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Créolistique et aménagement du créole et du français en Haïti : les défis actuels de l’État haïtien

— Compte–rendu de lecture de Lyonel Icart —

 

« La question linguistique haïtienne / Textes choisis »

Robert Berrouët-Oriol et Hugues Saint-Fort

Éd. Zémès/Cidihca, juin 2017

Par Lyonel Icart, Ph.D.

Montréal, le 3 août 2017

Des heures durant, après la lecture du livre de Berrouët-Oriol et Saint-Fort « La question linguistique haïtienne / Textes choisis  », je suis resté pensif. D’innombrables souvenirs de mon enfance au pays natal plongée dans le bilinguisme créole français de la nation ont refait surface. Et mon engagement en alphabétisation auprès de mes compatriotes à Montréal dans les années 1980 a ordonnancé mon appréhension de ces vingt-huit textes qui nous sont offerts. Au premier abord, je craignais un ouvrage de spécialistes émaillé de termes techniques qui auraient rendu la lecture fastidieuse. Fort heureusement, les auteurs ont su trouver le niveau de langue approprié pour séduire, accrocher et captiver le lecteur profane sans sacrifier la précision conceptuelle. Ils nous offrent un ouvrage qui ancre à sa juste place la langue injustement forclose de tous les Haïtiens, le kreyòl, sans congédier le français et l’héritage culturel qui l’accompagne.

La langue est le système symbolique qui nous permet de penser, d’appréhender le monde et de communiquer c’est-à-dire ce qui fait de nous ce que nous sommes.

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Une pierre est tombée, un homme est passé par là

Moi, bête, ma bouche est une hanche

Cassée, elle me porte et me donne ma

démarche d’animal pluriel

Je boite, j’ondule, je file à travers bois

Le jour, la nuit, j’étoile

Tantôt phoque pour ma fourrure d’ombre

Tantôt boeuf pour mon père mort

Tantôt chat pour mon peuple au hasard

 

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« Le Baron noir » de Sergio Noré

Par José Nosel —

le_baron_noirEditions Société des écrivains, 2016, 291 pages

Dans son ouvrage pédagogique, « l’Art de lire », considéré comme un des meilleurs manuels pour tout étudiant en littérature, le grand écrivain, méconnu, Emile Faguet, de l’académie française (1847-1916), écrit, je cite :
« Pour apprendre à lire, il faut d’abord lire très lentement et ensuite il faut lire très lentement et, toujours, jusqu’au dernier livre qui aura l’honneur d’être lu par vous, il faudra lire très lentement.
Il faut lire, aussi lentement un livre, pour en jouir, que pour s’instruire par lui, ou le critiquer »

Le conseil d’Emile Faguet, vaut, me semble-t-il, pour le dernier opus de l’écrivain Sergio Noré.

Il s’agit d’un recueil de 3 Nouvelles, de 291 pages, paru aux éditions Société des écrivains, et qui s’intitule, « Le Baron noir »

Il faudrait, en effet, le lire lentement :
Car, il y a matière pour jouir du plaisir de la lecture, d’autant qu’à chaque page, on décèle toute la jubilation de l’auteur d’écrire ce qu’il met dans la bouche de ses personnages.
Il y a matière pour s’instruire sur des réalités, notamment historiques, de notre terroir, qui nous sont proposées.

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Faubert Bolivar : poésies

faubert_poesieOh, daigne, mon amour
Ne pas t’enfuir à toutes jambes
Si je t’avoue que dans mon coeur
Battent les coeurs des ancêtres
Car c’est d’un amour à foutre le feu
que je t’aime
Interpelant l’histoire et la mythologie, un dit d’amour structuré comme le jeu des osselets (dos / creux / i / s) le poème de Faubert Bolivar assume une dimension expérimentale. Il est tendre et sauvage. La porte, comme figure de l’arrêt, de la distance, y tient une place capitale.
Elle est toujours à abattre, à ouvrir. Un dit d’amour qui cogne aux portes avec suffisamment de force pour les ébranler.

