Étiquette : Roland Sabra

Laos : Les hommes descendent des courges !

Carnet de route du Laos

— Par Roland Sabra —

Mes proches le savent : je m’étais toujours promis de retourner au Laos. J’ ai souvent raconté l’expérience de mon premier voyage en 1975 quelques semaines avant la prise officielle du pouvoir par le Pathet Lao, le bras armé du parti communiste. Le soir assis sur la terrasse du premier étage de l’hôtel de Paris à Vientiane, en sirotant une bière, j’assistais à l’arrivée tranquille mais déterminée des soldats du Parti Révolutionnaire du Peuple Lao. Trois par trois, vêtus à la chinoise dans des uniformes vert-olive, l’Ak47 en bandoulière, et trois grenades rondes, elles aussi de fabrication chinoise, à la ceinture. Deux ans auparavant un cessez-le feu général avait permis la mise en place, pour la forme, d’un gouvernement d’union nationale les communistes contrôlant 11 des 13 provinces. Il restait à prendre Vientiane, ce qui fut donc fait en 1975 en même temps que la démission forcée de tous les ministres non-communistes était obtenue sans difficultés. Et les révolutionnaires laotiens ont gardé le nom donné par le colonisateur français qui unifiait l’administration des différentes « principautés » ou minis royaumes qui se partageaient les territoires de son protégé et baptisait la nouvelle entité d’un nom unique « Laos ».

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Coup de gueule : les cinémas Madiana et la VO

— Par Selim Lander et Roland Sabra —
Comment dire l’exaspération des cinéphiles martiniquais face à la légèreté des gestionnaires de Madiana dès qu’il s’agit de la VO ? Grâce à Steve Zebina qui a organisé des projections de films en VO pour Tropiques Atrium dans leurs salles, ces gens ont compris qu’il y avait des amateurs pour de tels films, donc de l’argent à gagner. Mais il faut croire qu’ils détestent la VO au fond d’eux-mêmes puisque les incidents se multiplient. Combien de films programmés ne sont finalement pas passés au cours de ces deux dernières années ? On aimerait pouvoir en faire le compte ! Nous pardonnera-t-on si nous avouons avoir eu mieux à faire que dresser ce genre de liste ? C’est dommage, malgré tout, car il serait bon de mettre sous le nez des gestionnaires de ce cinéma la liste exhaustive de leurs manquements.
Ce n’est pas anodin de déplacer pour rien des amateurs qui viennent spécialement, parfois de fort loin (certes rien n’est kilométriquement très éloigné en Martinique, mais l’on sait combien le moindre déplacement peut être chronophage !).

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« L’Esclave »[1] ou qu’est-ce que la littérature ?

Note d’intention rétrospective par Michel Herland

couv 1 - CompresséeL’écriture romanesque est un acte spontané. L’auteur se découvre capable d’une imagination dont il ne se croyait pas capable ; il donne naissance à des personnages bientôt dotés d’une autonomie propre, si bien qu’il ne sait plus si c’est lui qui les conduit ou s’il est conduit par eux[2]. Autant dire que l’auteur n’est pas le mieux placé pour expliquer ce qu’il a voulu dire ; c’est pourquoi la lecture des critiques s’avère souvent si déroutante pour lui. Comme l’explique fort bien Jean-Paul Sartre dans Qu’est-ce que la littérature ?[3], le roman n’existe que par la rencontre de la subjectivité du l’auteur avec celle d’un lecteur. Celles-ci étant différentes, parfois très éloignées, voire incompatibles, il n’est pas surprenant que le premier, parfois, ne retrouve rien de ce qu’il croyait avoir voulu exprimer dans les commentaires des critiques littéraires et plus généralement de ses lecteurs.

On connaît peut-être la formule surprenante de Jean-Paul Sartre, toujours dans Qu’est-ce que la littérature ? : « Ecrire c’est à la fois dévoiler le monde et le proposer comme une tâche à la générosité du lecteur ».

