Réel Merveilleux, Réalisme Merveilleux, Réalisme Magique et Baroque (III)

reel_&_realismeUniversité des Antilles – Faculté des LSH – Campus de Schoelcher
Séminaires thématiques du CRILLASH 2014-2015
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Journée d’étude interdisciplinaire Jeudi 7 mai 2015
coordonnée par Charles W. Scheel
Réel Merveilleux, Réalisme Merveilleux, Réalisme Magique et Baroque (III)
Focus :
Jacques Stephen Alexis et Haïti in diaspora
Amphi Sellaye
Programme détaillé des communications
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9h30 : Jean-Durosier DESRIVIÈRES (Écrivain) : La poétique du Mystère dans la composition dramatique et la prose poétique de Faubert Bolivar. Lecture de La Flambeau, Jesika ou Bousiko et Sainte Dérivée des trottoirs
Abstract : Par quelle mathématique des signes le jeune auteur haïtien, Faubert Bolivar (1979), nous donne-t-il à saisir l’univers dramatique singulier de ses pièces de théâtre, La Flambeau et Jesika ou Bousiko, et l’espace fictionnel énigmatique de son récit poétique, Sainte Dérivée des trottoirs ? Comment évaluer cette expression littéraire qui semble toucher le possible extrême de certaines réalités haïtiennes connues, et pourtant si peu vraisemblables pour une catégorie de lecteurs, et la relation que développent les personnages de Bolivar avec ces topos récurrents dans son écriture livrée aux jeux de langage et d’onirisme avéré : la folie, l’intime et le cosmique (ou le religieux) ? Ainsi, parler de poétique du mystère, c’est esquisser le balbutiement d’une théorie littéraire qui est presqu’un prétexte à faire découvrir, à faire entendre, cette parole littéraire neuve, d’un autre ton, qui marque la rupture avec tout ce qui relèverait d’une esthétique du réel ou du réalisme merveilleux. Le mode d’intrusion des mystères-mêmes – fantômes, fous ou esprits vodous – dans les espaces réels énoncés par les textes bolivariens paraît résister absolument à ce penchant de certains critiques occidentaux à vouloir conclure hâtivement, concernant des écrits de ce style, en faveur de l’esthétique précitée. Mystère donc, comme l’écho de l’indicible dans l’agencement des signes, dans la stratégie de construction et de déconstruction de l’espace réel, imaginaire et symbolique, dans la mise en œuvre textuelle des traits quasi insaisissables d’une culture individuelle et d’une culture collective, multiple, instable, fuyante, souvent étrange… Mystère…

Jean-Durosier Desrivières est né en 1972 à Port-au-Prince. Il a vécu en Martinique de 1999 à 2008, pour y revenir en 2012 après des séjours en Haïti et en France. Enseignant, critique littéraire et poète-dramaturge, ses textes (publiés en français et en créole) sont lus et mis en scène en Europe et dans la Caraïbe. Diplômé en lettres modernes et classiques à l’ENS d’Haïti, en littérature francophone à l’Université des Antilles et de la Guyane, et en études théâtrales à l’Université Lumière (Lyon 2), il est spécialiste de la poésie de Georges Castera dont il a préfacé Le trou du souffleur (prix Carbet 2006). Auteur d’articles et de critiques littéraires publiés dans divers magazines et revues francophones, membre fondateur de la revue L’incertain, il fait entendre sa voix à travers maints rendez-vous culturels et universitaires, à la radio et à la télévision, tant en Martinique, en Haïti qu’en France. Son premier texte pour la scène, Paroles en crue (2009), a été finaliste au 4ème concours d’Etc_Caraïbe. Son récit théâtral La jupe de la rue Gît-le-Cœur (Lansman, 2014) a reçu le Prix Spécial du jury Etc_Caraïbe / Beaumarchais en 2013 et a été mis en lecture au 31ème Festival des Francophonies en Limousin.

