Année : 2018

L’autre Césaire : Suzanne, lumineuse dissidente

— Par Dominique Daeschler —

En fond d’un plateau noir, de dos, trois femmes accoudées à une table de bar, nous offrent, sur un air jazzy mâtiné de lumières tamisées, la vision de postérieurs joliment gainés. Atmosphère ! Atmosphère ! La volteface n’en est que plus saisissante !
En s’avançant sur le devant de la scène avec table et sièges, le temps d’un verre partagé, elles saisissent à bras le corps le verbe de Suzanne Césaire, proche des surréalistes et plume acérée de Tropiques.
C’est dans les écrits de dissidence que Daniel Maximin (auteur d’un livre sur Suzanne Césaire) s’est plongé pour constituer ce qui fait spectacle. Bonne pioche. Hassane Kouyaté, pour servir sa mise en scène les a assemblés à sa guise, prenant comme point de départ la terre insulaire.
L’écriture de Suzanne Césaire est dansante, imagée dans la forme, maniant la formule et l’incise. C’est sans détours ni ménagements qu’elle trace l’histoire de « sa » Martinique, nous faisant entrer, presque par effraction, dans sa terre. Odeur de la canne, chant du pipiri, luxuriance de la végétation : : on est loin d’un exotisme de carte postale.

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Journée Mondiale du Refus de la Misère

Refus de la misère : investissons dans l’éducation

— Par Aide & Action —
A l’occasion de la Journée Mondiale du refus de la misère (17 octobre) , Aide et Action rappelle l’impérieuse nécessité d’investir dans l’éducation afin de doter tout un chacun des compétences nécessaire pour s’insérer et s’intégrer dans un monde professionnel en constante évolution.
Bonne nouvelle sur le front du combat contre la misère : la pauvreté a drastiquement reculé depuis les années 1990 pour atteindre en 2015 un plus bas historique. Le taux mondial de pauvreté a ainsi chuté de 36% en 1990 à tout juste 10% en 2015 (soit 736 millions de personnes dans le monde vivant avec moins de 1.90 dollars par an). Il devrait, selon la Banque Mondiale, (Poverty and Shared Prosperity 2018: Piecing Together the Poverty Puzzle, 2018) atteindre 8.6% en 2018. Un plus bas historique.
La pauvreté au plus bas dans le monde
Les réjouissances ne sont toutefois pas de mises. Si de moins en moins de personnes vivent aujourd’hui dans l’extrême pauvreté, le rythme de baisse des taux de pauvreté est lui en train de ralentir, les politiques publiques et les aides mises en place ne parvenant pas à atteindre les populations les plus marginalisées et les plus éloignées de l’emploi.

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« Trois ruptures », ou la tragi-comédie du désamour

— par Janine Bailly —

Le décor est minimaliste, table-chaises et fauteuil qui tend à évoquer de douloureuses séances d’extraction dentaire… puisqu’aussi bien toute rupture dans le couple a pour motivation le désir d’échapper à ce qui contraint, au quotidien qui enferme, à l’autre qui soudain nous insupporte ! La scène est donc intemporelle, hors d’un lieu défini, elle pourrait être d’ici, de là-bas ou d’ailleurs. Que nous importe !

Ils sont deux, ou trois si entre eux se matérialise la haine debout, compacte et drue. Elle, plutôt dans sa belle maturité, Lui en un âge déjà quelque peu déclinant  — mais il est dans la « vraie vie » des couples, fussent-ils présidentiels, qui eux aussi font fi de ce paramètre. Elle, dans une beauté un peu agressive, un rien vulgaire, talons hauts et maquillage accentué. Lui un tantinet négligé, ventre rebondi sur ceinture serrée, à qui elle pourrait bien retourner la belle déclaration misogyne de Charles Aznavour : « Non… tu t’laisses aller, tu t’laisses aller ». Lui, cheveux grisonnants plus ou moins peignés selon la scène, Elle dont on ne sait si la fixité implacable de la noire chevelure est due à la nature ou au truchement d’une perruque ; et son personnage exude une certaine artificialité de poupée Barbie, opposée à la pesante présence terrienne de l’Autre.