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« L’Esclave » à la Bibliothèque Schoelcher

Mardi 12 mai 2015 à 18 h 30

Affiche bib SchoelcherQue sera la France dans un siècle ? L’Esclave brosse un futur possible, même s’il n’est certainement pas le plus souhaitable. L’auteur tire trois fils à partir du présent : la crise écologique, l’affaiblissement des nations occidentales, la montée de l’intégrisme religieux et du djihadisme. Cependant l’Esclave n’est pas qu’un exercice de futurologie. Les personnages sont des êtres de chair et de passions : il y a des sages et des fous, des sincères et des fourbes, des amoureux, des jaloux, des rancuniers, des orgueilleux, des cruels et des saints. Une lignée de femmes fortes traverse le récit, depuis l’époque actuelle jusqu’au dénouement de cette histoire.

Un roman, trois époques. 2009 – Une idylle se noue entre Michel, professeur de philosophie à l’université d’Aix-en-Provence et Colette, une de ses étudiantes. 2081 – Michel vient de mourir, Colette se remémore leur brève aventure, tout en observant la montée des périls qui menacent une Europe en pleine décadence.

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From York & Manchester… où règne la marchandise

Carnet de route 3

— Par Roland Sabra —
OLYMPUS DIGITAL CAMERA« La richesse des sociétés dans lesquelles règne le mode de production capitaliste s’annonce comme une « immense accumulation de marchandises. »
Karl Marx, phrase d’ouverture du « Capital »

Jamais le propos de Marx, dont une partie figurait déjà dans la Critique de l’Eco. Po. n’aura été aussi juste qu’en cette période de fêtes en Europe et plus précisément en Angleterre ou fût justement écrit « Das Kapital. Kritik der politischen Ökonomie ». Deux excursions en dehors de Liverpool où je réside depuis déjà trois semaines, confirment la profonde justesse de cette prémonition.
York. La répression fut terrible. Des milliers d’exécutions. Le fanatisme religieux au 16ème siècle dans le Yorshire ne valait pas mieux que ceux qui l’ont précédé ou qui l’ont suivi. Il ne faisait pas bon d’être catholique. Les remparts de la ville qui datent de l’époque romaine furent impuissants devant la folie meutrière. Le ver était dans le fruit. « Bis repetita placent » un siècle plus tard, lors de la Première Révolution anglaise, avec la guerre civile.

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« Mé ki sa nou lé » avec Sarah-Corine Emmanuel

sarah_co4— Par Roland Sabra —

On aura tout vu ! Un spectacle féministe mis en scène par Hervé Deluge ! 🙄 Certes il était en service commandé, mais il a fait le boulot pour lequel il était requis. Et plutôt bien ! Il faut dire que le thème est porteur.
Entre chant et théâtre, entre humour et colère, entre plaisir et tristesse, entre désir et douleur, entre partage et solitude, entre mère et femme,  Sarah-Corine Emmanuel nous a pris par la main pendant un long moment dans un assemblage de textes, de musiques et de chansons autour de la condition féminine, ici et ailleurs, pour une promenade réfléchie et enjouée. Des récits émouvants et drôles, des tranches de vies jubilatoires et parfois pathétiques ont été présentés avec cette gouaille, cette assurance de celle, Sarah-Corine Emmanuel, qui sait de quoi elle cause⋅ Dans ce genre elle est sur scène chez elle, nul ne peut en douter⋅ La scène ? Un triptyque de rideaux de fils blancs derrière lequel on entrevoit un orchestre et un chœur qui soutiennent la « diseuse »⋅ Au milieu un fauteuil de bar, blanc lui aussi, pivotant qu’elle occupe le plus souvent dans ses narrations.

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« 14°N 61°W » : entre Exposition d’œuvres d’art et Ciné-Club

 — Par Roland Sabra —

sao_paulo« São Paulo, Sociedade Anônima  » : un petit bijou des sixties!

L’espace 14°N 61°W est animé par Caryl Ivrisse-Crochemar, un jeune passionné d’art contemporain, qui a vécu en Europe, à Paris, Berlin et à Londres où il fut correspondant culturel de « L’Événement du Jeudi » . De retour en Martinique il ouvre dans un ancien entrepôt familial désaffecté un espace d’art contemporain au 19, rue du Mérite Artisanal (cela ne s’invente pas!)– Z.A Dillon à Fort de France qui non seulement accueille des artistes mais organise deux mardis soirs par mois une projection « art & essai » gratuite ouverte aux amoureux du cinéma et aux autres. 14°N 61°W a d’ailleurs accueilli quelques temps une autre association cinéphile, « Fewos » qui aujourd’hui est hébergée dans les locaux de la Guest’s house Packit au Rond Point Emma Ventura.

