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Autonomie : la Convention du Morne-Rouge a cinquante ans.

Par Yves-Léopold Monthieux

L’introduction par le ministre des Outre-Mer du mot ”autonomie” en plein milieu du charivari sociopolitique a jeté un froid en Martinique et en Guadeloupe. Le gouvernement aurait-il décidé de larguer les Antilles ou est-ce simplement du chantage ? Qui, croyez-vous, s’en inquiètent ? Ce sont les autonomistes, eux-mêmes. Et les indépendantistes !

Retour en arrière, moins de dix ans après le vote de la loi de 1946, un bilan négatif de l’assimilation est acté par la Fédération communiste martiniquaise au sein duquel se trouve encore Aimé Césaire. La mise en œuvre de la loi avait été laborieuse et il avait fallu attendre 1948 pour lui connaître un début d’application. En réalité, cette transformation avait été surtout décidée pour des objectifs de géopolitique, la priorité étant de reconstruire le pays. A la Fédération communiste martiniquaise, dès le milieu des années 1950, l’idée d’autonomie se substitue à l’euphorie assimilationniste. Mais si l’autonomie sera incarnée par Aimé Césaire et le PPM, on doit au Parti communiste martiniquais (PCM) la date officielle de sa naissance à la Convention du Morne-Rouge, organisée par la municipalité communiste de cette commune les 16, 17 et 18 août 1971.

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Liberté de la presse : liberté d’expression ou des patrons de presse ?

— Par Yves-Léopold Monthieux —

On le sait, la liberté de la presse locale est totale à l’égard du pouvoir national français. Il est possible, en effet sans encourir le moindre risque, de dire ou écrire pis que pendre sur le préfet ou le président de la République et, d’une manière générale, sur la politique du gouvernement. Cette liberté s’observe y compris sur les antennes de la station publique. En revanche écrire ou proférer un jugement négatif sur le politique martiniquais expose le média à des sanctions immédiates. « Mettre la presse au diapason », telle avait été l’ambition souvent rappelée de l’un de nos princes. De sorte que lorsqu’on s’interroge sur le lieu du véritable pouvoir politique (hors budgétaire), il est permis à bien des égards de le domicilier en Martinique où la crainte de l’élu pèse de tout son poids sur les médias locaux. Ainsi, foin des articles 73 ou 74, en matière médiatique la liberté c’est l’autonomie voire l’indépendance à l’égard de Paris.

En dessous du pouvoir politique local vient la liberté des patrons de presse. Sous l’autorité sourcilleuse du politique, ils sont chargés comme par délégation de la police de la parole.

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C’était Tapie …c’était Mitterrand : le surdoué de la transgression et le prince florentin.

Par Yves-Léopold Monthieux

Le temps n’est pas à l’évocation des fautes et erreurs qui ont accompagné chacune des facettes de l’œuvre de Bernard Tapie. Car il n’est pas de domaine investi par cet homme qui ne soit assorti de déconvenues d’égale importance que les succès remportés. Non pas pour des faits d’incompétence mais à cause d’agissements pour le moins douteux. En affaires, les méthodes qui l’ont mené au succès l’ont souvent conduit devant les tribunaux. En matière sportive ses succès incontestables ont été obscurcis par des soupçons et une condamnation judiciaire qui n’a pas été contestée.

Arrêtons-nous plutôt à sa brève et controversée carrière politique. Son talent exceptionnel dans ce domaine aussi a été instrumentalisé par le florentin François Mitterrand qui, par ailleurs, s’est beaucoup amusé dans l’exercice de sa fonction de président de la République, où il a excellé dans l’art de se jouer des personnes. On le sait, le florentin se définit comme « une personne rusée, subtile ou raffinée en référence aux princes de Florence à la Renaissance et à Machiavel ». Ainsi Tapie fut invité à tenter de freiner l’élan politique pris par Jean-Marie Le Pen que le Chef de l’État avait lui-même aidé à s’échapper pour gêner la Droite.