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Cinéma : « Trois visages », « Burning »

— Par Selim Lander —

Trois visages de Jafar Panahi

Ouverture de la saison cinéma 2018-2019 de Tropiques-Atrium avec Jafar Panahi, cinéaste maudit par le régime iranien qui le condamne à faire des films avec des bouts de ficelle, ce qu’il compense par son inventivité, son sens de la construction cinématographique. Pour Trois visages il a disposé néanmoins d’un peu plus de moyens que pour Taxi Téhéran que l’on avait déjà pu voir – et apprécier – toujours grâce à Tropiques-Atrium et à son « monsieur cinéma », Steve Zebina.

Trois visages a reçu le prix du scénario au dernier festival de Cannes. De fait, pendant presque tout le film (la fin s’avérant un peu décevante), on est subjugué par la manière dont Panahi instille le douce dans l’esprit du spectateur. Tout commence avec la vidéo de Marziyeh, une jeune fille qui a filmé son suicide sur son téléphone. Son film est destiné à Behnaz Jafari, une star de la télévision iranienne accusée par Marziyeh de ne pas avoir répondu à ses appels à l’aide, car sa famille paysanne s’oppose à sa vocation de comédienne.

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Pour une Martinique sans pesticides.

— Par le professeur Gilles-Éric Séralini, Université de Caen-Normandie —
Je voudrais tout d’abord saluer toutes les Martiniquaises et les Martiniquais, sans exception, parce que vous avez un merveilleux pays qui a besoin d’être dépollué d’urgence afin de retrouver la splendeur qu’il mérite.

Jusqu’à ce jour, les multinationales, ils s’en sont servies comme déversoir de leurs stocks sur la production agricole de votre Martinique qui pourrait être absolument sublime avec ses fruits, ses végétaux et ses légumes.

Des problèmes politiques ont permis, dans le cadre de l’agriculture intensive, ce laisser-faire dans les pratiques agricoles. Vous pourriez faire tout pousser chez vous, bien plus que la canne à sucre ou la banane et atteindre l’autosuffisance alimentaire.
Nous travaillons depuis des années avec l’association écologique Pour Une Martinique Autrement (PUMA), qui a bien raison d’insister sur le problème des cocktails de pesticides. Nous avons découvert que ce n’est pas simplement le Chlordécone qu’on a utilisé en Martinique, il n’a jamais été épandu seul, mais avec des poisons non déclarés dans ses bidons ; comme pour le Roundup, le principal pesticide du monde, ou le Paraquat, le DDT et de bien d’autres produits très toxiques qui l’ont accompagné.

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Fantômes Caraïbes par Hugues Henri

Du 19 au 28 octobre 2018 à la Villa Chanteclerc à Fort-de-France

La Collectivité Territoriale de Martinique a le plaisir de vous inviter à cette exposition d’Hugues HENRI, qui aura lieu à Fort-de-France du 19 au 28 octobre 2018, à la villa Chanteclerc, (route de Didier). Cette exposition perpétue la recherche par cet artiste d’un retour des Caraïbes, ces « Indiens » ethnnocidés, pour la plupart disparus à l’exception des survivants dans la réserve de la Dominique et des îles Karifugas le long du Belize. Il s’agit d’une fiction artistique, non d’une reconstitution basée sur des recherches scientifiques, historiques, archéologiques, ethnologiques et anthropologiques.

Les moyens utilisés par Hugues Henri sont traditionnellement plastiques et picturaux pour les 30 toiles sur chassis peintes à l’acrylique et à l’huile, mais aussi composites à travers les séries de 30 photomontages numériques imprimés sur toile.

La finalité n’est pas de fabriquer des images postmodernes vides de sens, mais de permettre ce « retour fictif mais sensible » des Fantômes caraïbes. Dès lors ils émergent autour de nous, dans nos décors quotidiens et lieux de mémoire, avec leur aura, leurs regards et leur présence qui retrouvent leurs places dans notre présent désincarné et consumériste.

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Trois ruptures en mode théâtre

Par Selim Lander

Qui, ayant découvert une incompatibilité soudaine ou couvant depuis longtemps, a connu la séparation d’avec son ou sa conjoint(e), sait bien qu’il n’y a pas matière à rire. Mais cela c’est dans la vraie vie. Au théâtre il est permis de voir les choses autrement. Et il faut bien reconnaître que, considérés d’un peu loin par des observateurs non impliqués, les arguments ou autres subterfuges mis en œuvre par les parties ne sont pas toujours dépourvus d’un certain ridicule.