10h00 : Valentine LOUP (U. de Lausanne) : Du « Réalisme merveilleux » de Jacques S. Alexis aux polars vaudou de Gary Victor : entre résurgences et transformations
Abstract : L’influence du concept du réalisme merveilleux élaboré par Jacques Stéphen Alexis est considérable, tant sur les écrivains que dans la recherche universitaire. Les études académiques actuelles mentionnent fréquemment l’écrivain Gary Victor parmi les héritiers du réalisme merveilleux haïtien. Depuis quelques années, celui-ci est considéré comme l’un des auteurs les plus prolifiques et les plus lus en Haïti. Dans son importante production littéraire figure un cycle de romans policiers qui comportent le péritexte intriguant de «polar vaudou». Cette communication vise à proposer une lecture de ces textes au regard du concept élaboré par Jacques Stéphen Alexis tel que nous le comprenons. Envisagé comme un courant artistique cherchant à restituer la vision haïtienne du monde, le réalisme merveilleux de Jaques Stéphen Alexis s’inscrit également dans une perspective engagée. En littérature, Alexis appelle au renouvellement des genres dans une optique haïtienne afin de guider « le peuple » dans ses luttes. D’une part, je montrerai comment les œuvres de Gary Victor – en particulier Les cloches de la Brésilienne (2006), Saison de porcs (2009) et Soro (2011) – illustrent parfaitement ce remaniement des modèles littéraires et se doublent d’une dimension critique. Oscillant entre respect des codes, réadaptations au contexte haïtien, renversements du genre policier et intégration d’autres formes de discours (en particulier celui de la lodyans), les polars de Victor s’en prennent aux stéréotypes littéraires, tant indigénistes qu’occidentaux. D’autre part, je tenterai de circonscrire le versant « vaudou » de ces textes, à l’aide du concept de réalisme grotesque approfondi par Rémi Astruc. Dès lors, nous verrons apparaître, derrière le masque du polar, toute la puissance symbolique du mythe, non plus traditionnel mais résolument moderne et propre à Gary Victor.

Originaire de Suisse, Valentine Loup est titulaire d’un Master en français moderne et en Histoire et Science des religions de l’Université de Lausanne depuis janvier 2015. Son parcours universitaire s’est centré sur ses intérêts personnels qui concernent particulièrement les cultures africaines et caribéennes. A l’Université de Lausanne, elle s’est spécialisée en histoire des « traditions marginalisées » qui correspondent aux pratiques rituelles extra-européennes, ainsi qu’en littérature francophone africaine. Afin de compléter son cursus elle a passé un séjour de six mois en Haïti – alternant voyages et enseignement dans une école – puis a effectué un échange à l’Université de Montréal pour compléter ses recherches de Master. Actuellement, elle travaille en collaboration avec une maison d’édition suisse, Hélice Hélas, pour promouvoir des auteurs locaux.

10h45 : Sandrine MIRAM-MARTHE-ROSE (UA) : La Grande Drive des esprits de
Gisèle Pineau : un réalisme merveilleux guadeloupéen ?

Abstract: Le roman de Gisèle Pineau La Grande Drive des esprits (1993) a été abordé sous divers angles. Celui de l’écriture féminine est le plus souvent relevé, mais on trouve également une pluralité d’aspects qui en découle. Ainsi, nous pourrons faire référence à des thèmes récurrents aussi chez des écrivaines guadeloupéennes connues, comme Simone Schwartz-Bart et Maryse Condé. D’ailleurs l’influence de ces deux parraines semble se profiler aussi dans le style de Gisèle Pineau et dans la façon de traiter certains de ces thèmes, notamment l’irruption de faits insolites parmi des faits qui semblent plus vraisemblables, phénomènes souvent associés dans la critique à la notion de réalisme merveilleux. Celle-ci a été défendue par Jacques Stephen Alexis dans un manifeste très engagé idéologiquement pour une esthétique « Du Réalisme merveilleux des Haïtiens ». Nous préférons retenir une approche plus spécifiquement littéraire, qui définit le réalisme merveilleux en le distinguant du réalisme magique en tant modes narratifs de la fiction (Scheel, 2005). Une telle approche aborde ces deux notions en se focalisant davantage sur la position du narrateur lors de la narration des événements insolites en particulier. La Grande Drive des esprits est une œuvre de fiction intéressante en tant qu’illustration de cet aspect discursif, qui est loin d’être simple. Ainsi, une œuvre à dominante réaliste merveilleuse n’exclut pas la présence de passages réalistes magiques. Mais la mise en relief de la perception de l’insolite dans le réel, que pratique parfois la narratrice, renforce-t-elle le réalisme merveilleux, ou le remet-elle en question ? A partir de là, nous tâcherons de répondre à la question si l’on peut parler d’un réalisme merveilleux spécifiquement guadeloupéen.