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« Adieu foulards, adieu madras » ne date pas du BUMIDOM

Par Yves-Léopold Monthieux

Ainsi donc, sous le titre « Vieux créoles à Paris : ils racontent leur choix de l’aventure hexagonale dès les années 1940 », un documentaire présenté par France TV rapporte des témoignages rappelant que la migration vers la France, pas encore l’Hexagone mais déjà la Métropole, n’a pas commencé avec le BUMIDOM. La célèbre chanson « Adieu foulards, adieu madras » qui avait préexisté à la venue des Indiens aux Antilles, atteste de la réalité d’une circulation des hommes qui ne fut pas que d’immigration. Toutes entières préoccupées à stigmatiser la période du BUMIDOM, la littérature et la presse n’ont pas été friandes de ce moment essentiel de la migration contemporaine des Antillais vers la France. Aussi, malgré la richesse des témoignages on ne peut réprimer une réserve à l’endroit de l’un d’eux qui n’a pas vécu durant deux années de suite en France.

Par ailleurs, dans ce « docu  » qui reconnaît le caractère valorisant de la migration à cette époque, les « plus humbles » sont encore été ignorés, qui, au prix de moyens et de circonstances exceptionnelles, parfois inavouables, trouvaient à répondre à l’appel de l’autre bord.

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L’État pris au piège des demi-mesures institutionnelles

— Par  Yves-Léopold Monthieux —

En 2001 j’écrivais mon premier essai, le Refus du débat institutionnel. J’indiquais que les partisans du changement institutionnel avaient une peur bleue que la population martiniquaise fut invitée à choisir par référendum entre les trois courants politiques qui agitaient la classe politique : le départementaliste, l’autonomiste et l’indépendantiste. Peu après allait se dérouler la consultation populaire du 7 décembre 2003, arrachée à Jacques Chirac par Alfred Marie-Jeanne. Résultat, les électeurs allaient choisir le statu quo, aidés par l’épisode du Chatt’en sac de Camille Darsières, secrétaire général du Parti progressiste martiniquais (PPM), qui fut dévastateur pour les tenants du changement.

Vingt ans après, le vrai débat institutionnel n’a toujours pas lieu

Ainsi donc, de l’avis de certains amis au nombre desquels EDL, mon livre n’avait plus d’intérêt dès lors que, selon eux, le débat avait eu lieu et que le peuple avait tranché. J’avais bien du mal à dire le contraire tant la controverse menée sur des « queues de cerises » avait été âpre. Il m’était difficile de dire qu’il s’agissait d’abord d’une lutte pour le pouvoir entre le Parti progressiste martiniquais et le Mouvement indépendantiste martiniquais, et non pour l’évolution statutaire.

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Martinique : une combinaison chimique qui pourrait exploser

Par  Yves-Léopold Monthieux
L’adoption d’un discours permanent de défiance et de rupture, méticuleusement entretenu pendant des décennies par une classe politique unanime, prenant dans la société martiniquaise les formes les plus diverses, suscitant les manifestations les plus inattendues, et qui est véhiculé par la totalité des moyens médiatiques à disposition, ne pouvait pas rester sans conséquences pour la société martiniquaise. Laquelle est, par ailleurs, paradoxalement, avec ses élus, viscéralement attachée à l’assimilation matérielle. Bref, les pieds et le ventre dans l’assimilation, la tête en dehors, le malade est atteint de schizophrénie !
Comment comprendre, dès lors, avec une divergence aussi fondamentale – assimilation assumée et volonté de rupture affirmée – au sein d’une population qu’on exhorte à faire peuple – peuple identifié : petits-fils d’esclaves, peuple empoisonné – mais dont on s’acharne à développer chez elle que des sentiments d’individualisme, qu’une telle combinaison chimique ne finisse un jour par exploser ? Telles sont les eaux grises dans lesquelles baigne la politique martiniquaise.
On sait que les populations sont parfois folles, les peuples devenir fous (celui qui écrit ces lignes est un peu fou).