Le Théâtre municipal a ouvert sa saison 2018-2019 avec une pièce à sketchs de Rémi de Vos qui présente trois situations au départ banales mais qui dérivent vers des conclusions qui ne le sont pas. Quoi de plus banal, en effet, qu’un conjoint qui ne supporte plus de cohabiter avec le chien de l’autre ou que des parents qui n’en peuvent plus de devoir gérer un enfant intenable ? Moins banal mais qui existe néanmoins, le cas où l’un des deux conjoints se découvre homosexuel et décide de vivre avec le nouvel objet de son amour. A partir de là, le talent de l’auteur est de nous conduire vers des fins que nous n’aurions pas spontanément anticipées.

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Parutions : nouveautés du 15 octobre 2018

Hac ex causa conlaticia stipe Valerius humatur ille Publicola et subsidiis amicorum mariti inops cum liberis uxor alitur Reguli et dotatur ex aerario filia Scipionis, cum nobilitas florem adultae virginis diuturnum absentia pauperis erubesceret patris.

Adolescebat autem obstinatum propositum erga haec et similia multa scrutanda, stimulos admovente regina, quae abrupte mariti fortunas trudebat in exitium praeceps, cum eum potius lenitate feminea ad veritatis humanitatisque viam reducere utilia suadendo deberet, ut in Gordianorum actibus factitasse Maximini truculenti illius imperatoris rettulimus coniugem.

Hac ex causa conlaticia stipe Valerius humatur ille Publicola et subsidiis amicorum mariti inops cum liberis uxor alitur Reguli et dotatur ex aerario filia Scipionis, cum nobilitas florem adultae virginis diuturnum absentia pauperis erubesceret patris.

Cognitis enim pilatorum caesorumque funeribus nemo deinde ad has stationes appulit navem, sed ut Scironis praerupta letalia declinantes litoribus Cypriis contigui navigabant, quae Isauriae scopulis sunt controversa.

Huic Arabia est conserta, ex alio latere Nabataeis contigua; opima varietate conmerciorum castrisque oppleta validis et castellis, quae ad repellendos gentium vicinarum excursus sollicitudo pervigil veterum per oportunos saltus erexit et cautos. haec quoque civitates habet inter oppida quaedam ingentes Bostram et Gerasam atque Philadelphiam murorum firmitate cautissimas.

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« Gouverneurs de la rosée » : de la difficulté à passer du roman au théâtre

— Par Térez Térry —

Jeudi soir, c’est à un rendez-vous émotionnel que Tropiques Atrium nous invitait à assister, en ouverture de saison, avec l’adaptation théâtrale et la mise en scène de Daniel Marcelin du roman « Gouverneurs de la rosée » de Jacques Roumain publié en 1944. On pouvait se réjouir de voir arriver au théâtre un public ayant la nostalgie d’un roman qui les avait séduits alors qu’ils étaient encore étudiants.

C’est donc un véritable challenge que s’est donné Daniel Marcellin, comédien, publiciste, dramaturge et metteur en scène haïtien, de vouloir passer d’un roman aussi riche en description et en événements au théâtre. Dans ce cas précis, les difficultés liées aux contraintes d’écriture étaient nombreuses : jongler avec la durée, le nombre de personnages, les décors, les accessoires, les costumes, les transitions… garder la langue de l’auteur.

Daniel Marcellin a choisi de commencer par la fin du roman et d’en garder les personnages clés et leurs dialogues en faisant fi des descriptions. Quelques insertions narratives ont été incluses dans les dialogues des comédiens. Le décor minimaliste participait à souligner la dramaturgie du propos.

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Idéologies de camouflage à la C.T.M.

