Étiquette : esclavage

Mauritanie : une femme esclave offerte comme cadeau de mariage

La question de l’attitude jugée trop conciliante du pays face à l’esclavage moderne de nouveau relancée.

— Par Jacques Deveaux —

On connaît son prénom, Moima, on sait également qu’elle est issue de la communauté Haratine. Il y a quelques semaines à Ouadane, au nord de la Mauritanie, cette quinquagénaire a été offerte en dot par un marié à son épouse. En clair, Moima devenait l’esclave de ce nouveau foyer. On n’en sait guère plus sur le contexte de cette affaire. Notamment comment Moima s’est retrouvée esclave, et qui l’aurait vendue. Nullement inquiétées, et sans le moindre remord, les personnes impliquées seraient venues se plaindre du tapage fait autour de la divulgation de cette affaire. Devant témoins, « elles ont affirmé que Moima est leur esclave », précise Aziza Brahim de l’ONG SOS Esclaves-Mauritanie, qui a soulevé l’affaire. Une attitude qui laisse à penser que la pratique semble normale dans ce pays.

L’affaire a déclenché une vive polémique. La Commission nationale des droits de l’Homme du pays, réputée proche du pouvoir, a démenti les faits. « Il n’a pas été établi, après investigations, d’une quelconque preuve de ces allégations », a affirmé Me Ahmed Salem Bouhoubeyni, son président.

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Quatre histoires, quatre comédiens, quatre monologues

Une autre histoire ou le malentendu de Julius-Amédée Laou

— Par Selim Lander —

Avouons notre désarroi face à cette pièce de Julius-Amédée Laou, auteur chevronné à en croire le programme de Tropiques-Atrium. Un thème qui ne peut que susciter l’empathie, une construction originale, des comédiens aguerris : toutes les conditions du succès sont a priori réunies. Il faut croire qu’une mauvaise fée jalouse a soufflé sur ce spectacle car il nous a paru surtout ennuyeux. Le texte, certes, aborde un sujet essentiel, celui de la conquête des Amériques, de la traite et de l’esclavage, mais nous avons quand même le droit de remarquer à cet égard que, à force de lui faire boire la même eau, le public martiniquais finit par n’avoir plus soif. S’il n’est pas faux de le considérer a priori réceptif lorsqu’on lui présente une histoire qui fut celle de ses ancêtres pas si lointains, il vient quand même un moment où il a envie d’autre chose. Ou alors le texte et la mise en scène doivent être suffisamment puissants pour faire passer ce qu’il a déjà si souvent entendu.

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Esclavage en Mauritanie: lettre ouverte au président Emmanuel Macron

— Par Martin Mateso —
A l’occasion du déplacement d’Emmanuel Macron à Nouakchott pour le sommet de l’Union africaine, le mouvement anti-esclavagiste mauritanien interpelle le chef de l’Etat français sur la question de la traite d’êtres humains dans son pays. Il rappelle qu’en Mauritanie «l’esclavage, le racisme anti-noir et l’extrémisme religieux constituent les facettes d’une même oppression».

C’est par une lettre ouverte que le mouvement anti-esclavagiste mauritanien (IRA) s’est adressé au président Emmanuel Macron. Le chef de l’Etat français doit rencontrer le 2 juillet à Nouakchot les dirigeants africains réunis pour le 31e sommet de l’Union africaine. Un tête-à-tête est également prévu avec son homologue mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz.

«Vous allez rencontrer un homme d’Etat, témoin d’une tentative d’épuration ethnique contre les autochtones noirs, de 1986 à 1991», écrit le chef du mouvement abolitionniste mauritanien, Biram Odeid.

Et de rappeler que cette épuration visait l’anéantissement, sinon l’expulsion, des ethnies d’ascendance africaine, tels que les Wolofs, les Bambaras et les Soninkés de Mauritanie.

«L’opération s’est soldée par des dizaines de milliers de déportés et d’exilés, des pogroms, la banalisation de la torture, des assassinats collectifs, des spoliations de bétail et de terre», peut-on lire dans cette lettre ouverte.

