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Le « monolinguisme » créole est-il une utopie ?

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

« Le monolinguisme du ridicule » (Verly Sylvestre, Le National, Port-au-Prince, 26 juillet 2017) expose un corps d’idées intéressantes notamment en ce qu’il pointe du doigt le refoulement discriminant de la langue créole dans nombre d’écoles en Haïti où des enfants sont encore punis lorsqu’ils s’expriment de façon tout à fait légitime en créole. Avec justesse, l’auteur de l’article rappelle que la minorisation institutionnelle du créole est une pratique anti pédagogique jusqu’à présent largement assumée en Haïti dans le corps professoral en dépit des aspects positifs de la réforme Bernard des années 1980. Cela étant, il y a lieu toutefois d’apporter un certain éclairage sur l’un ou l’autre volet de l’article de Verly Sylvestre.

Haïti appartient-il à la Francophonie ou à la Créolophonie ? Haïti est membre de la Francophonie institutionnelle depuis 1970 mais il est conforme à la réalité historique de le qualifier de pays FRANCOCRÉOLOPHONE au sens où deux langues, le français et le créole, coexistent depuis 1804 dans les appareils d’État, dans le système éducatif et dans la population selon un usage différencié et inégalitaire.

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Grand deuil sur la poésie haïtienne et québécoise

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Quelques jours après le décès de notre ami le poète Claude Pierre qui nous a laissés sans voix et les yeux rouillés d’une « brûlante salinité de l’absence » (Anthony Phelps), la disparition à Montréal, le 30 juin 2017, de l’un des plus grands poètes surréalistes haïtiens du XXe siècle, Serge Legagneur, plonge la poésie haïtienne et québécoise dans un grand deuil.

Né le 10 janvier 1937 à Jérémie, ville que l’on assure être celle des poètes, Serge Legagneur est l’un des membres fondateurs, au début des années 1960, du groupe Haïti littéraire aux côtés de Davertige, Roland Morisseau, Anthony Phelps, Auguste Thénor et René Philoctète. Pour se mettre à l’abri du terrorisme d’État institué par François Duvalier, il rejoint à Montréal, en 1965, ses amis poètes Émile Ollivier et Anthony Phelps qui ont dû eux aussi quitter l’île-prison duvaliérienne, liberticide et mortifère.

Avant son départ pour le Canada, Serge Legagneur a œuvré aux deux revues du groupe Haïti littéraire : d’abord « Prisme », revue sonore de radio Cacique fondée par Anthony Phelps. Radio Cacique animait, tous les dimanches, une chronique culturelle : trente minutes de poésie, un jeu radiophonique et une pièce de théâtre de trente minutes.

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La question linguistique haïtienne : Textes choisis

— Par Robert Berrouët-Oriol et Hugues Saint-Fort —

Éditions Zémès
288
Port-au-Prince, juin 2017

L’observateur : En 2011, vous avez co-rédigé, avec le linguiste Hugues Saint-Fort et al, le livre de référence «L’aménagement linguistique en Haïti : enjeux, défis et propositions » (Éditions de l’Université d’État d’Haïti et du Cidihca). Aujourd’hui, à Livres en folie, vous publiez « La question linguistique haïtienne / Textes choisis » (Éditions Zémès). Qu’apporte de nouveau cette publication aux lectorats d’Haïti et de la diaspora ?

Robert Berrouët-Oriol – Le livre « La question linguistique haïtienne / Textes choisis » prolonge l’état des lieux et les propositions contenues dans « L’aménagement linguistique en Haïti : enjeux, défis et propositions » et, également, il innove. Il mûrit en l’approfondissant le diagnostic posé dans « L’aménagement linguistique en Haïti : enjeux, défis et propositions ». Cette nouvelle publication accorde une large place à la créolistique avec des textes de haute facture de Hugues Saint-Fort, et ma contribution éclaire mieux la situation linguistique du pays à l’aune de la jurilinguistique. Ce livre étaye davantage les notions centrales de « droits linguistiques », de « droit à la langue maternelle créole », d’« équité des droits linguistiques », de future « parité statutaire entre le créole et le français », de « politique linguistique d’État » et de « loi contraignante d’aménagement linguistique » ciblant simultanément le créole et le français.