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C.T.M. : pas de vraie démocratie sans séparation des pouvoirs

— — Par Yves-Léopold Monthieux —

Plusieurs curiosités ont pu apparaître lors de la mise en place des nouveaux dirigeants de la collectivité territoriale de Martinique. Elles ont été camouflées par la résolution de tous de ramener la sérénité dans une collectivité qui en avait grand besoin. S’il est normal qu’une collectivité comportant une assemblée avec une commission permanente faisant toujours partie de celle-ci autorise la confusion entre l’exécutif et l’instance délibérante, comme naguère le conseil général et la région, une collectivité qui fait la distinction entre un exécutif et une assemblée (CTM) suppose le respect d’un principe fondamental en démocratie : le principe de la séparation des pouvoirs.
En voulant mettre en place un système qui satisfasse les élus porteurs de l’autonomie de l’article 74 de la Constitution française sans mécontenter la population qui n’en a pas voulu, on est parvenu au système hybride d’un département qui a les couleurs et les rites d’un gouvernement. Les incohérences de ce système devraient déconcerter plus d’un juriste de droit public. Est-ce utile de rappeler l’absurdité qui conduit, en cas d’indisponibilité du président du Conseil exécutif, à la démission d’office des 8 autres conseillers exécutifs ?

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De moratoires en renoncements, c’est bien « la fin d’une époque »

— Par Yves-Léopold Monthieux —
Faisant écho à un article paru dans la presse où l’échec d’Alfred MARIE-JEANNE, ce dimanche soir, est plus que suggéré, la vraie question peut se poser de savoir quel aura été son bilan politique. On peut s’y coller même si, nouveau miracle, la liste conduite par AMJ sortait en tête ce soir. L’issue de l’élection n’y changera pas grand-chose. Pour la commodité de l’exercice on pourrait comparer ce bilan à celui d’Aimé CESAIRE, les 2 hommes étant les acteurs les plus emblématiques de la politique martiniquaise depuis 1946. CESAIRE est quasiment entré dans l’histoire tandis que le second, qui lui avait prédit d’être jeté aux poubelles de l’Histoire, a toujours souhaité y entrer. C’est cela la rivalité entre les deux hommes et l’intérêt qu’il y a à les comparer.
On retiendra sans doute que CESAIRE sera resté pendant 55 ans maire de Fort-de-France (record de France) et AMJ, un peu moins longtemps, à Rivière-Pilote. Les deux auront connu une fortune électorale durable s’appuyant sur le populisme. Lorsqu’on voit dans quel état s’est trouvé (et se trouve encore !)

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Pourquoi une modification des statuts de la CTM paraît s’imposer.

Par Yves-Léopold Monthieux —
On ne peut que déplorer le mécanisme de mise en œuvre de la loi de juillet 2011 créant la collectivité territoriale de la Martinique (CTM). Les anomalies statutaires sont les fruits amers de dispositions empruntées à une collectivité de l’article 74 de la constitution, que les électeurs martiniquais avaient refusée. Ainsi donc, des statuts prévus pour un petit gouvernement issu de l’article 74 ont été transcrits à la hâte pour la CTM, collectivité de l’article 73. Ces dispositions qui ont voulu sauver la mise aux élus perdants du « 74 » ont donné naissance à un monstre institutionnel dont on ne sait pas vraiment qui des deux présidents est le véritable président de la CTM.
L’une de ces anomalies majeures prévoit que le départ du président du conseil exécutif, pour quelque motif que ce soit, entraine ipso facto la fin de partie pour les 8 autres membres. Cette observation avait longtemps fait sourire. Alors que l’installation d’un nouveau conseil exécutif aura bientôt lieu, il est bon de rappeler qu’on s’était inquiétés quand le président sortant du conseil exécutif avait dû affronter des juges à Paris.

