Étiquette : Hervé Deluge

PULL! ou de l’ironie aux Antilles

Texte et mise-en-scène de Hervé Deluge

—par Daniele Daude —
pullD’une perspective théátrologique une pièce mise en scène par son auteur suscite de premier abord une certaine méfiance. Le texte, la dramaturgie et la mise-en-scène étant ici liés par une même personne dans des exercices historiquement et artistiquement distincts un regard critique devra interroger tant l’autonomie que l’équilibre des genres. Les composantes théâtrales devant être considérées aussi bien séparément que dans leur interdépendance globale il convient d’interroger les constructions dramaturgiques (texte, musique, conception scénique, régie lumières, chorégraphie etc.) aussi bien dans leur rapport aux thématiques abordées et que dans les moyens scéniques déployés pour y répondre.

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Pull : deux truands sur le retour

pullPar Selim Lander – « Pull » : pull the trigger, appuie sur la détente. De fait, les deux personnages qui occupent la scène ont la gâchette facile. Les sens en alerte, ils dégainent plus vite que leur ombre. Avec Pull, comme on le comprend tout de suite, Hervé Deluge (auteur et metteur en scène)nous projette dans un univers de films noirs aux truands sympathiques. Pas mauvais bougres, tuer pour eux n’est qu’un métier, avec ses bons et ses mauvais côtés. Il n’empêche : ces deux-là sont rendus à un stade de leur (médiocre) existence où l’on commence à se poser des questions existentielles.  Leur philosophie ne va pas bien loin mais elle est dépourvue de prétention et l’on se laisse facilement charmer par des discours où l’humour côtoie la déraison. Il ne se passe rien : les tueurs (le mot « assassin » ne conviendrait pas ici) attendent qu’on leur désigne une cible, et comme la distribution est réduite à deux comédiens, on se doute bien qu’il ne se passera pas grand-chose d’autre. Pourtant, on a envie de savoir la suite.  

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« Pull » : mité !

—Par Roland Sabra —

pull-3Ils arrivent sur le plateau par les côtés de la salle, bras tendus, un revolver au bout de la main. Deux vieux clowns de réforme. L’un, crâne d’œuf au bas duquel pend un postiche élimé de rouquin, l’autre « Bibendum » noirci, enperruqué de faux cheveux noirs, raides et lustrés, sont enfermés dans les bas-fonds d’un théâtre poussiéreux. Ils attendent. Ils parlent pour ne rien dire. Ils  se racontent des histoires. Ils attendent un ordre, une mission. Ils parlent et ils attendent un nouveau contrat. Ils affabulent et ils attendent un autre assassinat. Ils mentent et ils attendent, peut-être leur propre mort. Ils inventent et ils attendent. Qu’attendent-ils ? Oh ce n’est pas Godot ! N’est pas Beckett qui veut !

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« Pull » – une mélodie en sous sol … du théâtre

— Vu par José Alpha —

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Il s’agit d’un rendez-vous-piège tendu par « la Baleine », certainement un boss du milieu, dans les sous-sols du théâtre Aimé Césaire à Fort de France, à ces deux flingueurs sur le retour qui n’ont d’arsenal que leur 9 mm et un lyrisme méchamment baroque qui tord le cou aux comédiens, gens de la scène et autre poète habitués des lieux.
La pièce commence par la surprenante apparition de nos deux malfrats qui vont inspecter de fond en comble le lieu du rendez vous. Les types sont nerveux ; torches et flingues à bout de doigt prêts à cracher la purée sur une mouche qui s’aventurerait dans leur périmètre. Paranos et stupides, balourds et  demeurés, ils attendent, l’œil vif, dans les sous sols du théâtre la venue d’un émissaire, ou de la Baleine lui-même, qui leur dira le motif de la convocation ou leur confiera peut être une autre mission.  Nous ne le saurons jamais ; en tout cas ni « la Baleine » n’apparait, ni changement de plan ne leur fera changer d’avis ;  il faut rester en place et attendre dans la pénombre du débarras, un point  c’est tout.

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« LE SYSTÈME MAKO », Comédie française….. à l’ATRIUM, les 26 et 27 juillet 2013.