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« Real » : allégorie et métaphore du dessaisissement de l’être

— par Roland Sabra —

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Que peut-on connaître au delà de ce qui nous est donné ? Atsumi, est une mangaka, une dessinatrice talentueuse de mangas. A la suite d’une tentative de suicide elle se trouve plongée dans un coma profond. Son compagnon, Koiki va se joindre à un programme médical novateur permettant une mise en relation, une prise contact de cerveau à cerveau pour la faire revenir pleinement parmi les vivants. Mais voilà que l’expérience se brouille. Quel esprit pénètre l’autre ?
Kiyoshi Kurosawa livre une fable fantastique, élégante et stylisée de fantômes japonnais pour nous questionner sur notre rapport à la réalité à une époque de mutations technologiques, véritables chevaux de Troie de l’expansion d’un imaginaire triomphant. La frontière est fragile, elle laisse passer les « Zombies philosophiques », ces spectres dessinés comme des figures de jeux vidéo, qu’Atsumi déploie et que Koiki croise dans ses voyages aux confins infinis et secrets de ce chemin vers l’autre.

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« Tous créoles » et « Le sanglot de l’homme noir » : une lettre de Silyane Larcher à Roland Sabra

plume_courrierCher Monsieur,

Je me permets de vous écrire après avoir été informée du fait que vous avez évoqué sur votre site ma présence lors de la conférence d’A. Mabanckou, ainsi que mes nom et titre supposé. Votre manière de présenter les choses, pour le moins maladroite (pour ne pas dire davantage…), laisse à penser que je me serais présentée sous un titre qui ne serait pas nécessairement le mien : « une jeune femme, se déclarant politologue »… Puisque vous étiez à la conférence, n’avez-vous pas entendu que j’ai indiqué, précisément afin d’éviter tout malentendu, mon rattachement institutionnel ?? Étonnamment, le premier concerné, c’est-à-dire A. Mabanckou, n’a pas douté de la manière dont je me suis présentée… Peut-être avez-vous tellement pris l’habitude d’observer l’esbroufe et parfois l’imposture à laquelle se livrent, hélas !, tant de Martiniquais que vous n’avez pas jugé utile de procéder à une simple recherche sur Google avant de prendre la plume de façon si cavalière ?

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Rideau ! Sur une déception.

— Par Roland Sabra —

chanteuse_lyriqueAu théâtre A. Césaire de Foyal, la dernière pièce de la saison très en deçà des attentes.

Une bonne idée, même chevillée au corps ne suffit pas à faire un bon spectacle. « Rideau! » en fait la démonstration. Le travail de Gladys Arnaud sur un texte de Laurent Bernat, aussi intéressant soit-il manque un peu de souffle. Ce qui est un comble pour un opus qui se situe entre chant et théâtre.
Restée, pendant la représentation, dans la loge de théâtre d’une célèbre chanteuse de boléro, son habilleuse laisse se dérouler de façon rétrospective le fil des circonstances et des sentiments qui l’ont conduit à renoncer à sa propre carrière pour s’attacher corps et âme à l’artiste. Sujet magnifique qui convoque une myriade de sentiments contradictoires; admiration, partage , dévouement, amour, sacrifice, haine, rancœur et jalousie. « Elle », c’est le nom de l’habilleuse, fredonne les airs de boléros, les chante, se glisse dans les habits de scène, s’imagine prendre la place de la vedette et donc inconsciemment l’éliminer, peu avant que celle-ci ne soit victime d’un malaise sur scène.

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A partir du « Faust » de Goethe

Un Faust façon vaudou, santeria et candomblé!

— Par Roland Sabra —

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Mise en scène de Jandira Bauer les 23 et 24 mai 2014 à 20h Salle de théâtre Aimé Césaire du Lycée Schoelcher
Jandira Bauer est une diablesse. Pour qui en doute encore il lui suffit d’avoir vu son travail à propos de « Faust » pour en être convaincu. Définitivement. Que revienne le temps béni où l’on excommuniait les gens de théâtre, les comédiens en tout premier lieu et qu’on en juge. Oh! Jésus, Marie, Joseph, Jandira Bauer sera de la première charrette. Qui aujourd’hui peut affronter une pièce de 4615 vers écrite en allemand au XVIIIème siècle et traduite par Gérard de Nerval en 1828 ? Qui peut avoir maintes fois et maintes fois plongé ses yeux dans ce texte et ne l’avoir lu qu’à la lueur instable et troublante d’une bougie du vaudou, de la santeria et plus précisément du candomblé ? Pour la metteure en scène martiniquaise d’origine brésilienne, le fil narratif du Faust originel n’a d’autre fonction que de détourner le regard de ce que le lecteur européanisé ne veut pas lire. 