Par Roland Tell —

Infidèles à leurs principes, les partis, constituant l’alliance de gestion à la CTM (droitistes, centristes, indépendantistes) mènent, de plus en plus, une politique de ressentiment contre le monde social martiniquais. Que d’antagonismes engendrés ici ou là par un régime sans précédent de licenciements, particulièrement significatifs, et premièrement déterminants, s’agissant de l’idéal historique envisagé, donc de son image prospective, à laquelle aspirent les tenants majoritaires de l’alliance au pouvoir. Sommes-nous déjà dans la phase utopique du séparatisme, préparant les réalisations temporelles futures ? En effet, sans avoir jamais fourni une explication du contenu de sa politique à la CTM, le Président Exécutif, particulièrement cynique, ne cesse de condamner la lourdeur des effectifs de la Collectivité, oubliant que ce n’est pas sa conscience de partisan, qui détermine la vie humaine à la Martinique, mais ce sont les conditions et les formes de vie, les besoins, les tendances du peuple martiniquais, qui, seuls, déterminent la conscience collective, de plus en plus conditionnnée par l’éducatif, l’économique, le social.

La doctrine des trois idéologies, composant la majorité à la CTM, cherche à isoler, de plus en plus, l’individu martiniquais dans une forme de prolétariat, se référant, plus que jamais, à un chef-dictateur, seul porteur d’espérance dans une Martinique de la nécessité.

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« Trois ruptures » : trois fois non !

— Par Roland Sabra —

C’est Remi de Vos l’auteur de la pièce « Trois ruptures » qui le dit : « La part de l’humour dans mes pièces est parfois mal comprise.» Assertion vérifiée au T.A.C. ce 13 octobre 2018 lors de la dernière représentation à Fort-de-France de la mise en scène réalisée par Othello Vilgard, Peut-être l’auteur devrait-il avoir toujours en tête l’aphorisme que Guy Desproges qui face à l’inévitable question Peut-on rire de tout ? répondait : « Oui, mais pas avec n’importe qui. Mieux vaut rire d’Auschwitz avec un Juif que jouer au Scrabble avec Klaus Barbie. ». La pièce évoque, comme souvent chez l’auteur la violence conjugale qu’il conçoit comme un reflet de la violence sociale. On peut soutenir la thèse inverse. La violence sociale s’enracine dans une violence conjugale, hétérosexuelle dans son immense majorité. Les rapports de domination hommes/femmes sont prototypiques des rapports de pouvoirs qui structurent l’édifice social.

Trois types de ruptures donc dans la pièce. Tout d’abord une femme prépare un « délicieux repas d’adieux » au mari qu’elle quitte. Elle ne supporte plus sa chienne. En guise de vengeance, l’homme, l’attache sur une chaise et l’oblige à manger la pâtée de l’animal.

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Les manifestations autour du matrimoine de la Martinique

— Par Culture Égalité —
A Culture Egalité, nous avons décidé, depuis plusieurs années, de célébrer le Matrimoine à côté du patrimoine. Honorer le matrimoine c’est rendre visible l’héritage des femmes, leur contribution au développement social, politique, économique, de notre société. C’est permettre à leurs descendantes d’aujourd’hui et de demain de connaître l’histoire de leur aïeules, de s’identifier à elles pour continuer à œuvrer et à porter leur pierre à un monde d’égalité et de justice. Mais c’est aussi amener leurs descendants à mieux évaluer le rôle des femmes dans la construction de notre pays et donc à réévaluer la place qui leur revient dans notre société… afin que celle-ci marche enfin sur ses deux jambes !
 

 C’est ainsi que nous avons commencé à sortir de l’oubli les femmes qui ont fait notre histoire et notre société : l’intellectuelle militante Suzanne Roussi Césaire, ainsi que sept Rebelles et Marronnes… Pour cette saison, l’Axe Matrimoine vous propose deux nouvelles manifestations :

 

Une caravane historique  en Hommage à

o   TINE, la libre de savane, et MONIQUE, toutes deux de l’habitation SPOUTOURNE

o   Laurence MARCLAY, ouvrière de 19 ans sur l’habitation BASSIGNAC.

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Robert Saé : contributions au débat d’idées

— Par Robert Saé —

1 – Pawol an bouch pa chaj*1 !

Quel dirigeant politique n’a-t-on pas entendu répéter que « vu la gravité des problèmes, il y a urgence que tous se mettent autour d’une table, au-delà des divergences, pour travailler dans l’intérêt du pays ! » ?