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Un corpus de discours scientifiques sur le créole

— Par Leslie Péan, économiste et historien —

« LA QUESTION LINGUISTIQUE HAÏTIENNE / TEXTES CHOISIS »

Robert Berrouët-Oriol & Hugues Saint-Fort

Éditions Zémès

288 pages

Port-au-Prince

Juin 2017

Au fil des années, nous sommes intervenus sur les questions linguistiques et sur le créole en quelques occasions. D’abord en écrivant un texte d’économie en créole pour la revue Sèl intitulé « Kèk nòt sous balans-péman pandan diktati Divalié yo (1957-1975) » (SÈL, jounal ayisyin aletranje, no 30-31, Brooklyn, New-York, 1976). Par la suite, nous avons publié douze articles sur cette question entre 2013 et 2016.     

  •  Économie d’une langue et langue d’une économie, Le Nouvelliste, 25 février 2013.
  •  Retour sur l’article « Économie d’une langue et langue d’une économie » (Première partie), AlterPresse, 25 mars 2013.
  •  Retour sur l’article « Économie d’une langue et langue d’une économie » (Deuxième partie), AlterPresse, 26 mars 2013.
  • Marasme économique, transmission des savoirs et langues (texte en sept parties), AlterPresse, 23, 25 mai, 1, 3, 7, 9, 11 juin 2013.
  • Le danger d’une approche superficielle d’une question complexe, (Première partie), Le Nouvelliste, 14 avril 2016.

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La question linguistique haïtienne / Textes choisis

Robert Berrouët-Oriol et Hugues Saint-Fort
Éditions Zémès
288 pages
Port-au-Prince, juin 2017

 Q.1Le National : En 2011, vous avez co-rédigé, avec le linguiste Robert Berrouët-Oriol et al, le livre de référence « L’aménagement linguistique en Haïti : enjeux, défis et propositions » (Éditions de l’Université d’État d’Haïti et Cidihca). Aujourd’hui, à Livres en folie, vous publiez « La question linguistique haïtienne / Textes choisis » (Éditions Zémès). Qu’apporte de nouveau cette publication aux lectorats d’Haïti et de la diaspora ?

R.1 – Hugues Saint-Fort : Le livre « L’aménagement linguistique en Haïti : enjeux, défis et propositions » que mes collègues linguistes Robert Berrouët-Oriol, Darline Cothière, Robert Fournier et moi avons publié en 2011 est un livre de référence, c’est-à-dire un ouvrage fait pour être consulté, dans la lignée d’un dictionnaire ou d’une encyclopédie par exemple.

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Aménagement du créole et du français

Plaidoyer pour la création d’une Secrétairerie d’État aux droits linguistiques en Haïti

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Montréal, le 20 avril 2017

L’épineuse « question linguistique haïtienne » –étudiée par Pradel Pompilus entre autres dans sa thèse de doctorat soutenue à la Sorbonne en 1961, « La langue française en Haïti »–, fait régulièrement la « Une » dans les médias, au pays comme en outre-mer. De différentes manières, elle est mise en débat tant par de simples citoyens que par des enseignants et des linguistes. De plus en plus nombreux sont ceux qui s’efforcent de mieux comprendre cette complexe problématique linguistique et des linguistes s’efforcent de la dénouer à la lumière des sciences du langage. Pour notre part, nous avons une nouvelle fois contribué à cet éclairage par la publication, le 7 février 2017, du texte « Les grands chantiers de l’aménagement linguistique d’Haïti (2017 – 2021)i » qui expose à la fois une claire vision de l’aménagement concomitant de nos deux langues officielles et l’impératif de la formulation/mise en œuvre de la première politique linguistique nationale de l’État haïtien qui saura instituer pareil aménagement.

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« Le français haïtien, une variété à part entière »

— Par Robert Berrouët-Oriol —

Montréal, le 16 mars 2017

En prélude aux célébrations de la Journée internationale de la francophonie célébrée le 20 mars de chaque année, l’article « Le français haïtien, une variété à part entière » paru à Port-au-Prince le 15 mars 2017 dans le quotidien Le National relate la participation de la Faculté de linguistique appliquée aux activités lancées le 14 mars par des représentants du gouvernement et de l’OIF (Organisation internationale de la Francophonie). L’article offre un très bref aperçu de l’intervention du linguiste Renauld Govain, doyen de la Faculté de linguistique appliquée, intitulée « Les apports de la francophonie haïtienne dans la francophonie internationale ».

