
— par Janine Bailly —
Il est des petits miracles qui donnent foi en l’avenir des arts vivants. Ainsi en cette fin de semaine, alors qu’à Tropiques-Atrium la Biennale de danse lançait ses derniers feux, le public se pressait en nombre aux portes du théâtre Aimé Césaire, avide de savoir quel sort la troupe de L’autre Bord Compagnie avait réservé à Jeux de massacre, la dernière pièce du dramaturge Eugène Ionesco. Si la réputation de Guillaume Malasné et Caroline Savard n’est plus à faire, s’attaquer avec des comédiens amateurs à un texte de cette complexité, où souvent les répliques se suivent de façon insolite plutôt que de s’enchaîner, relevait de la gageure, et parler sur scène de la mort n’est certes pas chose aisée. Pari tenu, les vingt-quatre hommes et femmes de tous âges et de toutes professions, venus d’horizons divers mais réunis par une passion commune, ont su nous emmener avec eux dans leur monde, qui pour être fictif n’en parle pas moins de notre humanité.
Au singulier, le jeu de massacre évoque cette attraction de fête foraine, qui consiste à faire tomber, à l’aide de balles lancées, des figurines, ou des têtes de préférence caricaturales : dès le prologue, le ton est donné, entre le tragique de la situation — un mystérieux fléau, assimilable à la peste, ravage la ville — et la distance d’une ironie cynique prise par l’auteur.


Jeux de massacre, ou comment une expression innocente tirée d’un jeu anodin de démolition se fait litote humoristique d’un phénomène grave à grande ampleur ou encore, comment parler d’un sujet sérieux s’il en est, avec humour et légèreté. Un humours grinçant caustique au service d’une réflexion sur le thème de la mort.
On connaît bien en Martinique Xavier Lemaire et sa complice Isabelle Andréani et c’est un plaisir sans cesse renouvelé de les découvrir dans une nouvelle création. Celle-ci est à part, une pièce sur le théâtre et la mise en scène. X. Lemaire se met lui-même en scène avec un double rôle, celui de conférencier chargé d’expliquer son métier au public (avec des références empruntées à quelques monuments de la profession : Jouvet, Vitez, Mnouchkine) et celui de directeur d’acteurs, en l’occurrence les deux comédiens confrontés aux personnages de Martine et Sganarelle dans le Médecin malgré lui (quel autre auteur que notre grand Molière, en effet, aurait pu s’imposer pour ce genre d’exercice ?)

L’argument est inspiré de l’air du temps. De ce temps  au cours duquel la Méditerranée est (re)devenue un cimetière marin. Un temps qui déplace Lampedusa aux antipodes. Inatteignable. Eux, les migrants, corps ballottés par les vagues, crèvent dans un cri. Lui, l’artiste, sur les bords de la tombe il invente des objets d’art à partir des débris des naufrages. Elle, la journaliste, elle venue enquêter, elle écrit dans un journal. Les mourants crient, il crée et elle écrit. Comme le dit le texte.
— Par Roland Sabra —
La Cie Téatlari – Théâtre des Cultures créoles / José ALPHA
Entrée libre
Auteurs : René Escudié & Mohamed Adi
 
Comme Al Pacino avait réalisé son « looking for Richard » pour dire son amour de Shakespeare en prenant la liberté d’un travail conduit comme une enquête, Nicolas Bonneau, metteur en scène et comédien d’ailleurs seul en scène ; nous révèle avec « Looking for Alceste », à travers des répliques de Molière et un récit contemporain, les différentes formes de la misanthropie.
Un mythe ? Une invention européenne ? Une paresse intellectuelle de l’Occident ? Un concept fourre-tout ? Un évitement de la pensée ? Le produit d’une attitude globalisante pour ne pas avoir à prendre en compte une infinie diversité, un jaillissement d’incommensurables possibilités dans le refoulement d’une altérité sans laquelle pourtant, on ne peut être nommé, on ne peut être au monde. Tenue d’Arlequin aux dix mille couleurs, elle est une, en ce costume et multiple en ce qui le compose. Dans la note d’intention qui accompagne la création de « 2147, et si l’Afrique disparaissait », le metteur en scène Moïse Touré écrit : « «L’Afrique contient nos archives,[…] (elle) abrite encore avec l’Asie, les enjeux de l’ancien temps. L’Occident a nommé ce continent, réfléchir l’Afrique, c’est réfléchir à nos fragments de violence, de conquête, notre poétique. L’Afrique m’aide à penser notre humanité; elle est partout ».
Le concours est réservé aux jeunes de 15 à 25 ans de Martinique, Guadeloupe et Guyane.
Lorsqu’Adel Habbassi entreprend son Voyage dans l’œuvre théâtrale de Gérard Astor, toute entière sortie de la guerre d’Algérie subie dans son enfance, il traite de la position même du théâtre dans le monde d’aujourd’hui.
Avec : Charles Wattara, Paul Zoungrana, Rose-Esther Guignard, Richard Adossou, Ange Aoussou, Mamadou Diabaté, Ximena Figueroa, Djénéba et Fousco

