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Soweto: la recette d’un succès populaire ambigu

 — Par Roland Sabra —

Soweto texte de Serge BiléComme toute recette de cuisine tout dépend de l’endroit où vous concoctez votre plat. On ne fait pas une bouillabaisse de la même façon à Marseille, à Miami, à Tokyo, à Fort-de-France. Il est important de tenir compte des ingrédients locaux, de ce que vous pourrez trouver sur le marché.

Prenons l’exemple de Soweto, spectacle qu’il est difficile de qualifier, tant il relève de genres indéfinis, (comédie musicale? tour de chant? danses? music-hall? variétés?) et qui a suscité un enthousiasme populaire indéniable à l’Atrium de Fort-de-France. Les trois représentations ont été doublées et chaque fois elles ont fait salle comble.

Serge Bilé, est un journaliste honnête et compétent, et ses papiers retracent, sans compromis, sans flatterie aucune ce qu’il constate, n’en déplaise à quelques nationalo-populistes qui lui contestent ( de quel droit?) sa liberté de parole au fallacieux prétexte qu’il ne serait pas martiniquais d’origine! La bêtise est sans frontière. Sans être historien, essayiste, ni même écrivain Serge Bilé écrit des livres, témoigne. « Noirs dans les camps nazis », qui aurait dû obtenir le prix Essais France Télévision a été écarté à la suite d’une intervention de la responsable des prix littéraires mettant injustement en doute le sérieux de l’ouvrage.

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« Mademoiselle Julie » : Pères, ne laissez jamais vos filles seules les nuits de Saint-Jean!

— Par Roland Sabra —
Michèle Césaire continue d’explorer les relations maître-serviteur. Après nous avoir présenté un Jacques le Fataliste très sage, elle nous offre aujourd’hui une Mademoiselle Julie tourmentée. Le tourment accompagne d’ailleurs la vie de Strindberg, auteur de la pièce et inventeur du théâtre moderne.

La pièce est un huis clos de trois personnages qui pousse au suicide une jeune fille la nuit des feux de la Saint-Jean. Mademoiselle Julie est une jeune fille qui appartient à à une noblesse d’épée sur le déclin. Jean est un domestique qui imagine échapper à sa condition par l’entremise d’une liaison avec la fille du Comte, sous les yeux de la cuisinière Christine, sa promise. Jeu de dupes à la fatale issue. Déjà enfant, le domestique croyait aimer Julie quand il n’était attiré que par les richesses, le château et les soins de la jeune fille. Il rêvait d’ascension sociale, elle vivra une descente aux enfers. A la transgression sociale s’ajoute une transgression des rôles sexuels, puisque c’est elle Julie qui prend l’initiative de séduire son domestique. On retrouve dans la pièce toute l’ambivalence de Strindberg vis à vis de ses propres parents.

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« René Maran, le premier Goncourt noir », de Charles Onama

Une vie de compromis et de révolte

La vie de René Maran n’est ni simple ni rectiligne. Sa démarche intellectuelle n’est pas non plus facile à cerner. Durant sa carrière de fonctionnaire et d’écrivain, il n’a pas souvent pris des positions aisément compréhensibles et accessibles au premier abord. Ce qui l’a souvent amené à être mal compris, à la fois des Blancs et des Noirs. Sa force principale a toujours été son indépendance d’esprit même s’il a incontestablement été formé dans un environnement où les préjugés raciaux sont parfois tenaces. René Maran est resté un homme du compromis mais pas de la compromission. Il a toujours été un homme du dialogue franc et sincère, un pondéré aux convictions fortes, bref, un médiateur incompris des Blancs et des Noirs. Il est surtout un intellectuel qui voulait voir l’humain triompher au-delà de sa couleur, un écrivain attaché au savoir et à la culture de toutes les aires géographiques, car le savoir et la culture sont, pour lui, une ouverture aux autres et au monde.

Si les contraintes de la vie ont poussé René Maran à accepter certains compromis, il est presque toujours parvenu à maintenir un équilibre entre le compromis et la révolte.