Né à Port-au-Prince en 1979, Faubert Bolivar a fait des études de Philosophie à l’École Normale Supérieure de son pays et à l’Université Paris VIII. Poète, dramaturge et essayiste,il a publié dans divers ouvrages collectifs et revues à travers le monde francophone. Il est, dès 1996, l’un des récipiendaires du Prix Jacques Stephen Alexis pour sa nouvelle « Faux-Lit ». Fin 2013, il reçoit, entre autres, le Prix Marius Gottin d’ETC-Caraïbe pour sa troisième pièce en langue créole, « Mon ami Pyero ».

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Mise à mort de la fécondité des connaissances en Haïti

Par Robert Berrouët-Oriol

Paru dans AlterPresse, Port-au-Prince, le 13 juillet 2016

 C’est à titre de poète et d’enseignant que j’ai reçu de plein fouet et avec une immense tristesse, depuis Port-au-Prince, la nouvelle du décès par balles assassines de deux de mes anciens étudiants : Michel Stéphane Bruno tué le 15 juin 2016 à Puits Blain (Pétion-Ville) et Whilems Édouard trucidé le 8 juillet 2016 à Pétion-Ville.

Michel Stéphane Bruno a été mon étudiant en linguistique et communication à l’Université Quisqueya, tandis qu’en 4e année j’ai enseigné la terminologie à Whilems Édouard à la Faculté de linguistique appliquée. Je garde d’eux le souvenir attachant de deux jeunes universitaires curieux, l’esprit alerte, apprenants méthodiques et exigeants, ouverts aux rapports humains enrichissants et respectueux de l’Autre.

Ces décès par balles assassines sont choquants et révoltants. Deux morts de plus, deux morts de trop dans un pays dont la criminalisation des structures et des moeurs remonte au terrorisme d’État duvaliériste, aux assassinats ciblés et à grande échelle de la dictature des Duvalier père et fils… Assassiner la vie en assassinant l’esprit est en effet l’une des principales chapes de plomb épandues sur le pays haïtien depuis la mortifère nuit duvaliériste…

Deux jeunes sont fauchés au cœur même de la fécondité des connaissances, dans le cours productif de leurs prestations professionnelles novatrices et reconnues.

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Bob/ Des ombres et des lueurs/ Mon ami Pierrot

Nassuf Djailani, Criss Niangouna, Faubert Bolivar

livre_tarmacTrois pièces. Trois pays. Trois auteurs. Les Comores. Le Congo-Brazzaville. Haïti. Et pourtant, non pas la même histoire, mais la même question : la violence est-elle le dernier recours contre l’injustice politique ? Ces trois auteurs y répondent chacun à leur manière, en traitant des faits les plus tragiques de l’actualité récente de leurs pays, mais en n’oubliant pas ce que le théâtre peut opposer à la barbarie engendrée par le chaos : le langage, la poésie et le logos comme un long chant destiné à témoigner, à faire réfléchir, à faire agir.

Bob de Nassuf Djailani, Des ombres et des lueurs de Criss Niangouna, Mon ami Pierrot de Faubert Bolivar : des écritures neuves, nécessaires et essentielles, pour appréhender les bouleversements de l’aire francophone en ce début de XXIe siècle.

Né à Port-au-Prince en 1979, Faubert Bolivar est poète, dramaturge et essayiste. Récipiendaire en 1996 du Prix Jacques Stephen Alexis pour sa nouvelle Faux-Lit, il a reçu en 2013 le Prix Marius Gottin d’ETC-Caraïbe pour sa troisième pièce en créole Mon ami Pyero. ( lire le compte-rendu de lecture publique ici)

Journaliste et écrivain, originaire de Mayotte dans l’archipel des Comores, Nassuf Djailani collabore régulièrement à des revues littéraires telles que Po&sie, Mange Monde, Riveneuve Continents ou Ubu – Scènes d’Europe.

