INTERVIEW
L’historien Pascal Blanchard revient sur les attaques dont la ministre est victime.
Des cris de singe, des bananes brandies, des dessins de guenon. «Je n’ai rien à dire à des personnes qui profèrent de telles paroles, qui sont je le rappelle, un délit.» Hier encore, interpellée sur les insultes racistes qu’elle essuie régulièrement, Christiane Taubira a rappelé sa ligne : ne pas surréagir sur les attaques à sa personne, mais s’inquiéter des paroles racistes proférées avec une impunité de plus en plus grande. Pascal Blanchard est historien, il a notamment codirigé la France noire en 2011 et la France arabo-orientale, qui vient de sortir aux Editions La Découverte.
Christiane Taubira est la cible d’insultes racistes de plus en plus brutales. Pourquoi ?
L’erreur serait de penser que cette brutalité n’existait pas avant. En réalité ce qui était invisible est rendu visible, un interdit a sauté. Des mots qui étaient il y a peu de l’ordre du scandale ou de l’interdit surgissent sur la scène publique : lors de manifestations ou dans les reportages télévisés. Ce qu’on entendait jusqu’alors dans les stades de foot – des cris de singe à l’entrée des joueurs sur le terrain, des phrases comme «il y a trop de Noirs dans l’équipe de France» – est dit désormais tout à fait ouvertement contre une ministre.