Comment comprendre, alors, le lamentable spectacle auquel nous assistons dans la réalité ? Violences verbales*2 récurrentes entre adversaires politiques, attaques personnelles impitoyables contre des individus sans aucune considération de l’impact sur leur famille, défense fanatique de dirigeants quels que soient les déviations et les excès commis par ceux-ci ! Tout cela venant d’une élite censée représenter et guider le peuple ! Le plus déroutant est que de telles dérives concernent des responsables de tous bords : droite, gauche autant qu’indépendantistes. Qu’est-ce donc qui explique ce climat délétère qui est un obstacle majeur à l’émancipation de notre peuple et à son engagement dans une construction collective ?

Avant toute chose, il convient de rappeler que les divisions et la dégradation du débat politique que nous subissons, ne sont pas propres à notre pays. Il en va de même dans pratiquement tous les pays du monde :

– Parce que les « élites » ne sont pas immunisées contre la culture mondialisée vulgarisée par les médias occidentaux, qui nourrit l’individualisme, la compétition, la violence et flatte tous les bas instincts qui sommeillent chez les individus.

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«Sexe, Race et Colonies» est bien un ouvrage d’histoire

— Par Gilles Boëtsch, directeur de recherche émérite, CNRS —
Le livre qui entend démontrer comment la puissance coloniale s’est aussi exercée par la domination sexuelle suscite de vives réactions : en publiant de nombreuses images de femmes humiliées, il en réactiverait la violence. L’anthropologue Gilles Boëtsch, un des codirecteurs de l’ouvrage, défend un travail de recherche : on ne peut pas déconstruire le passé colonial sans voir, comprendre et critiquer ces images.
Tribune. En réponse à quelques détracteurs de notre travail, comme Philippe Artières (Libération, le 1er octobre) ou Daniel Schneidermann (Libération, le 8 octobre), «Sexe, race et colonies» (éd. la Découverte) est bien un ouvrage d’histoire et d’anthropologie – un ouvrage de sciences humaines et sociales, dont le matériau d’étude est l’image – et non… un livre pornographique. Ce livre est le fruit de la collaboration de 97 chercheurs et spécialistes reconnus pour leurs travaux sur l’histoire de l’esclavage, du colonialisme, de la sexualité ou du corps. Des chercheurs travaillant dans plus de 30 universités ou laboratoires dans le monde entier. Leurs contributions respectives, réparties en 20 articles et en plus de 120 notices, sont illustrées par des sources iconographiques diverses : gravures, peintures, illustrations, affiches, cartes postales, photographies de la culture matérielle, archives anthropologiques et ethnographiques provenant d’institutions muséales européennes ou de collections privées.

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Gouverneur de la rosée : une tragédie, hélas !

— Par Selim Lander —

« Tu sais, le cœur et la raison, c’est du pareil au même. Tu diras […] : On répète comme ça que le garçon de Bienaimé, ce nègre qui s’appelle Manuel, a découvert une source. Mais il dit que c’est tout un tracas de l’amener dans la plaine, qu’il faudrait faire une coumbite général, et comme on est fâchés, ce n’est pas possible et la source restera là où elle est sans profit pour personne. » (Gouverneur de la rosée, p.121).

Le héros du roman de Jacques Roumain, s’adresse ainsi à son amour, la belle Annaïse, ou plus simplement Anna (« sa gorge était haute et pleine, et sous le déploiement de sa robe, la noble avancée des jambes déplaçait le dessin épanoui de son jeune corps », p. 113) pour lui exposer son projet : dans une contrée haïtienne ravagée par la déforestation et la sécheresse, il a, lui le miraculeux, trouvé à l’aide de ses mains (son nom est « Manuel) la source qui peut ramener la prospérité à condition que toute le village s’y mette (prolétaires, unissez-vous !).

