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Monchoachi dans sa Fugue vs Fug

— Par Térèz Léotin —

Dans sa Fugue vs Fug, Monchoachi prévient. Il a nommé « dévoiement, une fugue ». C’est, précise-t-il « un décrochage, d’ampleur inégalée, une rupture avec tous les modes antérieurs d’habiter la terre (en occident) …. une rupture que nous appréhendons plus encore au niveau de la langue.» L’ouvrage s’intitule aussi Lémistè 3. Il se trouve être le troisième volume d’un cycle, la suite des deux premiers chants Lémistè 1 et Lémistè 2.

L’auteur « en chaque son tire gravité force toute chose », on poursuit avec lui une quête initiatique pour que « les grappes se répandent invisibles sous la feuillée, s’égoutte l’eau versée sans lasse dans les cribles ò Danaïdes, escartèle, eslaise, esmeut, esbaïe, esgaille, essore, e s s a u r e, et les grappes se répandent invisibles » dans des « espaces déclos que monde éclos ». Des mots comme mouve, délèz, alaiz, blaiz, etc. etc…. se moquent de l’orthographe quelle qu’elle soit …peuplent l’ouvrage dans lequel les mots créoles habillent l’œuvre entre-maillée de mots français, latins, grecs et autres qui se rient du monde en toute liberté, dans un vocabulaire foisonnant qui sans les voyelles nous aurait laissé sans voix.

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Celui qui se réfugia dans la montagne. Monchoachi.

— Par Widad Amra

S’il est des personnages qui avancent dans la vie, entourés d’un halo de mystère, par leur rapport à l’existence, par ce qu’ils donnent peu à voir, peu à entendre, mais tellement à comprendre, il en est un qui incarne cette alchimie mystérieuse, le poète Monchoachi.

Dans le film d’Arlette Pacquit : « La Parole Sovaj », présenté en avant-première à Tropiques – Atrium le 30 mars dernier et en première diffusion sur Martinique la 1ère, le 6 avril, André-Pierre Louis, alias Monchoachi, nous est présenté dans toute sa complexité et toute sa clarté. Chose étonnante, l’homme solitaire est descendu de la montagne du Vauclin, lui qui refuse tout projecteur, cultive l’absence plus que la présence. Il nous est apparu dans sa simplicité, son apparente fragilité, son sourire malicieux, sa modestie, son élégance.

Ce documentaire d’une belle poésie, est un voyage qui brise les codes habituels pour offrir ce que la poésie a de plus éclaté et de plus rassemblé, de plus libre, de plus primitif, voire subversif, dans ce qu’elle offre à voir de ce qu’est la beauté.

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« Partition noire et bleue » (Lémistè 2) de Monchoachi

lemiste_2Le premier volume du cycle Lémistè, sous-titré « Liber America », était une approche par la parole de l’univers culturel et langagier du monde amérindien, à travers le choc entre les cultures européenne, africaine et caraïbe, qui se traduisit notamment, du point de vue de la langue et donc de la littérature, par l’invention à travers le créole d’une langue particulièrement sensuelle.
Dans le présent volume, Partition noire et bleue continent africain, sa puissance symbolique, son énergique vitalité. La grande originalité de la prosodie de ce livre, –où l’incantation la plus mystérieuse et la réalité langagière la plus immédiate et triviale répondent par la parole poétique au génie tragique de l’Afrique —,est de métaphoriser par une langue particulièrement riche et parleuse ses rites, ses masques, toute cette force merveilleuse qui « être relié par toutes les fibres du corps aux puissances de l’univers ». Monchoachi magnifie le Continent noir et ses riches cosmogonies face à l’emprise étouffante et froide de « la rationalité rapetissante, standardisante, nivelante, le fatalisme morne généré par un culte obtus rendu à l’évolutionnisme… »

Un livre qui s’inscrit dans le continuum d’une incroyable et fascinante entreprise langagière.