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Immigration en Guyane : la xénophobie se moque des principes

— Par Yves-Léopold Monthieux 

Par ces temps d’élections, il est commode pour les élus de savonner la pente du populisme. L’arrivée de Marocains en Guyane se prête bien à l’expression d’une xénophobie facile et sans risque de conflit intérieur et de voisinage. Les déclarations d’élu(e)s qui disent s’appuyer sur la population laissent sans voix. Les incidents qui opposent ces derniers aux immigrants, phénomène qui fait davantage que montrer le bout du nez en Martinique, sont la preuve que le lepénisme n’est pas l’apanage de la famille Le Pen. Le réflexe se retrouve à des degrés divers jusque chez les plus chatouilleux des progressistes. Lesquels ne s’expriment guère ces jours-ci en Guyane, alors que les discours d’ostracisme vont plutôt bon train. On aimerait bien entendre sur la xénophobie en terre amazonienne celle qui a pu expérimenter l’ostracisme sous d’autres cieux et à ses dépens, Mme Christiane Taubira.

Lire aussi: Guyane : quand le racisme empêche l’accès aux soins

Plus généralement, les situations réelles se moquent des principes et les choses ne feront que s’accentuer. Les pays « nantis » ne pourront pas longtemps encore continuer à ne s’occuper que des inégalités domestiques, des inégalités de classe.

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La captation par les « Sachants » du « Génocide par substitution » : une rare escroquerie intellectuelle.

Par Yves-Léopold Monthieux

« Il n’y a pas de génocide par substitution », ose écrire Mme Nadia Chonville qui dit pourquoi. Dénuée du romantisme habituel qui accompagne le récit national, son argumentation est lumineuse. De la part d’une intellectuelle martiniquaise, l’affirmation est courageuse. Heureusement qu’elle a pu se construire une crédibilité dans la presse locale. Sinon elle aurait rencontré des difficultés à se faire entendre.

Ainsi donc, sous la plume de la sociologue qui pourrait être la petite fille de bien d’entre nous, on peut lire un article iconoclaste sur le « génocide par substitution ». Pour la chercheuse martiniquaise, l’expression de Césaire est un « marronnier de la vie politique antillaise » qui, tel que présenté au peuple ne répond pas à la réalité. Il s’agit d’une formule commode véhiculée par les « sachants » martiniquais qui écrivent « l’histoire à côté de l’histoire ». Elle fait partie de ces « vérités » construites dans le cadre du cahier des charges dicté par les fabricants du roman national martiniquais. Plus précisément, la formule de Césaire est une aubaine.

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Ne pas remplacer le clivage Gauche-Droite par le « Nou tout’ kapab »

Par Yves Léopold Monthieux

Les élections de la CMT sonnent peut-être le glas d’une controverse commencée depuis une trentaine d’années et relative aux rapports entre les élus de droite et de gauche. Ce débat a pris toutes les formes et s’est déroulé par des formulations diverses dont la plus vieille fut « la nouvelle droite » Elle s’adressait au PPM, en mode d’accusation, par le maître de la formule, Alfred Marie-Jeanne. C’était au cours de la campagne électorale de l’élection régionale de 1989. En réalité, la saillie était en gestation depuis le moratoire d’Aimé Césaire que le patron du MIM avait vivement critiqué. Même si l’accusation tenait avant tout de la posture, elle a poussé le PPM à s’arcbouter contre les avances à peine voilées que leur exprimait Pierre Petit. Lequel s’était opposé à ses amis qui, au départ du PKLS du pacte global d’unité, souhaitaient la dissolution de l’assemblée de la région.

 En réalité, c’est AMJ qui fit l’ouverture vers la droite lors de son accession à la présidence de la région, en 1998. La 1. ère vice-présidence fut accordée à Pierre Petit et deux présidences de commission furent confiées à Miguel Laventure et Jean-Marcel Maran.

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Immigration africaine en Europe : se battre à mort… pour la vie

Par Yves-Léopold Monthieux

. Les incidents qui se déroulent en ce moment au nord du Maroc sur fond d’immigration, de pandémie sanitaire et de différend entre l’Espagne et le Maroc me conduisent à publier à nouveau une contre-chronique qui avait paru dans Antilla le 13 octobre 2005.