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« Sainte Dérivée des trottoirs » de Faubert Bolivar, m.e.s. Alice Leclerc, avec Vladimir Delva

— Par Alvina Ruprecht —

Cette nuit-là, devant le parvis de la cathédrale de Limoges, le public festivalier a participé à un événement à la fois insolite et époustouflant. Au son du battement des tambours accompagné de musique de l’église chrétienne, deux figures masquées sorties de l’ombre nous invitent à les suivre vers le Jardin de l’ Évêché…

Nous voilà du coup, devant un tas de déchets – canettes, vieux papiers, surfaces brillantes, filets de pêcheurs qui se se met à remuer alors qu’une lumière rougeâtre émane de cet « autel » posé à l’entrée du jardin. Une figure éclaboussée de détritus émerge de ce tas d’ordures, vomissant, crachant, jurant, hurlant en français et en créole, maudissant ses origines, sa mère, Jésus et l’éclopé qui était son père, sa manière de dénoncer la bêtise et la pauvreté dans le monde. Voici une nouvelle résurrection d’une apparence christique peu commune; un corps maigre, carnavalesque, trainant derrière elle tout le poids de toutes les souffrances et les obscénités du monde. L’acteur est magnifique mais la figure fait peur et le public est tétanisé devant la ‘Sainte Dérivée qui entreprend son calvaire syncrétique à travers le jardin de Christ où nous découvrons un monde de folie, de délire, de chaos dans la fête.

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« Gouverneurs de la rosée », de J. Roumain, adaptation et m.e.s. de D. Marcelin

 — Par Roland Sabra —

« Roméo et Juliette » entre obscurantisme et lutte pour la survie.

Traduit dans de nombreuses langues, transposé au cinéma par deux fois, très souvent adapté au théâtre le roman de Jacques Roumain est aujourd’hui un bien universel, intemporel et à ce titre le combat autour de l’eau autour duquel il s’articule est d’un actualité… brûlante.

Manuel est de retour à Fonds Rouge, après dix années passées à Cuba au cours desquelles comme ouvrier agricole, il a découvert la lutte des classes et ses combats perdus, gagnés, toujours recommencés. Il retrouve un pays fracassé, traversé par des conflits sanglants, des haines immuables, un pays déboisé, asséché, vidé de sa substance par le passage d’une économie pré-capitaliste, caractérisée par une propriété communale des terres, des valeurs de solidarité, de paix, de concorde et d’entraide symbolisées par le coumbite, à une économie de l’appropriation avec le partage des terres et ses conflits consubstantiels. Les sources ont disparu. Les champs ne sont que poussière et misère. Ce temps n’est plus où « on vivait tous en bonne harmonie, unis comme les doigts de la main et le coumbite réunissaient le voisinage pour la récolte ou le défrichage »

Manuel revenu de l’ailleurs, comme figure d’une altérité pourtant familière, tel un Christ noir combattant l’obscurantisme et la résignation se veut par sa parole et par son geste le ré-unificateur de la communauté.

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Le PABE en ses tribulations archipéliques – exposition collective à l’Atrium

— Par Selim Lander —

Le « PABE » – pour Plastik ArtBand Experimental, une association de plasticien.ne.s non-conformistes – occupe le paysage culturel martiniquais depuis une bonne dizaine d’années. Au fil des expositions de ce groupe à majorité féminine, on a pu découvrir des sensibilités artistiques très diverses, savantes ou naïves, des techniques sophistiquées ou plus frustes mais chez tous.tes le même enthousiasme, la même envie de laisser s’exprimer sa créativité. Ces artistes ont l’habitude de travailler ensemble depuis suffisamment longtemps pour faire groupe, ce qui n’empêche pas qui les a un peu fréquenté.e.s de reconnaître immédiatement la patte de chacun.e.

L’exposition collective qui vient de s’ouvrir à Tropiques- Atrium sous l’intitulé Tribulations archipéliques et qui se prolongera jusqu’au 10 novembre confirme cette diversité qui fait la richesse du groupe. Emmenés par les peintres Michèle Arretche et Marie Gauthier dont on connaît le métier, les « pabistes » ont abordé le thème de l’île en utilisant tous les procédés possibles, du tableau peint à l’ancienne sur une toile jusqu’à la vidéo en passant par la sculpture, la céramique, l’installation, le collage, la photo.

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Ordinateurs, tablettes, smartphones : contre les rançongiciels, que faire ?

Vous venez de lancer sur votre ordinateur, votre tablette ou encore votre smartphone un programme malveillant ? Et votre appareil est maintenant bloqué à cause d’un rançongiciel (ransomware) qui vous réclame de l’argent pour retrouver un usage normal de votre appareil ? Que faire ? Service-public.fr vous explique comment réagir !

