Catégorie : Théâtre

Les dessous du jury du festival de Trinité 2011

— Par M’A —

Plus d’un aura été scandalisé par le palmarès rendu public par Bérard Bourdon lors du Festival 2011 de théâtre amateur de la ville de Trinité. Sentiments d’iniquité et d’injustice dominent. Comme tout se sait très vite dans notre petit pays, nous avons appris que les membres du jury n’étaient pas unanimes, et c’est un euphémisme. Notons d’abord que Daniel Boukman dont la troupe « Key Manman Sent-Lis » présentait la pièce « Agoulou ek Ti sonson » a eu l’élégance de se retirer du jury. Il n’était pas venu à l’idée des organisateurs qu’il pouvait y avoir, comment dit-on aujourd’hui? Conflit d’intérêts? L’auteur n’a pas eu a se prononcer sur la façon dont son texte avait été passé à la moulinette, dépecé et restitué sous la forme d’un galimatias sans queue ni tête. Par ailleurs on a appris que les membres du jury s’étaient réunis plus d’une semaine avant l’ouverture et s’étaient mis d’accord pour exclure du palmarès « Les sardines grillées » au motif que la pièce avait déjà été jouée, notamment à Fort-de-France et qu’il ne s’agissait pas de vrais amateurs, car trop nettement au dessus de la concurrence.

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« Il want it, I’ll get it ! » : que les fruits tiennent la promesse des fleurs !

— Par Roland Sabra —

  Il ne faut pas désespérer de Hervé Deluge. S’il nous est arrivé d’être très réservé à l’égard de certaines de ses productions il nous arrive aussi d’être charmé par son travail. C’est le cas avec sa dernière production «I want it, I’ll get it », présentée fin fin 2011 à Fort-de-France dans le cadre du Festival e Théâtre amateur. Hervé Deluge, s’est emparé non pas d’un texte d’auteur mais d’un ensemble d’écrits destinés à autre chose quel leur mise en scène théâtrale. Il y a là des articles de presse, des extraits de coupures de journaux des commentaires, des réflexions entendues ici où là, des saynètes inventées à partir d’une observation distanciée et critique des pratiques quotidiennes qu’elles soient télévisuelles, radiophoniques, issues du monde professionnel ou de la conjugalité ou d’autres domaines. On assiste alors à un théâtre fait de collages de petites scènes, dont chacune présente une unité discursive et dont l’emboitement génère en creux, détaché du contexte et à un autre niveau de réflexion, un étrillage vigoureux de l’ordre social capitaliste. Tout le contraire d’un discours militant bavard, didactique et empesé.

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La création théâtrale à la Havane: Espace de renouveau de la réflexion identitaire cubaine

 

Alvina Ruprecht[1]

 

Le hasard a fait que j’ai pu voir les œuvres de trois metteurs en scène lors d’un séjour récent à la Havane. Leur manière d’aborder des questions concernant l’identité cubaine – de nouveaux rapports avec les traditions afro-cubaines, la discussion sur l’identité sexuelle et les possibilités artistiques d’un renouveau des sources de la pensée révolutionnaire – a révélé l’importance grandissante de la pratique théâtrale en tant qu’espace de réflexion sur les rapports entre l’individu et la société cubaine en général.

Eugenio Hernandez Espinosa, l’auteur de Maria Antonia, un classique contemporain de la littérature dramatique cubaine, a eu la gentillesse de m’inviter à une répétition de sa nouvelle mise en scène de son œuvre. L’événement a eu lieu au théâtre City Hall, siège de sa troupe le Teatro Caribeño de Cuba. Créée en 1967 par le regretté Roberto Blanco (le Grupo nacional el Taller dramático, devenu le Teatro Irrumpe), la production originale de Maria Antonia a représenté Cuba à la première édition du Festival des Amériques à Montréal (1985). Restée gravée dans la mémoire des artistes de l’époque, elle est devenue un événement mythique dans les annales théâtrales cubaines.

