— Par Pierre Pinalie—

Il s’agit d’une belle poésie qui s’étire et se chante comme une cantate longue et fine, une expression émise par une femme apparaissant en tant que symbole ethnique, linguistique et géographique. Sous sa plume, on se sent quelque peu au centre du monde, comme si la terre avait un axe autour duquel nous tournons tous, et le désir de l’auteur s’envole vers un espoir de paix. La série de jugements politiquement exprimés révèle une atmosphère difficile où le fanatisme crée des horreurs à l’image des doigts d’un artiste chilien coupés par l’abominable dictateur d’un pays où la liberté fut muselée pendant longtemps.
Il y a dans le titre un très émouvant bilinguisme fondamental dans lequel deux langues, deux sociétés, deux philosophies expriment la paix entre les humains. Il y a là, donc, la plus profonde prière pour l’amour des uns pour les autres sur une planète où, malheureusement, l’attentat et la haine se répètent dans la quotidienneté. Widad, l’auteur, est le fruit d’un métissage réalisé sur une île où flotte, chez certains incurables malades, un racisme aussi condamnable que celui que pratiquaient les esclavagistes d’hier.





Article à paraître dans le numéro 15 de KAZ A SYANS, bulletin du Centre de culture scientifique, technique et industrielle de la Guadeloupe ARCHIPEL DES SCIENCES.
Afin de vous présenter l’ouvrage qui nous réunit ce soir, je me permettrais d’embrayer en posant cette question a priori inattendue et ô combien ardue :
Après 


Il est en avance au rendez-vous. De noir vêtu, à la ville comme à la télévision, avec cette cravate à rayures jaunes dont il doit avoir moult exemplaires. Il est plongé dans la presse, qu’il vient d’acheter. On ne se départ pas d’une vieille maîtresse aussi facilement. Il est avenant, persuadé qu’il y a toujours à apprendre de l’autre et que la rencontre est une richesse. Dans un entretien il se comporte en vrai professionnel. Il connaît les ficelles du métier. L’interview, c’est son quotidien. Difficile de l’emmener là où il ne veut pas aller; il se dérobera prétextant la question ou le thème trop difficile pour lui. Il est venu parler de son dernier livre, de sa première fiction. Et si Breton à la recherche dans Fort-de-France en avril 1941, d’un ruban pour sa fille n’avait pas aperçu dans la vitrine de la mercerie que tenait la sœur de René Ménil un exemplaire de la revue « Tropiques »?

Il est député de la Martinique depuis la Libération, il a été avec Senghor, reconnu comme le plus grand poète noir d’expression française. Comment s’accordent, en lui, la négritude, la poésie et la politique ? 
Il est extrêmement frappant de voir qu’en Martinique chacune et chacun a un Césaire à raconter. Son Césaire. Le grand homme, il est vrai, a de quoi nourrir diversement les uns et les autres : noir, poète, élu, humaniste. Il a, peu ou prou, accompagné tous ses compatriotes de son île natale.