« LE SYSTÈME MAKO« , Comédie française…..
revient , à la demande du public,
à l’ATRIUM, les 26 et 27 juillet 2013.
Venez découvrir le spectacle le plus désopilant de l’année!!!
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Commentaires de quelques spectateurs:
« Mwen manjté pisé anlè mwen! » Margareth / Macouba
« La première scène peut choquer, mais…Fout’ i té bon! »  le Maire de Fort-de-France

« Mwen trapé mal tèt, a fos mwen ri, mé mwen ka viré wè sa » Maurice / Case-Pilote

Et la critique de Selim Lander :

http://www.madinin-art.net/le-systeme-mako-un-vaudeville-a-la-sauce-antillaise-2/

Et celle de Thomas Gendre :

http://www.madinin-art.net/le-systeme-mako-entre-stereotypes-et-macaqueries/

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« Le système Mako » de Deluge : entre stéréotypes et macaqueries!

 — par Thomas Gendre,  élève de terminale option théâtre, Lycée Schoelcher —

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Critique du spectacle le Système Mako,

Ribadier est le second mari d’Angèle, veuve de feu sieur Robineau. Suite aux infidélités de son défunt mari, Angèle a développé une jalousie frisant la paranoïa et surveille étroitement les activités de son second époux. Ribadier, inspiré des techniques du Docteur Charcot, possède le don d’hypnotisme et en profite pour endormir sa femme lors de ses escapades, la réveillant à son retour grâce à un truc que lui seul connaît. Un jour, il se confie maladroitement à Aristide Thommereux, son ami commun avec Robineau, revenu d’un exil de plusieurs années à Batavia. Ribadier ignore tout de l’amour que Thommereux vouait à Angèle, raison de son exil par delà les mers… Profitant d’une escapade de Ribadier, Thommereux réveille Angèle pour lui réitérer sa flamme… C’est à ce moment que Ribadier revient en catastrophe, poursuivi par le mari de sa maîtresse du moment, Thérèse, épouse d’un marchand de vins, Monsieur Savinet.

Hervé Deluge nous propose Le système Mako, d’après le Système Ribadier de Georges Feydeau, le roi du vaudeville : un théâtre animé, qui, suivant les lois du genre, enchaîne les rebondissements rocambolesques, les quiproquos et autre apparitions inopinés à un rythme frénétique.

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Le Système Mako : un vaudeville à la sauce antillaise

syteme_makoIl faut de tout pour faire un monde ; c’est également vrai au théâtre. Tragédie, drame ou comédie – Racine, Shakespeare ou Molière (pour s’en tenir aux vieux maîtres) – ne nous procurent pas les mêmes plaisirs. Le spectateur, cependant, n’est pas pris au dépourvu : sachant ce à quoi il doit s’attendre, il choisit les pièces qu’il ira voir. En d’autres termes, l’amateur « branché » d’aujourd’hui n’aura pas l’idée de se fourvoyer dans un théâtre des Grands Boulevards : il s’en tiendra aux salles subventionnées et, l’été, au « In » d’Avignon. L’amateur martiniquais n’a pas, quant à lui, la possibilité de faire autant le difficile : avec une programmation tournant autour d’une dizaine de pièces par an, jouées chacune deux ou trois soirs, il a intérêt à faire flèche de tout bois, plus précisément à se précipiter sur tout ce qui se présente, s’il veut satisfaire son appétit pour le théâtre.
Cet éclectisme forcé a au moins ce bon côté qu’il permet de vérifier combien les comédiens sont essentiels dans la réussite d’un spectacle. Un texte sublime peut devenir insupportable s’il est mal joué et, inversement, un texte sans grand intérêt peut se révéler plaisant s’il est porté par des comédiens talentueux ayant envie de faire partager leur plaisir de jouer.

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Une comédie introuvable

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— Par José Alpha —

L’inspiration comique des évènements, des situations et des personnages portée à la scène théâtrale répond généralement au besoin de détente et de distanciation que nous procurent par exemple les humoristes en général, ou les talentueux comiques antillais de plus en plus présents sur les scènes locales et nationales.
Nous avons plaisir à les voir se débattre à notre place, dans des situations de conflits, de frustration, de mensonges, de mauvaises fois et d’impuissance.

Alors quand on annonce « le Tartuffe » de Molière, même si on ne connait pas l’histoire, on s’attend à découvrir comme tout le monde, des développements suffisamment comiques servis par la réputation de l’auteur et surtout par la jeunesse du metteur en scène, de surcroit martiniquais donc bien au fait des relations humaines volcaniques et passionnelles qui nous constituent malgré tout.

