— Par Christian Antourel —
Dans un cadre conceptuel agité où l’Art Nègre tente de se frayer un chemin, on observe partout le regroupement d’artistes audacieux et de bonne volonté.
Ils conçoivent l’art ancien en perspective, une façon de revivifier, de réhabiliter la tradition. Refusant de s’insérer dans une stratégie platonique, commune de dérision, voire de déréliction où la facilité est à son paroxysme, l’A.M.4, prend son rôle à bras le corps et exprime la singularité percutante d’une philosophie active imprégnée de réflexions, de doutes, d’émotion, de certitudes aussi. Il convient de changer le désordre établi des choses en marquant l’espace culturel d’une trace de son intégrité partisane. Rien de plus légitime en somme. C’est du corps en mouvement, dans son expression la plus exacerbée dont il est question. Bèlè – Grand Bèlè – Bélya – Dammyé – Kalennda. La source vive, le feu sacré. Ces danses et leurs musiques regar a sou koté qui vous toisent de haut en bas et inversement. Ces danses qui marronnent entre rires et grimaces quand la tradition est bien là, sous les pieds nus et dans le rythme d’une littérature dansée, parfois impudique, dékatchiyé, écorchée brut dans sa sueur qui parle dans l’accent d’un « souffle barbare ».





Edito du 20/05/2008





On peut débarquer du « 9-3 », être nourri de la culture des banlieues, être porteur d’une identité bâtarde, avec du martiniquais mêlé à bien d’autres origines, et être néanmoins capable de s’adresser aux Antillais d’ici, à ceux qui ont fait le choix de rester dans le pays du premier exil, le pays des anciennes humiliations et des douleurs jamais complètement effacées. A en juger par l’émotion qui a saisi les spectateurs, D’ de Kabal, l’auteur et principal interprète d’Ecorce de peines, présentée à Fort-de-France le 17 avril, a su les toucher au plus profond et, qui sait ? leur apprendre quelque chose d’eux-mêmes qu’ils ignoraient, comme la fraternité profonde qui les lie aux « sauvageons » des banlieues, à l’égard desquels il leur arrive pourtant – quand la violence se met à déferler sur les cités – de tenir des propos dépourvus de toute compréhension.
Les comédiens et les comédiennes sont des êtres insupportables. Narcissiques, auto-centrés, mégalomanes, d’une redoutable fragilité qui se pare de la robe de l’infantilisme le plus indécrottable, on ne peut que les haïr de ne pouvoir faire du théâtre sans eux. Et pourtant… l’adage est bien connu qui affirme que l’on apprécie les gens que pour leurs qualités alors qu’on les aime pour leur défauts. Jandira de Jesus Bauer a été comédienne, ce qui explique pourquoi elle est sans doute assez folle pour s’embarquer avec trois comédiennes antillaises et monter « Les Bonnes » à Fort-de-France. Le résultat est à la mesure de l’entreprise, décalé, iconoclaste et fidèle, inventif et décapant, mais surtout réussi. 


Mise en sc