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De Johann Wolgang Goethe à Robert Lamoureux ou de « Faust » à « La Soupière »

— Par Roland Sabra —

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Ce week-end les amateurs de théâtre foyalais et d’ailleurs auront le choix entre deux spectacles qui se situent chacun aux extrémités de l’arc théâtral. Johann Wolfgang von Goethe d’un côté et Robert Lamoureux de l’autre ! N’hésitez pas allez voir les deux. Pratiquez l’art du grand écart. Leur point commun? Elles se jouent toutes les deux dans une salle qui porte le nom d’Aimé Césaire à Fort-de France. Forcément à Fort-de-France!
Brève présentation

A partir du « Faust » de Goethe

Mise en scène de Jandira Bauer les 23 et 24 mai 2014 à 20h Salle de théâtre Aimé Césaire du Lycée Schoelcher

Vaclav Havel, écrit dans ses Lettres à Olga que les trois œuvres principales de la culture européenne sont Don Juan, le Golem et Faust. C’est à un de ces trois monuments que Jandira Bauer s’est attaquée.

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« Heli » : une monographie mexicaine

Film mexicain d'Amat Escalante avec Armando Espitia, Andrea Vergara, Linda Gonzalez (1 h 45). A Madiana.

— Par Roland Sabra —
heli-2La séquence d’ouverture signe le climat du film. Un plan fixe sur sur une chaussure cloutée qui maintient sur le plateau d’une camionnette une tête ensanglantée. A ses cotés, tête-bêche, un cadavre. Travelling vers l’avant du pick-up sur la nuque du conducteur, celle du passager et sur le faisceau des phares qui éclairent une route poussiéreuse. La voiture s’arrête au bord d’un hameau. Plan général sur la camionnette, la route et la passerelle pour piétons qui l’enjambe. Sortie des passagers qui transportent le mort et le prisonnier sur le pont, matraquent le rescapé, le laissent inanimé et pendent le cadavre au bout d’une corde du haut de la passerelle.  Pas d’explications.

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« Her » une fable philosophique entre utopie et dystopie

Un film de Spike Jonze à Madiana.

— Par Roland Sabra —

herLe futur est au présent, sous nos yeux.

C’est une fable entre cauchemar philosophique et parcours initiatique que nous propose Spike Jonze dans sa dernière œuvre «  Her ». 2024 peut-être, Los-Angeles, dans un monde aseptisé, les pauvres ont disparu tout comme les conflits sociaux, ethniques, politiques. Toute violence a cessé, rejetée au delà du cadre de l’écran, hors les murs de la ville. Les voitures ne sont plus, on se déplace dans des métros spacieux, confortables avec des gares aux corridors vitrés et aux espaces aseptisés. Il ne reste que des individus repliés sur eux-mêmes. Isolés. Atomisés. Théodore Twombly en est un parmi des millions.

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« Pull » : mité !

—Par Roland Sabra —

pull-3Ils arrivent sur le plateau par les côtés de la salle, bras tendus, un revolver au bout de la main. Deux vieux clowns de réforme. L’un, crâne d’œuf au bas duquel pend un postiche élimé de rouquin, l’autre « Bibendum » noirci, enperruqué de faux cheveux noirs, raides et lustrés, sont enfermés dans les bas-fonds d’un théâtre poussiéreux. Ils attendent. Ils parlent pour ne rien dire. Ils  se racontent des histoires. Ils attendent un ordre, une mission. Ils parlent et ils attendent un nouveau contrat. Ils affabulent et ils attendent un autre assassinat. Ils mentent et ils attendent, peut-être leur propre mort. Ils inventent et ils attendent. Qu’attendent-ils ? Oh ce n’est pas Godot ! N’est pas Beckett qui veut !