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Deux spectacles du Théâtre Martiniquais sur le Festival Off d’Avignon 2011



Label 2011 ANNEE DES OUTRE-MER

 

La compagnie VIRGUL’ présentera deux de ses spectacles au Théâtre du Chapeau Rouge lors du Festival Off d’Avignon. Il s’agit de la pièce de Jean-Claude Danaud, « Les Sardines Grillées » et d’un spectacle de contes, dans la tradition du conte Créole de Martinique « Ti Chat pourquoi ris-tu ?  » de Valer’EGOUY. Deux occasions de découvrir la diversité de la création Théâtrale de la Martinique d’aujourd’hui.
VIRGUL’ et son directeur artistique Valer’EGOUY sont très actifs dans le domaine de l’enracinement de la pratique théâtrale et de la parole contée dans les quartiers populaires de Fort de France. Ils sont à l’origine de plusieurs ateliers et rendez-vous culturels – Festival Contes et Musique dans la Cité, Lire et Dire pour le Plaisir, Arts et Culture en Vacances, spectacles jeune public, …

Leur dernier spectacle « Les sardines grillées », dont l’amorce du travail a été effectuée par Corinne VASSON avant que Valer’EGOUY ne fasse la mise-en-scène, a rempli cette saison le Théâtre Aimé Césaire sur toutes les représentations. C’est un bon moment de théâtre à déguster avec cœur, le bonheur sera partagé.

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Charline Lucazeau une jeune metteure en scène à l’énergie hors du commun !

par Madinin’Art

    L’atelier théâtre et l’option musique du Lycée de Belle-vue présentaient les 23 et 24 mars dans la salle Frantz Fanon le spectacle « Tu te rencontres » dans une mise en musique de Thierry Marque et une mise en scène de Charline Lucazeau et Valer Egouy. Comme le titre l’indique le thème retenu est celui de la rencontre. Il sera décliné dans une série de sketches empruntés à divers répertoires, de Guy Bedos et Sophie Daumier ( La drague) à Ionesco ( La cantatrice chauve) avec des créations agrémentées d’improvisations. Le rire repose sur le quiproquo, l’ambigüité des situations. Tel rendez-vous à l’apparence galante se révèle être un rendez-vous d’embauche. Le sketch final, une composition d’ensemble avec les comédiens de noir vêtus et portant masque blanc dégage une esthétique assez réussie. L’occupation du plateau par la troupe n’est pas toujours assurée, les trajectoires des uns et des autres ont tendance à être un peu brouillonnes. Comme toujours dans le théâtre amateur l’enthousiasme et la fougue des comédiens sont les éléments les plus sympathiques qui nous sont  donnés à voir.

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« Agôn » de l’irritante Jandira Bauer

–par Roland Sabra —

Jandira Bauer est une metteure en scène irritante. Elle est capable de mise en scène de très grande qualité comme « Psychose 4.48 » de Sarah Kane dont on ne dira jamais assez qu’elle supportait le regard avec ce que les plus grands du théâtre européen en ont fait, notamment Claude Régy et Isabelle Huppert. Excusez du peu. Dommage que si peu de monde en Martinique ait pu s’en rendre compte. Peut-être un manque de repères pour faire le rapprochement ou la comparaison ? Alors pourquoi est-elle si irritante ? Parce que comme tous les artistes qui ont une vision précise de leur travail elle peut verser si ce n’est dans le maniérisme, tout au moins dans une répétition forcenée de tics, d’automatismes de mise en scène qui une fois qu’ils ont été repérés deviennent précisément irritants.

La sensualité, l’érotisme, la sexualité occupent une place importante dans son travail. Elle nous dit par là que nous sommes des êtres de désirs, de passion, de violence, que la jouissance à partie liée à la mort, en d’autre termes qu’Éros fait parfois bon ménage avec Thanatos.

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Ayiti ; youpi !