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Hadriana dans tous mes rêves

hadriana_depestre_poinsotÉtude critique par Jérôme Poinsot

RENÉ DEPESTRE

Hadriana dans tous mes rêves

HONORÉ CHAMPION PARIS – 201

Jacmel (Haïti) en 1938, à l’époque des réjouissances du Carnaval, Patrick Altamont, le jeune narrateur, nous conte deux évènements qui se produisent en simultané : d’abord la fin de sa très chère marraine Germaine Villaret-Joyeuse, puis les noces de l’éblouissante Hadriana Siloé, laquelle tombe raide morte au pied de l’autel à la minute où elle prononce le oui sacramentel.
Mais nous sommes en pays vaudou où le rituel des métamorphoses permet de mêler les horreur de la mort aux rires de la fête. Et si Hadriana, l’héroïne française du récit, est enterrée en grande pompe dans sa belle robe de mariée, elle ressuscite aussitôt sous la forme d’une zombie, l’une des formes mythiques du destin des Haïtiens. Autour de ce thème lié aux mythes de l’esclavage et de la colonisation, symbole de l’ambiguïté du réel-merveilleux dans les cultures de la Caraïbe, l’humour et l’imagination du conteur se débrident pour éclairer le vécu haïtien dans sa fantaisie, sa sensualité, son surréalisme démonté, son désordre toujours hallucinant…

  • Collection ENTRE LES LIGNES
  • Format 11 X 17,6 CM
  • Nombre de volume 1
  • Nombre de pages 136
  • Type de reliure BROCHÉ
  • ISBN 9782745331007
  • Date de publication 17/03/2016
  • Lieu d’édition PARIS
  • Indic.

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Dans la maison du père, danser au risque du péril

— Par Sophie Joubert —

dans_la_maison_du_pereDans la maison du père, de Yanick Lahens. Coll. «SW Poche», Sabine Wespieser éditeur, 9 euros. Le premier roman de la Haïtienne Yanick Lahens [première parution en 2000] suit l’émancipation par la danse d’une jeune fille de bonne famille.

Dans la maison du père est un roman doublement initiatique. Au sens classique, parce qu’il suit la formation d’Alice Bien-aimé, une jeune mulâtresse de la bonne société haïtienne. D’une manière plus souterraine, parce qu’il pénètre au cœur des cérémonies vaudoues, interdites par un décret de Toussaint Louverture, le 4 janvier 1800. C’est dans une villa de Port-au-Prince, à l’insu de ses parents, qu’Alice découvre cette danse du diable qui libère les corps et les esprits.

Un corps et une île 
en pleine ébullition

Alice Bienaimé est véritablement née d’une image, à l’âge de treize ans. Portée par un air de ragtime à la mode, l’adolescente esquisse quelques pas de danse, aussitôt réprimés par une violente gifle de son père, Anténor le Sévère. Ce traumatisme originel est le cœur du très beau roman de Yanick Lahens, raconté à la première personne par la petite fille devenue une vieille femme.

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Réel Merveilleux, Réalisme Merveilleux, Réalisme Magique et Baroque (III)

reel_&_realismeUniversité des Antilles – Faculté des LSH – Campus de Schoelcher
Séminaires thématiques du CRILLASH 2014-2015
*
Journée d’étude interdisciplinaire Jeudi 7 mai 2015
coordonnée par Charles W. Scheel
Réel Merveilleux, Réalisme Merveilleux, Réalisme Magique et Baroque (III)
Focus :
Jacques Stephen Alexis et Haïti in diaspora
Amphi Sellaye
Programme détaillé des communications
*

9h30 : Jean-Durosier DESRIVIÈRES (Écrivain) : La poétique du Mystère dans la composition dramatique et la prose poétique de Faubert Bolivar. Lecture de La Flambeau, Jesika ou Bousiko et Sainte Dérivée des trottoirs
Abstract : Par quelle mathématique des signes le jeune auteur haïtien, Faubert Bolivar (1979), nous donne-t-il à saisir l’univers dramatique singulier de ses pièces de théâtre, La Flambeau et Jesika ou Bousiko, et l’espace fictionnel énigmatique de son récit poétique, Sainte Dérivée des trottoirs ? Comment évaluer cette expression littéraire qui semble toucher le possible extrême de certaines réalités haïtiennes connues, et pourtant si peu vraisemblables pour une catégorie de lecteurs, et la relation que développent les personnages de Bolivar avec ces topos récurrents dans son écriture livrée aux jeux de langage et d’onirisme avéré : la folie, l’intime et le cosmique (ou le religieux) ?

