— Par Jean Durosier DESRIVIERES —
Titre :
*Paroles en crue
Genre :
*Drame.
Durée :
*Théoriquement la représentation de cette pièce, encore au stade de projet, devrait osciller entre une heure (1h) et une heure et demie (1h30).
Résumé :
*On est à la Cité de l’Indépendance, un soir de forte averse provoquant un début d’inondation. Deux inconnus, Maton et Voltaire, se retrouvent par hasard sous un abri de fortune, le porche d’un magasin-bric-à-brac où ils se réfugient, en attendant une éventuelle accalmie pour pouvoir rentrer : le premier chez sa compagne Sonia et le second Chez son amante Eva. Alors que l’eau monte graduellement, Maton, enjoué et sans doute habitué à de pareilles situations, éprouve tout simplement, pour tuer le temps, le besoin de parler à son compagnon (Voltaire) de circonstance qui paraît être un Etranger à ses yeux, un coopérant, apparemment coincé et méprisant par-dessus tout. Mais l’eau se fait de plus en plus menaçante, quand soudain passe un cadavre. C’est alors que, sous le choc, la voix de Voltaire se fera entendre de façon plus drue, et l’on discernera également la fragilité du personnage et découvrira presque toute sa vérité.

Edito du 20/05/2008





On peut débarquer du « 9-3 », être nourri de la culture des banlieues, être porteur d’une identité bâtarde, avec du martiniquais mêlé à bien d’autres origines, et être néanmoins capable de s’adresser aux Antillais d’ici, à ceux qui ont fait le choix de rester dans le pays du premier exil, le pays des anciennes humiliations et des douleurs jamais complètement effacées. A en juger par l’émotion qui a saisi les spectateurs, D’ de Kabal, l’auteur et principal interprète d’Ecorce de peines, présentée à Fort-de-France le 17 avril, a su les toucher au plus profond et, qui sait ? leur apprendre quelque chose d’eux-mêmes qu’ils ignoraient, comme la fraternité profonde qui les lie aux « sauvageons » des banlieues, à l’égard desquels il leur arrive pourtant – quand la violence se met à déferler sur les cités – de tenir des propos dépourvus de toute compréhension.
Les comédiens et les comédiennes sont des êtres insupportables. Narcissiques, auto-centrés, mégalomanes, d’une redoutable fragilité qui se pare de la robe de l’infantilisme le plus indécrottable, on ne peut que les haïr de ne pouvoir faire du théâtre sans eux. Et pourtant… l’adage est bien connu qui affirme que l’on apprécie les gens que pour leurs qualités alors qu’on les aime pour leur défauts. Jandira de Jesus Bauer a été comédienne, ce qui explique pourquoi elle est sans doute assez folle pour s’embarquer avec trois comédiennes antillaises et monter « Les Bonnes » à Fort-de-France. Le résultat est à la mesure de l’entreprise, décalé, iconoclaste et fidèle, inventif et décapant, mais surtout réussi. 


Mise en sc

Michèle Césaire continue d’explorer les relations maître-serviteur. Après nous avoir présenté un Jacques le Fataliste très sage, elle nous offre aujourd’hui une Mademoiselle Julie tourmentée. Le tourment accompagne d’ailleurs la vie de Strindberg, auteur de la pièce et inventeur du théâtre moderne.
Mademoiselle JULIE est une leçon de sociologie sous la fausse apparence d’un divertissement. C’est là toute la différence entre un théâtre militant, didactique, pesant qui noie le divertissement dans la leçon démonstrative et le théâtre de réflexion qui, se présentant d’abord comme un divertissement, amène le spectateur à s’interroger, à penser. Un espace est constitué entre la scène et la salle que le spectateur aura la possibilité, le loisir et pas l’obligation, de traverser par un processus d’identifications plus ou moins conscient non pas à des personnages, mais à des situations vécues, incarnées par des comédiens. Ce qui est asséné d’un côté est laissé à la liberté d’appropriation de l’autre. Distinction entre texte de propagande et texte à thèse, éloge de la distanciation surtout quand elle est brechtienne. Parvenir à cette magie assure à la pièce sa pérennité. C’est pourquoi on peut toujours jouer Sophocle et quelques autres.