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Parution de Lémistè 2, de Monchoachi

monchoachi-2Le mardi 19 janvier 2016 se tenait la soirée d’ouverture des Rencontres pour le lendemain à la Médiathèque du Saint-Esprit, autour de la vie et l’œuvre de Monchoachi. Le public, nombreux et attentif, était heureux de re-découvrir cet immense poète qui se fait discret depuis de nombreuses années, se retirant dans les hauteurs du Vauclin pour mener son œuvre poétique.  Avec son aimable autorisation, nous publions ici les poèmes qui ont été lus ce soir-là. Ils sont extraits de Lémistè 2, en librairie à partir du 29 mars. Bonne lecture !
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XV

Mâle / Fimelle

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Sur « Lémistè » de Monchoachi

 Ce livre ci est frère de très grandes sommes poétiques…

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— Par  Yves Bergeret, poète —

Le titre en créole pousse d’emblée le lecteur loin de la stable lumière apollinienne. Lémistè : Les mystères. Le livre entraîne le lecteur dans un très âpre tourbillon de gestes rituels et surtout de longues formules sacrées antillaises. Le livre est paroles en tous sens, extrêmement vivantes et actives. Presque aucune contemplation, presque aucune strophe où le temps s’arrête en s’ouvrant vers une sorte d’infini ou d’éternité. Tout ici est proche, odorant, sensible, tactile. Pas d’horizon lointain, pas d’infini océanique, pas de grands ciels. Mais le livre entraîne toujours son lecteur dans l’intensité d’un rite sacré dans un lieu cultuel ou d’un geste sacré de la vie pratique dans la cour et même dans le secret de la maison. Le livre entraîne son lecteur dans la proximité mobile de ce rite ou de ce geste. Continuels gros plans. Nous voici dans les Antilles, dont presque chaque habitant se rappelle la déportation esclavagiste de ses ancêtres.

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« Lémistè » de Monchoachi

Monchoachi

à François Boddaert, Editions Obsidiane

 

…Je vous expose ma visée pour Lémistè dont Liber America que vous avez entre les mains, constitue un premier volet : il s’agirait d’un long parcours à travers les mythes, les magies, les rituels cérémoniels qui ont fait la présence des différentes parties ou lieux du monde, présence recouverte totalement de nos jours par la Civilisation : Amérique, Afrique-Océanie, Europe-Asie (se sont mes découpes), non évidemment dans le simple but de rapporter ceux-ci (je ne suis pas ethnologue), mais en les jouant, en les déplaçant, en les retournant, voire en les subjuguant, ceci en vue d’ébranler la vision calamiteuse du monde charriée par la dite Civilisation.

Comme tout poète, je n’ai à ma disposition pour ce faire que la langue, ou du moins j’en ai deux : la créole et la française, ce qui me permet de jouer des facultés de l’une et de l’autre, la française plus portée aux généralisations, la créole plus rythmique, plus sonore, plus imagée, plus sensible, plus traversée aussi par le souffle, non de l’esprit, mais des esprits et des magies, ce qui ne constitue pas un moindre recours pour nous ramener à une vision du monde sensible où toutes choses vivent et pas seulement l’homme.

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«Le monde tel qu’il est» de Monchoachi

 Une invite au débat

—par Roland Sabra —


Le débat commence. Monchoachi publie ces jours- ci un petit opuscule  » Le monde tel qu’il est« , d’un cinquantaine de pages qui se veut une réponse à celui de Chaoiseau et Glissant «  Quand les murs tombent« . Ce dernier écrit dans l’urgence d’une situation politique que le nécessitait, la création ignominieuse, d’un « Ministère de l’Immigration et de l’Identité Nationale » présentait les avantages et les imperfections d’un long tract qui permettait d’organiser des débats. Ce qui avait été le cas, dans plusieurs endroits du monde et notamment en Martinique. On se souvient en effet que des élèves du lycée Schoelcher, des étudiants de l’IUFM, des syndicalistes s’étaient emparés du texte et en avaient débattu avec les auteurs. A partir de la dénonciation de ce qu’ils considéraient comme une infamie, Glissant et Chamoiseau portaient sur la place publique la question de la nature d’un futur état  pour la Martinique. Etat-Nation ou Etat-Relation?

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Café littéraire & conférence inaugurale de Mai.Poésie à Foyal

 Le mardi 16 mai 2023 au Patio19 et à Tropiques-Atrium

17h : Café poétique et dédicaces, en partenariat avec la librairie Kazabul au Patio19

Avec les auteurs et auteurices : Ar Guens Jean Mary, Witensly Lauvince et Lyonel Trouillot (Haïti), Stelle Dibandi, Fanfan Méryt, Nathanaël et Roger Parsemain (Martinique) Hector Poullet (Guadeloupe).