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Les triporteurs de la discorde

— Par Christian Antourel —

 « Notre intention, c’est aussi établir un pont entre l’Education Nationale et le théâtre professionnel, qui puisse nourrir les espoirs d’une action culturelle soutenue »
(Hervé Deluge)

–__-  Le Tartuffe d’Hervé Deluge

Le Tartuffe est une comédie de mœurs. La pièce étudie et fait la satire appuyée des dévots. C’est dans Tartuffe que Molière définit le mieux son but qui est de peindre les hypocrisies religieuses, l’aveuglement et les problèmes de l’extrême dévotion. L’analyse se veut fine et également met en relief les rapports maîtres/serviteurs. La pièce a été le plus grands succès de Molière. C’est l’histoire d’une famille aux prises avec un prédateur. Les personnages qui doivent occuper le devant de la scène sont Orgon, Elmire et Tartuffe. Selon le schéma hérité de la farce médiévale avec la femme, le mari, et l’amant : ce personnage intrus qui s’immisce dans le couple. Mais la pièce est bien plus sophistiquée qu’elle le semble .Passions, rires, larmes et rebondissements, doivent en faire une comédie divertissante. Hervé Deluge dans des proportions qui prennent toujours le risque de l’audace cherche derrière la farce et la bouffonnerie de la pièce, un plus délirant, excentrique même,  dans cette famille qui est un champ de bataille ou stratégies, ruses, attaques et coups d’éclat se succèdent.

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Tartuffe en roue libre

—  par Roland Sabra —

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    Tartuffe n’est peut-être pas le personnage principal de la pièce éponyme de Molière. C’est sans doute Orgon que l’auteur interprétait lui même. On pourrait même présenter Orgon comme un homme amoureux d’ un faux dévot auquel il est prêt à tout sacrifier par entêtement, ou plutôt par amour. On pourrait. Hervé Deluge aurait pu…

Disons le d’emblée il y a des trouvailles de mise en scène, une belle scénographie, de très belles lumières dues, une fois de plus à Dominique Guesdon. On se souviendra du clin d’oeil à la célèbre photo de Marylin Monroe sur une grille de métro avec Elmire, la femme d’Orgon, robe offerte au vent tout comme on aura photographié Madame Pernelle icône agenouillée dans la troisième dimension d’un vitrail collé au sol. Moments de pure beauté plastique. La musique de Alfred Fantome à une petite tonalité « orientalisante » qui in-temporalise ingénieusement la pièce, Le recours à des tricycles pour le déplacement des personnages sur l’immense plateau nu du CMAC est aussi une bonne idée, qui tourne parfois au procédé mais qui pouvait signifier une distance maitrisée avec le texte.

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Hervé Deluge monte Le tartuffe

—  Propos recueillis par R. Sabra —

 

 

 

Pourquoi monter le tartuffe ici et maintenant en Martinique ?

Tartuffe est l’une des pièces qui a fait l’objet du plus grand nombre de mises en scène au monde. C’est dire si cette dernière pose des questionnements universels.
Pour une équipe artistique martiniquaise se confronter à cette œuvre c’est poser concrètement un défi : celui de nous l’approprier de manière vivante, contemporaine et sans complexe.
C’est aussi établir un pont entre l’éducation nationale et le théâtre professionnel, qui puisse nourrir les espoirs d’une action culturelle soutenue.
Jouer une pièce classique en Martinique 15 fois dans la grande salle de l’Atrium est une gageure et constitue une première. C’est surtout offrir à notre jeunesse l’opportunité d’assister aux représentations d’un spectacle qui ouvre aux enseignants comme aux élèves une large sphère d’investigation. Ainsi qu’à tout amoureux du théâtre classique ou du théâtre tout court.

L’hypocrisie n’est-elle pas nécessaire au maintien de la religion et de ses lois?
-Pourquoi la religion serait-elle nécessairement liée à l’hypocrisie?
Il me semble qu’il existe des gens qui ont réellement la foi et qui l’appliquent avec sincérité, c’est à dire dans l’amour du prochain.

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« Il want it, I’ll get it ! » : que les fruits tiennent la promesse des fleurs !

— Par Roland Sabra —

  Il ne faut pas désespérer de Hervé Deluge. S’il nous est arrivé d’être très réservé à l’égard de certaines de ses productions il nous arrive aussi d’être charmé par son travail. C’est le cas avec sa dernière production «I want it, I’ll get it », présentée fin fin 2011 à Fort-de-France dans le cadre du Festival e Théâtre amateur. Hervé Deluge, s’est emparé non pas d’un texte d’auteur mais d’un ensemble d’écrits destinés à autre chose quel leur mise en scène théâtrale. Il y a là des articles de presse, des extraits de coupures de journaux des commentaires, des réflexions entendues ici où là, des saynètes inventées à partir d’une observation distanciée et critique des pratiques quotidiennes qu’elles soient télévisuelles, radiophoniques, issues du monde professionnel ou de la conjugalité ou d’autres domaines. On assiste alors à un théâtre fait de collages de petites scènes, dont chacune présente une unité discursive et dont l’emboitement génère en creux, détaché du contexte et à un autre niveau de réflexion, un étrillage vigoureux de l’ordre social capitaliste. Tout le contraire d’un discours militant bavard, didactique et empesé.