En cas de blocage de votre ordinateur, tablette ou smartphone à cause d’un rançongiciel , il vous est demandé de fournir une certaine somme d’argent en échange de la clé de déchiffrement qui devrait permettre de restaurer les fichiers rendus inaccessibles (documents de travail, photos de vacances, musique…). Face à cette situation, Service-public.fr vous recommande :

  • de signaler d’abord le chantage dont vous êtes victime en ligne sur le site www.internet-signalement.gouv.fr  ;
  • et de porter plainte au commissariat ou à la gendarmerie.

Pour vous aider ensuite face à ce type de situation, Service-public.fr vous recommande de consulter le site www.nomoreransom.org , véritable interface entre les victimes et les fournisseurs d’outils et de solutions pour le déblocage et/ou le déchiffrement de vos fichiers bloqués.

  Rappel :

Néanmoins, avant tout problème, pensez à protéger vos appareils :

  • en installant un antivirus et ses mises à jour ;
  • en mettant en place un logiciel anti-spam ;
  • et en nettoyant régulièrement votre appareil de ses fichiers temporaires.

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Contribution à l’avancée de la langue créole. Notre rapport à la langue

—Par Fernand Tiburce Fortuné —

Selon ULLMAN, « tout système linguistique renferme une analyse du monde extérieur qui lui est propre et qui diffère de celles d’autres langues ou d’autres étapes de la même langue. Dépositaire de l’expérience accumulée de générations passées, il fournit à la génération future une façon de voir, une interprétation de l’univers ». (1)

C’est pourquoi, selon nous, la relation à notre langue est une relation à la terre, donc à la poésie, donc à la création. Elle est par conséquent une relation à la mère, un cordon ombilical essentiel qui nous singularise, et en même temps nous préserve de la solitude.

La langue s’exprime alors comme patrimoine, c’est-à-dire comme un lieu non clos où s’engrangent drus, les temps forts de notre vécu. Dans ce contexte, le parler d’un peuple signifie volonté d’amour et acte de fidélité.

La langue, c’est nous-mêmes, mais c’est encore le contact, la présence, l’existence même de l’Autre. En effet, toute langue est à un certain degré ce mouvement multiforme vers une fraternité partageable, une communauté à essentialiser.

Comment ne pas aimer sa langue ?

Pourquoi tenter d’ériger un «mur de la honte» entre sa langue et soi-même ?

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Le critique, l’artiste et son public…

Un atelier de critique dramatique, sous la direction de Jean-Pierre Han, est organisé ces jours-ci par Tropiques -Atrium. En juin 2006 R. Sabra publiait un article autour de ce thème dans « Le Naïf. En voici le début.

— Par Roland Sabra —
Le plus simple serait de compter le nombre d’entrées, le chiffre d’affaires généré par un spectacle. On saurait ainsi facilement quels sont les bons, les moins bons et les mauvais. C’est ce que font les marchands de culture dans un rabattement du qualitatif sur le quantitatif. Triomphe de la bipolarité. Axes orthonormés, le temps en abscisse et le chiffre bien ordonné pour un profit maximisé. Mais on peut croire que la culture n’est pas une marchandise… comme une autre et que le succès en la matière résulte d’une alchimie entre l’artiste, son public et un prescripteur, le critique. Le critique peut être académique, il est alors dans une position d’expert, mais dans ce cas son impact auprès du public est limité. Il peut être journaliste, le plus souvent, donc inséré dans une logique économique, celle du groupe de presse auquel il appartient.

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天下 « Tianxia, tout sous un même ciel », de Zhao Tingyang,

— Par Michel Pennetier —

Imaginons un gouvernement mondial, sans extériorité. Tout ce qui est sous le ciel, la terre avec ses habitants, la nature, est englobé dans un système de gouvernance qui synthétise les aspirations de tous les êtres. Les états tels qu’ils existent aujourd’hui sont regroupés en fédérations régionales porteuses d’une certaine civilisation (L’Europe en est un exemple). Les fédérations sont représentées auprès du gouvernement mondial. Chaque niveau se gouverne lui-même dans le cadre du niveau supérieur si bien que le niveau mondial est l’ultime législateur des relations entre les fédérations et des états entre eux au sein d’une fédération. A l’intérieur d’un état, on peut aussi distinguer un niveau local (la commune) la région et l’état si bien que le niveau le plus local s’inscrit dans la convergence d’une politique mondiale pour le bien de tous. Tout le système bancaire grâce à internet est orienté vers la satisfaction équitable des besoins à travers la planète.