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Sous le signe du théâtre

— Par Roland Sabra —

 Poster-Tabou « L’échange » de Paul Claudel, les 08 et 09 novembre à Fort-de-France! Voilà un évènement théâtral de taille. Le travail de la Compagnie de la Comédie Noire a fait l’objet d’une couverture de presse élogieuse. On trouvera à la suite, un dossier de présentation avec un résumé de la pièce. A ne surtout pas manquer!

Le débat, parfois vif, qui depuis deux ans travaille à nouveau, le monde théâtral et qui porte, pour le dire vite, sur la place du texte dans la représentation se poursuit, comme l’illustre la controverse entre Florence Dupont et Denis Guénoun. Ce débat n’est pas importé, ici en Martinique. Il est enraciné à l’existence même du théâtre martiniquais dont l’indubitable filiation avec la poésie est à la fois sa force et sa faiblesse. Comme aime à le souligner la comédienne Amel Aïdoudi « On fait de l’or avec de l’or« . C’est pourquoi le recours à des textes forts, « L’échange » de Claudel, « Les Bonnes » de Genet,  Manteca de Torriente ou les admirables traductions en créole de Becket par Monchoachi peut être  salué comme une tentative de refondation du théâtre.

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Le français est une langue créole

— Par Alain Rey —

Alain Rey

FRANCE – 22 octobre 2007
PROPOS RECUEILLIS PAR DOMINIQUE MATAILLET ET RENAUD DE ROCHEBRUNE

Père du dictionnaire Le Robert, le célèbre lexicologue part en lutte contre les puristes. Et se félicite des métissages de la langue de Molière. Interview.

La langue française est-elle en danger ? La question, posée à nouveau avec insistance par divers auteurs ces dernières années, revient régulièrement au premier plan. Et elle conduit toujours deux camps à s’opposer.

Le plus fourni, celui des pessimistes, dénonce le déclin du français sur la scène mondiale. Mais aussi la menace que feraient peser sur son usage ceux qui le parlent mal, que ce soit par la faute de l’école, l’apparition de nouvelles façons de communiquer – par exemple les SMS – ou d’autres évolutions, comme, pour certains, l’influence grandissante des créoles ou des pidgins. Ces tenants de la pureté de la langue sont surtout épouvantés par l’essor de l’anglais et plus encore par l’anglicisation du français.

En face, d’autres ont toujours fait valoir que ces inquiétudes étaient souvent sans fondement et toujours largement exagérées.

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« Quadrille » : « Le bonheur à deux, ça dure le temps de compter jusqu’à trois. » Sacha Guitry

— Par Roland Sabra —

Le théâtre aussi connaît des effets de mode. Ainsi Sacha Guitry, mort en 1957 est resté injouable pendant quelques décennies. Injouable parce que lui collaient à la peau les étiquettes de théâtre de boulevard et d’auteur misogyne. La misogynie est avérée comme en témoignent les abondantes citations et autres aphorismes de l’auteur présentant les femmes sous des jours éclairés de condescendance, de rancoeur, si ce n’est de mépris. Quant à la réputation de théâtre de boulevard il faut se souvenir que celui-ci n’existait que par différenciation d’avec le théâtre « officiel » celui de la Comédie française par exemple, ce théâtre qui se réservait les « grands » textes ou tout au moins ceux dont la facture était d’un classicisme de bon aloi. Théâtre des boutiquiers, des tenanciers d’échoppes, officines et autres bazars, au petit capital économique et démunis du capital culturel permettant d’accéder aux oeuvres de renom ce divertissement abordait les thèmes de leurs conversations préférées, l’argent, les bourgeois, les parvenus, les histoires de maris et de femmes emmêlés de maîtresses et amants. Théâtre privé de peu de ressources face au théâtre public subventionné il lui fallu trouver les moyens de survivre en explorant les berges de la facilité, du conservatisme esthétique, moral et politique, en flattant le public.

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Angelo, un tyran pas doux pour un moment de pur plaisir !

—Par Roland Sabra—

Un ravissement de Michelle Césaire

Le théâtre est aussi un divertissement, qui donne du plaisir et c’est tant mieux! Philippe Person en fait la démonstration avec un texte pas si facile qu’il y paraît. Le talent de Person, à nulle autre pareil, relève le défi avec Angelo, tyran de Padoue, de Victor Hugo.