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Avignon 2017 (13) « Le Misanthrope politique », « La Putain respectueuse », « La Violence des riches »

— Par Selim Lander —

Le Misanthrope (politique) de Molière (OFF)

Voilà une M.E.S. (de Claire Guyot) qui dépoussière joliment une pièce du répertoire classique sans jamais la trahir. Le titre est trompeur, de même que le résumé dans le catalogue du OFF qui évoque une « version cinématographique du chef d’œuvre de Molière » alors que ce Misanthrope se joue fort honnêtement sur les planches sans le truchement d’une caméra ni de micros. Quant à l’aspect « politique », il correspond tout au plus à un prologue (muet) et à la première scène pendant lesquels Alceste et Philinte travaillent côte à côte sur un bureau, l’un à signer des parapheurs, l’autre à corriger un texte sur un ordinateur portable. Car c’est surtout en cela que la M.E.S. est moderne, grâce aux costumes et à une utilisation très astucieuse des instruments qui ont envahi notre vie quotidienne, tablettes et téléphones mobiles. Par exemple Philinte n’a pas besoin d’être présent dans la même pièce qu’Alceste. Il peut dialoguer avec lui grâce au téléphone d’Éliante en position haut-parleur. De même le valet de Célimène est-il commodément remplacé par un interphone.

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Roméo et Julie : du théâtre populaire

— Par Selim Lander —

Voir la grande salle « Aimé Césaire » (on se Roméo et Juliedemande comment elle pourrait s’appeler autrement !) de l’Atrium pleine jusqu’au dernier balcon, lors de la dernière et dixième représentation (si nous avons bien compté et « scolaires » comprises) d’une même pièce a quelque chose de rassurant. Dans une petite île comme la nôtre, dont la population totale atteint à peine celle d’une ville moyenne de Métropole, il n’est pas si facile de rassembler autant de spectateurs pour le théâtre. Certes, le Théâtre municipal (inutile de préciser son nom officiel : on ne peut pas se tromper !) fait régulièrement le plein de trois représentations de la même pièce mais la « jauge » n’est pas comparable. Le Théâtre municipal a son public (un mélange étonnant de boulevardiers et de spectateurs prêts à avaler les expériences les plus contemporaines) ; l’Atrium, dans la grande salle, a également son public féru de musiques d’aujourd’hui et de théâtre « populaire ».

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Noire, obèse et nue contre l’esclavage

Nona Faustine a réalisé une série d’autoportraits où elle pose nue à New York dans des lieux emblématiques de l’esclavage. Des photos qui dérangent.
Dans une démarche insolite et plutôt osée, la photographe afro-américaine Nona Faustine a posé complètement nue dans certains lieux emblématiques de New York liés à l’histoire de l’esclavage.

Portraits.

La série d’autoportraits de Nona Faustine s’intitule « White Shoes ». « Chaussures blanches », comme celles qu’elle porte sur les photos où sa nudité est publiquement exposée. Avec les chaussures, un autre accessoire apparaît souvent : les fers, les chaînes, par lesquels les esclaves étaient contraints.L’histoire de l’esclavage dans la ville de New York est le thème de la série photographique de l’artiste. Nona Faustine n’a en effet posé que dans des lieux liés à cette histoire. Qui savait par exemple que Wall Street s’est bâti sur un ancien marché aux esclaves ? Que l’hôtel de ville de New York reposait sur un site où des esclaves étaient enterrés ? « Inscrit dans une tradition photographique tout en questionnant la culture qui a engendré cette tradition, mon travail traverse les lignes du passé et du présent », écrit Nona Faustine.

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« Bouki fait gombo » : histoire d’une plantation en Louisiane

— Par Michel Herland —

BoukiFaitGomboNous avons présenté ailleurs le mémorial de l’esclavage inauguré récemment sur le site de la Plantation Whitney en Louisiane[i]. Ibrahima Seck, son directeur scientifique, a consacré à l’histoire de la plantation un livre intitulé Bouki fait Gombo[ii]. Si le sous-titre est explicite, il n’en est pas de même du titre, compréhensible seulement pour qui connaît le proverbe entier (Bouki fait Gombo, lapin mangé li), proverbe dans lequel l’auteur propose de voir la description imagée de l’exploitation telle qu’elle existait en particulier dans les sociétés esclavagistes. Le brave bouc qui prépare à manger[iii], ce serait l’esclave et le lapin qui s’en régale serait le maître.

Cette interprétation proposée par I. Seck dans l’Introduction à son livre paraît néanmoins sujette à caution car le proverbe – dans ses diverses variantes et depuis ses lointaines origines au Sénégal où la hyène se trouve opposée au lapin – met traditionnellement en scène la ruse et non la force. Or c’est cette dernière qui est à la base de la société esclavagiste. Lafcadio Hearn, qui donne ce proverbe dans son Petit Dictionnaire des proverbes créoles, note qu’il résume un grand nombre de contes mettant en scène Compé Bouki épis Compé Lapin[iv].

