Selim Lander

Prodige des marionnettes : « Monsieur Lapousyè »

— Par Selim Lander —

Bien que Madinin’Art ait déjà dit brièvement, sous la plume de Roland Sabra, tout le bien qu’il fallait penser de Monsieur Lapousyè, on nous pardonnera de revenir sur ce spectacle étonnant, véritable OTNI dans le paysage théâtral martiniquais. Rien d’original pourtant à considérer le résumé, le « pitch » comme il ne convient pas de dire. On peut même dire que le thème est rebattu en nos contrées puisqu’il s’agit d’un vieux Martiniquais parti en France par l’intermédiaire du BUMIDOM et qui se souvient avec quelques fantasmes en prime. Un peu court peut-être ? Oui, mais le théâtre contemporain nous a habitués à des pièces où l’intrigue se réduit à peu de choses et où la forme importe davantage que le fond.

Si l’on doit parler d’objet théâtral non identifié à propos de cette pièce, c’est que les compagnies martiniquaises ne nous ont jamais présenté quelque chose de semblable. Certes, on a déjà vu quelques bons spectacles de marionnettes mais jamais de ce niveau là et celui-ci peut rivaliser aisément avec toutes les pièces de marionnettes importées auxquelles on a pu assister.

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Le cent-dixième anniversaire de la naissance de Césaire

— Par Michel Herland —

Né en 1913, mort en 2008, Aimé Césaire aura eu une longue carrière tant politique que littéraire, les deux indissociablement liés au demeurant, puisque les poèmes, au-delà de leurs innovations formelles, nous en apprennent beaucoup sur ce qui a motivé l’action du député-maire, indignation et action, l’action qui naît de l’indignation.

Pour marquer le cent-dixième anniversaire de la naissance de celui qui fut député de la Martinique entre 1945 et 1993 et maire de Fort-de-France entre 1946 et 2001, la Fondation Clément et l’association ACA (Aimé Césaire actuel) organisent conjointement deux expositions, l’une qui retrace les faits saillants de cette longue carrière, l’autre consacrées aux images rapportées par trois photographes à l’issue de leur exploration de la nature martiniquaise.

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L’exposition Césaire proprement dite qui occupe le niveau inférieur des espaces de la Fondation est divisée en plusieurs sections : les origines, depuis les bateaux négriers jusqu’au village natal de Basse-Pointe, les misères coloniales ; les ruptures idéologique (la négritude), esthétique (le surréalisme) et politique (d’avec le communisme) ; le guide et le bâtisseur.

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Raymond Médélice & Rodrigue Glombard à la Fondation Clément

Du 21 juillet au 19 septembre 2023.

 — Par Selim Lander —

On peut compter sur la Fondation Clément pour présenter dans des conditions parfaites les œuvres d’artistes contemporains, des artistes du Tout-Monde lors des grandes expositions en partenariat avec une autre institution muséale (Beaubourg, Fondation Dapper, etc.), ou plus souvent de la Caraïbe, avec une attention privilégiée vers la Martinique où, aujourd’hui comme hier, ne manquent pas les plasticiens talentueux.

Vient de s’ouvrir une double exposition d’artistes liés plus ou moins intimement à cette île. Raymond Médélice, né à Paris, est installé à la Martinique depuis l’âge de 22 ans. Quant à Rodrigue Glombard, s’il est lyonnais, sa famille en est originaire. Ils ont d’ailleurs tous deux déjà exposé à la Fondation. Rien de plus différent, à part ça, que leurs œuvres. Tandis que le premier, autodidacte, se rapproche de l’art brut, le second, passé par les Beaux-Arts de Besançon, pratique un art non figuratif, à l’exception des séries récentes baptisées « Temporels » qui alignent des chiffres sur fond noir.

Raymond Médélice

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Silences et confidences – une exposition d’Hélène Jacob et Sandrine Zedame

– Par Selim Lander –

Pour la première fois, Hélène Jacob et Sandrine Zédame, deux complices présentes ensemble depuis longtemps dans des expositions collectives exposent seules dans les trois salles du premier étage du Créole Art Café à Saint-Pierre (Martinique). Trois salles pour trois ensembles différents : la suite des femmes célèbres d’H. Jacob, un ensemble de peintures plus intimistes de deux artistes, enfin des photographies de S. Zédame.