Les habitués du National liront avec intérêt, bientôt souhaitons-le, l’intégralité de la conférence du linguiste Renauld Govain. Il est l’auteur, il convient de le rappeler, du livre « Les emprunts du créole haïtien à l’anglais et à l’espagnol » (éd. L’Harmattan, Paris, 2014) et de plusieurs articles scientifiques scrutant une réalité historique trop souvent oblitérée par certains prédicateurs créolistes fondamentalistes, le patrimoine linguistique haïtien bilingue créole-français. On (re)lira donc avec profit les études suivantes : Govain R.

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Les grands chantiers de l’aménagement linguistique d’Haïti (2017 – 2021)

— Par Robert Berrouët-Oriol —

Courant 2011, suite aux défis majeurs induits par le tremblement de terre de 2010, quatre linguistes ont fait paraître le livre de référence « L’aménagement linguistique en Haïti : enjeux, défis et propositions » (par Berrouët-Oriol, R., D.,  Cothière, R., Fournier, H., Saint-Fort; coédition du Cidihca et Éditions de l’Université d’État d’Haïti). Le livre est préfacé par le linguiste québécois Jean Claude Corbeil, l’une des sommités mondiales en matière d’aménagement linguistique et auteur du fameux « Dictionnaire visuel » traduit en 35 langues.

Salué par la critique, l’ouvrage –bien reçu en Haïti et en diaspora dans différents milieux et amplement diffusé–, invitait à la réflexion et à l’action concertée autour de neuves notions structurant une forte vision. Pour la première fois dans l’histoire des idées au pays, le « problème linguistique haïtien » était analysé à travers l’articulation de notions essentielles relevant de domaines liés, notamment la jurilinguistique1 et l’aménagement linguistique2 entendu au sens de « Mise en place de la politique linguistique, lorsqu’un État a choisi d’intervenir explicitement sur la question des langues » (Grand dictionnaire terminologique du Québec).

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Graphie officielle du créole haïtien : de la nécessité d’une vigilance critique

— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

Montréal, le 4 janvier 2017

Alors même que l’on croyait le sujet longtemps dépassé, la graphie du créole haïtien est aujourd’hui encore, chez quelques-uns, objet de confusion historique, d’amalgame et de préjugés réducteurs. C’est ce qui ressort de l’article « Rencontre avec Madeleine Begon Fawcett, lanceuse d’alerte (3) » – (Entrevue avec Marie Alice Théard, Le National, Port-au-Prince, 27 décembre 2016).

La lecture de la troisième partie de l’entrevue montre d’évidence que Madeleine Begon Fawcett charrie plusieurs erreurs historiques et des préjugés réducteurs et dommageables sur la graphie du créole ainsi que sur les enjeux réels des réformes éducatives passées.

Le lecteur attentif aura bien noté que Madeleine Begon Fawcett, dans son entrevue, ne prend appui sur aucun texte de référence, sur aucune étude sociolinguistique connue sur le créole pouvant conforter ses erratiques affirmations qui, je le précise, ne sont pas crédibles au plan scientifique. Ainsi, faisant fi des travaux de la créolistique de ces quarante dernières années et de toute référence documentaire accessible, elle trafique la vérité historique lorsqu’elle invente de toutes pièces un OVNI, une pseudo « réforme Connell-Laubach [sic] du créole avec une graphie américaine [sic] (pois devient pwa, manger une bouillie devient « bwè labouyi) ».

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« Les Jeux du dissemblable. Folie, marge et féminin en littérature haïtienne contemporaine »

 Un livre majeur et de grande érudition de Stéphane Martelly

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— Par Robert Berrouët-Oriol —

Stéphane Martelly, –poète, peintre et chercheure postdoctorale en recherche-création à l’Université Concordia–, a fait paraître, le 30 novembre 2016 à la Librairie Gallimard de Montréal, « Les jeux du dissemblable. Folie, marge et féminin en littérature haïtienne contemporaine » (Éditions Nota bene). Ce livre est issu de sa thèse de doctorat soutenue en mai 2014 à l’Université de Montréal.