Par Roland Sabra

— Daniel Marcellin nous conte l’histoire d’Haïti,  qu’il a écrite avec Philippe Laurent et que ce dernier met en scène dans un spectacle justement nommé AYITI.  Comédien longiligne, formé au mime, Daniel Marcelin use non seulement de la souplesse de son expression corporelle mais aussi de ses talent d’imitateur pour entremêler tranches de vies et histoire majuscule. Ses propres enfants, sa femme, côtoient, Napoléon, Toussaint Louverture, Dessalines, Papa Doc et les autres. Il est seul sur le plateau avec pour tout dispositif scénique deux dizaines de valises de toutes sortes disposées en demi cercle, desquelles il extraira au gré de ses besoins quelques accessoires, un parapluie, des sacs à mains, une casquette, des lunettes pour figurer les différents personnages qu’il incarnera.

La question qui ouvre le spectacle et qui restera ouverte jusqu’à la fin, même si des éléments de réponses sont avancés, est celle-ci : Comment « La perle des Antilles, selon l’expression consacrée est-elle devenue un des pays les plus pauvres et les plus inégalitaires qui soient? Comment Haïti  première République Noire, deuxième République du continent américain, a-telle sombré dans le sous-développement et la misère?

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« La carte » de Bernard Lagier

par Roland Sabra —

Une lecture  mise en espace salle Aimé Césaire au lycée Schoelcher


   Dine Alougbine, le metteur en scène béninois en résidence en Martinique présentait le vendredi 03 février une lecture et une mise en espace d’un fragment de la pièce de Bernard Lagier « La carte » dans la salle de théâtre Aimé Césaire du lycée Schoelcher. Les précédentes mises en scènes des œuvres de Lagier étaient des adaptations de textes par forcément écrit pour le théâtre. Ce n’est pas le cas pour « La carte » et la différence est immédiate, dès les premières phrases on perçoit que l’adresse du texte était clairement présente lors de sa création. Il en résulte une clarté et une limpidité dans l’exposition de la situation, qu’on ne retrouvait pas toujours dans le foisonnement, la luxuriance et quelques fois la démesure de « Moi, chien créole », ou de « L’orchidée violée ». Il est possible que la lecture de Dine Alougbine ait aussi participé à cette épure.

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« L’ile aux esclaves » : « Une bonne pièce de théâtre doit poser les problèmes et non les résoudre »

— par Roland Sabra —

   Cette phrase  de Jean-Paul Sarte à propos des « Mains sales » s’applique assez bien au théâtre de Marivaux (1688-1763) qui invite le spectateur à réfléchir sur l’inégalité sociale, sans pour autant réclamer un changement politique. Marivaux n’est pas révolutionnaire. Dans le langage moderne, tout au plus serait-il «  réformiste ». Moraliste est semble-t-il le mot le plus adéquat. Dans l’Ile aux esclaves, qui nous est présentée le 28 janvier à 20 h 30 dans la salle Frantz Fanon du CMAC-ATRIUM, il fait appel sinon à l’humanisme des personnages, tout au moins à leur humanité, à leur raison, ce en quoi il préfigure le siècle des Lumières sans en avoir les audaces politiques. Résumons l’intrigue. En un temps qui fait référence à la Grèce antique, mais que le vocabulaire de la pièce dément, et à la suite d’un naufrage, quelques survivants, maitres et valets, échouent sur une ile dans laquelle les rapports sociaux sont inversés. D’anciens esclaves ont pris le pouvoir et rééduquent les maîtres qui débarquent dans la République en leur imposant l’ancien statut d’esclave tandis que les anciens esclaves sont mis dans la condition de maître.