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Une performance de Jacques-Olivier Ensfelder, entourée d’artifices inutiles

"La nuit juste avant les forêts" à Fort-de-France

 Modifié le 02-02-2014

j-o_ensfelderJacques-Olivier Ensfelder ( photo) fait montre d’un grand talent dans «La nuit juste avant les forêts ». Il portait en lui ce texte comme on garde un mystère. Depuis de longues années. Au fond du cœur. Étranger à lui-même et si proche, comme un enfant qui vous déchire de trop vous ressembler. Il porte le texte qui souvent l’emporte. C’est une bataille douce et douloureuse qu’il livre sur scène, dans une chorégraphie amoureuse avec les mots, les sonorités, les registres de langage, la musicalité de la phrase. Les scansions, les découpes qu’il opère dans le texte, se construisent comme témoignages de fidélité et de reconnaissance, comme preuves d’amour à l’auteur trop tôt disparu. Seul en scène il convoque la multitude des rencontres éphémères, des amoures sans lendemains, des déceptions d’une demande infinie dont l’objet toujours se dérobe à ne pouvoir être nommé. Sec et nerveux, violent et précis le phrasé épouse et enlace le propos, lui accorde des plages de repos, de calme précaire sur fond d’inquiétude sans cesse renaissante.

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Le CMAC condamné pour licenciement abusif !

— Par Roland Sabra—

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On se souvient des conditions, honteuses pour leurs auteurs, dans lesquelles Josiane Cueff, alors directrice du CMAC avait été « remerciée » pour le travail accompli à la tête de la Scène nationale de Martinique en 2011 et 2012. Si le court bilan de la Directrice pouvait et devait faire l’objet d’un débat tout à fait légitime les manières de faire utilisées pour se défaire de sa présence soulevaient et soulevent encore, rien qu’à les évoquer, des haut-le-coeur. Il est des moyens, des méthodes qui déshonorent ceux qui y ont recours. Une cabale, menée par un groupe d’artistes dépités de ne pouvoir se hisser au niveau des exigences artistiques d’une scène nationale et organisée en sous-main par un groupe d’oligarques colonisant à son profit l’encadrement de la structure, avait conduit à l’éviction de la directrice. Des arguments martinico-lepenistes avaient été avancés, des procédures dignes de patron-voyou avaient mises en œuvre. Et tout cela bien sûr par des hommes et des femmes de « gôche », de progrès.

Les voilà aujourd’hui condamnés par le Conseil des prud’hommes de Fort-de-France pour licenciement abusif.

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De trois petits chefs- d’oeuvre, japonais, chinois et indien…

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— Par Roland Sabra —

Depuis dix ans déjà Hirokazu Kore-Eda, questionne la famille. En 2004, dans Nobody Knows, s’inspirantd’une histoire vraie, une mère avait abandonné ses quatre enfants dans un appartement pour se livrer à la prostitution, il interrogeait : peut-on avoir comme mère une putain? Still Walking ( 2008) abordait l’impossible deuil d’un fils aîné mort en sauvant de la noyade un enfant. Air Doll à travers l’amour possessif d’un célibataire pour une poupée gonflable qui finira par prendre vie et s’autonomiser traitait des thèmes de l’isolement et de la solitude dans les sociétés modernes et celui du pouvoir dans une relation de couple. Dans I wish (2011) deux frères séparés par le divorce de leurs parents essaient de renouer lors d’un voyage initiatique avec le « paradis perdu » de leur enfance.

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Césaire, Lam, Picasso, « Nous nous sommes trouvés »

 Se tient à la Fondation Clément au François, sans doute la plus belle exposition jamais organisée en Martinique.

expo_cesaire_lam_picasso  — par Roland Sabra —

 Fin avril 1941 le vapeur Capitaine Paul Lemerle arrive enfin dans la baie de Fort-de-France un mois après son départ de Marseille avec à son bord trois cents cinquante intellectuels européens pourchassés par le nazisme triomphant. Le bateau a vingt ans d’âge, poussif il est au deux tiers de sa vie. Il ne dispose que de sept couchettes réparties entre deux cabines. Les passagers, s’entassent dans les cales sans air ni lumière sur des lits de fortune, ou ce qui en tient lieu, des grabats plutôt. Qui y-a-t-il parmi cette « racaille » selon les termes employés par la police »collaborationniste » de Marseille ? André Breton, Claude Levi-Strauss, Victor Serge, Anna Seghers, Wifredo Lam, des artistes, des savants, des communistes, des juifs, des anarchistes, des républicains espagnols. Une fondation étasunienne l’ »Emergency Rescue Committee » (ERC) est chargée par son gouvernement de sauver les personnalités intellectuelles menacées par l’hitlérisme qui en échange accepteront d’offrir à la grande Amérique le service de leur savoir.

