Danses, Festivals, Musiques
« Bèlè Kouli » de Suzy Manyri : de l’oxymore dansé
— par Daniele Daude —
La
production de Suzy Manyri interpelle en premier lieu par son titre. Si étymologiquement le terme « kouli » se réfère d’abord au travail journalier c’est bien dans le cadre colonial dont nous sommes aujourd’hui encore les héritiers qu’il prend son essor international(1). A ce terme déjà ambivalent vient s’ajouter ce qu’il convient d’appeler le symbole paradigmatique d’une prise de conscience identitaire martiniquaise : le bèlè. Issues du contexte historique des plantations les danses et musiques bèlè sont intimement liées à l’histoire coloniale de la Martinique⋅ Ainsi elles ne peuvent être exécutées ou lues sans la prise en compte de ce facteur constituant⋅⋅ Ceci posé il se dégage une série de questions quant à l’alliance apparemment improbable entre des contextes, des genres, des styles, des musiques, des chorégraphies, des dramaturgies, des mise-en-scènes, des scénographies ou encore des performances que tout semble éloigner⋅ Le pari de la compagnie Suryakantamani de Suzy Manyri est à cet égard audacieux⋅ Sans rendre compte de « Bèlè Kouli » de façon exhaustive nous proposons de dégager deux axes qui constituent des temps forts de la re-présentation : la dramaturgie et la gestion des groupes dans l’espace scénique.

— Par Annick JUSTIN JOSEPH —
— Rencontre de Selim Lander avec Michel Dural —
D’une perspective théátrologique une pièce mise en scène par son auteur suscite de premier abord une certaine méfiance. Le texte, la dramaturgie et la mise-en-scène étant ici liés par une même personne dans des exercices historiquement et artistiquement distincts un regard critique devra interroger tant l’autonomie que l’équilibre des genres. Les composantes théâtrales devant être considérées aussi bien séparément que dans leur interdépendance globale il convient d’interroger les constructions dramaturgiques (texte, musique, conception scénique, régie lumières, chorégraphie etc.) aussi bien dans leur rapport aux thématiques abordées et que dans les moyens scéniques déployés pour y répondre.
Ils arrivent sur le plateau par les côtés de la salle, bras tendus, un revolver au bout de la main. Deux vieux clowns de réforme. L’un, crâne d’œuf au bas duquel pend un postiche élimé de rouquin, l’autre « Bibendum » noirci, enperruqué de faux cheveux noirs, raides et lustrés, sont enfermés dans les bas-fonds d’un théâtre poussiéreux. Ils attendent. Ils parlent pour ne rien dire. Ils se racontent des histoires. Ils attendent un ordre, une mission. Ils parlent et ils attendent un nouveau contrat. Ils affabulent et ils attendent un autre assassinat. Ils mentent et ils attendent, peut-être leur propre mort. Ils inventent et ils attendent. Qu’attendent-ils ? Oh ce n’est pas Godot ! N’est pas Beckett qui veut !

Placés sur la berge d’en face du pont qui enjambe la rivière, vraisemblablement à l’une des sorties de la ville, les spectateurs voyeurs assistent en grimaçant aux délires lucides d’un exclu. Celui qu’a choisi de nous montrer le comédien Jacques Olivier Ensfelder (JOE), extrait du Théâtre de Bernard Marie Koltès « qui exprime la tragédie de l’être solitaire et de la mort ».
Jacques-Olivier Ensfelder ( photo) fait montre d’un grand talent dans «La nuit juste avant les forêts ». Il portait en lui ce texte comme on garde un mystère. Depuis de longues années. Au fond du cœur. Étranger à lui-même et si proche, comme un enfant qui vous déchire de trop vous ressembler. Il porte le texte qui souvent l’emporte. C’est une bataille douce et douloureuse qu’il livre sur scène, dans une chorégraphie amoureuse avec les mots, les sonorités, les registres de langage, la musicalité de la phrase. Les scansions, les découpes qu’il opère dans le texte, se construisent comme témoignages de fidélité et de reconnaissance, comme preuves d’amour à l’auteur trop tôt disparu. Seul en scène il convoque la multitude des rencontres éphémères, des amoures sans lendemains, des déceptions d’une demande infinie dont l’objet toujours se dérobe à ne pouvoir être nommé. Sec et nerveux, violent et précis le phrasé épouse et enlace le propos, lui accorde des plages de repos, de calme précaire sur fond d’inquiétude sans cesse renaissante.
Yvonne Guilon : Comment se présente le texte « La nuit juste avant les forêts » ?
Cette nouvelle saison sera sans nul doute celle des créations. Elles seront au nombre de sept sur les spectacles programmés et cela sans comptabiliser celles de la rencontre théâtre amateur du mois de mai.



Cette aventure, nous raconte les acteurs en rébellion contre le metteur en scène, refusant l’illusion qu’on leur impose au profit de la sincérité passionnelle.
Madame, Monsieur,