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« Les Sauveurs » de Ricardo Prieto : le mieux est l’ennemi du bien

—Par Roland Sabra —

Mise en scène de Ruddy Sylaire

 

 

Ricardo Priéto

 

« Dans le décor spectaculaire, le regard ne rencontre que les choses et leur prix. « 

 

Graffiti de Mai 68

 

 

 

 

Une rencontre miraculeuse, en pleine rue, va transformer, bouleverser et finalement détruire une famille en proie aux difficultés ordinaires de la vie. Problèmes d’argent récurrents, des difficultés relationnelles entre parents et enfants, bref le pain quotidien de beaucoup. Croyant faire le bonheur de tous le Père  de la famille Florès,  de sous-louer à M. Fergodlivio  une chambre dans la maison familiale, à des conditions pécuniaires qui défient tout entendement : 20 000 euros par mois. Trop beau pour être vrai! Le locataire va très vite se révéler être un tyran, exigeant, pour commencer que disparaissent de la maison, les petits riens , les petits plus qui rendaient acceptables ce qui ne l’était pas. Doivent donc disparaitre plantes, fleurs, oiseaux, alimentation locale et d’une façon plus générale tout ce qui renvoyait aux coutumes de la maisonnée. Le fils, Jorge Florés, en rébellion contre le père, rien d’extraordinaire à cela, sera le premier à partir, avant que le despote n’oblige le père  à punir, en la frappant, la mère accusée d’avoir désobéi aux ordres du locataire, étape  dans une descente aux enfers qui se conclura par l’élimination physique de la gêneuse!

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« Fabula Buffa » : Bouffon et politique

— Par Roland Sabra —

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  Carlo Boso en personne est venu nous faire la leçon, nous rappeler les origines de la Commedia dell Arte. Avec l’accent italien en prime. Nous avons écouté. Nous avons retenu. Apparue au XVI ème, siècle son origine est sans doute plus lointaine. Dés l’époque romaine il existe une tradition populaire de pantomimes qui ne prendra forme que beaucoup plus tard après moult pérégrinations. Le nom lui-même est sujet à variation : Appelé aussi commedia all’improviso  (à l’impromptu), commedia a soggetto  (à canevas) ou commedia popolare  (populaire), ce genre a reçu ces noms divers par opposition au théâtre littéraire (commedia sostenuta ), apparu en Italie dès les premières années du XVIe siècle. Sa caractéristique essentielle et qui lui donnera le nom sous lequel il nous est parvenu est une fixation, une formalisation des codes scéniques que l’on retrouve presque intacts de nos jours. Les personnages sont eux aussi très normés, deux vieillards, deux jeunes hommes amoureux, deux jeunes femmes amoureuses, deux valets, deux servantes auxquels viennent s’ajouter à l’occasion des acrobates, des danseurs des chanteurs etc.

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« Des incarcérés » : sous un déluge d’avanies

— Par Roland Sabra

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La première qualité d’un metteur en scène est semble-t-il de savoir lire. Savoir lire un texte, de théâtre de préférence. La démonstration par l’absurde en a été faite par Hervé Deluge qui présentait les 12 et 13 novembre derniers « sa lecture » du texte de Christophe Cazalis « Des incarcérés ». Ce texte remarqué, sans être pour autant vraiment remarquable est un huis clos, une réflexion sur le totalitarisme, sur l’enfermement, qu’il soit physique ou identitaire. Un texte ambitieux dans son propos et dont la construction est en adéquation avec ce qu’il thématise. Un texte circulaire, dans le quel l’épilogue renvoie à ce qu’exposait le prologue.

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« Des incarcérés », de Christophe Cazalis, un pari à demi réussi.

Par Selim Lander.

 

 
   