Patio19 :19 Rue Garnier Pagès, Fort-de-France 97200, Martinique

19 h : Tropiques Atrium

  • Conférence inaugurale présentée par Claude Dauphin, Professeur émérite de musicologie à l’UQAM et chercheur associé à l’OICRM : De la subversion et de la poétique : Musicaliser la poésie chez les Indigénistes haïtiens.

  • Récital poétique « De la poésie comme de la musique – Pwézi sé mizik, mizik sé pwézi »: avec Nelson-Rafaell Madel et Christophe Césaire- Textes choisis par Faubert Bolivar

Mercredi 17 mai

9h30-11h30 : La poésie est dans la rue-Pwézi an lari-a

  • François : Stéphane Martelly, Hermas Gbaguidi / Stelle Dibandi
  • Robert : Max Rippon, Christina Goh/ Eric Pézo
  • Saint-Esprit : Claude Dauphin, Daniel Berté, Gérard Lamoureux, Dieulermesson Petit-Frère, Ar Guens Jean Mary, Patricia Latour, Lyonel Trouillot
  • Saint-Pierre : Michel Ducasse, Françoise James Ousénie/ Malik Duranty
  • Sainte-Luce : Francis Combes, Stéphanie Melyon-Reinette /Richard Bunod
  • Collège Petit Manoir, Lamentin (8h-11h) : Hector Poullet, Françoise Foutou
  • Collège Jane Nardal, Diamant (8h30-10h30) : Roger Parsemain, Witensky Lauvince
  • 14h-16h / Centre Pénitentiaire, Ducos : Lolita Monga (quartier des femmes), Mehdi Krüger (quartier des hommes)

16h-18h : Martinique Poésie Tour-Pwézi ka Woulé 1/3

(Sur inscription auprès du secrétariat du festival) Saint-Esprit-Ducos

19h : Hommage à Monchoachi

Médiathèque Alfred Melon-Dégras (AMD), Saint-Esprit

  • Projection “Monchoachi, La parole Sovaj”d’Arlette Pacquit
  • Récital de morceaux choisis de Monchoachi par Faubert Bolivar, Nicole Cage, Malik Duranty, Simone Lagrand, Arlette Pacquit/ Ponctuation musicale Ali Boulo Santo Cissoko (maître de kora)
  • Lancement du dernier titre de Monchoachi : « Retour à la parole sauvage » (Ed.

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« Mai.Poésie » 2ème edition

Du 08 au 14 mai 2023 PoésieCommune
Du 15 au 20 mai 2023 Festival Mai Poésie

Maintenir la poésie
« Et nous entendons fidèles à la poésie, la maintenir vivante :
comme un ulcère, comme une panique,
images de catastrophes et de liberté de chute et de délivrance,
dévorant sans fin le foie du monde. »

Aimé CESAIRE, Tropiques 8-9, Octobre 1943

— Présentation par Faubert Bolivar, Directeur artistique —

La première édition de « Mai-Poésie » a été une réussite à laquelle ont fortement contribué la diversité et la qualité de nos partenaires dont chacun.e a su faire sienne l’idée du Festival.

BALISAILLE est sur la bonne voie pour réussir son pari de « re-créer les conditions propices sinon à un ré-enracinement du moins une ré-institutionnalisation de la poésie en terre martiniquaise ». Nous espérons parvenir à faire à la poésie toute sa place aussi bien dans le cœur et l’esprit de celles et ceux qui nous suivent, mais surtout dans le paysage culturel et institutionnel de l’île. Aussi, de l’avis de toustes la première édition a-t-elle été un véritable succès dont nous pouvons nous inspirer pour la suite.

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Analyse de «  La Désapparition » de  Gerry L’Etang

— Par Fernand Tiburce Fortuné —

« A un moment où la société est ébranlée par des événements décisifs, il paraît inévitable que la création littéraire s’en empare pour interroger les diverses facettes de la transformation en train de se produire »

(Maria Graciete Besse).

