Une fille sur dix est victime de violences sexuelles

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L’Unicef publie un rapport terrifiant sur les violences faites aux enfants dans 190 pays. Il établit qu’une victime d’homicide sur cinq est un enfant.

« Cachée sous nos yeux » : le nouveau rapport publié par l’Unicef dresse un tableau terrible de la violence subie par les enfants dans le monde. Selon les données de ce rapport, environ 120 millions de filles de moins de 20 ans, soit une sur dix dans le monde, ont subi des violences sexuelles. Autre chiffre non moins terrifiant : en 2012, une victime d’homicide sur cinq était un enfant. L’étude s’appuie sur « la plus importante collecte de données jamais effectuée » dans quelque 190 pays.

Si 120 millions de jeunes filles sont victimes de violences sexuelles dans le monde, les plus exposées à ces violences se trouvent en Afrique subsaharienne. Parmi les adolescentes mariées âgées de 15 à 19 ans, une sur trois a été victime de violences émotionnelles, physiques ou sexuelles perpétrées par son mari ou partenaire. Cette forme de sévices est plus répandue en République démocratique du Congo et en Guinée équatoriale que dans le reste du monde.

Dix données sur la violence contre les enfants

 1– En 2012 seulement, presque 95 000 enfants et adolescents de moins de 20 ans ont été victimes d’homicide – soit près d’une victime d’homicide sur 5 cette année-là.

2– Dans le monde, environ 6 enfants sur 10  âgés de 2 à 14 ans (soit près d’un milliard) subissent des châtiments corporels infligés régulièrement par les personnes qui s’occupent d’eux.

3– Près d’un élève sur trois âgé de 13 à 15 ans dans le monde affirme avoir participé à un ou plusieurs bagarres physiques au cours de l’année écoulée.

4– Dans le monde, plus d’un élève sur trois âgé de 13 à 15 ans subit au moins un acte d’intimidation de manière régulière.

5– Environ un adolescent de 13 à 15 ans sur trois en Europe et Amérique du Nord a admis avoir intimidé d’autres élèves à l’école au moins une fois au cours des deux derniers mois.

6– Parmi les filles âgées de 15 à 19 ans dans le monde, près d’un quart (près de 70 millions) ont affirmé avoir été victimes d’une forme de violence physique ou une autre depuis l’âge de 15 ans.

7– Environ 120 millions de filles  dans le monde (environ une sur dix) ont subi des rapports sexuels forcés ou d’autres actes sexuels forcés à un moment de leur vie. Les garçons sont également en position de risque, mais on ne dispose pas d’estimation mondiale à cause de l’absence de données comparables dans la plupart des pays.

8– Dans le monde, près d’une adolescente sur trois âgée de 15 à 19 ans (84 millions) a été victime de violences émotionnelles, physiques et/ou sexuelles commises par son mari ou partenaire.

9– Environ 3 adultes sur 10  dans le monde pensent que le châtiment corporel est nécessaire pour élever ou éduquer correctement un enfant.

10– Près de la moitié des filles  de 15 à 19 ans dans le monde (environ 126 millions) pensent qu’il est parfois justifié qu’un mari ou un partenaire frappe ou batte sa femme.

Note : ces estimations se fondent sur un sous-ensemble de pays diposant de données portant sur 50 pour cent ou plus de leur population d’enfantss et d’adultes dans les catégories d’âge respectives.

Sources : Données mondiales de l’UNICEF, 2014, sur la base d’Enquêtes démographiques et sanitaires (EDS), d’Enquêtes mondiales sur la santé des élèves en milieu scolaire (GSHS), de l’Étude HBSC sur les comportements en matière de santé des enfants en âge d’aller à l’école, d’Enquêtes en grappes à indicateur multiple (MICS), d’autres enquêtes nationales et d’autres études pertinentes. Les données sur la population proviennent de Perspectives de la population mondiale: la révision de 2012,édition CD-ROM, de la Division de la population, Départeent des affaires économiques et sociales des Nations Unies, 2013


Le rapport de l’UNICEF

Un nouveau rapport de l’UNICEF présente les dernières statistiques sur la violence envers les enfants, à partir des données de 190 pays. En étudiant les formes de violence ainsi que les attitudes et normes sociales dans le monde, il met en lumière un problème jusqu’à présent insuffisamment documenté. Le rapport a pour objectif d’utiliser des données pour rendre la violence envers les enfants, ainsi que ses nombreuses ramifications, plus visibles, de permettre une meilleure compréhension de son ampleur et de sa nature, et de proposer des pistes pour sa prévention. Bien que des efforts plus soutenus soient nécessaires pour renforcer la disponibilité de données fiables et complètes à ce sujet, les résultats présentés ici sont un appel vibrant à l’action.

