’approprier, le plateau ne portant par ailleurs pour tout élément de décor qu’une cuvette de toilettes maculée. Trop de vélocité dans la diction, et les finales des phrases ne me permettent pas de bien saisir tout ce qui est dit. Trop de réalisme, à demi assumé cependant dans les choix de mise en scène.

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« Le Dernier jour d’un condamné », de Victor Hugo

— Par Janine Bailly —  

La lumière est crue, blanche, parfois bleue mais plus rarement. Rouge quand est évoquée la séquence attendue de la guillotine, suggérée par le bruit métallique du couperet qui descend sur son rail, et par le mouvement qui jette au sol le comédien avant que ne se fasse le noir. La lumière est dure, agressive, elle s’oppose à l’idée d’un cachot humide et sombre, qui apitoie lorsque l’on pense aux geôles d’antan. Car ce n’est pas par l’émotion que Victor Hugo entend mener principalement ce réquisitoire contre la peine de mort, mais bien en faisant appel à notre faculté de raisonnement. Le texte est d’abord un plaidoyer, à jouer de façon à ce que les mots fassent en nous leur chemin de réflexion, ces mots d’une langue parfaite et acérée qui viennent sous la plume courroucée de l’auteur. Celui-ci, qui dans la préface ajoutée en 1832 met en avant la « fonction politique et morale de son roman », ne déclarait-il pas en effet : « Le Dernier jour d’un condamné n’est autre chose qu’un plaidoyer, direct ou indirect, comme on voudra, pour l’abolition de la peine de mort » ?

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« Vivre », dans le sillage de la Compagnie Car’Avan

— par Janine Bailly —

Vu ce mardi 21 janvier, la deuxième création offerte sous le chapiteau, dans ce Festival 2020 des Petites Formes : le « Vivre » sous la direction artistique de Thierry Sirou, chorégraphe et metteur en scène, une production de la Compagnie Car’Avan. De celle-ci, nous avions déjà découvert, sur la scène du Théâtre Aimé Césaire en 2018, « Amniosphère », un spectacle singulier et qui « de la conception à la délivrance, restitue[ait] la prodigieuse amplitude des échanges émotionnels et physiques qui relient la mère, confrontée aux aléas de la vie, et le bébé à naître ».

Quand le spectacle « Vivre » commence, on devine sur la scène baignée dans une semi-obscurité des origines, deux présences, Elle et Lui. Homme, Femme. Rien d’autre. Les corps seuls, dans leur éphémère densité, pour occuper l’espace. Dans un premier temps, émouvant et beau, ces corps se cherchent, se trouvent et se perdent, se prennent et se déprennent. Ils s’imbriquent, puis se détachent, ils s’accordent puis se rejettent, et sous le pont des jambes écartées de l’autre, l’un parfois se glisse.

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