Déjà connue à l’échelle internationale pour avoir publié le livre qui, selon mon analyse, est la plus exhaustive et méthodique étude de l’œuvre du poète Magloire Saint-Aude –« Le sujet opaque – Une lecture de l’oeuvre poétique de Magloire-Saint-Aude », Paris : L’Harmattan, 2001–, Stéphane Martelly offre aujourd’hui à tous ceux qui s’intéressent à la littérature haïtienne contemporaine un livre majeur et de grande érudition, une référence analytique fort bien documentée qui fera date dans la réception critique de cette littérature.

Le livre « Les jeux du dissemblable. Folie, marge et féminin en littérature haïtienne contemporaine » se déploie sur 379 pages dans une langue de grande clarté argumentative.

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Dictionnaire monolingue du créole haïtien

Appel au débat public sur un sujet majeur de société

robert_berrouet-oriol— Par Robert Berrouët-Oriol —

Linguiste-terminologue

Montréal, le 28 novembre 2016

L’annonce de la prochaine mise en ligne, par des étudiants de quatrième année de la Faculté de linguistique de l’Université d’État d’Haïti, d’« Un dictionnaire numérique du créole haïtien en gestationi » a soulevé bien des interrogations tant au pays qu’en outre-mer. Cette annonce a été suivie de textes critiques examinant un projet entrepris par de jeunes universitaires inconnus au bataillon des lexicographes professionnels et sans qualification ni expérience dans le domaine hautement spécialisé de la dictionnairiqueii. Ces textes sont principalement consignés, en Haïti, dans le quotidien Le National, et, ailleurs, sur les sites Madinin’Art, Potomitan et Montray kreyòl habituellement visités par les lectorats des Antilles et de la diaspora.

Afin de prolonger et d’enrichir la réflexion sur le rôle d’un dictionnaire monolingueiii de la langue usuelle et en particulier APPELER AU DEBAT PUBLIC sur la complexe question d’un dictionnaire monolingue du créole haïtieniv, il est essentiel de (re)lire les textes suivants accessibles sur le site www.berrouet-oriol.com

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Dictionnaire créole numérique : le poids des mots !

— Par Roody Edmé —

roody_edmeDans un récent article ayant pour titre « Le dictionnaire numérique du créole haitien : mirage, amateurisme ou labeur de haute exigence scientifique » paru sur son site www. Berrouet-Oriol.com et relayé sur Madinin’Art, l’écrivain et linguiste Robert Berrouet-Oriol s’alarme vigoureusement contre le projet d’un groupe d’étudiants de la Faculté de Linguistique de l’Université d’État d’Haïti de mettre en ligne un dictionnaire du créole haïtien. Le coordonnateur et co-auteur du précieux ouvrage autour de l’aménagement linguistique en Haïti tire la sonnette d’alarme sur les multiples dangers d’une entreprise académique aussi spontanée qu’hasardeuse.

Il s’insurge avec toute la puissance théorique d’un chercheur expérimenté contre une initiative, volontariste, mais ô combien risquée ! Rédiger un dictionnaire créole unilingue numérique est à ce stade des études, la quatrième année, très au-dessus des compétences des étudiants.

Le scientifique et ardent défenseur des droits linguistiques des unilingues Haïtiens expose dans cet article les conditions nécessaires et suffisantes d’une initiative aussi ambitieuse. Avec la sévérité du professeur rigoureux, il étale tout au long de son texte le maillage d’expertises indispensable à une opération académique particulièrement exigeante.

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Les grands chantiers de la traduction en créole haïtien

— Par Robert Berrouët-Oriol, Linguiste-terminologue —
Montréal, le 18 janvier 2015kreyol_haitian
La traduction vers le créole haïtien s’apparente souventes fois au parcours du combattant traversant nus pieds le champ miné des bonnes intentions. Si la fausse idée selon laquelle on ne commet pas de « fautes » dans l’écriture du créole est bien avérée chez nombre de bilingues créole-français, il est tout aussi avéré que plusieurs locuteurs natifs du créole s’improvisent traducteurs vers le créole sous prétexte d’être détenteurs d’une connaissance intime de leur langue maternelle.  Est-il aujourd’hui possible de dégager les caractéristiques d’ensemble du marché de la traduction en Haïti ? Dispose-t-on d’un profil général des traducteurs qui œuvrent sur une base professionnelle ? Vers quelle langue cible traduit-on principalement au pays ? Y a-t-il en Haïti une institution offrant une formation ciblée en traduction ? La présente étude, en suivant le fil du premier grand chantier de traduction en Haïti, entend répondre à ces questions et s’attachera à identifier et à analyser quelques problèmes de traduction; ensuite elle fera d’utiles suggestions dans la perspective de la formation académique et professionnelle.