La désapparition, ce roman (tantara) de Gerry L’Etang n’est pas anodin. Il est complexe, surprenant, déroutant, apparemment inintelligible, parfois terrible. Je me suis posé deux questions après l‘avoir lu :

Faut-il le mettre entre les deux oreilles de certains ?

Faut-il le mettre entre les mains de tous ?

Cet ouvrage de 123 pages, comprend 14 chapitres et, à la page 107, un remarquable poème qui tant sur le rythme que sur le fond -à ne pas en douter- résume la pensée de l’auteur.

Comment mieux décrire avec autant de violence, survolée par un humour grinçant, ce chaos et cette désagrégation qui nous menacent? Comment mieux décrire, dans une actualité perturbante, nos divisions, nos déchirures, nos illusions «malpapaye», nos combats perdus et peut-être nos regrets?

Comment mieux étaler, dans des scènes incroyablement cruelles, nos turpitudes, nos incohérences, notre simulacre d’unité et de vivre ensemble.

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Du 26 au 28 mai 2022, c’est mai poésie dans l’île d’Aimé Césaire !

Un festival d’un genre majeur en Martinique du côté de la commune de Saint-Esprit organisé par l’association Balisaille. Cet évènement articulé autour du thème « ‘’Parler poésie’’ a bénéficié du soutien de la DAC martinique, de la ville du Saint-Esprit qui a su faire de ce festival une activité phare de la commune à l’approche de sa fête patronale, et de la ville de Fort-de-France qui a mis à notre disposition la maison d’Aimé Césaire pour accueillir notre soirée du 27 mai 2022, en hommage à Jacques Stephen Alexis », a fait savoir le président de l’association, Daniel Boyer-Faustin tout en insistant que ce thème est tiré d’un texte inédit du grand poète Monchoachi.

Lire aussi : Widad Amra :  » Connaitre deux pays, deux histoires, c’est aller à l’universel »

Il a indiqué que cette grande fête de la poésie accueillera des auteurs de renommée internationale. Parmi eux, Joby Bernabé, Francis Combes, Raphaël Confiant, Patricia Latour, Lyonel Trouillot.

Qui sera l’invité d’honneur pour déployer les ailes de la poésie en ces instants ?

« La poétesse Widad Amra est notre invitée d’honneur, une manière pour nous de saluer le courage et l’audace de cette femme qui a tenu, parallèlement à son activité d’enseignante, à parler la poésie ».

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Balisaille : parler la poésie

Mai.Poésie / Festival d’un genre majeur 26-28 mai 2022 au Saint-Esprit

 Liminaire

Aimé CÉSAIRE : ce nom seul suffirait à faire de la Martinique une terre de poésie. Le rayonnement planétaire, la puissance du verbe, la magnificence des images de l’auteur du « Cahier d’un retour au pays natal », en font l’un des plus grands poètes du vingtième siècle. Cependant, paradoxalement, pendant que le roman, le théâtre, voire le conte ou le slam tiennent le haut du pavé, la poésie y paraît délaissée.

MONCHOACHI, en dépit de la force tellurique de sa poésie, n’est pas connu au-delà de certains cercles d’initié.e.s, et n’en demande pas davantage puisque volontairement il s’est retiré sur les hauteurs du Vauclin, d’où il ne serait sorti pour se montrer en public que deux fois en dix ans.

S’il ne s’agit nullement de dire que, comme l’auteur de « Lémistè », la poésie se fait rare au pays de Césaire, il est néanmoins évident que d’un point de vue strictement institutionnel celle-ci a encore à faire sa place dans le paysage culturel de l’île.

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Les quatre marqueurs et les trois impératifs

— Par Ali Babar Kenjah —

Vous avez dit « Changer de paradigme » ?

I. Jé-a bout !

Comme dirait Monchoachi, traduisant « Fin de partie » de Beckett : « Jé-a bout ! » Le déboulonnage de la raison politique postcoloniale et de sa gesticulatoire stérile par la contestation populaire, marque une étape majeure dans la décomposition politique de la société martiniquaise. Même si la contestation ne doit pas masquer l’enkystement d’un vote assimilationniste xénophobe qui doit nous inquiéter, et qu’il faut combattre. Mais l’expression majoritaire au premier tour a traduit une mobilisation de la jeunesse, du peuple et de la masse des victimes de la macronie, pour une transformation de la société.Ce message des urnes, s’il devait être confirmé lors des prochaines législatives, mettrait alors au premier plan de l’agenda politique la validation populaire (référendum) d’un programme de transition écosystémique. En vérité, la transformation urgente de la société martiniquaise exige de mener à bien trois révolutions : une révolution écologique, une révolution sociétale, une révolution politique.