Présentation
La protection des enfants contre toutes les formes de violence est un droit fondamental garanti par la Convention relative aux droits de l’enfant et d’autres traités et normes relatifs aux droits de l’homme. Pourtant, la violence demeure très présente dans le quotidien des enfants dans le monde – indépendamment de leur contexte économique et social, de leur culture, de leur religion ou de leur origine ethnique – avec des conséquences immédiates comme à long terme. Les enfants qui ont souffert de sévices ou de négligence graves sont souvent ralentis dans leur développement, connaissent des difficultés d’apprentissage et obtiennent de mauvais résultats à l’école. Ils peuvent avoir une faible estime d’eux-mêmes et souffrir de dépression, pouvant mener, au pire, à des comportements à risque ou à des blessures auto-infligées. Être témoin de violences peut provoquer une détresse similaire. Les enfants qui grandissent dans des foyers ou communautés violents ont tendance à intérioriser ces comportements comme un moyen de régler les conflits, et reproduisent ces modèles de violences et de sévices envers leurs propres conjoint(e) s et enfants. Au-delà de ses conséquences tragiques sur les individus et les familles, la violence envers les enfants s’accompagne de sérieux coûts économiques et sociaux dans la mesure où elle implique une perte de potentiel et une baisse de la productivité.

Depuis une décennie, le caractère omniprésent et l’impact généralisé de la violence envers les enfants sont de plus en plus reconnus. Néanmoins, ce phénomène demeure insuffisamment documenté et dénoncé. Cela est dû à diverses raisons, notamment au fait que certaines formes de violence envers les enfants sont socialement acceptées, implicitement admises ou ne sont pas considérées comme une forme de maltraitance. De nombreuses victimes sont trop jeunes ou trop vulnérables pour parler de leur expérience ou se protéger. Et bien trop souvent lorsque les victimes dénoncent de mauvais traitements, le système juridique manque à son devoir et les services de protection de l’enfance sont indisponibles. Le manque de données adéquates sur le sujet aggrave probablement le problème en alimentant l’idée fausse selon laquelle la violence reste un phénomène marginal, qui n’affecte que certaines catégories d’enfants et qui n’est perpétré que par des contrevenants biologiquement prédisposés aux comportements violents.

En dépit de nombreuses lacunes dans la base de connaissances actuelle, ce rapport témoigne des améliorations réalisées au cours des dernières années dans le recueil de données. Le rapport se base sur les éléments d’information disponibles pour décrire ce que l’on sait actuellement sur les formes de violence envers les enfants dans le monde, à partir de données compilées depuis une sélection de sources. Les analyses sont essentiellement axées sur les formes de violences interpersonnelles, définies comme des actes violents infligés aux enfants par un autre individu ou un petit groupe. Parmi les types de violences interpersonnelles traités, figurent ceux principalement commis par les aidants familiaux et autres membres de la famille, les figures d’autorité, les pairs et les étrangers, au sein comme en dehors du foyer.

En raison du manque d’uniformité dans la manière dont on recueille les données sur la violence envers les enfants, ce rapport repose principalement sur des informations recueillies via des sources comparables au niveau international, notamment les enquêtes en grappes à indicateurs multiples (MICS) appuyées par l’UNICEF, les enquêtes démographiques et de santé (EDS) appuyées par l’US Agency for International Development (USAID), les Enquêtes mondiales sur la santé des élèves en milieu scolaire (GSHS) et l’Étude HBSC sur les comportements en matière de santé des enfants en âge d’aller à l’école. Ces programmes d’études internationaux ont principalement été mis en place dans les pays à revenu faible et intermédiaire (à l’exception de l’enquête HBSC). Ce rapport est donc largement axé sur ces pays, mais cela ne signifie en aucun cas que la violence envers les enfants n’existe pas dans les pays à revenu élevé. Ce rapport utilise donc également des faits ou données factuelles spécifiques aux pays, issus d’études à petite échelle et d’enquêtes nationales, afin de mettre en lumière certains aspects ou contextes d’une variété de pays où il n’existe pas de données représentatives ou comparables. Grâce à ces sources combinées, le rapport utilise des données sur 190 pays et représente la plus importante compilation de statistiques à ce jour sur la violence envers les enfants.