1. Mise en contexte de l’activité traductionnelle

La traduction généraliste et la traduction technique et scientifique vers le créole se heurtent à un déficit de formation que nous allons identifier au plan institutionnel.

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Le dictionnaire numérique du créole haïtien : mirage, amateurisme ou labeur de haute exigence scientifique ?

— Par Robert Berrouët-Oriol, Linguiste-terminologue —

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« Un dictionnaire numérique du créole haïtien en gestation » est le titre, fringant, d’un article paru à Port-au-Prince dans Le National du 27 octobre 2016. L’article, qui traite d’un futur dictionnaire numérique du créole « qui contiendra dix mille entrées », précise que « L’idée est apparue dans un cours de sémantique et lexicologie au moment où deux camarades discutaient de quelques sujets qui pourraient leur inspirer leur mémoire de sortie ». Une idée comme une autre, « apparue » sous le ciel complaisant des bonnes intentions, comme un salutaire numéro de « borlette » à lotto.com …

Ce projet de dictionnaire soulève de nombreuses questions chez nombre d’enseignants et de linguistes. Comment « une vingtaine d’étudiants finissants en sciences du langage » –qui n’ont même pas bouclé au premier cycle une licence généraliste à l’université, qui n’ont pas encore été formés à la recherche en lexicologie au second cycle (niveau maîtrise ou DESS), qui n’ont publié aucune étude scientifique connue sur le créole, et qui sont inconnus au bataillon des lexicographes professionnels–, comment ces étudiants peuvent-ils conceptualiser, rédiger et mettre en ligne un dictionnaire numérique du créole haïtien ?

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Mise à mort de la fécondité des connaissances en Haïti

Par Robert Berrouët-Oriol

Paru dans AlterPresse, Port-au-Prince, le 13 juillet 2016

 C’est à titre de poète et d’enseignant que j’ai reçu de plein fouet et avec une immense tristesse, depuis Port-au-Prince, la nouvelle du décès par balles assassines de deux de mes anciens étudiants : Michel Stéphane Bruno tué le 15 juin 2016 à Puits Blain (Pétion-Ville) et Whilems Édouard trucidé le 8 juillet 2016 à Pétion-Ville.

Michel Stéphane Bruno a été mon étudiant en linguistique et communication à l’Université Quisqueya, tandis qu’en 4e année j’ai enseigné la terminologie à Whilems Édouard à la Faculté de linguistique appliquée. Je garde d’eux le souvenir attachant de deux jeunes universitaires curieux, l’esprit alerte, apprenants méthodiques et exigeants, ouverts aux rapports humains enrichissants et respectueux de l’Autre.

Ces décès par balles assassines sont choquants et révoltants. Deux morts de plus, deux morts de trop dans un pays dont la criminalisation des structures et des moeurs remonte au terrorisme d’État duvaliériste, aux assassinats ciblés et à grande échelle de la dictature des Duvalier père et fils… Assassiner la vie en assassinant l’esprit est en effet l’une des principales chapes de plomb épandues sur le pays haïtien depuis la mortifère nuit duvaliériste…

Deux jeunes sont fauchés au cœur même de la fécondité des connaissances, dans le cours productif de leurs prestations professionnelles novatrices et reconnues.

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Avons-nous vraiment besoin d’une Académie créole aujourd’hui en Haïti ?

— Par Robert Berrouët-Oriol, Linguiste-terminologue —

akademi_kreyolL’Académie créole : « lobby », « ONG » ou Institution d’Etat sous mandat d’aménagement linguistique?

Avons-nous vraiment besoin d’une Académie [1] créole aujourd’hui en Haïti ? Cette question a été abordée par des gens de tous horizons au cours des dernières années et a suscité de l’intérêt. Suite aux démarches d’un comité dédié à l’établissement d’une telle institution, le sénat a voté en 2012 la loi sur l’Académie du créole haïtien et la chambre des députés l’a fait en 2013. Contraint, l’Exécutif y a donné mollement suite en publiant dans Le Moniteur du 7 avril 2014 la loi portant sur l’organisation et le fonctionnement de cette nouvelle institution. L’installation du conseil des 33 académiciens [2] de la langue créole était prévue le mardi 28 octobre 2014 lors de la Journée internationale de la langue créole.