La révolution écologique nous est imposée par la réalité planétaire du réchauffement climatique, par la fragilité de notre matrice micro-insulaire maltraitée et la nécessité stratégique de pourvoir autant que possible à nos différents besoins.

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Palmarès de la 16ème édition Du Cinémartinique Festival 2022

Compétition Court Métrage

Les lauréats

Prix Révélation Court-Métrage :

« Mal Nonm » de Yannis Sainte-Rose (Martinique)

Prix du Public Court-Métrage : 

« Dorlis» d’Enricka MH (Martinique)

 

Prix du Meilleur Court-Métrage Antilles-Guyane :

« Ecoutez le battement de nos images » d’Audrey et Maxime Jean-Baptiste (Guyane)

 

Prix du Jury Court-Métrage : 

« Tjenbé Red » de Chloé Léonil (Martinique)

 

Mention Spéciale du Jury Court-Métrage :

« Twa Fey » de Séphora Monteau et Eléanore Coyette (Haïti/France)

16ème édition Compétition Documentaire

Les lauréats :

 

Prix du Meilleur Documentaire Antilles-Guyane : 

« René Maran, le premier goncourt noir » de Fabrice Gardel et Mathieu Weschler (France)

Prix du Jury Documentaire : 

« La Opcion Cero» de Marcel Beltran (Haiti)

Mention Spéciale du Jury Documentaire :

« Monchoachi, la parole sovaj» d’Arlette Pacquit (Martinique)

La Bourse du Festival

Le lauréat

« Zwazo Paradi » de Bénédicte Dubuisson

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Nous ne voulons pas de votre « mesure »

Par Monchoachi

Le corps de l’homme est le nœud : il est l’originaire, le lieu natif d’où tout se met en mouvement et se propulse. Il est le support sur lequel tout vient se nouer. Traversé par la parole, il est la matrice en laquelle s’articule son rapport au temps, à l’espace et à la terre. Il est l’ultime où tout se joue. Il ne faut donc pas s’étonner qu’à chaque phase importante de l’évolution du monde, le corps constituât l’enjeu majeur, la mise décisive.

Déjà le christianisme, avec le génie particulier qui est le sien avait à juste titre saisi ce qu’a de véritablement crucial le corps. Il s’en est d’emblée emparé comme emblème; mais un emblème chargé d’ambigüité puisqu’il s’agit d’un corps martyrisé, châtié. Il l’a ensuite, de nouveau en toute ambigüité, métamorphosé en corpus dei (corps de dieu), ce qui constitue pour le moins une manière de l’absenter car le dieu de la religion de l’Unique n’a pas de corps, autrement dit: ou wèy, ou pa wèy, disparèt’ pran-y. Toutefois, l’exhibition du corps de Jésus, complaisamment orchestrée tout au long par l’art occidental du Moyen-âge, permettait par ailleurs au christianisme d’étendre son emprise à toute la terre, en particulier à la terre dite « païenne » (en laquelle, ne l’oublions pas, l’Europe du Moyen-âge se trouve incluse); autrement dit, d’étendre son emprise partout là où le corps est incontournable comme axe accordant l’homme au monde.

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Fugue vs Fug

— Par Mireille Pierre-Louis —

Depuis quelques temps, le poète Monchoachi a entrepris une longue investigation poétique, Lémistè, visant à mettre en évidence le projet dévastateur d’une civilisation, ainsi nommée « Occident », au regard d’une manière d’habiter la terre. Après deux premiers volets consacrés à l’Amérique et à l’Afrique, vient de paraître aux Editions Obsidiane, « Fugue vs Fug » consacré à l’Europe.