Principaux résultats
Ce rapport fournit des preuves de l’omniprésence de la violence dans la vie des enfants de toutes les couches de la société, dans le monde entier. La violence interpersonnelle prend de nombreuses formes – physique, sexuelle et émotionnelle – et a lieu dans de nombreux contextes, notamment le foyer, l’école, la communauté et sur Internet. De même, les auteurs de violences contre les enfants sont très variés. Ils peuvent être des membres de leur famille, des partenaires intimes, leurs enseignants, leurs voisins, des inconnus ou même d’autres enfants. Cette violence se traduit par des blessures, des souffrances et de l’humiliation; et elle peut tuer.

 L’homicide
En 2012 seulement, presque 95 000 enfants et adolescents de moins de 20 ans ont été victimes d’homicide, ce qui en fait l’une des principales causes de décès et de blessures évitables chez les enfants. La grande majorité des victimes (85 000 enfants) vivaient dans des pays à revenu faible et intermédiaire. De 0 à 9 ans, 85 pour cent des décès sont le résultat de maladies transmissibles et non transmissibles, avec une faible différenciation par sexe. Lorsque les enfants entrent dans leur deuxième décennie de vie, par contre, la part des décès dus à des blessures intentionnelles, notamment l’homicide, augmente, en particulier chez les garçons.

Dans le monde, l’Amérique latine et les Caraïbes comptent la plus grande part de victimes d’homicide de moins de 20 ans (25 400). L’Afrique de l’Ouest et centrale représente la deuxième part en importance (23 400), suivie de l’Afrique de l’Est et australe (15 000). Le taux d’homicide le plus faible pour ce groupe d’âge se trouve en Europe centrale et orientale et dans la Communauté d’États indépendants (ECO/CEI), suivies du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. Les trois pays comptant les taux d’homicide les plus élevés dans le monde chez les enfants et les adolescents de moins de vingt ans sont El Salvador, le Guatemala, et la république bolivarienne du Venezuela. Dans chacun de ces pays, l’homicide est la principale cause de décès chez les garçons adolescents. Le Nigeria détient le nombre le plus élevé de jeunes victimes d’homicides, avec près de 13 000 décès en 2012, suivi par le Brésil, avec environ 11 000 décès.

La discipline violente
Bien que stupéfiantes en elles-mêmes, les statistiques ci-dessus constituent une manifestation de violence relativement peu répandue dans la vie des enfants. Les données montrent que beaucoup plus d’enfants subissent des violences dans le cadre de la discipline – généralement chez eux et dès leur plus jeune âge. En moyenne, environ 6 enfants sur 10 dans le monde (presque un milliard) âgés de 2 à 14 ans sont soumis à des châtiments physiques (corporels) infligés par les personnes qui s’occupent d’eux de manière régulière. Pour la plupart, les enfants sont exposés à un mélange de châtiment physique et d’agression psychologique. Les formes de châtiment corporel les plus graves – frapper un enfant à la tête, sur les oreilles ou le visage ou battre un enfant avec force et à plusieurs reprises – sont généralement moins fréquentes : en moyenne, environ 17 pour cent des enfants dans 58 pays subissent ces pratiques brutales. Dans 23 pays, les châtiments physiques graves sont fréquents, avec plus d’un enfant sur cinq affecté.