« Ma réflexion, aujourd’hui, portera sur la confusion des genres et l’amalgame des mandats dans le projet Académie créole : confusion entre l’objet réel institué (l’Académie) et le fait qu’elle n’est dotée dès le départ d’aucun pouvoir juridique d’intervention contraignante et normative à l’échelle de l’État, en particulier dans le domaine premier et pionnier de l’aménagement linguistique.

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Haïti, pays invité d’honneur du Salon du livre de Montréal

20 au 25 novembre 2013

Suite aux Rencontres québécoises tenues en Haïti du 1er au 8 mai 2013 à l’occasion des dix ans de Mémoire d’encrier, le Salon du livre de Montréal accueille Haïti comme pays invité d’honneur. Pour la présente édition, qui se déroule sous le thème «Une passerelle entre les cultures», Haïti déploie son imaginaire à la Place Bonaventure.En savoir plus

Pour l’occasion, des écrivains haïtiens sont parmi nous :Yanick Lahens, Kettly Mars, Emmelie Prophète, Laënnec Hurbon, James Noël, Jean-Robert Léonidas, Jean-Euphèle Milcé, Michel Soukar et Gary Victor.

Sont également présents des professionnels du livre: Monique Lafontant, librairie La Pléiade, Anaïse Chavenet, Communication Plus Distribution, Charles Tardieu, éditions Zémès. L’ancienne première ministre Michèle Duvivier Pierre-Louis, figure emblématique du changement en Haïti et présidente de la Fondation Connaissance & Liberté (FOKAL), fait aussi partie de la délégation.

 

 

 

 

Voir la vidéo de Bonjour voisine.

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La tentative de réhabilitation de J-C Duvallier est un flagrant déni de justice

Lettre ouverte d’un poète au quotidien Le Nouvelliste d’Haïti

 

Robert Berrouët-Oriol

Linguiste-terminologue

Montréal, le 13 février 2013

Courriel : tradutexte.in ter@hotmail.com

En Haïti, la période durant laquelle se tient le carnaval est un moment privilégié d’expression de toutes les outrances du langage et des frustrations de la vie quotidienne. Elle peut être également propice à la diffusion d’idées négationnistes1et fallacieuses dans les champs historique et politique. Formulées en pareil contexte, les idées négationnistes passent souvent presqu’inaperçues : l’éructation carnavalesque, seule, mugit dans la Cité, couvrant de sa bave burlesque toute autre parole.

Arthur V. CALIXTE, duvaliériste et tonton-macoute notoire, homme de main des Duvalier père et fils, vient de mettre à profit pareil contexte en publiant dans Le Nouvelliste du 8 février 2013, comme à la dérobée, anba pay, un article mystificateur et négationniste : « Jean-Claude Duvalier, la grande victime de l’histoire » (http://www.lenouvelliste.com/article4.php?newsid=113360). Fier ilote d’une sourde tentative de réhabilitation du nazillon haïtien, Arthur V. CALIXTE réécrit l’Histoire, s’inscrit dans le déni des faits connus et fabrique, pince-sans-rire, un Jean-Claude Duvalier « victime » et « dictateur progressiste ».

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Flagrant malaise dans la littérature…


— Par Robert Berrouët-Oriol —

Linguiste-terminologue

Montréal, le 28 mai 2012

Défaillance,   dérangement, désagrément, désarroi, éblouissement, embarras… On dispose d’une ample récolte de synonymes pour exprimer la notion de ‘’malaise’’. À la suite des textes publiés ces trois derniers mois, sur différents sites et journaux, par de jeunes poètes haïtiens et qui illustrent l’actuel malaise dans la littérature, voici que paraît aujourd’hui, sur le site Potomitan, la  »Lettre ouverte à un poète que j’apprécie : Georges Castera »1. Cette nouvelle lettre ouverte porte la signature du poète Anivince Jean-Baptiste et elle est d’abord parue sur le site Haïti News 2000. Le document que publie aujourd’hui Potomitan m’a été aimablement acheminé, hier, par le jeune poète Claude Sainnécharles.