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En revenant de l’Expo…

 Aimé Césaire, Lam, Picasso « Nous nous sommes trouvés »

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— Par Roland Sabra —

Suite de l’article Césaire, Lam, Picasso, ils se sont trouvés!

Passé le sas d’entrée sur la droite sont accrochés dans ce qui peut ressembler à une alcôve quelques masques ayant accompagné Césaire, Lam et Picasso leur vie durant.

  S’en tenir à la déclaration péremptoire et agacée de Picasso en réponse à une critique de sa période cubiste un peu trop réductrice « L’art nègre ? Connais pas ! » c’est tordre la pensée du peintre, lui qui précise, «  Il n’y a pas d’art nègre, mais une manifestation du génie humain qui, à la suite des circonstances, s’est exprimée et développée en Afrique. » Le paradoxe tient à ce que Picasso va contribuer, peut-être plus que tout autre, mais sans doute involontairement, ou tout au moins sans en mesurer toute la portée, à la constitution d’un nouvel objet, «  L’Art nègre » précisément, dont il dit par ailleurs ne rien savoir ! Le statut des objets africains rapportés par les navigateurs portugais dès le XVème siècle et constitués en collections à partir du tout début du XXème siècle par Maurice de Vlaminck comme l’atteste Guillaume Apollinaire, sont porteurs d’une ambiguïté qui ne cesse de faire débat aujourd’hui encore.

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Césaire, Lam, Picasso, ils se sont trouvés!

Se tiexpo_cesaire_lam_picassoent à la Fondation Clément au François, sans doute la plus belle exposition jamais organisée en Martinique.

 — En guise d’introduction par Roland Sabra —

 Fin avril 1941 le vapeur Capitaine Paul Lemerle arrive enfin dans la baie de Fort-de-France un mois après son départ de Marseille avec à son bord trois cents cinquante intellectuels européens pourchassés par le nazisme triomphant. Le bateau a vingt ans d’âge, poussif il est au deux tiers de sa vie. Il ne dispose que de sept couchettes réparties entre deux cabines. Les passagers s’entassent dans les cales sans air ni lumière sur des lits de fortune, ou ce qui en tient lieu, des grabats plutôt. Qui y-a-t-il parmi cette « racaille » selon les termes employés par la police »collaborationniste » de Marseille ? André Breton, Claude Levi-Strauss, Victor Serge, Anna Seghers, Wifredo Lam, des artistes, des savants, des communistes, des juifs, des anarchistes, des républicains espagnols. Une fondation étasunienne l’ »Emergency Rescue Committee » (ERC) est chargée par son gouvernement de sauver les personnalités intellectuelles menacées par l’hitlérisme qui en échange accepteront d’offrir à la grande Amérique le service de leur savoir.

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« La voix humaine »: d’une distanciation l’autre

 

— Par Roland Sabra —

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« C’est l’extrême sensibilité qui fait les médiocres acteurs; c’est la sensibilité médiocre qui fait la multitude des mauvais acteurs; et c’est le manque absolu de sensibilité qui prépare les acteurs sublimes. » (Diderot, Paradoxe sur le comédien (1773-1780))

A qui se demanderait quelle mouche a donc piqué Michèle Césaire pour nous présenter au Théâtre Aimé Césaire de Fort-de-France, les 14, 15 et 16 novembre 2013, au beau milieu d’une programmation essentiellement consacrée cette année à Bertholt Brecht une pièce de Jean Cocteau, on aurait beau jeu de répondre que si 2013 est l’année ou l’on commémore le centenaire de la naissance d’Aimé Césaire et d’Albert Camus, elle est aussi l’année du tricentenaire de la naissance de Denis Diderot. Si vous n’êtes pas plus avancé dans l’interrogation, si vous vous étonnez du rapprochement entre l’encyclopédiste du dix-huitième siècle, emprisonné pour avoir affronter les pouvoirs institués de son époque et le poète un tantinet mondain soupçonné de collaboration avec les troupes allemandes durant la Seconde guerre Mondiale c’est que vous n’avez pas vu la performance de Nicole Dogué dans « La voix humaine » mise en scène par Marja-Leena Junker.