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Appel solennel de Gérald Bloncourt aux étudiants de Jacmel et de Port-au-Prince

haiti-2En 2007, j’étais invité par l’Université d’Haïti aux évènements qui rendaient hommage à Jacques Roumain.
Je vous ai rencontré. Nous avons beaucoup parlé, discuté. Quelques-uns d’entre vous me demandaient que faire ? devant l’incurie des gouvernants de l’époque.
Je répondais, instruisez-vous, cultivez-vous, organisez-vous, patience …
Aujourd’hui 6 Octobre 2014 je vous demande de vous insurger contre les décisions de Martelly actuellement et provisoirement « président » d’Haïti, qui veut rendre hommage à l’ex-dictateur Duvalier.
Il n’est pas question que cet assassin, poursuivi pour Crimes contre l’Humanité, soit honoré par les autorités de notre pays.
Je vous demande d’avoir le courage de vos ainés de 1946 qui au cours des Cinq Glorieuses ont mis à bas un pouvoir autoritaire et contraire aux intérêts de la nation.
Debout, jeunesse haïtienne. Joignez-vous au peuple, aux opposants, à tous les démocrates, à tous les patriotes et imposez le respect dû aux milliers de victimes, vilement torturées, liquidées dans les geôles de Fort-Dimanche et dans toutes les prisons du territoire.
Insurgez-vous contre ce pouvoir qui bafoue la mémoire des Jacques Stephen Alexis, Marc Romulus, et de tant d’autres patriotes !

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Brève exploration de la littérature en langue créole en Haïti, de ses balbutiements à son affirmation

— Par Jean Durosier DESRIVIERES —

  

Préambule

Compte tenu de l’ensemble des œuvres publiées depuis deux décennies par des auteurs haïtiens, tant en Haïti qu’à l’étranger, on peut aisément soutenir l’idée que la littérature haïtienne s’écrit dans plusieurs langues aujourd’hui: français, créole, anglais, espagnole… Bien entendu, même s’il est nécessaire de le signaler, on n’est pas obligé de s’attarder sur cette idée pour aborder convenablement l’histoire littéraire haïtienne. En revanche, on est forcé désormais de parler, sans l’ombre d’aucun doute, d’une littérature qui s’écrit dans les deux langues officielles du pays, à savoir: le français et le créole. Donc, explorer la littérature en langue créole en Haïti, c’est considérer un versant de la littérature haïtienne longtemps négligé et qui s’affirme de plus en plus comme l’une de ses composantes effectives, réelles, mesurables et incontournables. Avant de retracer pour vous le parcours de la littérature en langue créole en Haïti, j’aimerais d’abord exposer quelques grandes lignes de l’histoire littéraire haïtienne elle-même. Cet exposé vous permettra de mieux comprendre la situation de la littérature en langue créole qui est toujours en construction en Haïti, dans un contexte

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Hommage à Gérald Bloncourt, par Widad Amra, poétesse.

Autour de Gérald Bloncourt.
Intervention à la bibliothèque Schoelcher le Jeudi 17 Février 2011.


 

Monsieur Bloncourt

Je connais votre pays. J’aime votre pays dans ce qu’ il offre de créativité dans une grande diversité, dans ce qu’il offre de résistance dans le temps, dans ce qu’il offre de dignité, et dans ce qu’il dit de l’humanité. Et cela, au delà, de tous les Malgré. Passés et présents.

Mais vous, Monsieur Bloncourt, avec tout le respect que je vous dois, je ne vous connaissais pas.
Jusqu’à ce livre…Jusqu’au hasard amical qui a mis ce livre entre mes mains.
Et je dirais comme Jean Claude Charles, qui a écrit votre préface, mon étonnement.
«  A la fin des années 60, en Haïti, je ne connaissais pas l’existence de Gérald Bloncourt.