Dans le champ littéraire haïtien, cette nouvelle interpellation publique des écrivains ‘’aînés’’ par les jeunes poètes mérite une attention critique et elle intervient en écho à la nécessaire et rigoureuse appréciation de la gestion autocratique et préjudiciable de l’extraordinaire activité dénommée ‘’Étonnants voyageurs – Haïti’’ déjà mise en cause publiquement. Au jour d’aujourd’hui, les responsables de ‘’Étonnants voyageurs – Haïti’’ n’ont pas consenti à répondre avec hauteur de vues et de manière responsable aux jeunes poètes haïtiens sur certaines questions de fond qu’ils ont courageusement soulevées.

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Les lettre haïtiennes, vivement, de la France à l’Italie

Reportage

–__-

De gauche à droite: James noël, Robert Berrouët-Oriol, Yves Chemla, Jean-Durosier Desrivières, Anthony Phelps et Joël Des Rosiers, Salon du livre de Paris, stand de la Librairie du sud

 Par Robert Berrouët-Oriol

Linguiste-terminologue

 Montréal, le 4 avril 2012

Il est des temps de haute-lisse qui se tissent et s’engravent rive gauche de la mémoire… Mon dernier séjour en Europe, à l’aune d’une hospitalité de tous les instants, a été de cette cuvée –et je me réjouis que les Lettres haïtiennes en fussent le faîtage. Avec bonheur, j’ai encore une fois arpenté les venelles du Salon du livre de Paris, Porte de Versailles, du 16 au 19 mars 2012. Auteur invité par la Région Bretagne à la version 2012 de ce Salon, j’y étais, au stand de cette Région, en dédicace pour le livre « Poème du décours » (Éditions Triptyque et Prix du livre insulaire 2010 à Ouessant, France), ainsi que pour la réédition de « L’aménagement linguistique en Haïti : enjeux, défis et propositions » (Éditions du CIDIHCA et Éditions de l’Université d’État d’Haïti).

 

D’aucuns posent que le Salon du livre de Paris est l’un des deux plus importants événements mondiaux de ce champ… Alors faut-il parler chiffres ?

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Aménagement du créole et du français en Haïti


creole
L’ÉCOLE EN CRÉOLE, EN FRANÇAIS, DANS LES DEUX LANGUES ?
ÉTAT DE LA QUESTION ET PERSPECTIVES

Table-ronde, Association des enseignants haïtiens du Québec (AEHQ)
Montréal, le 16 octobre 2011 (version écourtée et remaniée : 30 novembre 2011)

Robert Berrouët-Oriol
Linguiste-terminologue

Pour contribuer de manière constructive à la réflexion de la table-ronde d’aujourd’hui dont le thème est « L’école en créole, en français, dans les deux langues ? État de la question et perspectives », je caractériserai la situation linguistique haïtienne sur quatre axes principaux. Ces quatre axes analytiques constituent la charpente à partir de laquelle notre vision est construite, et cette vision légitime et donne lieu à une perspective centrale –l’aménagement des deux langues officielles d’Haïti à l’échelle du pays tout entier. Et c’est à partir de cette vision centrale que j’interrogerai le sous-ensemble « aménagement des langues officielles dans le système éducatif national ». Le fil conducteur de ma pensée sera donc le suivant : l’État haïtien doit-il adopter sa première législation contraignante en matière d’aménagement linguistique afin de légitimer et d’encadrer l’aménagement et du créole et du français dans le système éducatif national, de la maternelle à l’enseignement secondaire, universitaire et technique ?

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Desrivières, poète créole.

— Par Michel Herland.—

 Jean-Durosier Desrivières dont les lecteurs connaissent peut-être déjà le recueil précédent, « Bouts de ville à vendre » (1), qui racontait la ville de Port-au-Prince (d’avant la catastrophe du 12 janvier 2010) en des vers jubilatoires, nous offre maintenant un choix de poèmes redoublés, la version créole (que l’on doit croire originale) sur la page de gauche faisant face à la version française à droite (2). L’exercice qui consiste à produire deux poèmes qui disent la même chose (ou à peu près) en des langues différentes est évidemment risqué.