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« Gravity » : what a pity ou le vide sidéral

—Par M’A —

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A Madiana

« Le docteur Ryan Stone, brillante experte en ingénierie médicale, est novice en matière d’expédition spatiale. Lors de son premier voyage, elle accompagne l’astronaute chevronné Matt Kowalsky. Mais alors qu’ils effectuent une banale sortie dans l’espace, des débris en orbite s’abattent sur leur navette. Ils se retrouvent seuls dans l’espace, à 600 kilomètres de la Terre. Alors que leurs chances de survie sont minimes, ils doivent faire preuve de beaucoup de sang-froid et d’entraide pour tenter de rejoindre le sol. Perdus dans cet univers infini, ils essaient de gérer des réserves d’oxygène qui diminuent peu à peu. Bientôt, une seconde vague de débris met leur vie en danger… » Tel est le synopsis de Gravity, un phénoménal succès planétaire avec un scénario d’une pauvreté confondante pour ne pas dire d’une nullité ou d’un vide sidéral effayant. Le plus incroyable est de lire sous la plume de quelques-uns qu’il s’agirait là du plus grand film de science fiction depuis « 2001, l’odyssée de l’espace » de Stanley Kubrick ! Il faut pour cela avoir oublié les débats intenses suscités par l’oeuvre de Kubrick il y a 45 ans, oublié la réponse, cinq ans après d’Andreï Tarkovski, avec « Solaris », adaptation du roman de de Stanislas Lem, reprise par Steven Soderberg en 2002.

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« Une saison au Congo » au Grand Carbet : du grand et bel ouvrage!

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— Par Roland Sabra —

Christian Schiaretti et l’ensemble de sa troupe ont offert à la Martinique, par l’entremise du Conseil Régional et du SERMAC deux heures trente de bonheur les 2 et 3 novembre au Grand Carbet du Parc Aimé Césaire de Fort-de-France. Il n’est pas si fréquent, excepté lors du Festival de la ville capitale, de voir un plateau de théâtre occupé par trois douzaines de comédiens, musiciens et chanteurs majoritairement d’origine africaine, burkinabé, ou antillaise agrémenté de quelques caucasiens. Ce métissage réussi est un des éléments du succès populaire du travail présenté. Il en est d’autres. La pièce en elle- même et la mise en scène participent bien sûr à cette réussite.

 1958 : le Congo actuel, cette invention d’une zone tampon entre les féroces appétits des puissances coloniales britannique, française et allemande est en ébullition. La Belgique qui en a hérité est sur le point de passer la main. L’indépendance est en marche. Un jeune leader, il a 33 ans, à la tête du MNC, le Mouvement Nationaliste Congolais, mène la vie dure aux colonialistes qui l’emprisonnent plusieurs fois et notamment en décembre 1959 alors que se réunit à Bruxelles la table ronde qui doit mener à l’indépendance.

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« La dernière scène », texte et mise-en-scène d’Alain Foix

 A l’Atrium les 17 & 18 octobre 2013

— Par M’A—

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Écrivain, philosophe et dramaturge, Alain Foix, né en Guadeloupe, est un homme dérangeant. Et c’est tant mieux. Son théâtre « existentiel et humaniste » s’impose un impératif catégoriel, celui de ne jamais verser dans la facilité mais toujours s’imposer de penser avec une exigence éthique. Dans le combat entre existentialisme et essentialisme il est clairement du côté du premier terme. Il a d’ailleurs écrit dans Libération en 2001 un papier qui a fait date, notamment par les réactions d’incompréhension qu’il a suscité. Le titre était « Adieu négritude ». Fin lecteur de Sartre il déclare « la négritude [est] un concept opératoire qui a pour fin sa propre fin. La négritude ne peut pas exister au-delà du dépassement de cette condition-là, sinon, c’est l’essentialisme dans lequel tout est possible et d’abord le racisme. »

On trouvera l’illustration la plus récente de ce positionnent éthique dans l’écriture de la pièce qu’il nous est donnée à voir à Fort-de-France, « La dernière scène ». Dés les premières lignes il précise « « L’auteur prend, dans tout cet ouvrage, le parti, à l’encontre de la convention, d’écrire blanc ou noir, lorsqu’il s’agit de personnes, avec des minuscules.

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