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Lémistè, un chantier poétique qui propulse le lecteur dans la beauté et la présence des mondes magiques, présence qui subsiste encore ici et là, mais recouverte par des siècles d’hégémonie d’une civilisation occidentale (ratio) dévastatrice.

Lémistè, n’est pas une ode au passé, mais une quête éminemment actuelle de la voie de l’homme, déviée vers une trajectoire funeste.

Après les deux premiers volets consacrés à l’Amérique indienne (Liber America) et à l’Afrique noire (Partition noire et bleue), le troisième opus de Lémistè, Fugue vs Fug, nous conduit maintenant en Europe.

L’Europe, et en particulier en son sein la Grèce antique, où prit naissance, voici quelques 2500 ans, la civilisation occidentale qui dans les Temps modernes, et à partir du tournant que constitua la découverte de l’Amérique, s’est étendue à la terre entière, de sorte qu’en elle se situe à la fois la provenance des traits essentiels du monde d’aujourd’hui, et les nœuds et articulations à partir desquels peuvent s’esquisser des voies menant à un au-delà de ladite civilisation.

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En ces temps obscurs…

Par Marie- Laurence Delor

Le fait le plus marquant de la période, pour l’observateur avisé, c’est l’irruption dans le débat public, grâce aux médias sous pression des réseaux sociaux, de problématiques régressives jusque là marginales, portées par une nébuleuse rouge-vert-noir (1). La notion de « régression », telle que nous en usons ici, n’est pas réductible à son sens courant d’opposition au « progrès ». Si elle recouvre l’idée d’un retour en arrière, d’une certaine façon proche de la psychologie expérimentale et de la psychanalyse (2), elle réfère surtout ici à des tendances inquiétantes et à leur banalisation à la faveur du silence des politiques et de la capitulation des intellectuels. Nous en avons repéré deux, à notre avis, principales :

1. La dictature de la croyance

La dictature de la croyance telle qu’elle se présente aujourd’hui est à la jonction du narcissisme libéral (3), de la crise de la politique et de l’explosion des réseaux sociaux. Des réseaux sociaux qui fonctionnent toujours plus selon le faux postulat d’égalité en dignité et en vérité de toute parole : une corruption de la liberté d’expression et de la démocratie.

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Nous habitons un corps

— Par Monchoachi —

Habiter un corps est le propre des humains. L’homme habite un corps comme une demeure où il accueille ses expériences du temps et de l’espace, et plus que tout, la parole, toutes choses qui vont lui permettre de se projeter pour s’accomplir. Cependant, tous les hommes n’ont pas, sur le même mode et avec la même intensité, ce sentiment d’habiter un corps car l’épreuve du temps, les traces dont il imprègne le corps et qui vont animer la langue, n’est pas la même pour tous.

Ainsi, nous, Antillais et Guyanais habitons un espace qui porte un passé dont la présence ne peut être reléguée, puisqu’elle marque le début des Temps modernes, et que c’est dans cet espace que l’Occident a ancré et dévoilé son projet de mainmise sur la terre entière. Cet espace que nous habitons porte donc cette empreinte particulière et déterminante, et il va continument accuser cet effluve et le propager en toutes ces vibrations. Le temps qui nous porte est aussi chargé de nos expériences propres et surtout de notre épreuve singulière s’agissant du corps.

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Ni Assimilation , ni Créolisation. Pour le Marronnage

— Ali Babar Kenjah —

Le récent débat pugilistique qui a médiatiquement opposé Jean-Luc Mélenchon à Eric Zemmour, a confronté les tenants de deux visions de la relation de la France à son ancien empire colonial, et aux migrations des indigènes qui en découle. Nostalgique de l’Empire,Eric Zemmour, reste fermement attaché aux vertus du « Nos ancêtres les Gaulois » et défend l’Assimilation comme principe d’intégration des étrangers dans la République.L’Esprit critique des Lumières, incarné par un Jean-Luc Mélenchon paradoxalement inspiré par Édouard Glissant, lui répond qu’en matière de société multiculturelle, l’expérience historique place les sociétés antillaises au premier rang d’un idéal souhaitable pour promouvoir le « vivre ensemble » (sic)… Du point de vue pugilistique, je prononce un match nul. Vraiment nul. Du point de vue intérieur de la colonie Martinique, je récuse ici tout éloge de l’Assimilation ou de la Créolisation comme proposant des modèles culturels souhaitables quant à leurs bénéfices humains, ou en terme de « paix sociale ».