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Mémorial ACTe, le plus ambitieux lieu de mémoire jamais dédié à l’esclavage

memorial_acteVisite en avant-première du plus ambitieux lieu de mémoire jamais dédié à l’esclavage.Un équipement culturel sans précédent aux Antilles.

Le site abrita, plus d’un siècle durant, l’usine sucrière Darboussier, fermée en 1980 puis démolie, à l’exception de sa seule annexe administrative, une bâtisse jaunie de style colonial, où furent réglées les payes de générations d’ouvriers locaux. Connu de tous les Antillais pour avoir englouti des quantités de tiges de canne à sucre en plein centre de Pointe-à-Pitre, à deux pas de la préfecture, ce phare industriel de l’île de la Guadeloupe cède aujourd’hui sa place à un imposant bâtiment moderniste tout juste sorti de terre, long de 240 m et fort de 7.124 m², dont 2.500 m2 dédiés aux expositions mémorielles et artistiques. Le « centre Beaubourg » de l’île? La formule circule.

Il s’agit du flambant Mémorial ACTe, le centre caribéen d’expressions et de mémoire de la traite et de l’esclavage*, projet porté par la Région Guadeloupe tout au long des années 2000. Érigée en bord de mer à la façon d’un navire, sa façade altière, toute minérale, rappelle celle du récent MuCem, à Marseille (musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée).

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« L’Esclave » à la Bibliothèque Schoelcher

Mardi 12 mai 2015 à 18 h 30

Affiche bib SchoelcherQue sera la France dans un siècle ? L’Esclave brosse un futur possible, même s’il n’est certainement pas le plus souhaitable. L’auteur tire trois fils à partir du présent : la crise écologique, l’affaiblissement des nations occidentales, la montée de l’intégrisme religieux et du djihadisme. Cependant l’Esclave n’est pas qu’un exercice de futurologie. Les personnages sont des êtres de chair et de passions : il y a des sages et des fous, des sincères et des fourbes, des amoureux, des jaloux, des rancuniers, des orgueilleux, des cruels et des saints. Une lignée de femmes fortes traverse le récit, depuis l’époque actuelle jusqu’au dénouement de cette histoire.

Un roman, trois époques. 2009 – Une idylle se noue entre Michel, professeur de philosophie à l’université d’Aix-en-Provence et Colette, une de ses étudiantes. 2081 – Michel vient de mourir, Colette se remémore leur brève aventure, tout en observant la montée des périls qui menacent une Europe en pleine décadence.

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L’intéressante maladresse de George Pau-Langevin

— Par René Ladouceur —
pau_langevin-3 Je ne suis pas précisément un fan des commémorations. Je préfère voir le passé revenir de lui-même, sans qu’un rite le convoque. Mais je vais le dire ici sans barguigner : évoquer le Mouvement de la renaissance guyanaise fait plus que m’enchanter. Tout est magique pour moi dans cette période. J’aime la Guyane du Mouvement de la renaissance guyanaise, j’aime ses illusions, ses échecs, ses dérèglements, son intensité, et je l’aime parce que c’est l’une des plus belles, des plus grandes rencontres de la Guyane avec les Guyanais qui sont entrés dans l’Histoire. Songez que c’est en novembre 1946 que René Maran revient en Guyane. Il y arrive sans Félix Eboué, disparu deux ans plus tôt, mais pour soutenir, à l’occasion des élections législatives, la candidature de René Jadfard, le leader du Mouvement de la renaissance guyanaise. Jadfard, en effet, se présente à nouveau contre Gaston Monnerville. Excusez du peu. C’est à cette occasion que René Maran retrouve son ami Léon Damas qui, à Paris, n’avait de cesse de lui reprocher de ne pas s’intéresser suffisamment à la Guyane.