Quoi qu’il en soit, cet exercice dont Robert Berrouët-Oriol, dans sa préface, rappelle qu’il a déjà été tenté par Georges Castera dans « Tanbou kreyol – Tambour créole », nous pousse inévitablement à comparer les vertus des deux propositions poétiques, celle en créole haïtien et celle en français standard. Qu’on en juge :

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Haïti : déménagement linguistique

Par Yves Dejean  [1]

Maturation et spontanéité linguistiques

 

Les recherches et les progrès en linguistique de la seconde moitié du vingtième siècle ont mis en lumière l’acquisition naturelle et rapide de la ou des langues de leur environnement par tous les enfants normaux dès leur naissance (et même avant, à en juger par les recherches récentes de Jacques Mehler and Emmanuel Dupoux sur l’acquisition in utero ; voir Mehler J, Dupoux E. 1994. What Infants Know : The New Cognitive Science of Early Development. Cambridge, MA : Blackwell). La réalité et la nature de ce phénomène humain universel contrastent vivement avec l’apprentissage d’une langue étrangère par des personnes qui se donnent la peine de l’étudier. Cet apprentissage est souvent laborieux, lent, incomplet, boiteux et sujet à régression.

 

Quand on propose l’apprentissage du français à plus de huit millions de créolophones unilingues d’Haïti comme une entreprise obligatoire dans un système scolaire, il est nécessaire de réfléchir sérieusement à sa possibilité, sa praticabilité et son coût en temps, efforts, matériel, argent et enseignants. L’examen de cet aspect du problème semble totalement ignoré ou escamoté par les auteurs d’un livre récent L’Aménagement linguistique en Haïti : Enjeux, défis et propositions (par Robert Berrouët-Oriol, Darline Cothière, Robert Fournier et Hugues St-Fort, Éditions du CIDHICA et de l’Université d’État d’Haïti, 2011).

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La pratique écrite du créole haïtien, entre fiction et diction. * Tèks envante, tèks lide ak tèks tradwi !

Par Jean-Durosier DESRIVIERES

En dehors d’autres outils sans doute de grandes valeurs, les haïtiens disposent, de façon légitime et légale, de deux langues – le créole et le français – pour investir pleinement leur imaginaire. A l’instar des vrais bilingues se permettant de passer d’un territoire linguistique à l’autre sans failles, notamment sur le plan oral, je m’autorise un exercice similaire dans ce texte (ainsi commandé), dépourvu pourtant de tout esprit démagogique et de toute sensibilité au quota. En ce sens, je ne saurais ignorer mon adhésion aux concepts et notions largement mis en valeur par Robert Berrouët-Oriol dans ce lumineux ouvrage collectif (autres collaborateurs : Darline Cothière, Robert Fournier et Hugues St-Fort), d’une extrême rigueur méthodologique, qu’il a coordonné : L’aménagement linguistique en Haïti : enjeux, défis et propositions [1] , lequel fait l’éloge de la francocréolophonie haïtienne et propose une convergence linguistique dans l’enseignement et la pratique des langues au pays. J’y reviendrai.

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Plaidoyer pour une lexicographie créole de haute qualité scientifique

— Par Robert-Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —

De la nécessité de promouvoir un lexicographie créole de haute qulité scientifique et de soumettre à l’analyse critique ainsi qu’au débat public tout pseudo «  modèle lexicographique » créole fantaisiste, rachitique et amateur contraire à la méthodologie de la lexicographique professionnelle.

À la suite de la parution en Haïti, dans Le National du 11 novembre 2021, de mon article titré « De l’usage du créole dans l’apprentissage scolaire en Haïti : qu’en savons-nous vraiment ? , j’ai enregistré divers commentaires confirmant qu’il y a communauté de vue entre nombre d’enseignants oeuvrant en Haïti et moi. Cette communauté de vue se rapporte aux différents problèmes que soulève l’usage du créole dans l’apprentissage scolaire et à la nécessité d’une véritable qualification didactique pour l’enseignement en langue maternelle créole. L’un de mes interlocuteurs me demande toutefois de préciser ma pensée sur la situation linguistique d’Haïti, notamment au regard de la production de matériel didactique en créole. La réponse à cette demande emprunte la voie d’un plaidoyer pour une lexicographie créole de haute qualité scientifique, et ce plaidoyer s’adresse aux enseignants, aux linguistes, aux didacticiens, aux directeurs d’écoles, aux rédacteurs et éditeurs de manuels scolaires ainsi qu’aux cadres du ministère de l’Éducation nationale.

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