Angelo Malipieri, aime La Tisbe, comédienne, une -pas-grand-chose, qui aime un déclassé, le proscrit Rodolfo, lui-même amoureux de la Catarina dévote et femme de ce tyran pas doux pour deux sous. Chez Hugo, les choses sont assez simples : les méchants sont méchants et forcément riches, les gentils sont gentils et forcément pauvres et entre les deux, les pervers, forcément pervers puisque se situant entre les deux.

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Que disent les mondialisations? Un entretien de Roland Sabra avec André Lucrèce.

 Sociologue, essayiste et romancier, homme de théâtre il donne ses rendez-vous dans des endroits impossibles, le hall bruyant d’une galerie marchande. C’est là qu’il nous a accordé cet entretien, qu’il a pris soin de relire avant publication.

 Roland Sabra : Puisque nous sommes dans un centre commercial, tout de suite une question inspirée par « Souffrance et jouissance ». Il y a une certaine vulgate marxiste qui résumerait la consommation à une « aliénation » et à un moyen pour le pouvoir colonial de « tenir par le ventre» la population martiniquaise. Vous semblez prendre quelques distances en évoquant Veblen?

 André Lucrèce : D’abord je voudrais dire que cela ne peut être analysé comme dans n’importe quelle société. Pour une raison très simple : les données du passé font qu’existe une mémoire. Je travaille toujours sur une mémoire longue parce que les éléments qui permettent de comprendre une situation sont à la fois des éléments contemporains mais aussi des éléments transcrits depuis d’une mémoire longue et récupérés par les acteurs. Les choses sont infiniment complexes dans un pays comme le nôtre.

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« Miracle en Alabama », mais pas à Fort-de-France!

— Par Roland Sabra —

Au théâtre foyalais, une ouverture de saison en demi-teinte en attendant

« La Maison du peuple  » de Louis Guilloux



« Miracle en Alabama » mais pas à Fort-de-France! Michèle Césaire nous a habitués à plus d’audace que la reprise d’un succès qui a fait le tour du monde. Encore qu’il y ait quelque risque à re-mettre en scène « L’histoire d’Helen Keller » parue en 1902 et qui fit l’objet d’une adaptation cinématographique par William Gibson d’après sa pièce de théâtre, dans une mise en scène d’Arthur Penn de nombreuses fois « nominée » aux Oscars et doublement récompensée en 1963. Le titre du film The Miracle Worker est plus proche du thème que le titre français. Anne Sullivan, l’institutrice anciennement aveugle tout juste sortie de l’école de Boston est en effet la travailleuse miraculeuse ou plus exactement l’accoucheuse de miracle, qui luttant contre le double sentiment de culpabilité et de honte dans lequel l’entourage familial enferme la jeune fille va lui permettre d’advenir à elle-même. « Là où c’était le Sujet doit advenir ».

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« Combat de femmes » de Luc Saint Eloy : en finir avec la complaisance aliénante dans le domaine culturel

 — Par Roland Sabra —

combat de femmes

Les techniques de Võ pour les femmes, un art qui consiste en l’apprentissage des formes de combat traditionnelles auprès de maîtres d’arts martiaux

« Incest ? The game all family can play! » disent avec l’humour qui les caractérise nos amis anglais. Luc Saint-Eloy, parisien d’origine guadeloupéenne aborde le sujet sous un autre angle dans « Combat de Femmes » une pièce qu’il a écrite mise en scène et présentée dans une première version aux foyolais le 08 juillet 2005 dans le cadre du 34 ème Festival de Fort-de-France « Imaginaires Insulaires ». Le texte écrit il y dix ans de cela est resté lettre morte pendant tout ce temps, sans que personne n’accepte d’en financer le montage et il aura fallu la nécessité de trouver quelque chose à montrer dans l’urgence de la préparation du festival pour qu’il soit présenté. Le thème est un peu sulfureux . Deux jeunes femmes entretiennent une liaison amoureuse, ce qui est ici et ailleurs déjà hors norme, mais facteur aggravant elles découvrent qu’elles sont soeurs par leur mère, l’une ayant été abandonnée, peut-être vendue, malgré quelques dénégations, à sa naissance à une famille d’adoption.

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