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« Des incarcérés » : sous un déluge d’avanies

— Par Roland Sabra

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La première qualité d’un metteur en scène est semble-t-il de savoir lire. Savoir lire un texte, de théâtre de préférence. La démonstration par l’absurde en a été faite par Hervé Deluge qui présentait les 12 et 13 novembre derniers « sa lecture » du texte de Christophe Cazalis « Des incarcérés ». Ce texte remarqué, sans être pour autant vraiment remarquable est un huis clos, une réflexion sur le totalitarisme, sur l’enfermement, qu’il soit physique ou identitaire. Un texte ambitieux dans son propos et dont la construction est en adéquation avec ce qu’il thématise. Un texte circulaire, dans le quel l’épilogue renvoie à ce qu’exposait le prologue.

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« Des incarcérés », de Christophe Cazalis, un pari à demi réussi.

Par Selim Lander.

 

 
   

Une bouffée d’oxygène, cette dernière fin de semaine, à l’Atrium. Enfin un auteur et un metteur en scène qui osaient innover, mélanger les genres, au risque, il est vrai, de nous laisser finalement l’impression d’une histoire inachevée et d’une demie réussite.
La pièce met successivement en scène deux univers très différents. D’abord un pays totalitaire, quelque part sous les tropiques, où l’on traque sans répit les résistants, les « anarcos ». Au départ Henri, un médecin blanc, francophone (joué par Patrice le Namouric) est seul, prisonnier dans sa cellule. Il n’a d’autres interlocuteurs qu’une caméra et un haut-parleur quand vient le temps pour lui de passer « au rapport ». Arrive ensuite un deuxième prisonnier, Amédée, un ouvrier noir (interprété par le metteur en scène, Hervé Deluge), qui ne connaît que le créole. Ils sont néanmoins tous les deux pourvus d’un appareil qui leur permet de comprendre et même de parler la langue de l’autre, ce qui vaut de savoureux passages entre les deux langues aux couleurs et aux registres si différents. Après quelques malentendus initiaux, les deux hommes finissent par devenir complices, sauf qu’on comprend au trois quarts de la pièce qu’Amédée est en réalité un agent double, chargé de faire parler Henri.

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« Lectures dramatiques » dans les jardins du théâtre

— Par Laurence Aurry —

Il faut saluer l’initiative d’ETC Caraïbe et remercier Michèle Césaire et le Théâtre de Fort-de-France pour les lectures dramatiques publiques organisées dans les jardins du théâtre les 8 et 9 avril derniers.ETC Caraïbe ( Ecritures Théâtrales Contemporaines en Caraïbe) est une jeune association dynamique qui s’est donné pour mission de susciter et de promulguer la création dramaturgique dans le bassin caribéen. Depuis quatre ans, elle organise des concours d’écriture permettant l’émergence et la révélation de jeunes talents. En partenariat avec le Rectorat et la DRAC, elle a mis en place dans les établissements scolaires et les prisons des rencontres avec des metteurs en scène, des acteurs et des auteurs confirmés. Dans les locaux de Fonds Saint-Jacques, éditeur, auteurs dramatiques viennent régulièrement animer des ateliers d’écriture pour les apprentis-dramaturges.

ETC Caraïbe œuvre à l’ouverture et au métissage culturels. Avec ces intervenants de tous horizons (cubains, vénézueliens, canadiens, français, africains…) et ses actions dans de nombreuses villes en France (Paris, Avignon, Toulouse…) et à l’étranger (Montréal, Caracas, bientôt New York…) ETC Caraïbe offre une chance extraordinaire de faire rayonner notre culture insulaire et de nous ouvrir au monde.