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L’indécente lettre de Madame Ursull

— par Tony Albina —

shoah-1

l’homme-famine, l’homme-insulte, l’homme-torture on
pouvait à n’importe quel moment le saisir le rouer de
coups, le tuer – parfaitement le tuer – sans avoir de
compte à rendre à personne sans avoir d’excuses à pré
senter à personne
un homme juif
un homme-pogrom
un chiot
un mendigot
Aimé Césaire

Il y a une indécence sans fond dans la lettre de la citoyenne, Madame Joëlle Ursull.
Anecdotique aurait pu être cette sombre affaire si l’enjeu n’était rien d’autre qu’une certaine domiciliation d’un antisémitisme larvaire et rampant dans nos pays au nom de l’insoumission nègre.
C’est se tromper mille fois. Et s’obstiner à glisser dans ce que Serge Letchimy a appelé l’abîme. Car en effet, c’est s’y engouffrer que de dire, et nous nègres ! chaque fois que l’on entend Shoah. C’est précisément ce qu’a fait cette dame. D’où la grande indécence de sa missive. Indécence : manquer de correction prévient une définition. Autrement dit manquer de rectitude, c’est à dire refuser de conformer son action à une droite conduite.
Quelle est cette droite conduite à laquelle cette lettre fait défaut ?

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« Faire l’apologie de l’esclavage n’est pas condamnable par la loi française »

— Par Élie Domota —

esclavage-400Monsieur Le Président de la République,

Un débat sur la liberté d’expression et le droit au blasphème agite la société française actuellement. Permettez moi de vous adresser ces quelques remarques, considérant le contenu répété de vos discours, et des membres de votre gouvernement, sur le vivre ensemble.
Vous le savez, l’esclavage et la traite négrière sont, depuis la loi TAUBIRA du 21 Mai 2001, reconnus comme crime contre l’humanité.

En 2009, M. Despointes, béké Martiniquais, descendant de propriétaire d’esclaves, tenait les propos suivants sur Canal plus :
«Dans les familles métissées, les enfants sont de couleurs différentes, il n’y a pas d’harmonie. Moi, je ne trouve pas ça bien. Nous (ndlr: les Békés), on a voulu préserver la race.» «Les historiens ne parlent que des aspects négatifs de l’esclavage et c’est regrettable» ……« les bons côtés de l’esclavage et les colons qui étaient très humains avec leurs esclaves, qui les ont affranchis et qui leur donnaient la possibilité d’avoir un métier ».

Ces propos ont déclenché la colère de milliers de Martiniquais et de descendants d’esclaves de part le monde.

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Colloque en mémoire de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions

Thème : « Le racisme est soluble dans l’encre noire » ( S. Dracius)

— Par Robert Sae —
savoir_c_pouvoirAtelier 2 : « Savoir c’est pouvoir ! » ou l’absolue nécessité de Culture et Connaissances en lutte contre l’aliénation, en vue d’une réparation.

SAVOIR ET AGIR !
Nous sommes à un moment de l’histoire humaine où la mainmise des maîtres sur le savoir devient de plus en plus difficile. Le rang et la notoriété de ceux d’en haut ne suffisent plus à rendre crédibles leurs préceptes, leurs analyses et leurs déclarations. Rien ne peut occulter les inégalités criantes, les drames sociaux, les catastrophes environnementales enfantées par le système. Aucun écran ne peut masquer les travers de leur dite démocratie  pas plus que les contradictions entre les valeurs affichées et les pratiques barbares développées au plan international. Il n’est plus possible à aucun pays dominant ni à aucune caste au pouvoir de désinformer, de conditionner et de museler impunément l’opinion.

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Esclavage. Quels lieux pour la mémoire du crime ?

10 mai journée de l'Abolition

— Par Adrien Rouchaleou —

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Un seul mémorial [dans l’hexagone] est consacré aux traites et aux esclavages. Outre-mer, des projets se montent avec un autre angle.

Le seul, en effet. Car cet épisode du passé de la France, malgré l’importance qu’il aura revêtue dans la constitution de ce qu’est aujourd’hui la nation française, semble encore brûler les yeux de nombre de dirigeants politiques qui préfèrent en détourner le regard.

Certes Nantes ne pouvait dénier longtemps son triste rang de premier port négrier de France. Mais il est à noter qu’elle s’est penchée beaucoup plus tôt que les autres villes esclavagistes sur son passé. Bien avant la loi Taubira reconnaissant les traites et les esclavages comme crime contre l’humanité (2001), c’est à l’occasion du 150e anniversaire de la seconde abolition, en 1998, que le conseil municipal de la cité ligérienne prend la décision d’ériger un monument aux victimes. Confié à l’artiste polonais Krzysztof Wodiczko et à l’architecte Julian Bonder, il aura tout de même fallu du temps pour arriver jusqu’à sa livraison en mars 2012.
Aucun lieu de mémoire spécifique n’existe à Bordeaux

Maire durant toute cette période, Jean-Marc Ayrault fait de ce mémorial « un projet politique » comme il l’écrivait alors : « Assumer un tel passé, sans esprit de repentance, permet aujourd’hui de mener nos combats les yeux grands ouverts. 