Une bouffée d’oxygène, cette dernière fin de semaine, à l’Atrium. Enfin un auteur et un metteur en scène qui osaient innover, mélanger les genres, au risque, il est vrai, de nous laisser finalement l’impression d’une histoire inachevée et d’une demie réussite.
La pièce met successivement en scène deux univers très différents. D’abord un pays totalitaire, quelque part sous les tropiques, où l’on traque sans répit les résistants, les « anarcos ». Au départ Henri, un médecin blanc, francophone (joué par Patrice le Namouric) est seul, prisonnier dans sa cellule. Il n’a d’autres interlocuteurs qu’une caméra et un haut-parleur quand vient le temps pour lui de passer « au rapport ». Arrive ensuite un deuxième prisonnier, Amédée, un ouvrier noir (interprété par le metteur en scène, Hervé Deluge), qui ne connaît que le créole. Ils sont néanmoins tous les deux pourvus d’un appareil qui leur permet de comprendre et même de parler la langue de l’autre, ce qui vaut de savoureux passages entre les deux langues aux couleurs et aux registres si différents. Après quelques malentendus initiaux, les deux hommes finissent par devenir complices, sauf qu’on comprend au trois quarts de la pièce qu’Amédée est en réalité un agent double, chargé de faire parler Henri.

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De Bleu de Parme à Vert Limon Une lecture infinie

par Christian Antourel —

 Amel Aïdoudi ; une comédienne rompue à l’art de la scène.

 
Brillante idée du SERMAC (Service Municipal d’Action Culturelle), que de poursuivre les rendez- vous « bleu de parme », initiés depuis huit années par Lydie Bétis sa directrice. Cette saison est intitulée Vert Limon, celui dont le poète a dit : « il entre dans la composition de ma chair »
Sur scène Amazigh Kateb, leader et chanteur du groupe « Le Poison Rouge » fils du très célèbre Kateb Yacine immense écrivain, dramaturge et poète algérien qui « demeure un symbole de la révolte contre toutes les formes d’injustices et l’emblème d’une conscience insoumise, déterminée à rêver, penser et agir debout » Et notre Amel Aïdoudi comédienne aux mille facettes de l’indicible a l’émotion, qui dévoile les mystères d’un monde ou le réel n’est qu’un litham qui dissimule l’essentiel. Elle sait se libérer de toute convention rigide qui pourrait l’entraver dans son élan premier. Cette spontanéité procure à sa présence une sincérité vivifiante, quand le répertoire emprunte aux auteurs leur détermination, leurs déchirures soudaines, leurs métamorphoses érudites, articulées sur des textes de Frantz Fanon, d’Aimé Césaire, de Kateb Yacine.

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« le Jour où Nina Simone a cessé de chanter » de Alain Timar

 — Par Roland Sabra —

 
« le Jour où Nina Simone a cessé de chanter » | © Sylvie Biscioni

Alain Timar, le metteur en scène avignonais, est de retour en Martinique. Avec un texte de de Darina Al Joundi et Mohamed Kacimi : «  Le jour où Nina Simone a cessé de chanter ». Alain Timar est un élément du « Tout-monde » cher à Edouard Glissant. S’il y a des lignes de forces dans ses choix, comme Jean Genet; Ionesco ou Samuel Becket dont on a eu la chance d’applaudir à Fort-de-France il y a déjà quatre ans « Fin de partie », il y a surtout dans son travail une ouverture à l’altérité, une sensibilité à la différence vécue comme une nécessité. Il monte des textes en hongrois, en américain, en tagalog, une langue des îles philippines. Il est aussi celui qui révèle, au public français, sept ans avant son prix Nobel de littérature l’écrivain Gao Xingjian.

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« La nuit caribéenne » : la mise en scène est un art difficile.

  — par Roland Sabra —

  Crédits photo : Philippe Bourgade

Comment donner chair à un texte? Le travail ressemble plus à celui du sculpteur qui enlève de la matière qu’à celui du peintre qui en ajoute. Arielle Bloesch en a fait la démonstration avec « La nuit caribéenne » les 22 et 23 octobre au CMAC de Fort-de-France. Confrontée à un premier texte pour le théâtre écrit par Alfred Alexandre, d’une grande force, riche de contenu, il lui a fallu faire des choix. Rappelons l’argument. Deux frères, Frantz et Georges, deux naufragés de l’espérance révolutionnaire caribéenne, de l’aspiration à un monde plus fraternel, sont les épaves échouées sur la grève inhospitalière du libéralisme triomphant. Trahis par les dirigeants du Parti, au sein duquel ils étaient engagés dans le service d’ordre, ils ont sombré avec leurs rêves d’indépendance dans une dérive sans fin vers ce que Robert Castel nommerait comme étant la désaffiliation, une des dernières étapes avant la mort sociale. Alfred Alexandre dit avoir beaucoup penser à Steinbeck et à Faulkner en écrivant ce texte. Comme un hommage. A la trahison des espérances de transformations politiques et sociales vient se surajouter une traitrise, une crapulerie, occultée, maquillée entre les deux frères et qui, remémorée ouvrira sur une issue dramatique..