Nous Antillais, sommes les meilleurs spécialistes de l’Assimilation à la française. Au même titre que près de cinq millions de citoyens de la République issus des derniers confettis de l’Empire.

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« Labimsolo » de Daniel Boukman, chez K.Editions

Labimsolo (équivalant à spleen en français) est une expression du créole martiniquais quasiment aujourd’hui disparue et dont l’emploi littéraire peut en permettre comme une résurrection… Quand, pour annoncer la publication de ce nouveau recueil, j’ai utilisé le terme de haïku, je ne cherchais pas à reproduire la rigueur métrique de ce genre poétique japonais ; je n’en ai épousé que la concision de mots assemblés pour dire – à voix basse – ce qu’ils disent.

Ecrire des haïkus suppose un détachement de l’auteur ; tel ne fut pas du tout l’état d’esprit présidant à l’écriture de LABIMSOLO, comme le révèle la préface que voici :

An tan lontan, té ni an jaden oti, anpami an lablanni flè santibon, an bann zwézo tout koulè té ka bay lavwa bay lavwa. Pannan tan-an, anbafey, an laposésion zòti té ka aladous vansé-vansé, paré pou toufé jaden-an oti an bann zwézo tout koulè té ka bay lavwa.

Alos, andidan tjè-mwen, an pawol nef wè jou pou dénonsé jes-makak, kouto dé lanm, manti-mantè, fidji masié… an pawol nef pou gloriyé nonm ek fanm vayan, wosé wo flanm flanbo libèté.

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Martinique : Histoire & Mémoire, statues de Schœlcher et de quelques autres…

Récapitulatif provisoire de 86 contributions au débat

Sur l’abolition de l’esclavage : fausses querelles et vrais problèmes — Par Édouard de Lépine —

S’appuyer sur une mémoire partagée pour bâtir une vision ambitieuse de l’avenir — Par Olivier-Ernest Jean-Marie —

Casser les statues de Schoelcher est une démarche qui méconnaît une part de l’histoire de la fin de l’esclavage!Par Gilbert Pago —

Points de vue sur un évènement marquant de ce 22 mai 2020 France Antilles du 22 mai 2020 :  l’événement à Fort-de-France

A bas Schoelcher ! Alors faut-t-il sortir du cocon de l’état-providence français ? — Par Jean-Marie Nol, économiste —

Le débat ce n’est pas ça ! — Par Fola Gadet, écrivain et universitaire

Schoelcher : détruire une statue est-il toujours illégitime ? — Par Catherine Bertho Lavenir —

Une intéressante contribution au débat Tribune de Myriam Cottias

Mauvais geste, saine révolte Déclaration de Louis Maugée après le saccage des statues de Victor Schœlcher

Statues de Schœlcher : n’y aurait-il aucune oreille ? — Par  Anique Sylvestre, écrivaine —

La statue foyalaise de Schoelcher : une œuvre d’anciens esclaves. — Par Yves-Léopold Monthieux —

Cet enfant qui a grandi… — Par Ali Babar Kenjah —

Blablas, leçons et donneurs de leçons.

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Politique, cris et tâtonnements

— Par Frantz Succab —

Les récentes élections municipales et communautaires ont provoqué à chaud des sentiments divers, de l’optimisme au dégoût en passant par le doute. Les commentaires de presse ont suivi. Ils ont souvent usé du stéréotype de « dégagisme » pour décrire l’apparition de nouvelles figures à la place de certains caciques de la vie politique.

On se dit qu’il faut que la Démocratie respire, mais respire-t-elle bien chez nous ? On sent son souffle court. La société, du côté de sa composante la plus jeune, a priori la moins conservatrice, cherche de l’air, mais loin des bureaux de vote. Cela n’empêche pas ce constant prêchi-prêcha républicain et démocratique qui sonne de plus en plus creux par déficit d’ouailles. Loin de célébrer ici la victoire de l’abstention, qui ne serait en réalité la victoire de personne, nous la constatons simplement. C’est un fait persistant, pesant, qui depuis des lustres nous procure indirectement une représentation politique par défaut. Désertion ou fatalisme ?