Sandrine Miram-Marthe-Rose est doctorante en traductologie (spécialité: espagnol) à l’Université des Antilles, après l’obtention d’un Master en traductologie avec un mémoire intitulé “Traduction et repésentation du réel: la littérature caribéenne” et basé notamment sur la traduction française de Cent Ans de solitude de Gabriel García Márquez, et sur la traduction espagnole de La Grande Drive des esprits de Gisèle Pineau. Ses recherches portent sur les poétiques caribéennes dans les littératures des espaces francophones et hispanophones et sur les problématiques liées à la traduction des oeuvres issues de ces zones.

11h15 : Frédéric LEFRANÇOIS (UA) : Mirages du désir, désir de mirages: les facettes du réalisme magique chez Jamaica Kincaid
Abstract : Le but de cette communication est de définir les rapports entre l’imaginaire littéraire façonné par les traumatismes de l’histoire coloniale dans la Caraïbe et son reflet dans un mode d’écriture que l’on pourrait qualifier de magico-réaliste. Il s’agira, en particulier, de déterminer le sens du concept de réalisme magique tel qu’il se manifeste dans An Autobiography of My Mother, roman emblématique de l’écrivaine antillo-américaine Jamaica Kincaid. A travers l’étude de cette œuvre, nous tâcherons de montrer, que le réalisme magique ne caractérise pas seulement une pratique scripturale, mais qu’il permet également de remettre en question un type d’herméneutique qui entretient la confusion entre la transcription du monde réel – où les notions de vrai et de faux s’appliquent – et les modes narratifs qui sont régis par d’autres critères, spécifiques au genre que l’on désigne aujourd’hui sous le vocable de trauma fiction.

Frédéric Lefrançois est chercheur associé au CRILLASH et enseignant en études anglophones à l’Université des Antilles. Il est titulaire d’un doctorat en langues et littératures anglophones et anglo-saxonnes. Sa thèse, intitulée « Figures de l’exil dans l’œuvre de Caryl Phillips », a été soutenue en 2008. Depuis, il poursuit ses recherches sur la question de l’appartenance dans le champ de la littérature postcoloniale. Il a contribué à plusieurs manifestations et publications scientifiques portant sur les thèmes du pouvoir et de l’altérité.

14h00 : Charles W. SCHEEL (UA) : Réalisme et Merveilleux dans Claire of the Sea Light d’Edwidge Danticat et dans Parabole du failli de Lyonel Trouillot
Abstract : On se penchera en tant que comparatiste sur deux romans publiés en 2013, l’un en France et en français par un auteur haïtien vivant en Haïti, et l’autre en anglais à New York par une auteure née en Haïti mais vivant depuis plus de trente ans aux Etats-Unis. Il s’agira de  montrer que, par-delà de nombreuses différences, ces œuvres partagent des préoccupations communes, tant sur le plan des thèmes (fondamentalement celui de la survie en conditions hostiles, voire traumatisantes) que sur celui d’aspects formels. Ces romans allient réalisme et merveilleux, non pas dans l’esthétique si particulière et exigeante formulée par Alexis dans son manifeste du Réalisme merveilleux des Haïtiens, mais dans une combinaison d’engagement social et d’écriture discrètement poétique. Chez Danticat, le discours, davantage centré sur des questions féministes que sur la lutte des classes, repousse les frontières de la conscience linguistique, sociale et littéraire au sein de la diaspora haïtienne aux E.U., dans des directions qu’Alexis, en tant qu’homme et médecin éduqué en France, et activiste politique des années 1950, n’aurait pu prévoir. Dans Parabole du failli, Lyonel Trouillot aborde lui la question de la solidarité masculine dans la perspective de relations amicales basées sur une passion commune de la poésie et obscurcies par une tragédie. Le discours dans ce roman est fort éloigné de celui d’autres écrivains haïtiens contemporains, plus à l’aise dans une veine érotique machiste et/ou vaudouisante. Il est aussi bien plus poétique que celui de Danticat, dont l’anglais reste sobre et beaucoup moins expressif. De tels constats bousculent des stéréotypes répandus sur des écritures soi-disant « masculines » ou « féminines ». Il convient aussi de préciser les rapports respectifs de ces œuvres à une esthétique incluant le merveilleux.