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« La nuit caribéenne » : présentation

 — Par Roland Sabra —

La nuit caribéenne se joue le vendredi 22 et le samedi 23 octobre à l’Atrium. C’est l’occasion de découvrir un auteur de théâtre et donc un texte. Un texte fort, comme un cri de haine, de désespoir, de fureurs, de mensonges ,de crimes, de viols et de dissimulation. Deux frères, des laissés pour compte des lendemains qui chantent, trainent leur déclassement social entre terre et mer. Le leader maximo du parti pour lequel ils s’étaient engagés dans le Service d’ordre( SO) a passé de petits arrangements avec l’ennemi de classe, et somme toute s’en accommode plutôt bien. Ils font penser à George et Lennie du livre de Steinbeck Des souris et des hommes dont on a vu une adaptation au petit théâtre de foyal il y a peu. Frantz est l’ainé, il a élevé son cadet Georges; il existe un lourd contentieux entre les deux frères et la haine est un ciment solide qui unit ces deux paumés. L’effondrement des repères symboliques qui les soutenaient se coagule avec la disparition de l’espérance d’un monde autre, le renoncement à une attente eschatologique; l’abandon du rêve d’un monde meilleur , d’un monde dans lequel les derniers auraient pu être les premiers.

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« Des souris et des hommes » de John Steinbeck : du bon gros théâtre… de qualité!

— Par Roland Sabra —

C omme souvent Michèle Césaire ouvre la saison théâtrale avec une pièce flamboyante Cette année elle nous offre un en hommage aux loosers du rêve a méricain et à tous ceux qui des aurores de l’expansion à la longue nuit des chômeurs ont trainé leurs guêtres et leur misère sur les bancs de toutes les galères du monde. C’est en 1937, au cours de ce qui est resté la plus grande crise du capitalisme que John Steinbeck publie Des souris et des Hommes. Ce sont avec les raisins de la colère les œuvres les plus connues de l’écrivain, prix Nobel de Littérature en 1962. L’histoire ressemble à celle de Moosbrugger dans « L’homme sans qualité » de Robert Musil paru en 1930, dont elle s’inspire mais en l’étoffant davantage. Le titre quant à lui est emprunté à un poème de Robert Burns «  Les plans les mieux conçus des souris et des hommes souvent ne se réalisent pas ». Le succès du roman est immédiat et vient consolider le statut d’écrivain que Steinbeck avait conquis deux ans auparavant avec Tortillat Flat.

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Ras le bol de la programmation concurrentielle à Fort-de-France !

  — Par Roland Sabra —

« Michèle Césaire, directrice du Théâtre Aimé Césaire à Fort-de-France  et Manuel Césaire directeur du CMAC Atrium à Fort-de-France ne se  rencontrent pas, ne communiquent pas, ne se téléphonent pas, ne se parlent pas. La programmation concurrentielle se poursuit allègrement, comme c’est le cas depuis de longues années. L’affiche peut rester vide pendant des semaines, pas la moindre petite pièce à se mettre sous la dent et puis tout à coup, spectacles à l’Atrium et au Théâtre de Foyal au même moment, c’est à dire aux mêmes dates, aux mêmes heures. Comme si le public était assez nombreux pour se partager! Comme si il n’était pas préférable d’étaler sur l’année les trop rares pièces proposées! Comme si les autorités de tutelles étaient incapables d’imposer une concertation! Faut-il rappeler qu’elles sont elles aussi en concurrence  politique? Il est a parier que même une assemblée unique échouerait à relever un tel défi. A nous de faire entre vaches maigres et (relative) abondance. »

Voilà ce que nous écrivions il y  a quelques temps. Ce n’était que la énième reprise d’une même plainte  formulée chaque année.