. Fort-de-France, le 18 mai 2021

Se battre à mort… pour la vie

. « Je me suis arraché le bras gauche avec le fil barbelé et on m’a fait des points de suture aux deux jambes, mais je n’y pense plus. Je mange bien, on m’a donné les habits de l’armée et je dors dans un lit. Ma seule peur, c’est qu’on me renvoie d’où je viens. Le reste c’est de la rigolade… comparé à là d’où je viens, c’est le paradis ». Après avoir vu à la télévision les assauts menés par des centaines de jeunes Africains contre les grilles séparant le Sud affamé et le Nord prospère, voilà donc, ci-dessus, ce qu’on peut lire dans Libération dans un entretien accordé à un Guinéen ravi, malgré ses blessures, de s’en être « bien sorti ».

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C’est peut-être cela le récit national martiniquais

Par Yves-Léopold Monthieux

Lorsque l’un des médecins qui a pratiqué l’autopsie du jeune Marie-Louise de l’affaire Chalvet m’a déclaré que « tout peuple qui se construit a besoin de mythes », je n’avais pas compris que le praticien pouvait, avec un tel aplomb, s’accommoder de la déconsidération d’un acte médical qu’il avait cosigné. Je lui avais simplement dit mon étonnement que l’histoire fût sur le point de retenir des conclusions médicales contraires aux siennes et à deux de ses confrères.

 Quelques années plus tard, Gilbert Pago donnait à l’Atrium une conférence relative à son livre sur l’insurrection du sud de la Martinique, en 1870. Dans le débat qui suivit l’historien rappela les différents évènements de l’année 1848 qui ont jalonné la marche vers l’abolition de l’esclavage. Les précisions qu’il avait apportées pouvaient laisser croire à un intérêt relatif de l’auteur pour celle du 22 mai 1848, comme si chacun pouvait choisir la date qui lui convenait. D’où la question qui fusa dans l’assistance de savoir quel était, selon lui, celle qui avait sa préférence. Il indiqua promptement son choix : le « 22 mai ».

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Martinique : nous sommes déjà dans l’autonomie

Par Yves-Léopold Monthieux

A la question d’un journaliste qui s’est étonné que pour l’élection prochaine de la CTM, le maire du St Esprit s’allie à l’autonomiste Catherine Conconne, le responsable du parti La République (LR) a répondu que la Martinique a déjà un statut d’autonomie depuis la disparition du conseil général et le remplacement du département par la collectivité territoriale. La déclaration de Fred-Michel Tiraut est juste. Certes, cette évolution a été obtenue à la marge du principe d’autodétermination puisque la décision a été prise pour le peuple et non par le peuple, lequel ne s’est pas prononcé pour l’évolution obtenue. Par ailleurs, l’autonomie se révèle moins un statut qu’un curseur qui établit le niveau de dépendance du territoire à sa métropole. Comme l’écrit Serge Letchimy dans Discours sur l’autonomie1, l’autonomie est un état d’esprit. Plus en amont de la déclaration de Fred-Michel Tiraut, j’avais exprimé en 2006 que nous étions déjà dans l’autonomie. Dès cette date, en effet, l’existence de ce « nouvel aménagement de la dépendance » m’avait paru évidente. Je posais alors la question de savoir quel était le projet martiniquais qui n’avait pu être réalisé, faute d’autonomie suffisante.

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Absurdité de croire que s’il était réélu Marie-Jeanne se désisterait en cours de mandat en faveur d’un protégé!

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Il ne faudrait pas se cacher derrière une querelle de mots. Lorsqu’on parle de dictateur à la Collectivité territoriale de Martinique, chacun sait de quoi on parle. On sait qu’il y a des élections et qu’un parapluie enlève à ce mot son essence. Cette protection s’appelle l’État français, même si celui-ci évite le plus possible d’entrer dans les bisbilles politiciennes entre élus martiniquais. Il y avait bien avant la chute du rideau de fer des pays qui s’appelaient démocraties populaires. On sait pourtant qu’ils n’étaient ni démocratiques ni populaires.