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« 12 years A slave » : une fresque, haute de dignité, magnifique.

122_years_a_slaveA Madiana

Avec « 12 Years A Slave », de Steve McQueen, plongée au cœur des plantations d’esclaves en Louisiane
Avec une histoire vraie qui est vraiment une histoire et des comédiens qui vont de Chiwetel 
Ejiofor à Brad Pitt, cette fresque sur l’esclavagisme, haute de dignité, est magnifique.

La liste des nominations aux oscars n’annonce pas automatiquement celle des vainqueurs mais elle est un indice qui témoigne fortement du goût des votants. C’est ainsi que, après avoir déjà été couronné du trophée du meilleur acteur dramatique (attribué à Chiwetel Ejiofor) lors des récents golden globes, 12 Years A Slave vient d’empocher neuf nominations pour les prochains oscars (verdict le 2 mars prochain), ce qui est pour le moins considérable pour un drame d’époque sans effets spéciaux faisant appel à la connaissance historique, à la sensibilité et non à l’adrénaline. Du poids lourd donc, ce qui n’étonnera pas qui a déjà vu les deux premiers chefs-d’œuvre de l’auteur, Hunger et Shame.

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Le feuilleton de la demande de réparations de l’esclavage

— Par Marlène Hospice, docteur en ethnologie et en sociologie comparée —

Ô Chimères!. Il en va d’une certaine manière pour l’individu comme pour un groupe humain. Du fond des âges de l’humanité jusqu’à nos jours, des fantasmes s’emparent d’eux, les vampirisent, déroutant leurs actes vers des caps fous et fracassants.
Ô chimères!
Les Grecs les ont matérialisées en figures animales diaboliques au corps de chèvre, à la tête de lion et à la queue de serpent. Les Haïtiens – jamais en reste d’ironie créatrice collective quelque soit le poids des fléaux qui les accablent -ont eu à faire face dans les années 2001-2005 de Jean-Bertrand Aristide – aux Chimères en chair et en os, sous les figures prédatrices de bandes armées dignes émules des sinistres Tonton Macoutes des Duvallier père et fils.
En Martinique, nous avons les flambeaux de la demande de réparations de l’esclavage.

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Esclavage : une réparation par la transparence

— Par Thomas Piketty, directeur d’études à l’EHESS et professeur à l’Ecole d’économie de Paris. —

esclavage-300Est-il possible d’envisager des réparations financières pour les crimes commis lors de l’esclavage ? En décrétant que «l’histoire ne peut pas faire l’objet d’une transaction», François Hollande vient de répondre négativement à cette question, le 10 mai, lors de la journée de commémoration de l’abolition de l’esclavage. La formule est habile. Pourtant, si l’on regarde les choses de plus près, la question est plus complexe, et ne peut être évacuée aussi facilement. Christiane Taubira, qui est à l’origine de la loi de 2001 reconnaissant la traite négrière et l’esclavage comme crime contre l’humanité, et instituant la journée du 10 mai, a eu raison de corriger immédiatement le tir présidentiel, en évoquant dès le lendemain la nécessité de réfléchir à des formes de politique foncière et de redistribution des terres en faveur des descendants d’esclaves dans les territoires français d’outre-mer.

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Mali, la révolte des esclaves

— Par Boris Thiolay, ( envoyé spécial, Lepoint.fr) —

esclavage_maliDans un pays accablé de tant de maux, la tradition séculaire de l’esclavage, officiellement interdit, reste un fléau. Avec courage, une association lutte pour rendre la liberté à au moins 300 000 personnes et traîner leurs « maîtres » en justice. Un combat sans relâche.

Lentement, il égrène l’identité de ses protégés : « Akadaye ag Abdullahi, sa soeur Tattché, Tamezanat et ses trois enfants… » Sur la feuille dépliée avec soin figurent ainsi 25 noms de famille. Une trentaine de personnes en tout. Cette liste est un raccourci poignant du destin d’Intamat ag Ikadewan, un homme enjoué de 55 ans, issu de la communauté bellah, c’est-à-dire les esclaves noirs de clans touareg du nord du Mali. Les noms cités sont ceux d’anciens captifs qu’il a libérés, à lui seul, depuis plus de trente-cinq ans, dans les régions de Menaka et de Gao.  