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Le francophone est-il une langue étrangère ?

par Hubert Haddad

–__-

Etre un francophone qui a réussi, c’est avoir sa résidence intellectuelle secondaire à Saint-Germain-des-Prés

   Même si la pesanteur et les réflexes néocoloniaux demeurent inhérents à toute position dominante, on ne peut guère affirmer que les médias, l’édition, le public, bref la France dite métropolitaine, ait une représentation post-coloniale de ce qui se passe dans le vaste ailleurs de la langue française. C’est davantage d’une perception et d’un positionnement élitistes qu’il s’agit, celui d’un certain jacobinisme intellectuel, du parisianisme pour tout dire, mode sélectif d’exaltation des différences cher au protectionnisme, à l’occasion caudataire de la bourgeoisie éclairée.

Le désaveu implicite pour les expressions littéraires extra-territoriales rappelle celui qui avait cours naguère, en direction des provinces françaises : un écrivain isolé dans le Cantal ou l’Ardenne avait peu de chances d’exister un jour s’il ne montait pas à Paris, dans la foulée d’un Lucien de Rubempré. Rimbaud était considéré comme un rustre par Banville et sa coterie. Les poètes maudits sont presque tous des horsains, des provinciaux présomptueux.

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Haïti, Guadeloupe, Dominique : nouvelles écritures théâtrales

 — par José Pliya* —

arlequin-2Le point commun entre les trois territoires à explorer sous l’angle des « nouvelles écritures théâtrales », c’est la Caraïbe. Cette partie du monde a, entre autres singularités, ces insularités multiples, ces langues en archipels : français, anglais, espagnol, créole… À ce titre, on peut dire que le deuxième point commun entre nos trois territoires est la langue créole qu’ils ont en partage. Cela est important, car, comme nous allons le voir, cette langue créole – dont la caractéristique est le mélange d’idiomes, le croisement de formes syntaxiques, la transversalité d’imaginaires linguistiques – reflète assez bien la réalité des scènes théâtrales de ces trois îles, et même de la Grande Caraïbe.

Haïti : entre ancrage local et aspiration à l’universel

Dans le foisonnement artistique perpétuel qui frappe le spectateur qui découvre cette île, le théâtre a toujours eu une place importante. Les années 1970-1980 sont dominées par la figure de grands metteurs en scène comme Syto Cavé et, surtout, le regretté Hervé Denis. Avec eux, le théâtre est une affaire de troupe, de famille et de grands textes du répertoire haïtien (Jacques Stephen Alexis) ou caribéen (Simone Schwarz-Bart, Aimé Césaire) qui sont créés et joués un peu partout dans le monde.

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Fonctions et enjeux de la parole dans Texaco (Patrick Chamoiseau)

 

— Par Luce Czyba —

 

Résumé

 

C’est de mémoire collective et d’affirmation, par l’écriture littéraire, d’une créolité qui n’est pas que langage mais promeut une esthétique, que procède le projet de Texaco. La présentation par L. Czyba du roman et de la perspective dans laquelle il s’inscrit privilégie la dialectique de l’écriture et de la parole. Le « marqueur de paroles », relais et témoin de la narratrice principale qui le nomme « oiseau de Cham », accomplit en quelque sorte le rêve d’« oraliture » de son auteur Chamoiseau.

 

Texte intégral

 

Dans l’Éloge de la créolité1, Jean Bernabé, Patrick Chamoiseau et Raphaël Confiant se proclament créoles, ce qui, pour eux, ne signifie pas seulement être né et avoir été élevé aux Amériques, sans en être originaire comme les Amérindiens, mais surtout être « en quête », et souvent de façon douloureuse, « d’une pensée plus fertile, d’une expression plus juste et d’une esthétique plus vraie ». Ils refusent en effet de continuer à voir le monde à travers le filtre des valeurs occidentales, à se percevoir eux-mêmes « exotisés » par la vision française qu’ils ont dû adopter, autrement dit à se regarder eux-mêmes avec le regard de l’Autre.

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C’est quoi le drame d’Haïti ?