Les attitudes face au châtiment corporel des enfants
La proportion élevée d’enfants exposés à une discipline violente semble contredire les résultats relatifs aux attitudes à son égard : environ 3 adultes sur 10 seulement dans le monde pensent que le châtiment corporel est nécessaire pour élever ou éduquer correctement un enfant. En réalité, dans tous les pays sauf un – le Swaziland – le pourcentage d’adultes interrogés qui pensent que le châtiment physique est nécessaire est systématiquement inférieur au pourcentage d’enfants âgés de 2 à 14 ans qui subissent une discipline violente. Dans la plupart des pays, les adultes peu ou pas instruits sont plus susceptibles de trouver le châtiment physique nécessaire pour élever leurs enfants que leurs pairs plus instruits. Au Yémen, par exemple, 51 pour cent des mères ou des principaux aidants familiaux n’ayant pas reçu d’enseignement scolaire trouvaient nécessaire de recourir au châtiment physique pour éduquer un enfant, contre 21 pour cent des mères ou des principaux aidants familiaux ayant reçu un enseignement secondaire ou supérieur. Les adultes ayant un faible statut économique s’avèrent également plus favorables au châtiment corporel que leurs homologues plus riches dans environ trois quarts des pays pour lesquels des données étaient disponibles.

La violence infligée par leurs pairs et des partenaires intimes
En grandissant, les enfants deviennent plus vulnérables à d’autres formes d’agression, notamment aux violences infligées par leurs pairs et leurs partenaires intimes. Les agressions physiques entre élèves sont communes, notamment chez les garçons. Dans 25 pays disposant de données comparables, la prévalence des agressions physiques entre élèves âgés de 13 à 15 ans varie d’environ 20 pour cent dans l’ex-république yougoslave de Macédoine et en Uruguay à plus de 50 pour cent au Botswana, à Djibouti, en Égypte, au Ghana, en république-Unie de tanzanie (Dar es Salaam) et au Yémen. Dans le monde, plus d’un élève sur trois âgé de 13 à 15 ans subit au moins un acte d’intimidation de manière régulière. Parmi 106 pays disposant de données comparables sur les adolescents ayant récemment été victimes d’intimidation, les taux varient de 7 pour cent au tadjikistan à 74 pour cent au Samoa. Près d’un tiers (31 pour cent) des adolescents en Europe et Amérique du Nord ont admis avoir intimidé des jeunes de leur âge, avec une prévalence allant d’environ un sur sept (14 pour cent) en république tchèque et en Suède à près de six sur dix (59 pour cent) en Lettonie et en Roumanie.

Les expériences de violence continuent jusqu’à la fin de l’adolescence. Parmi les filles âgées de 15 à 19 ans dans le monde, près d’un quart (environ 70 millions) ont affirmé avoir été victimes d’une forme de violence physique ou une autre depuis l’âge de 15 ans. En Afrique de l’Est et australe, au moins 12 pour cent des filles de ce groupe d’âge ont signalé des incidents de violence physique au cours de l’année passée dans les neuf pays pour lesquels des données étaient disponibles, à l’exception des Comores. En Afrique de l’Ouest et centrale, la proportion est d’au moins 1 fille sur 14 dans chacun des 11 pays pour lesquels des données étaient disponibles; cette part atteint jusqu’à 26 pour cent au Cameroun et 42 pour cent en république démocratique du Congo.

Les filles jamais mariées sont plus susceptibles de signaler des violences physiques commises par des membres de la famille, des amis, des connaissances ou des enseignants. Par contre, chez les filles mariées ou ayant été mariées, les partenaires intimes actuels et/ou passés représentent la majorité des auteurs de violences physiques signalés dans tous les pays où des données sont disponibles. En Inde, au Mozambique, au Népal, au Pakistan, en république-Unie de Tanzanie et en Zambie, par exemple, plus de 70 pour cent de filles ont cité leur mari ou partenaire actuel ou passé comme auteur de violences physiques à leur encontre. La violence au sein du couple constitue en effet la forme la plus commune de violence sexiste envers les filles. Dans le monde, près d’une adolescente sur trois âgée de 15 à 19 ans (84 millions) engagée dans une union officielle a été victime de violences émotionnelles, physiques et/ou sexuelles commises par son mari ou partenaire. Les taux de violence au sein du couple sont particulièrement élevés en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud, et en Amérique latine et aux Caraïbes.

Les données relatives à l’exposition des garçons adolescents aux violences physiques, notamment au sein du couple, sont beaucoup plus limitées. Néanmoins, au moins un garçon adolescent sur quatre âgé de 15 à 19 ans a affirmé avoir subi des violences physiques depuis l’âge de 15 ans dans chacun des cinq pays à revenu faible et intermédiaire disposant de données comparables; le taux de prévalence dépasse les 40 pour cent dans ces pays à l’exception de deux (le Ghana et le Mozambique). Les auteurs de violences les plus communément signalés varient dans ces cinq pays et comprennent des membres de la famille, des amis ou connaissances et des professeurs.

