« Le système Mako » de Deluge : entre stéréotypes et macaqueries!

 — par Thomas Gendre,  élève de terminale option théâtre, Lycée Schoelcher —

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Critique du spectacle le Système Mako,

Ribadier est le second mari d’Angèle, veuve de feu sieur Robineau. Suite aux infidélités de son défunt mari, Angèle a développé une jalousie frisant la paranoïa et surveille étroitement les activités de son second époux. Ribadier, inspiré des techniques du Docteur Charcot, possède le don d’hypnotisme et en profite pour endormir sa femme lors de ses escapades, la réveillant à son retour grâce à un truc que lui seul connaît. Un jour, il se confie maladroitement à Aristide Thommereux, son ami commun avec Robineau, revenu d’un exil de plusieurs années à Batavia. Ribadier ignore tout de l’amour que Thommereux vouait à Angèle, raison de son exil par delà les mers… Profitant d’une escapade de Ribadier, Thommereux réveille Angèle pour lui réitérer sa flamme… C’est à ce moment que Ribadier revient en catastrophe, poursuivi par le mari de sa maîtresse du moment, Thérèse, épouse d’un marchand de vins, Monsieur Savinet.

Hervé Deluge nous propose Le système Mako, d’après le Système Ribadier de Georges Feydeau, le roi du vaudeville : un théâtre animé, qui, suivant les lois du genre, enchaîne les rebondissements rocambolesques, les quiproquos et autre apparitions inopinés à un rythme frénétique.

Pour prendre du plaisir à suivre ces péripéties, comme le faisaient le public à l’époque de la création, le spectateur contemporain doit être entraîné par un rythme endiablé qui l’empêche de déceler les énormes invraisemblances des situations. « Il a paru nécessaire, au metteur en scène que je suis, de ramener le propos de Feydeau à des caricatures typiquement martiniquaises plongées dans les réalités qui occupent en ce moment nos concitoyens » explique Hervé Deluge.

Le rideau s’ouvre sur un décor plutôt fade : un fond en « U » percé de quatre portes et d’une fenêtre centrale qui s’entrebaille, découvrant un coq bien vivant.

Un canapé rond en velours bleu occupe le centre cour : le siège pivote comme un tourniquet de parc de jeu et permettra de mettre en scène les courses poursuites dans un surplace intéressant.

Les personnages apparaissent en costumes modernes. Là rien que de très convenu.

Ce qui m’agace, dans le système Deluge, c’est cette volonté de nous renvoyer sempiternellement à une réalité d’antan longtemps, marquée par la colonisation occidentale : «  le monde contemporain »

Est-il encore celui où s’entend le pas du cheval du géreur de l’habitation ? Est-il nécessaire de nous servir encore, au prix de quelques macaqueries bien senties, des stéréotypes qui relèvent davantage du préjugé que de nos réalités ? Est-ce « revisiter » un classique que de l’émailler de quelques formules en créole ?

Apparemment nous ne sommes pas assez intelligents pour comprendre tout seuls ce qu’est une « adaptation » : en sus du titre évocateur, il faut encore que le coq fasse un tour de pitt gratuit sur le bras du coqueleur dont le nom prête évidemment à quelques jeux de mots vulgaires…

Faut-il pour qu’une pièce intéresse les « scolaires » l’alourdir de gras sous-entendus ? Comme dans le Tartuffe du même metteur en scène, la lanterne rouge s’allume dès que le grivois se profile. Lourd !

Avec un Jeu mécanique pour certains, truffé de clowneries gratuites pour d’autres (gesticulations pitoyables sur une échelle de piscine repeinte), la pièce « adaptée » ne sort ni grandie ni enrichie de rien : on perd le rythme indispensable,  l’intérêt se tarit.

Un rideau derrière le fond de scène en « U » ne cache pas les comédiens qui passent pour s’envoyer des accessoires ou pour balancer des chauves-souris en plastique par la fenêtre du salon.

Beaucoup de maladresse et peu de profondeur, c’est souvent ce qu’on sert « aux scolaires » en imaginant qu’ils s’en contenteront.