Jean-Durosier Desrivières vous ouvre ses archives
N°3 : Entretien avec Aimé Césaire


Nous avons rencontré le poète patriarche martiniquais le 20 Janvier 2004 à son bureau de maire honoraire, abrité à l’ancienne mairie de Fort-de-France. Le sage nonagénaire nous a reçu cordialement, ravi de rencontrer une fois de plus un homme du pays « où la négritude se mit debout pour la première fois ». Sa mémoire et son esprit encore vifs l’emportent sur l’ouie qui lui joue parfois des tours. Il suffit d’évoquer Haïti pour voir briller à travers ses yeux et son sourire exquis une passion sublime, à nulle autre pareille.

Jean-Durosier Desrivières : Comment percevez-vous l’indépendance d’Haïti ?
Aimé Césaire : Je suis le premier parmi les Martiniquais à avoir signalé et salué l’indépendance d’Haïti. C’est un événement d’une très grande portée : pas seulement haïtienne, elle est aussi antillaise. On peut même dire : qu’est-ce qu’elle est mondiale ! Parce que les Haïtiens n’ont pas seulement conquis la liberté pour eux ; c’est tout un système qui a été ébranlé par cette révolte haïtienne et, en particulier, il est clair que l’Europe ne pouvait plus continuer à maintenir le système colonial tel qu’il existait à l’époque – l’esclavage pour les autres pays des Antilles et aussi presque l’Amérique du sud, pour les Espagnols ou les Anglais – c’était l’abolition de l’esclavage.

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Vivre et mourir pour Haïti

— Par Stéphane Martelly(*) —

« Oncle Gabriel et moi, nous ne tarderons pas à démarrer en trombe et à nous engouffrer dans les venelles du bord de mer : “Non, mille fois non, grommelle-t-il, comme un cri rentré, ce peuple mérite davantage que la pitié, l’obole ou la condescendance. Il y a d’autres horizons que celui de la dépossession des choses du monde”. […] Et moi, Narcès Morelli, j’ai vingt ans. Je vis dans un monde dément, plein de turbulences, de tapages et de bras de flammes. J’ai beau écarquiller les yeux, je ne vois pas poindre l’aube nouvelle. Mes oreilles tendues n’entendent pas les premiers accords de la fête depuis si longtemps promise. J’ai vingt ans. Comment faire pour balancer la nuit et contempler quelque part au loin, la vertigineuse blancheur du petit matin ? » – Émile Ollivier

« Que la femme soit l’adieu devenue, navrure entre les froissements de ses propres entrailles ; qu’elle ne s’attarde plus dans l’attente de l’aurore puisque l’aurore est retardée. » – Yanick Jean

Il est temps ici de prendre un moment une parole, depuis la diaspora, qui n’est certes pas à nous.

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« Les défis contemporains de la traduction et de la lexicographie créole en Haïti »

Appel à contribution pour l’élaboration d’un livre collectif sur la traduction et la lexicographie créole : Document de projet

—Par  Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue

  1. Contexte général et problématique 

    1. De la traduction créole

L’observation de terrain, a minima, indique qu’en matière de traduction vers le créole l’on est passé en Haïti, au cours des cinquante dernières années, d’une tradition généraliste autodidacte, principalement littéraire et religieuse (fables, contes, textes bibliques, chants liturgiques, prédication), à une traduction plus technique, davantage diversifiée et spécialisée notamment en raison de la prolifération des ONG et des agences de coopération internationale présentes dans l’espace national. Jusqu’ici la problématique de la traduction en créole haïtien n’a pas fait l’objet de travaux de recherche universitaires approfondis, ni de mémoires de maîtrise, ni de thèses de doctorat, et encore moins d’ouvrages traitant de ce sujet. De manière générale, cette problématique est peu ou mal connue, et ce qui a prévalu jusqu’à une période pas trop lointaine s’apparente à un champ de travail au sein duquel prévalait la bonne vieille méthode de la « version » traductionnelle.

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Molières 2023 : ‘Starmania’ nommé, la Comédie-Française plébiscitée

La 34e édition de la grande cérémonie du théâtre français se tiendra le 24 avril sous la houlette d’Alexis Michalik au Théâtre de Paris.
L’opéra-rock Starmania revisité avec succès depuis novembre a été nommé aux Molières 2023, avec par ailleurs une bataille entre trois sociétaires de la Comédie-Française pour être sacré meilleur comédien du théâtre public. Isabelle Huppert est nommée pour la neuvième fois comme meilleure comédienne dans le public (La Ménagerie de Verre), face à Isabelle Carré, Sara Giraudeau et Catherine Hiegel.

