Une Europe contre les peuples et la démocratie

europe_allemande— Par François Bonnet —

L’euro a accouché d’un monstre politique. L’humiliant accord imposé à Alexis Tsipras le démontre une fois encore: il n’est pas de marges de manœuvre politiques possibles dans une zone monétaire devenue l’otage des idéologues du libéralisme.
Depuis dimanche soir, le hashstag #ThisIsaCoup est l’un des plus suivis sur Twitter. De l’économiste Prix Nobel Paul Krugman à l’ancien ministre grec Yanis Varoufakis, en passant par le souverainiste français Nicolas Dupont-Aignant, le #CestUnCoup canalise les indignations contre l’accord imposé par les Européens à la Grèce en échange de son sauvetage financier.
Coup d’Etat? L’expression peut cristalliser les désaccords mais une chose n’est guère contestable: les «institutions européennes» ont bel et bien décidé de prendre le pouvoir en Grèce. La proposition du socialiste allemand Martin Schulz, président du parlement européen, d’installer «un gouvernement de technocrates» à Athènes s’est ainsi réalisée de fait, au terme d’un week end de négociations qui a vu l’Allemagne imposer de bout en bout sa ligne.

C’est la vraie démonstration de ce week end: la zone euro et ses présumés critères de gestion ont accouché d’un monstre politique. Et ce monstre est en train de dévorer ce qui est au cœur même du projet européen: l’approndissement démocratique. La zone euro n’est plus l’Europe, elle est devenue une machine à balayer les peuples et à écraser la démocratie. Nous l’avions déjà expérimenté à l’automne 2011, quand deux chefs de gouvernement furent renversés sous les pressions des marchés et du duo Merkel/Sarkozy. Il s’agissait alors de Silvio Berlusconi et Georges Papandréou.

Cette fois, la démonstration est autrement plus violente parce qu’elle s’est faite de bout en bout sous les yeux des citoyens européens. Le premier ministre grec Alexis Tsipras se trouve de fait démis de ses fonctions, de la principale au moins, celle de conduire une politique économique ; c’est ce qu’explicite par le menu le texte de l’accord obtenu à l’arraché à l’issue de dix-sept heures de négociations.

Tsipras et la Grèce ne sont pas seulement humiliés ; le premier ministre est brisé politiquement tant il a été contraint d’abdiquer de la plupart de ses demandes. Et si sa majorité parlementaire peut encore le suivre un temps, il ne fait nul doute qu’un bouleversement radical du paysage politique grec va intervenir dans les mois qui viennent. A Bruxelles, de nombreux dirigeants européens suggèrent déjà un remaniement, la mise en place d’un gouvernement d’union nationale, la démission des ministres jugés les plus radicaux…

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