Les violences sexuelles
Environ 120 millions de filles dans le monde (un peu plus d’une sur dix) ont subi des rapports sexuels forcés ou d’autres actes sexuels forcés à un moment de leur vie. Mais dans certaines parties du monde, les filles semblent y être plus exposées que d’autres. On trouve des taux de prévalence de 10 pour cent ou plus pour les rapports sexuels forcés dans 13 des 18 pays d’Afrique subsaharienne où des données sont disponibles. En revanche, dans tous les pays de l’ECO/CEI disposant de données comparables (excepté en république de Moldova), moins d’un pour cent d’adolescentes ont signalé des cas de violences sexuelles.

L’âge auquel les violences sexuelles sont subies pour la première fois a également été mesuré. À l’exception de trois pays, dans les 21 pays disposant de données comparables, la plupart des adolescentes ont affirmé avoir subi des abus sexuels pour la première fois entre l’âge de 15 et 19 ans. Néanmoins, une proportion importante a subi des violences sexuelles pour la première fois à un plus jeune âge. Dans les 21 pays, sauf en Inde, au Libéria, en république de Moldova, à Sao tomé-et-Principe et au Zimbabwe, au moins une fille sur cinq ayant signalé au moins un cas de violence sexuelle a affirmé qu’il avait eu lieu pour la première fois entre l’âge de 10 et 14 ans.

Les principaux auteurs de violences sexuelles contre les filles sont de loin leur ancien ou actuel mari, partenaire ou petit ami. Une part conséquente de filles de l’État plurinational de Bolivie, de la république dominicaine, du Guatemala, du Kenya, de la république de Moldova, de la république-Unie de tanzanie et de l’Ouganda a également affirmé avoir été victime de violences de la part d’un(e) ami(e) ou d’une connaissance.

Les garçons subissent également des violences sexuelles, mais dans des proportions bien moins importantes que les filles, d’après les données de quatre pays. En Ouganda, les garçons adolescents risquent près de deux fois moins que les adolescentes de signaler des cas de rapports sexuels forcés ou d’autres actes sexuels forcés. De même, au Mozambique, une part beaucoup plus faible de garçons adolescents a affirmé avoir été victime de violences sexuelles (3 pour cent de garçons contre 9 pour cent de filles). Comme pour les filles, les cas de violences sexuelles chez les garçons surviennent le plus souvent pour la première fois entre l’âge de 15 et 19 ans et les auteurs de violences les plus fréquemment cités sont les partenaires intimes actuels ou passés.

Les adolescents vivant dans des pays à revenu élevé sont également exposés au risque de violences sexuelles. En Suisse, par exemple, une enquête nationale réalisée en 2009 auprès des filles et des garçons âgés de 15 à 17 ans a révélé que respectivement 22 pour cent et 8 pour cent d’entre eux étaient victimes au moins une fois au cours de leur vie de violences sexuelles impliquant un contact physique. La forme la plus commune de violence physique pour les deux sexes dans ce pays est la cyber­victimisation. Aux États-Unis, la seconde National Survey of Children’s Exposure to Violence (NatSCEV II), menée en 2011, révélait des taux de victimisation sexuelle au cours de la vie des filles et garçons âgés de 14 à 17 ans de 35 pour cent et 20 pour cent respectivement.

Signaler les cas de violence
Quels que soient le type de violence subie ou les circonstances dans lesquelles elle a été subie, la plupart des victimes gardent le secret et ne demandent jamais d’aide. Les données présentées dans ce rapport confirment que près de la moitié des adolescentes âgées de 15 à 19 ans qui signalent avoir déjà subi des violences physiques et/ ou sexuelles affirment n’en avoir jamais parlé à personne. En Jordanie, au Kirghizistan, au Népal, au Nigéria, en Ouganda, au Pakistan et au tadjikistan, ce pourcentage s’élève à plus de la moitié. Les jeunes femmes victimes de violences sexuelles uniquement sont les moins susceptibles de parler de leur agression, contrairement à celles ayant subi des violences physiques uniquement ou des violences physiques et sexuelles. La comparaison des données des pays disposant d’informations sur les deux sexes révèle que les garçons sont à peu près aussi susceptibles que les filles de garder le secret au sujet de l’agression subi.