La maison de Molière domine le théâtre public avec 11 nominations pour cinq productions. Trois poids lourds, Denis Podalydès (Le Roi Lear), Laurent Stocker (L’Avare) ou Christian Hecq (Le Bourgeois Gentilhomme) pourraient rafler le Molière du meilleur comédien. Deux autres sociétaires, Benjamin Lavernhe (La Dame de la mer d’Ibsen) et Christophe Montenez (Le Roi Lear) sont nommés pour le second rôle.

La pensionnaire Marina Hands (Le Roi Lear) est nommée comme meilleure comédienne dans un second rôle. « La Reine des neiges, l’histoire oubliée », spectacle jeune public créé pour le Français, récolte deux nominations.

Le « bourgeois Gentilhomme » nommé quatre fois
C’est le Bourgeois Gentilhomme, dans la production du couple Christian Hecq et Valérie Lesort, qui rafle le plus de nominations (4), dont le Molière du théâtre public, de la mise en scène et de la création sonore et visuelle.

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« Les revenants de l’impossible amour », de Faubert Bolivar, m.e.s. Jean-Erns Marie-Louise

Mercredi 16 mars- 19h Tropiques-Atrium

Primé Meilleur texte dramatique 2017 par Textes En Paroles – G

« Connaissez-vous le dicton qui dit : « ne se rencontrent que les gens qui se sont donnés rendez-vous ». Il en va de même pour la mort, on croit qu’elle arrive par hasard, sereine, somptueuse, montrant le bout de chaque chemin de vie, parce qu’on ignore que l’on ne meurt que sur rendez-vous. Si. Si si. Si-si-siFaubert Bolivar

Note de mise en scène

Faubert Bolivar, est pour moi, un auteur de la même lignée que Franck Fouché, Jean Price-Mars, Jacques-Stephen Alexis, Félix Morisseau-Leroy… ils ont réussi à capter la réalité sociale Haïtienne pour la rendre universelle par la forme et la langue. 

Henry Gauthier-Villars tout comme Franck Fouché affirment que le théâtre est bien d’essence religieuse. Si étymologiquement, religieux signifie ce qui relie, le théâtre ne serait donc vraiment lui-même quand il reste fidèle à sa mission originelle servir un idéal social, réunir serait sa double fonction. Cette double mission dont parle Gauthier-Villars nous montre que le théâtre n’a d’autre objectif que d’opérer une série de déplacements qui vont du déroulement des pulsions élémentaires du corps, en passant par le rythme, par la dislocation de l’anatomie jusqu’à l’éclatement des forces premières occultes pour mettre à nu la vie dans sa transparence.

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« Ti manmay la ki té rété kous kouri soley-la », de Fernand Tiburce Fortuné

— Quatrième de couverture par Raphaël Confiant —

Kont fantastik, menm manniè kont moral, kont satirik épi kont lanmou, ka benyen limajinè moun péyi kréyol pas sé kont-tala wè jou dan bouden bato négriyé épi dan gran fènwè bitasion. Sé manniè palè lespri lannwit, bondjé chalviré épi falfret sa ki gran pasé’w. Ladjables, Papadjab, Zonbi, Lom san tet, Lantikris épi lézot soukouyan navidjé dan tet sa ki, pami nou, té ni chans pa tro konnet radjo
épi pa konnet télévizion pies. Epi yo péla an sel kou ! Disparet pran yo dan fon brech mémwa pété-nou.

Pou….mondjé mèsi ! ki Legba, papa Jézikri oben Marémen viré wè jou anba plim sé vayan matjè pawol nou an. Sé Césaire ki dékouvè « vié amadou » afritjen-an ka brilé dan fondok nou chak-la ; sé Glissant ka rélé kous kouri neg mawon-an dan bòdaj pies kann ; sé Chamoiseau ka chapé kouri dèyè dowlis-la épi Pépin « l’homme au bâton ».