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Pour la réparation

esclavage-300
— Par Patrick Chamoiseau —
En matière de colonisation, de traite et d’esclavage,
la réparation relève d’une volonté d’aller au mieux-humain : une complexe totalité.
Dès lors, il faut la concevoir dans un écosystème  :
– Politique
– Législatif
– Foncier
– Éducationnel
– Scientifique
– Culturel
– Financier
– Psychologique
– Esthétique
– Artistique
– Symbolique
Son éthique déserte toute bonne ou toute mauvaise conscience, vengeance ou récrimination, pour s’inscrire dans la haute conscience. Elle demande, à qui en porterait la volonté étatique, la mise en place d’une instance de réflexion et de structuration.
L’écarter en s’effarouchant d’une indécence comptable
n’est qu’une manière caricaturale de ne rien entendre au concert obligé des mémoires.
Patrick CHAMOISEAU

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Taubira : « Des terres pour les descendants d’esclaves »

 

taubira_gvtINTERVIEW – Lundi, la ministre de la Justice dressera un premier bilan des « zones de sécurité prioritaires ». Concernant le débat sur l’esclavage, elle est favorable, en outre-mer, à « une politique foncière » qui vise à réparer « les confiscations des terres »…

La garde des Sceaux veut « des remembrements fonciers » pour les descendants d’esclaves.

Vous vous rendez lundi à Lyon avec Manuel Valls, dans le quartier de la Duchère, une des premières zones de sécurité prioritaires. Quel est le premier bilan?
Le bilan n’est pas exclusivement une affaire de chiffres, même s’ils sont des éléments d’appréciation. Sur Lyon-la Duchère, en six mois, le taux d’élucidation a progressé de plus de 10% [10,2]. Et il y a une baisse de la délinquance générale estimée à un peu moins de 8% [7,81%]. C’est un premier bilan encourageant. Mais au-delà de la baisse de la délinquance, cette action concertée de mobilisation de toutes les forces – justice, police, éducation nationale – vise avant tout à améliorer le cadre et la qualité de vie dans ces quartiers. Il y a plusieurs étapes dans notre démarche, l’étape répressive bien sûr, mais nous devons aussi mettre en œuvre des actions sociales fortes coordonnées entre l’État et les élus, mobiliser les associations… Avec ces ZSP, nous voulons des résultats durables sur le long terme.

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La mémoire de l’esclavage troublée par l’appel à des réparations financières

—Par Elise Vincent
Depuis 2001, le 10 mai a été institué Journée nationale de commémoration de l’abolition de l’esclavage. Vendredi 10 mai, le chef de l’Etat devait donc s’exprimer sur le sujet. Une manière de réparer symboliquement, comme chaque année, les horreurs de la traite négrière à laquelle la France a activement participé du milieu du XVIIe à la fin du XIXe siècle, en déportant plus d’un million d’Africains.

L’occasion, aussi, de répondre par la négative aux demandes de réparation financière pour des descendants d’esclaves, formulées depuis plusieurs mois par le Conseil représentatif des associations noires (CRAN). « L’histoire ne s’efface pas. On ne la gomme pas. Elle ne peut faire l’objet de transactions au terme d’une comptabilité qui serait en tout point impossible à établir », devait déclarer François Hollande.

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Réparations financières pour les descendants d’esclaves : le casse-tête des arbres généalogiques

— Par Elise Vincent —
A l’occasion de la Journée nationale de la commémoration de l’abolition de l’esclavage, le Conseil représentatif des associations noires (CRAN) a réitéré sa demande de réparation pour les descendants des victimes de la traite négrière, formulée depuis plusieurs mois. Il a prévu de déposer une plainte contre la Caisse des dépôts et consignations, accusée de s’être enrichie grâce à l’esclavage. Mais le combat du CRAN est loin de faire l’unanimité, notamment à cause de la complexité d’une telle indemnisation.

Lire : La mémoire de l’esclavage troublée par l’appel à des réparations financières

Patrick Grenier-Delassagne est l’exemple typique du métissage qui rend aujourd’hui particulièrement délicat à mettre en pratique le principe des réparations financières pour l’esclavage. A 52 ans, ce scénariste et romancier s’avoue très surpris par les revendications du CRAN auxquelles il a beaucoup réfléchit. Son arbre généalogique révèle à lui seul l’ampleur des difficultés.