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La Monnaie de la pièce

 

— Par Laurence Aurry —

 

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Théâtre Aimé Césaire, les 14 et 15 mai 2010

 

 La troupe Courtes Lignes nous est revenue cette année avec un nouveau spectacle, une comédie. Après Devinez qui ? , une adaptation réussie des Dix petits nègres d’Agatha Christie, elle effectue un retour au théâtre de boulevard qui lui avait valu un franc succès avec Le Dindon de Georges Feydeau, il y a deux ans. La comédie de boulevard est souvent décriée par les puristes ou les théâtreux mais ce théâtre obtient toujours l’adhésion du public. Et lorsqu’il est bien joué, comme c’était le cas, samedi 15 mai, il peut rivaliser avec tous les classiques ou le théâtre sérieux. Donc, il faut s’abstenir de tous préjugés.
La troupe guadeloupéenne, ne déroge pas à la réputation qu’elle s’est forgée. Tous les acteurs se démènent pour notre plus grand plaisir pendant presque deux heures. Une belle performance surtout pour Claude-Georges Grimonpez et David Couchet qui jouent avec talent deux vieux amis à la fois complices et dupes de la fausse comédie. Nous assistons à une incroyable course au mensonge, une escalade dans les explications les plus saugrenues.

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« Sizwe Banzi est mort » d’Athol Fugard, John Kani et Winston Ntshona

— par Laurence Aurry —

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Peter Brook

 Les 14 et 15 mai derniers, le CMAC nous a permis de découvrir, dans la salle Frantz Fanon de l’Atrium, Sizwe Banzi est mort, une pièce d’Afrique du Sud qui nous introduit dans l’univers des townships de l’apartheid. On s’attend avec un sujet grave comme celui-ci à une pièce sombre et tragique. Au lieu de quoi, sans effacer la réalité avec ses injustices, ses brimades, une surexploitation des ouvriers noirs et une sous rémunération, l’absence des libertés et un contrôle permanent de tout et de tous, les auteurs traitent avec beaucoup de tendresse et de dérision la situation délicate de leurs personnages. Sizwe Banzi qui est fiché par la police parce qu’il a eu la malchance de se trouver au mauvais endroit lors d’une descente de la police ne peut plus trouver de travail décent pour nourrir sa femme et ses quatre enfants. Il sera obligé d’usurper l’identité d’un mort pour pouvoir continuer à exister. Bien sûr, cela ne se fera pas sans problème de conscience pour ce pauvre Sizwe. Mais Buntu qui l’a recueilli arrive à le convaincre et lui redonne goût à la vie.

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« Sziwe Banzi est mort » : une soirée éblouissante

— Par Roland Sabra —

habib_dembele-3_400Après une magnifique Antigone qui a enthousiasmé le public martiniquais la semaine dernière, l’Atrium nous offre, Vendredi 14 et Samedi 15 mai , « Sizwe Banzi est mort » dans une mise en scène du légendaire Peter Brook. La pièce écrite au début des années 70 par des auteurs sud-africains appartient à ce qu’on appelle le Théâtre des Townships. Issu des ghettos ce théâtre de par son existence même était un défi politique au régime de l’Apartheid puisque celui-ci avait interdit le théâtre aux populations noires.
Il s’agit d’un théâtre de l’urgence, de l’immédiateté qui a pour objectif de récupérer sur les lieux mêmes du crime raciste une parole que l’on voulait muette. Si le contenu est fortement social, quelques fois politique il n’est jamais militant. On y traite du chômage, des problèmes de l’éducation, de la violence dans la rue et dans la famille, de l’emprise de l’alcool, de la condition de la femme et – tout récemment – du sida. Il s’agit d’un théâtre complet qui sollicite l’intellect du comédien mais qui n’oublie pas de convoquer, de solliciter son corps sur la scène.