Parmi les adolescentes de 15 à 19 ans ayant déjà été victimes de violences physiques et/ou sexuelles, environ 7 sur 10 ont affirmé n’avoir jamais cherché d’aide pour y mettre fin. Les raisons sont variées, mais de nombreuses filles ont affirmé qu’elles ne se rendaient pas compte que ce qu’elles subissaient était une forme de violence ou qu’elles ne considéraient pas ces violences comme un problème. Des données limitées révèlent que, dans certains pays, les garçons sont même moins susceptibles que les filles de demander de l’aide. Et, comme les filles, la plupart des garçons ne parlent pas de leur expérience de la violence, indépendamment de son type, parce qu’ils ne la considèrent pas comme un problème. Lorsque les jeunes femmes victimes demandent de l’aide, c’est en général à leur propre famille. Il y a beaucoup plus de chances qu’elles demandent un soutien à des individus qu’elles connaissent personnellement qu’à des institutions, comme les services de police, les centres médicaux, les établissements d’aide juridique, les groupes religieux et/ ou les services sociaux, même lorsqu’elles savent qu’elles peuvent y trouver de l’aide.

Les attitudes vis-à-vis des femmes battues
L’étude des attitudes et normes sociales liées à la violence peut aider à comprendre pourquoi elle survient, pourquoi elle persiste et pourquoi elle n’est pas signalée. Les données de ce rapport suggèrent que près de la moitié des filles de 15 à 19 ans dans le monde (environ 126 millions) pense qu’il est parfois justifié qu’un mari ou un partenaire frappe ou batte sa femme (ou sa partenaire). En Afrique subsaharienne et au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, cette proportion s’élève à plus de la moitié. En ECO/CEI, elle chute à 28 pour cent.
Les attitudes favorables aux violences contre les épouses sont également très répandues chez les garçons adolescents. En Afrique de l’Est et australe ainsi qu’en Asie du Sud, près de 50 pour cent des garçons de 15 à 19 ans pensent qu’il est justifié qu’un mari frappe sa femme dans certains contextes; en Afrique de l’Ouest et centrale, cette proportion est d’un peu plus d’un tiers. Étonnamment peut-être, néanmoins, dans 28 des 60 pays disposant de données sur les deux sexes, une plus grande proportion de filles que de garçons pense qu’il est parfois justifié de battre sa femme; dans 14 de ces pays, l’écart entre les sexes est supérieur à dix points de pourcentage. Ce schéma est plus courant en Asie du Sud, en Afrique subsaharienne et en Asie de l’Est et dans le Pacifique que dans les autres régions.
Bien que garçons et filles puissent présenter des différences dans leur attitude vis-à-vis des femmes battues, les opinions semblent converger sur les principales conditions dans lesquelles cette forme de violence peut être justifiée : la négligence des enfants est la raison la plus communément citée chez les personnes interrogées, filles comme garçons.

Les attitudes vis-à-vis des violences sexuelles envers les enfants
Les attitudes relatives aux violences sexuelles envers les enfants ont également été étudiées. Bien qu’il n’existe actuellement pas de données à grande échelle et comparables au niveau international, les recherches menées dans quelques pays et régions illustrent la diversité et la complexité des croyances communément admises au sujet de cette forme de violence envers les enfants. Par exemple, une étude menée dans six pays des Caraïbes orientales en 2008-2009 analysait les perceptions des femmes et des hommes de 18 ans et plus quant aux violences sexuelles envers les enfants. Pour tenter de comprendre certains des facteurs pouvant contribuer à ce type de violence, l’étude demandait aux personnes interrogées si elles pensaient que l’attitude négative des hommes envers les femmes était l’une des causes. La plupart des personnes interrogées n’étaient soit pas d’accord (60 pour cent), soit pas certaines (27 pour cent). En revanche, 77 pour cent des personnes interrogées ont affirmé que la manière de s’habiller des filles provoquait chez les hommes une attention de caractère sexuel.