En réalité, le système de la CTM se rapprocherait plus de la « démocrature », vocable récent qui est appliqué aux pays où les dirigeants sont choisis par un vote, souvent vicié, mais s’autorisent dans l’exercice du pouvoir des gestes d’autorité exorbitants du droit commun. Il suffit par exemple que le statut de l’institution contienne des lacunes telles qu’il soit impossible à l’opposition ou aux alliés de la majorité d’en appeler le président au respect de la règle démocratique. C’est le cas pour la CTM. La violence des attaques par d’anciens alliés de la CTM contre les méthodes de la gouvernance finissante atteste d’une réalité qui n’aurait dû échapper à aucun citoyen averti : le président de la CTM a pu faire tout ce qu’il a fait dans le cadre de l’institution territoriale.

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23 avril 1848 : Libération des esclaves de Case-Pilote

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Qui ne se souvient de la Semaine sainte telle qu’elle fut pratiquée, notamment le jeudi saint, le vendredi saint et le samedi gloria ? Les cloches des églises faisaient relâche jusqu’au samedi tandis que les croix, statues et images étaient voilées. Pour remplacer les cloches les enfants de chœur se répandaient dans les rues en faisant crisser des crécelles, sorte de moulinet en bois qui s’appelait rara en Martinique. Ce mot provient peut-être du mot ara qui est une variété de perroquet de l’Amérique tropicale. D’où l’expression courante à l’époque « parler comme un rara ». On retrouve le mot ara à Haïti pour désigner une musique mystique jouée, notamment, au cours de la Semaine sainte, ce qui peut être considéré comme un point commun avec la Martinique. Une autre pratique, le « battre Judas », consistait pour les fidèles de la paroisse à circuler dans les rues en frappant sur des boîtes vides symbolisant Judas, l’apôtre qui a trahi Jésus. Des jeunes dévoyés profitaient parfois pour se livrer à des exactions comme des lancers de pierres sur les maisons. En cette fin de semaine des 20, 21, 22 et 23 avril 1848, le phénomène prit un tour particulier.

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1848, année de l’abolition : Schœlcher, Bissette et le 22 mai, 3 mythes pour une république.

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Je n’oublierai pas la phrase de l’un des médecins qui ont rédigé le rapport d’autopsie de la seconde victime de février 1974, le jeune ouvrier en bâtiment Georges Marie-Louise. « Tout peuple qui se construit a besoin de mythes », me dit-il. C’était la réponse sans équivoque à mon interrogation : « Docteur, je pense à vous quand j’entends certaines interprétations des incidents de février 1974 1». Des mythes, en veux-tu en voilà ! N’est-ce pas une méthode d’écriture de l’histoire ou d’histoires à côté de l’histoire qui caractérise trop souvent l’Histoire de la Martinique ?

Dans une récente expression, Marie-Hélène Léotin fait une présentation sans fard de Cyrille Bissette. Selon l’historienne, celui qui fut l’une des parties prenantes de l’abolition de l’esclavage de 1848 se serait caractérisé par son opportunisme et non par l’empathie du propriétaire d’esclaves qu’il était. Ses idées auraient évolué au gré des circonstances et des intérêts des mulâtres qui seraient devenus in fine les alliés objectifs des esclaves. Cette description peu contestée de l’historienne conduit à enfermer les mythes Bissette2 et Schoelcher dans un égal rejet, au seul avantage d’un 3ème mythe, la date du 22 mai 1848.

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« Fusillade » du Lamentin : une autre histoire à côté de l’Histoire.

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Quel historien martiniquais, nourri au marxisme ou non, s’est donné le mal de faire des recherches et d’aider à écrire une histoire neutre dans l’affaire de mars 1961 au Lamentin ? De se pencher sur l’épisode du décès, deux ans plus tôt, et de la succession du maire communiste. Fernand Guilon n’était pas en odeur de sainteté au sein de son parti lorsqu’il s’est suicidé. La même question peut être posée pour les évènements de décembre 1959 à Fort-de-France ou de février 1974, la réponse sera la même : aucun historien honnête n’a étudié ces affaires en historien. S’agissant de « 1959 », l’historien de service a été recadré par la commission Stora. Quant aux incidents de Chalvet, deux médecins ont corédigé un document historique essentiel, le rapport d’autopsie de l’une des deux victimes. Mais jusqu’à leur disparition, ces praticiens ont laissé dire le contraire du rapport et couvert par leur silence bienveillant une présentation arrangée de l’affaire. Bien que la gravité des évènements de février 1974 ne soit pas contestable, il est regrettable que soit retenue l’histoire écrite par des historiens marxistes, manifestement à la gloire de leur propre militantisme.

