— Par Robert Berrouët-Oriol, linguiste-terminologue —
L’accession du créole au statut de langue enseignée et langue d’enseignement remonte à la réforme Bernard de 1979. En effet, « Joseph C. Bernard dans sa réforme de l’éducation a fait publier une loi sur le créole à la Chambre législative le 18 septembre 1979. Et à côté du français, il devient, pour la première fois dans l’histoire de l’enseignement d’Haïti, langue outil et langue objet » (Fortenel Thélusma, « Pratique du créole et du français en Haïti : entre un monolinguisme persistant et un bilinguisme compliqué », 2019, à paraître). Ambitieuse dans son objectif majeur, la réforme Bernard de 1979 accordait donc, grande nouveauté dans l’apprentissage des connaissances au pays, un statut nouveau et une place centrale à l’enseignement dans/de la langue maternelle des apprenants unilingues créolophones. Cette ambitieuse réforme n’a pas été généralisée ni menée à son terme, et dès ses débuts elle a été torpillée par les grands commis de la dictature duvaliériste comme en témoigne le sociologue Guy Alexandre dans son article « La politique éducative du jean-claudisme, chronique de l’échec « organisé » d’un projet de réforme » paru dans « Le prix du jean-claudisme – Arbitraire, parodie, désocialisation », livre publié en 2013 sous la direction de Pierre Buteau et Lyonel Trouillot aux Éditions C3.