En ce qui concerne la perception des conséquences des violences sexuelles envers les enfants, la majorité des personnes interrogées dans les Caraïbes orientales (85 pour cent) les considéraient comme préjudiciables pour les enfants sur le plan affectif à long terme. toutefois, les recherches dans d’autres parties du monde révèlent une variété d’opinions. En Norvège, par exemple, une étude sur l’ensemble de la population a montré que les personnes interrogées n’étaient pas certaines que le contact sexuel soit préjudiciable à l’enfant. Au Nigéria, 61 pour cent des parents interrogés pensaient que les violences ne pouvaient avoir d’impact grave sur la santé qu’en cas de rapport sexuel.

L’éradication de la violence envers les enfants est entre nos mains
La violence envers les enfants est très répandue mais pas inévitable. Son éradication implique une responsabilité partagée.

Bien que souvent considérée comme un problème individuel, la violence envers les enfants est, en réalité, un problème sociétal, induit par les inégalités économiques et sociales et les faibles niveaux d’instruction. Elle est alimentée par des normes sociales considérant la violence comme un moyen acceptable de résoudre les conflits, approuvant la domination des adultes sur les enfants et encourageant les discriminations. Elle est rendue possible par des systèmes qui manquent de politiques et de lois adaptées, d’une gouvernance efficace et d’une primauté du droit pour prévenir la violence, enquêter sur les actes de violence et en poursuivre les auteurs, et fournir des services de suivi et des traitements aux victimes. Et elle persiste si elle n’est pas documentée ni chiffrée à cause d’investissements inadaptés dans le recueil de données et d’une mauvaise diffusion des résultats.

Les données fournies dans ce rapport montrent clairement qu’un nombre trop élevé d’enfants ne sont pas adéquatement protégés contre la violence. La plupart des violences envers les enfants sont commises par les personnes chargées de s’occuper d’eux ou avec lesquelles ils sont en rapport au quotidien – les aidants familiaux, les pairs et les partenaires intimes. Les enfants sont aussi souvent privés de la protection dont ils ont besoin et qu’ils méritent de la part de l’État. Seuls 39 pays dans le monde protègent juridiquement les enfants de toutes les formes de châtiments corporels, y compris à la maison. En outre, il existe des écarts importants entre les protections accordées aux victimes de violences adultes et enfants. Par exemple, si un adulte est frappé par un proche ou un pair, cela est généralement considéré comme un comportement inacceptable et des dispositions juridiques existent le plus souvent pour protéger les droits de la victime. Par contre, si des enfants sont violemment punis par leurs parents ou d’autres aidants familiaux, ces actes sont généralement considérés comme sans conséquences, et les mêmes type et degré de protection juridique ne sont généralement pas prévus. Ce manque de protection – associé à des attitudes et normes sociales justifiant certains actes de violence envers les enfants – crée un environnement dans lequel de nombreuses formes de violence sont considérées comme normales et restent impunies.

L’une des limites inhérente à toute tentative de collecte de données sur la violence envers les enfants est ce qu’elle laisse de côté : le grand nombre présumé d’enfants qui ne peuvent ou ne veulent faire part de leur expérience. Bien que ce rapport soit également soumis à cette contrainte, les faits qu’il présente suffisent à motiver un passage à l’action. Parce que même un seul enfant blessé par un acte de violence, c’est un enfant de trop.

Le processus de compréhension et de lutte contre la violence envers les enfants continuera d’être semé d’embûches. Néanmoins, au fur et à mesure que des stratégies supplémentaires pour éradiquer la violence sont formulées et appliquées, il est clair que des investissements systématiques dans la génération de données sont essentiels. Les données factuelles qui en résultent sont cruciales pour le suivi des engagements, pour alimenter le développement de nouveaux programmes, politiques et lois et pour évaluer leur efficacité. Les recherches futures doivent être axées non seulement sur le recueil de données relatives à la prévalence de la violence mais aussi sur la compréhension des facteurs sous-jacents qui l’alimentent et sur l’évaluation des interventions destinées à la prévenir et à y remédier. Une diffusion large des données dans des formats accessibles restera essentielle pour sensibiliser et entretenir la volonté politique nécessaire au développement et à la mise en œuvre de stratégies et d’actions efficaces – à tous les niveaux de la société.

Télécharger le rapport de l’UNICEF