Fernand fortune, li, ka di soley « vini isi ! » Menm « Compère général soleil » -la gran matjè pawol ayisien-an yo kriyé Jacques Stephane Alexis a té bien enmen an.

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Plus de 1000 avocats se mobilisent contre Marine Le Pen

« La loi n’est l’expression de la volonté générale que dans le respect de la Constitution ».

Notre République repose sur un socle de valeurs fondamentales que sont la Justice, l’égalité, la sécurité, la fraternité, le pluralisme des opinions et le respect des croyances.

Marine Le Pen veut sans ambiguïté renverser ces valeurs au profit de l’autoritarisme, de la xénophobie, du repli sur soi, du corporatisme et de la haine de l’autre.

Le programme du Front National, et partant son arrivée au pouvoir, conduirait à la fin de l’Etat de droit puisqu’il est en contradiction avec nos principes constitutionnels et conventionnels.

Nous, avocats, participons au quotidien, aux côtés des magistrats et des autres professions judiciaires, au fonctionnement de la Justice démocratique. Chaque jour, nous menons nos petits et grands combats pour y contribuer.
Nous avons aujourd’hui un autre combat à mener : rassembler nos forces et lutter pour que Marine Le Pen n’accède pas à la magistrature suprême et que le résultat des urnes traduise un sursaut massif et démocratique.

Notre appel et notre engagement sont clairs. Il n’y aucune place pour un « ni ni » qui rompt non seulement le front républicain, mais qui affaiblit la République toute entière.

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« Créer et pérenniser des instances de valorisation et de légitimation en Haïti. »

Entretien avec Lyonel Trouillot. Propos recueillis par Faubert Bolivar pour Madinin-Art
lyonel_trouillotBien souvent déterminé par le marché éditorial des pays occidentaux, notre regard sur la littérature haïtienne contemporaine ne porte pas toujours aussi loin qu’il le devrait. Quand nous savons que ce qui vaut pour la littérature vaut aussi pour tout le reste, nous pensons qu’il est important que nous prenions l’habitude d’aller à la rencontre d’Haïti, en Haïti. C’est dans cette optique nous avons rencontré l’écrivain Lyonel Trouillot, qui vient de signer son accession à la direction éditoriale de C3 avec sept (7) nouveaux titres et deux (2) rééditions1.

Lyonel Trouillot, bonjour. Vous êtes écrivain. En France, vos romans sont publiés chez Actes Sud. Mais vous êtes aussi connu comme un intellectuel engagé et, les deux vont de pair, activiste culturel. Vous avez créé les Vendredis littéraires qui existent depuis plus de vingt ans, et il y a une dizaine d’années, les Ateliers du jeudi soir. Vous venez de prendre la direction éditoriale d’une jeune maison d’édition haïtienne, C3. A ce titre, vous venez de lancer les premiers ouvrages choisis par vos soins.

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La belle amour humaine…

— Par Jacques-Stephen Alexis —

bonne_annee_2015Ce très beau texte de Jacques-Stephen Alexis nous a été envoyé par Jean Durosier Desrivières, puis par d’autres. Qu’ils en soient remerciés.

La belle amour humaine 1957

 Heureuse année à mon ami l’Homme !

Heureuse année à ceux qui se cherchent et ne trouvent pas encore.

Heureuse année aussi à ceux qui ont trébuché dans le chemin difficile.

 Heureuse année quand même à ceux qui ne croient à rien pas même à eux-mêmes. Heureuse année, bien sûr, à tous ceux qui souffrent, luttent, espèrent et croient toujours.

 Heureuse année à tous mes frères, mes amis, à tous mes compagnons du spirituel qui combattent pour trouver la joie, la paix du cœur et le sentiment du devoir accompli.

 Quand j’eus écrit ces vœux sur la page blanche, carré blême et interrogateur, qui attendait de recevoir l’image de moi-même qu’avec mes pauvres mots je dois transmettre à mes compagnons de rêves et de galères, j’ai posé la plume et j’ai réfléchi un long instant. Que sont en effet des vœux s’ils n’ont pas un objet précis, possible, réalisable ?

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