M. Grenier-Delassagne est originaire par son père de l’île Saint-Vincent des Grenadines, qui fait partie d’une région des Petites Antilles, dans l’océan Atlantique, au large du continent américain. Cette île a connu, comme d’autres, les plantations sucrières et l’esclavage de façon massive entre le XVIIe et le XIXe siècle.

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Un point de notre histoire dans les débats en cours.

par Gilbert Pago.

 

–Bruno Nestor-Azérot, député de la Martinique vient de faire une déclaration retentissante à l’Assemblée Nationale Française dans le débat sur le mariage pour tous. Je ne reviendrai pas sur son positionnement qui relève de ses convictions personnelles, qu’il faut tolérer même si je ne suis pas d’accord,  mais sur l’argument qu’il a considéré comme le plus important dans son argumentation. Il a déclaré :

« Moi, homme issu d’un peuple opprimé, réduit en esclavage, où le système social était un système qui refusait à un homme et à une femme de pouvoir avoir un enfant et de se marier légitimement, où le mariage était interdit et fut une conquête de la liberté ».

L’argument mérite d’être commenté car l’histoire et notre passé d’esclave sont souvent utilisés, à tort et souvent en total contre-sens. C’est donc en ma qualité d’historien que je me prononce.

Si des maîtres se sont souvent opposés aux mariages des esclaves, pour leurs intérêts. Ce n’étaient ni le cas de la totalité ni le sens de la politique royale exprimée à travers les instructions royales et le fameux Code Noir qui était enregistré par  le Conseil souverain.

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L’émancipation d’Abraham Lincoln

Président en guerre, Abraham Lincoln dut se défaire d’un dilemme entre ses convictions personnelles et son mandat politique.

Le 1er janvier 1863, il y a 150 ans, Abraham Lincoln signait la Proclamation d’émancipation des esclaves. Anniversaire notoire, souligné par la Maison-Blanche, pour un texte décisif mais sans poésie.

Son style juridique tend à faire oublier l’audace qu’il fallut pour le promulguer. Document alambiqué, il n’est pas formulé avec la simplicité qui fit de la Déclaration d’indépendance une référence.

Au moment où Abraham Lincoln s’apprête à refonder la république encore naissante, il choisi d’émettre un décret, plutôt que de chercher une voie plus solennelle pour marquer l’importance de sa cause. Le procédé traduit tout le poids des difficultés auxquelles le président se trouvait confronté.

La Guerre de sécession fait rage. Et Lincoln, comme il l’écrivit, était déchiré entre son « combat pour sauver l’Union » et son « souhait souvent répété que tous les hommes soient en tous lieux libres ».

La formule retenue pour libérer les esclaves, l’émission d’un décret militaire, lui permit de résoudre l’opposition entre ces deux exigences. Il trouva dans ses pouvoirs de commandent en chef des armées (« commander-in-chief ») une voie pour s’exprimer.

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Une descendante d’esclave veut assigner l’État en justice

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Rosita Destival veut obtenir réparation du préjudice causé par l’asservissement d’un aïeul, avec le soutien du Conseil représentatif des associations noires.

Une descendante d’esclave a indiqué mardi qu’elle allait assigner l’État en justice pour obtenir réparation du préjudice causé par l’asservissement d’un aïeul, une première destinée à faire pression sur le gouvernement pour qu’il s’engage à réparer la traite des Noirs. Rosita Destival, 51 ans, doit engager prochainement une action civile devant le tribunal de grande instance de Paris en s’appuyant sur la loi Taubira de 2001 qui qualifie l’esclavage de crime contre l’humanité.

« J’exige vérité, justice et réparation pour rendre honneur à nos ancêtres », a déclaré, lors d’une conférence de presse, cette militante du Mouvement international pour les réparations (MIR), dont l’arrière-arrière-grand-père a été affranchi en 1834 en Guadeloupe. « Elle a un préjudice moral : son nom n’est pas le vrai nom de sa famille et elle ne connaît pas ses origines », a expliqué son avocat Me Johannes Louis. « Elle a aussi un préjudice matériel : son aïeul n’a pas pu constituer de patrimoine et sa famille a vécu dans des conditions difficiles », a-t-il ajouté.

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