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L’histoire à coté de l’histoire continue de s’écrire

— Par Yves Léopold Monthieux —

L’absence d’historiens martiniquais dans le débat sur le pavillon des 4 serpents n’est pas anodine. Ils refusent généralement d’entrer dans ce genre de débats épidermiques où tout est dit au premier degré, écrit d’avance par les idéologues et que la moindre tentative d’apporter un codicille de rectification les fait vouer aux gémonies. Sachant que leur parole est de peu de valeur par rapport à celle des idéologues et que le dernier ignare peut les contredire, ils préfèrent se taire.
Même lorsqu’il s’agit d’historiens référents, leur notoriété ne les autorise pas davantage à sortir des clous idéologiques. Si leur honnêteté les conduit néanmoins à faire un pas dans ce sens, il leur faut aussitôt trouver la formule qui relativise leur audace pour ne pas, comme ils disent, « se faire assassiner ». La plupart des autres n’ont pas ce petit courage et ne sont pas (socialement ou au plan corporatiste) autorisés à l’exprimer. Cependant il n’y a pas que des historiens peu courageux ou paresseux en Martinique ; on ne doit pas non plus leur demander d’être des héros.

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Élections de la CTM: priorité à l’autosuffisance alimentaire

Par Yves-Léopold Monthieux

Dès 1975, après avoir écouté un ami exprimer ses doutes quant aux possibilités de développement de la Martinique et m’inspirant d’un mot de Paul Valéry (1931), il m’était venu l’idée d’intituler une tribune : « Le temps de la Martinique finie commence ? ». N’est-on pas en effet arrivé en Martinique au bout de quelque chose qui devrait nous ramener à l’essentiel ?

Peut-on continuer d’édifier encore des éléphants blancs tel le port de Grand-Rivière ou de nouvelles cathédrales comme le stade de Dillon ou le futur ex-Lycée Schoelcher ? Le caractère prétentieux de nos réalisations doit-il l’emporter sur leur utilité et la rigueur d’une saine gestion de l’argent public ? Lorsqu’on sait que la démographie est une donnée essentielle de la mise en œuvre de tout projet économique, peut-on continuer à mettre en œuvre des infrastructures nouvelles sans tenir compte de la « dépopulation massive » que connaît la Martinique ? Alors que le chiffre de 350 000 habitants est déjà prononcé par un organisme international, et que celui des véhicules devrait mécaniquement diminuer à proportion, est-il salutaire de poursuivre à grands frais et en direction de tous les azimuts l’extension du TCSP, sans qu’on connaisse par ailleurs le bilan du fonctionnement du tronçon Fort-de-France – Lamentin ?

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Cessez de dénigrer les personnes passées par le BUMIDOM.

Par Yves-Léopold Monthieux


Une personne issue du BUMIDOM et revenue en Martinique vient d’exprimer ses sentiments à la suite de la rediffusion à la télévision ce jour d’un film qui lui est insupportable.
Je dis merci à Madinin’Art de me permettre d’écrire ceci, qui ne peut pas être écrit ou dit dans la presse écrite et audiovisuelle : cessez, Messieurs-dames les journalistes de Martinique-la-première, de diffuser avec une régularité de métronome des films militants et misérabilistes sur le BUMIDOM. Ils ne sont pas de vous et n’ont pour objet, dans le but d’accuser le gouvernement d’alors, que de jeter l’opprobre sur les personnes parties au titre du BUMIDOM. Il n’a jamais – ô grand jamais – été organisé de débat entre des personnes d’avis différents ayant vécu cette histoire. Vous ne connaissez pas l’avis de ceux qui, très majoritairement, ont connu par ce biais une incontestable ascension sociale et dont aucun film ou ouvrage ne parle.
Il est aujourd’hui possible, mais pour combien de temps encore (?), de joindre et d’entendre ceux et celles qui sont revenus en Martinique à la retraite.