Au lieu de se contenter de s’en réjouir ou de le regretter, n’est-il pas temps de chercher à comprendre ce que dissimule la vie politique en Guadeloupe ?

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La Martinique parle le présent

— Par Monchoachi
« A travers l’action RVN (Rouge Vert Noir) de ces dernières semaines, la Martinique parle le présent. Elle le parle doublement : elle parle le présent de son histoire coloniale. Elle parle en même temps le présent de la terre entière dont l’espace est au même titre dévasté par un technicisme productiviste débridé et le temps embrigadé dans l’historiographie, pressuré par l’exigence d’un développement (d’un progrès) dont la seule destination est la marchandisation complète du monde, son nivellement et son engloutissement dans le totalitarisme technologique. Elle le fait dans un langage qui lui est propre faisant écho à un contexte qui lui est propre : celui d’un colonialisme qui s’exaspère avec la cristallisation de deux phénomènes parallèles : d’un côté une jeunesse émigrée massivement, en quête d’emplois vers la métropole coloniale (un peuple une nouvelle fois déraciné, désertant sa terre, mué en ombre) ; d’un autre côté, une active colonisation de peuplement qui ne cesse de se renforcer depuis deux décennies. S’ajoute à cela, le resserrement colonial d’un encerclement administratif et répressif.

Par conséquent, s’entêter de renvoyer à tout prix à l’histoire et à ses chères études ce qui parle le présent avec une telle insistance, c’est, contre toute évidence, prendre option de tourner la tête, de se voiler la face pour ne pas voir la présence de ce présent certes suffoquant, continuer de s’abuser à bon compte et préférer en quelque sorte se raconter des histoires.

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« Clameurs » : l’oratorio du mathématicien trompettiste

Également professeur de littérature, l’Antillais Jacques Coursil [avait] enregistré « Clameurs ».

—Par Francis Marmande Publié le 04 mai 2007 —

Belle gueule, rire sonore, 69 ans, lunettes à la Linné et dreadlocks enneigées, Jacques Coursil publie un oratorio. Professeur de littérature à Cornell (Etats-Unis), docteur en mathématique, il l’intitule Clameurs. Composée en 2006, c’est une oeuvre de pure jeunesse. Coursil est antillais, né à Paris en 1938, fidèle aux convictions de son père : la poésie, les luttes..

Clameurs n’a rien à voir avec les clichés antillais. Clameurs ne relève pas du jazz, mais ne peut jaillir que de purs musiciens de jazz. Clameurs n’est pas « world ». C’est une oeuvre de jeunesse, un souffle, une idée : « Tu vois, on a beaucoup moins vieilli que les jeunes ne sont jeunes. »

T-shirt noir sous veste noire, binocles de grand lecteur, Coursil remonte le temps. En novembre 1968, il fait la couverture du numéro 2 d‘Actuel. Aucune nostalgie : la passion pure de la littérature, de la musique, de la poésie, de la linguistique, de la mathématique formelle, de l’informatique.

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En souvenir de Jacques Coursil

Son mot à José Hayot

Cher José,
De loin, tout est calme ; de près, ça se complique toujours un peu. C’est vrai qu’au demeurant, ça a l’air limpide ; je joue de la trompette, j’écris et cause ici et là devant des assemblées studieuses et pleines de bonnes intentions. 
Ma promesse d’écrire un papier sur la SPIRALE de Frankétienne est une montagne de craie dont les galeries creusées me retombent souvent sur la tête. Je comprends le peu d’empressement des spécialistes ; à quoi bon emprunter un chemin si complexe qui vrille si profond ? Quand j’en aurai fini avec cette bagarre de plume, tu seras, j’en suis sûr, encore plus ébloui par Frankétienne. Ce type est plus que fou, il est sage. 
La poétique de nos auteurs (Glissant, Frankétienne, Monchoachi) est, avouons le, plus difficile qu’une spirale logarithmique, mais elle est en même temps, si directe, si près du lecteur, si sensible et touchante ; cette double propension ne me laisse aucun répit. Les commentateurs, pour la plupart biographes, embrassent le héros et négligent le texte ; bref, ils journalisent et ne me servent à rien. 

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