Charles W. Scheel est professeur de littérature américaine et d’études postcoloniales à l’UFR de LSH de l’Université des Antilles depuis septembre 2012. Entre sa licence et sa maîtrise d’études anglophones à l’Université de Strasbourg, il a voyagé pendant une dizaine d’années et enseigné le français ou l’anglais aux USA, en France, à Bahrain, en Allemagne et en Suisse. Après avoir obtenu un doctorat de littérature française de l’University of Texas at Austin et un doctorat ès lettres de l’Université Paris III, il est devenu maître de conférences à l’Université de Metz (1995-2012, sauf pendant un séjour de quatre ans à l’Université de Mayence en tant qu’attaché de coopération universitaire près l’Ambassade de France à Berlin) et a soutenu un dossier d’habilitation à diriger des recherches en littérature générale et comparée, intitulé « Réalisme, merveilleux et modes narratifs dans la fiction du 20e siècle – Littératures d’Europe et des Amériques, » à l’Université Paris III. En sus de nombreux articles accessibles pour la plupart sur academia.edu, il a publié l’ouvrage Réalisme magique et réalisme merveilleux. Des théories aux poétiques (Préface de Daniel-Henri Pageaux, Collection Critiques littéraires, Paris, L’Harmattan, 2005).

14h30 : Daniel-Henri PAGEAUX (Pr. Em. U. Paris III) : Le roman selon Louis- Philippe Dalembert : entre « réalisme poétique » et néo-baroque
Abstract : Le Haïtien Louis-Philippe Dalembert a fait son entrée en littérature avec deux recueils poétiques (d’ailleurs primés en France) sous le titre Et le soleil se souvient (l’Harmattan, 1989) que j’avais eu le plaisir de préfacer. Depuis, il est remarquable de constater que L.-Ph Dalembert, dans le temps même où il publiait des romans, n’a pas cessé de pratiquer l’écriture poétique, sous forme de recueils (le dernier en 2010), ou à l’intérieur de ses romans en ménageant des passages, des pauses où s’épanouit une singulière prose poétique, en particulier dans L’autre face de la mer (Stock, 1998). C’est un premier axe que nous souhaitons retenir dans une approche « poétique », visant à cerner l’esthétique à l’œuvre dans le monde romanesque de L.-Ph. Dalembert. Les références ibériques constituent un second axe de lecture. Elles sont multiples et peuvent aisément s’expliquer par la formation universitaire du romancier, auteur d’une thèse sur le « Noir chez Alejo Carpentier ». De telles informations, d’ordre biographique ou factuel, sont là pour inviter à aller plus avant dans l’esthétique et dans l’imaginaire du romancier. On pense aux références au réel merveilleux dans des nouvelles (Le songe d’une nuit d’enfance, Le Serpent à plumes, 1993), dans des romans (le personnage de Pauline Bonaparte dans L’île du bout des rêves, Ed. du Rocher, 2007), voire Le roman de Cuba (Ed. du Rocher, 2009), sorte de récit de voyage. Une intertextualité très présente tout au long des romans (en particulier la culture italienne, là encore au départ pour des raisons biographiques, très prégnante dans Ballade d’un amour inachevé, Mercure de France, 2013, peut-être un tournant ?), une polyphonie très active (par exemple dans Rue du Faubourg Saint-Denis, Ed. du Rocher, 2005), une vision très polémique, mais aussi comique, voire grotesque, par exemple de son île natale (dès le premier roman, Le crayon du Bon Dieu n’a pas de gomme, Stock, 1996), invitent à aller plus profondément dans une définition possible de la poétique romanesque selon Dalembert. Tandis que la notion de « réalisme poétique » est empruntée à Glissant, lorsqu’il définit le dépassement du réalisme chez Kateb Yacine, la notion de « néo-baroque » (depuis Severo Sarduy) ou celle de Baroque (de Carpentier à Glissant) permettent à la fois d’éclairer certains effets d’écriture et de relier le « francophone » Dalembert à une tradition ibérique et plus proprement caraïbe.

Daniel-Henri Pageaux est Professeur émérite de Littérature générale et comparée à la Sorbonne Nouvelle-Paris III. Hispaniste de formation, il s’est tourné vers les littératures francophones d’Afrique noire, des Amériques et de l’Océan indien. Il est membre de comités d’honneur ou de rédaction de plusieurs revues internationales dont Comparative literature in China. Il est co-directeur de la Revue de Littérature comparée et membre correspondant de l’Académie des sciences de Lisbonne. Il a publié à ce jour une trentaine d’ouvrages dont plusieurs manuels de littérature comparée et littérature espagnole. Citons : La littérature générale et comparée, Paris, Colin, 1994 (traductions en roumain, macédonien, chinois, arabe); Le séminaire d’Ain Chams/Le Caire Introduction à la littérature générale et comparée, l’Harmattan, 2008 (trad. en italien, 2010) ; Naissances du roman (Klincksieck, 1995 et rééd. 2006 et traduit en italien). Dernier ouvrage publié : Itinéraires comparatistes (2 vol. aux éd. Jean Maisonneuve, Paris, 2014). Il a aussi publié sous deux pseudonymes trois romans, en français et en espagnol.