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« Sans titre » de Frederico Garcia Lorca

— Par Roland Sabra —

Jacques-Olivier Ensfelder travaille depuis sept ans avec un petit groupe de femmes passionnées de théâtre. Un seul homme durant ce « septennat » s’est aventuré sur les planches. Le metteur en scène récuse la distinction entre théâtre amateur et théâtre professionnel. Il explique que bien des amateurs ont un talent au moins équivalent à certains professionnels. La preuve nous en est donnée chaque année par une troupe subventionnée dont le metteur en scène s’escrime à vouloir jouer, pour un résultat sur lequel on ne s’appesantira pas.

 

La position de Jacques-Olivier Enselder si elle est parfois juste ne l’est pas en toutes circonstances. Son dernier travail en témoigne. Un texte magnifique de Frederico Garcia Lorca «  Comédie sans titre, écrite juste avant la mort du poète assassiné par les troupes franquistes. Pièce de théâtre sur le théâtre. Un metteur en scène répète « Le songe d’une nuit d’été » de Shakespeare dans le théâtre d’une ville sur le point de tomber aux mains des factieux. Quelle est l’urgence? Peut-on continuer à faire du théâtre qualifié de « bourgeois » dans une situation insurrectionnelle.

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Une magnifique Antigone, mise en scène par René Loyon

— Par Roland Sabra,

Belle affiche les 7 et 8 mai à l’Atrium avec Antigone dans une mise en scène de René Loyon. Cette tragédie de Sophocle appartient à ce qu’on appelle le cycle des pièces thébaines, du nom de Thèbes, la cité-royaume, «   la seule cité où des mortelles donnent naissance à des dieux » nous dit l’auteur! Antigone est la dernière de la série après « Œdipe roi « et « Œdipe à Colone » mais elle a été rédigée bien avant, en 441 avant JC. Alors me direz-vous en quoi une pièce écrite il y prés de 2500 ans en Grèce peut-elle intéresser le public martiniquais. Et bien en ceci qu’elle nous conte une histoire qui interroge les liens entre les vivants et les morts, l’opposition entre la loi des hommes et la loi des dieux. Antigone est une résistante. Rappelons l’argument. De la liaison incestueuse entre Oedipe et sa mère Jocaste sont nés deux frères jumeaux, Etéocle et Polynice et deux filles Ismène et Antigone. Enfants maudits s’il en est, parmi les enfants maudits! Les fils héritent du pouvoir, chacun devant régner une année à tour de rôle.

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Sotigui Kouyaté, comédien malien

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Dans le Mahabharata, créé par Peter Brook à Avignon en 1985, il jouait Bhishma, celui qui possède et transmet la sagesse. Vêtue d’un boubou blanc, son immense silhouette se découpait sur les pierres, dans la nuit magique de la carrière de Boulbon, où le spectacle se donnait. C’était la première fois que l’on voyait en France Sotigui Kouyaté. Ce grand comédien africain est mort samedi 17 avril, à Paris, à l’âge de 73 ans, d’une maladie pulmonaire.

Sotigui Kouyaté se définissait comme un homme de la culture mandingue, d’où viennent les griots. De parents guinéens, il est né le 19 juillet 1936 à Bamako, au Mali, puis il a vécu au Burkina Faso. « La première famille de griots, ce sont les Kouyaté, je suis un de leurs descendants, disait-il au Monde, en 2001. En Europe, on ignore ce que veut dire griot : pas seulement un conteur, mais tout à la fois le dépositaire de la mémoire de son peuple, mémoire uniquement orale, un maître de la parole, un généalogiste qui connaît toutes les ascendances de chacun, le maître des cérémonies, gardien des traditions et des coutumes, et, surtout, un médiateur.

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