Une telle structure suppose une éthique. Il s’agirait de passer de la politique de puissance à une politique de coopération, selon le principe que ce qui est bénéfique au niveau mondial l’est aussi à chaque membre de la communauté mondiale.

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« Création et engagement », présentation du livre de Dominique Berthet

À l’ESPE vendredi 12 octobre 2018 à 18h 30

La Bibliothèque Schœlcher vous invite à la rencontre autour de l’ouvrage « Création et engagement » publié sous la direction de Dominique BERTHET.

L’engagement dans le domaine de la création renvoie à deux aspects. Le premier est inhérent à la création en tant que telle dans la mesure où le créateur s’investit, s’implique dans son projet et dans sa pratique. Créer c’est donner naissance à quelque chose qui n’existait pas avant. Pour cela s’exerce une double action : de la pensée et du corps. La création est souvent présentée comme un combat dans lequel l’artiste se confronte au matériau, au support, aux composants, à l’espace, etc. L’inattendu, le hasard, l’accident perturbent parfois le projet et l’intention du créateur qui est alors amené à prendre en compte ce qu’il n’avait pas prévu. La création résulte d’un engagement total de celui qui donne forme à cette « chose » nouvelle.

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«Dilili à Paris», la cause féministe du cinéaste Michel Ocelot

A Madiana à partir du 13 octobre 2018

Après l’Afrique dans « Kirikou et la sorcière », et l’Orient dans « Azur et Asmar », le cinéaste Michel Ocelot enlumine le Paris de la Belle Époque. « Dilili à Paris », son nouveau film d’animation sort ce mercredi 10 octobre sur les écrans français. Une fable qui mêle enquête policière, célébrités du début du XXe siècle et convictions féministes…

« Je m’appelle Dilili ». C’est une princesse qui vient de l’autre bout de la terre. L’autre bout de la terre, c’est la Nouvelle-Calédonie. La petite princesse kanake Dilili joue les sauvages dans un zoo humain parisien. Petite protégée d’une grande bourgeoise, elle va se lier d’amitié avec un coursier pédalant dans Paris sur son triporteur… Et tenter de démasquer les membres d’une société secrète qui enlève des fillettes.

Michel Ocelot au service de la cause féministe

Tout le beau monde du Paris de la Belle Epoque défile sur l’écran : Pasteur, Toulouse-Lautrec, Renoir, Proust ou encore Marie Curie. On retrouve l’humanisme de Michel Ocelot au service, ici, d’une cause féministe… Car les horribles mâles maîtres sont des hommes qui ne cherchent qu’à asservir des femmes.

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Sexe, race & colonies : « Notre livre n’est en rien pornographique! »

— Propos recueillis par Aliocha Wald Lasowski—

Dans « Sexe, race & colonies », l’historien Pascal Blanchard éclaire les heures les plus sombres de la colonisation française.

L’ouvrage collectif Sexe, race & colonies (La Découverte), mené par l’historien Pascal Blanchard, réunit 97 chercheurs internationaux, qui analysent 1200 images ou illustrations de six siècles de domination coloniale et sexuelle, des premiers empires aux Amériques, jusqu’aux stéréotypes racistes et pornographiques contemporains.

Suivant le fil chronologique, le livre est divisé en quatre parties : « Fascinations » (1420-1830), « Dominations » (1830-1920), « Décolonisations » (1920-1970) et « Métissages » (depuis 1970 à nos jours). Par son ampleur historique, la densité de son iconographie et sa diversité géographique (tous les empires coloniaux sont analysés), Sexe, race & colonies est une somme unique et inédite. En s’appuyant sur des images à chaque page, les auteurs du livre entendent montrer que « la domination sexuelle dans les espaces colonisés fut un long processus d’asservissement produisant des imaginaires complexes qui, entre exotisme et érotisme, se nourrissent d’une véritable fascination/répulsion pour les corps racisés ». Le viol des corps, lié à la conquête territoriale, est exposé par les images de l’époque qui contribuent à fabriquer les fantasmes exotiques de l’Occident, pour assurer la domination raciale et sexuelle.

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