15h30 : Conférencier d’honneur – Louis-Philippe DALEMBERT (Écrivain) : Littératures, identités et vagabondage
Abstract: La migration, les déplacements incessants des personnages constituent une thématique forte dans mon travail d’écrivain et participent d’une esthétique que je nomme vagabondage. Ces déplacements sont parfois liés à des nécessités économiques, mais plus souvent à une pulsion de l’ailleurs, qui finit, chez certains, par prendre la forme d’une véritable obsession. Les données de cette obsession du déplacement – et de son pendant, l’ailleurs – sont présentes dès mon premier recueil de poèmes. Toutefois, loin de la subir, certains personnages finissent par s’en servir pour constituer une géographie personnelle. Faite de nostalgie et de rêves. Un lieu toujours repoussé plus loin, qui participe d’un choix de l’individu, de sa liberté, liée de manière intrinsèque à la prise de conscience de son humanité et aussi du caractère éphémère de celle-ci. En ce sens, l’idée de vagabondage se différencie d’autres concepts proches comme l’errance, le nomadisme ou encore l’exil. Elle est surtout liée à ce que je nomme le pays-temps, une idée développée dans l’épilogue de mon roman Le crayon du bon Dieu n’a pas de gomme. Dans l’esprit du narrateur, le Temps est fait d’étapes, de «lieux» successifs qu’on n’habite jamais qu’une fois. C’est alors lui qui définit l’individu et non plus l’espace, auquel il se substitue. Cette obsession du Temps, présente aussi bien dans ma prose que dans ma poésie, relève d’une thématique personnelle. Elle y rejoint l’idée de vagabondage, ce désir inconscient de vouloir arrêter sinon le Temps, du moins de ne pas le voir passer.

Né à Port-au-Prince, Haïti, Louis-Philippe Dalembert est l’un des écrivains majeurs de sa génération. Auteur d’une vingtaine d’ouvrages traduits dans une dizaine de langues, il vit depuis une trentaine d’années entre la terre natale et d’autres pays comme la France, l’Italie, les États-Unis, l’Allemagne, Israël. Ancien pensionnaire de la Villa Médici à Rome, chevalier des Arts et des Lettres en France, son travail a été récompensé par des distinctions comme le Prix Casa de las Américas, le Prix RFO, le Berliner Künstlerprogramm des DAAD, etc. Louis-Philippe Dalembert est par ailleurs diplômé de l’École normale supérieure de Port-au-Prince, de l’École supérieure de journalisme de Paris et auteur d’une thèse de doctorat en littérature comparée sur l’écrivain Alejo Carpentier (Université Sorbonne Nouvelle). Il a été Visiting Professor à University Wisconsin-Milwaukee (2013), à Bern Univestität (2015) et O’Brien Distinguished Visiting Scholar (2014) à Scripps College, en Californie.

17h00 : Rencontre avec l’auteur haïtien Jean-Durosier DESRIVIERES
et mise en lecture de Les Biens de l’Empereur par Hervé Déluge / Etc_Caraïbe

Synopsis : Un audienceur raconte, comme il peut, l’histoire de deux clochards qui s’amusent à revisiter l’Histoire politique de leur République, à leur manière, en vue de comprendre sans doute sa situation actuelle. Fofo, l’illuminé, incarne l’Empereur incompris et Cloclo, l’ancien militaire handicapé, respecte presque toutes les règles que lui impose son compagnon de jeu. S’y mêlent donc la mémoire collective, quelques vérités insupportables et des souvenirs personnels qui provoquent parfois quelques frictions entre les deux anciens amis. Où conduira finalement ce jeu extravagant ?

Jean-Durosier DESRIVIERES s’est toujours intéressé à l’art de la scène en tant que comédien amateur et animateur d’atelier de théâtre éducatif. En 2009, il écrit son premier texte pour la scène, Paroles en crue – nominé au 4ème concours d’Etc_Caraïbe. En 2013, son texte La jupe de la rue Git-le-Cœur reçoit le Prix Spécial du jury de la 6ème édition du concours d’Ecriture Théâtrale contemporaine en Caraïbe (Etc_Caraïbe). Grâce à ce prix et à une bourse d’Etc_Caraïbe, il termine d’écrire ce texte en résidence au Centre d’écriture de Marimont, en Belgique. Le texte est édité aux éditions Lansman en 2014.