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Le dépeuplement de la Martinique : ira-t-on vers une substitution choisie ? 

Par Yves-Léopold Monthieux
Depuis les derniers chiffres de l’INSEE sur la démographie décroissante, des spécialistes et autres observateurs se penchent sur ce phénomène qui pourrait être déterminant pour les choix politiques à venir. Ces chiffres tombent à point nommé pour nourrir des projets en vue de l’élection de la Collectivité territoriale de Martinique. Deux intellectuels connus, le sociologue André Lucrèce et l’anthropologue Gerry Létang, apportent leur éclairage sur la nature du problème jusqu’à, pour le second nommé, esquisser une solution. Pour expliquer la décroissance de la population de ce début de siècle, le premier a cru devoir se référer à des déclarations politiques du passé.
Est-il encore besoin, en effet, de faire appel à des propos tenus par des leaders indépendantistes pour qui, loin de se préoccuper d’avenir démographique de Martinique, il s’agissait de faire feu de tout bois pour combattre le système politique français en vigueur. Edouard Glissant, membre fondateur du FAGA, le grand frère de l’OJAM, est cité pour sa métaphore douteuse : « Le pays, vidé de son sang jeune sera sans ressort et pourra être tenu en toute quiétude ».

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La Martinique brûle, les élus regardent ailleurs

— Par Yves-Léopold Monthieux 

« Parce que leur silence peut être considéré comme une espèce de complicité avec ce genre d’actes de vandalisme ». Samuel Tavernier.

Il est bien seul, le maire du François, à condamner l’incendie volontaire qui s’est produit dans sa commune. Pourquoi diable s’est-on pris à un entrepreneur de sa commune ? Ce qui lui interdit de se taire comme tous ses collègues : ceux de l’association des maires, ceux parmi lesquels il se trouvait dimanche lors de l’ouverture de la campagne de Péyi-a ; ceux qui tous, avec le maire idoine, ont « compris » l’acte raciste qui s’est produit au début du mois au Prêcheur et qu’il s’était, lui aussi abstenu de condamner ; ceux qui avalisent les dégradations commises dans des centres commerciaux, ainsi que les opérations de destruction de statues. Comme se taisent l’ensemble de l’intelligentsia à propos de ces exactions, ceux qui, pendant décennies, par leurs discours et leurs leçons, ont préparé ce qui se passe aujourd’hui et qui, tout à coup, effrayés, se voient dérangés dans leur confort bourgeois par le résultat obtenu. Oui, M. le maire Samuel Tavernier, il y a complicité des élus martiniquais qui, tous, se taisent, qui, tous, donnent en quelque sorte l’absolution à tout ce qui se passe aujourd’hui, sous le manteau des couleurs rouge-vert-noir.

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Élections de la CTM : le « syndrome du dernier ennemi » sera-t-il déterminant ?

Par Yves-Léopold Monthieux

Il y a quatre ans, l’annonce de la candidature à sa réélection du président de la CTM avait fait sourire, tant elle avait paru improbable. On avait pensé à une facétie du vieil homme qui, faute de se trouver à la tête d’une Martinique indépendante, était parvenu au faîte du pouvoir possible. En effet, on pouvait croire satisfait l’homme de pouvoir plus que d’opposition qui a toujours saisi ce pouvoir tel qu’il se présente à lui. Ne s’étant jamais opposé au pouvoir central, il avait su, contrairement aux autonomistes, convaincre deux présidents de la République d’organiser les trois consultations populaires sur l’évolution statutaire. N’ayant pu parvenir à l’objectif suprême il aura été celui qui aura permis de s’en approcher.

Premier à annoncer sa candidature, il est le premier à descendre dans l’arène. Le succès de la grand-messe organisée le 10 janvier dernier au Gros-Morne a dû mettre fin à bien des ricanements. Mais moins spectaculaire, les 2300 militants et partisans qui se sont rendus dans cet obscur bureau de la mairie du Lorrain pour manifester leur soutien à son projet de Séguineau est significatif de la capacité de mobilisation du président du Mouvement indépendantiste martiniquais (MIM).

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