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« Un marmonneur providentiel? Je suis un Gueuleur » de Hervé Deluge

 — Par Roland Sabra —

On connait bien Hervé Deluge . Il a  travaillé ces derniers temps sous la direction de Lucette Salibur. Les résultats étaient inégaux, avec une question lancinante : qui du comédien ou du metteur en scène devait payer la facture? Le spectacle proposé les 20 et 21 novembre 2008 à l’Atrium donne une réponse en forme de pirouette. Hervé Deluge se met en scène lui-même. Avec un coup de main de Rudy Sylaire il est vrai. Le matériau central d »Un marmonneur providentiel » est tiré de « Cahier d’un retour au pays natal« , « Et les chiens se taisaient » et aussi d’autres textes césairiens. Hervé Deluge connait son Césaire. Une des qualités de ce travail, il en a plusieurs, est de mettre en évidence une force d’interprétation du verbe du poète qui le porte à une telle incandescence que la forme se consume ne laissant subsister que le trait acéré qu’elle enveloppait. Hervé Deluge  a fait une vraie lecture des textes de Césaire, en se les appropriant de façon charnelle, en leur faisant l’amour, et nous les restituant, transformés par la seule magie du dire, en une langue presque naturelle.

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« Le collier d’Hélène » : Daniely Francisque entre guerre civile et guerre intime

— Par Roland Sabra —

 

Qu’est-il plus grave?  perdre sa terre? ou un collier? La question est insensée pour qui oublierait qu’un chagrin d’amour peut anéantir un sujet plus sûrement qu’un bombardement. Oser dire cela dans un pays en guerre depuis trente ans, dans un pays occupé, dans un pays déchiré, dans un pays qui n’est qu’affrontements, enlèvements et assassinats dans un pays qui pourtant veut vivre, oser dire cela relève de la folie. C’est ce à quoi nous convie Lucette Salibur en montant une pièce de Carole Fréchette, « Le collier d’Hélène » dont on avait pu écouter la lecture dans le cadre de la troisième rencontre métisse « Théâtre des Nations » Martinique/Québec au Théâtre de Fort-de-France de Michèle Césaire sur une invitation de Etc Caraïbe/CEAD.

Hélène est donc à Beyrouth, quand elle perd un collier de verroteries. Perte sur laquelle elle s’appuie pour rester dans ce pays meurtri et partir à la recherche de l’objet perdu.

Refuser de hiérarchiser la douleur, de considérer qu’il est des peines supérieures à d’autres c’est se situer d’emblée du côté du sujet, en posant comme incontournable le caractère incommensurable de la souffrance humaine.

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MOLIERE Folie’s ou l’ébauche d’un projet intéressant

— Par Roland Sabra —

 L’idée du Théâtre du Flamboyant de Lucette Salibur est excellente : faire découvrir à la génération du zapping quelques textes de Molière. Comment? Et bien en montant un zapping de scènes issues des pièces du directeur de l’illustre théâtre! Michel Dural, professeur de Lettres et de Théâtre, bien connu dans le monde théâtral martiniquais a donc été chargé d’une adaptation, un choix d’extraits, de répliques quelques fois écourtées mais toujours fidèles à l’esprit de la pièce en un mot : d’un montage de textes en forme de « promenade guidée dans l’œuvre de Molière. » selon les propres termes de Michel Dural. Le choix des scènes qu’il a retenues lui appartient et chaque amateur en ferait un différent selon son cœur mais commencer par « L’impromptu de Versailles » est assez judicieux. Enfin l’adaptateur propose et le metteur en scène dispose.

Ce qui a été montré Jeudi 14 juin dans la Salle Aimé Césaire du Lycée Schoelcher était encore brouillon, mal ficelé, inégal, pour tout dire peu abouti. Deux locomotives tirent tant bien que mal, le spectacle.

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La ka espéré Godot : entre méprise et trahison. Une mise en scène de Lucette Salibur

 — Par Roland Sabra —

  «Rien à faire» Tout est dit dès les premiers mots de la pièce. A cette remarque de Gogo confronté à la difficulté, très matérielle, d’ôter sa chaussure Didi répond sur le plan philosophique «Je commence à le croire.». L’absurde n’est pas tant l’absence de sens que le trop plein de contre-sens. Ici règne le domaine du double et du dédoublement. Estragon et Vladimir, Pozzo et Lucky. Le garçon et son frère. Et même si l’inconscient d’un texte ne se love pas dans la biographie du scripteur, comment ne pas évoquer en Vladimir, Frank Beckett le frère aîné, persécuteur et en Estragon, le Sam Beckett, en voie de clochardisation, souffre douleur de la fratrie sous l’oeil accusateur du tyran maternel? Le double est signe de mort. Longtemps on a tué les jumeaux à la naissance : la nature se trompait à produire deux fois le même. Rémus est tué pour que Romulus fonde une ville qui défie la mort, une ville éternelle. A l’annonce d’un décès, les miroirs sont voilés pour éviter que le reflet du cadavre ne re-convoque la mort.

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