Poursuivant son enquête picturale à la recherche des femmes qui ont fait l’histoire à un titre ou à un autre, Hélène Jacob présente cette fois-ci des femmes qui n’ont pas reçu la lumière autant qu’elles le méritaient. D’où le titre de cette série : « De l’ombre à la lumière. Quelques exemples de ces femmes enfin honorées par la peintre : Valérie Thomas, physicienne mathématicienne afro-américaine, elle invente le transmetteur d’illusions qui permet la transmission d’image 3D par satellite ; Veronica Franco, courtisane vénitienne du 16ème siècle qui lutta entre autres pour les droits des femmes et notamment ceux des prostituées ; Lee Miller, célèbre modèle de Man Ray, elle fut également grand reporter de guerre ; Cathy Rosier, actrice martiniquaise, elle jouera dans le samouraï aux côtés d’Alain Delon ; Madeleine Rifault, résistante pendant la seconde guerre mondiale ; et pour finir Moira Milan, activiste mapuche, elle lutte contre l’exploitation minière de sa terre.

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« Plein Emploi » de Stéphane Titeca, m.e.s. Eric Delor

– Par Selim Lander —

Plein Emploi ou Pôle Emploi ? Ce n’est pas la même chose et la secrétaire de Plein Emploi commence à en avoir plein le dos des appels pour Pôle Emploi qui arrivent sur son téléphone de la part de chômeurs qui ont confondu les deux termes. Mais comme elle leur dit (à peu près) : est-ce que vous avez déjà entendu quelqu’un au bout du fil quand vous appelez Pôle Emploi ? Non, bien sûr, vous n’avez jamais qu’un répondeur : ici, c’est différent. A ceci près que cette association d’insertion appelée Plein Emploi est pour l’essentiel une arnaque servant à accaparer les fonds publics. Parmi les chômeurs qui appellent il y a un certain M. Marie-Joseph (clin d’œil à l’intention des habitants de la Martinique où un Marie-Joseph célèbre, loin d’être au chômage, est propriétaire de plusieurs entreprises…). La pièce commence, muette, par la secrétaire Philomène (Rita Ravier) qui s’installe en prenant tout son temps. Arrive ensuite Pierre-Antoine (Virgil Venance), le patron de la boite, en tenue de cycliste. Il entreprendra de se changer mais ne metta jamais son pantalon, il restera jusqu’au bout en chemise-cravatte et les jambes nues sous sa culotte de vélo.

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Naufrage de la littérature

– Par Michel Lercoulois –

Est-ce un signe du déclin de la littérature, pourtant contredit par les centaines de romans qui se publient chaque année en France, les milliers de manuscrits refusés, les succès en librairie de certains écrivains souvent non dépourvus de qualité littéraire ? À regarder ces faits, en particulier le nombre d’aspirants auteurs dont tous ne vont pas jusqu’à soumettre leur manuscrit, on pourrait croire que les revues littéraires sont plébiscitées, tant il est important, quand on écrit, de se tenir au courant de ce qui se publie. Certes, parmi les apprentis nombreux sont ceux obéissant simplement à leur pulsion d’écrire, sans être nécessairement eux-mêmes des lecteurs, mais il en reste suffisamment des autres pour constituer un lectorat non négligeable. Ce n’est visiblement pas le cas, ces revues se portent mal. Cependant un éditeur digne de ce nom se doit d’avoir sa revue et Gallimard ne pouvait pas assassiner son emblème, la NRF, crée en 1908. Il a donc décidé de lui donner un nouveau départ, sous un autre format, avec une publication seulement semestrielle au lieu de bi-mensuelle et un contenu différent.

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« La Réunification des deux Corées » par L’Autre Bord

— Par Selim Lander —

Ils sont quinze, sept dames ou demoiselles et cinq messieurs, disons plutôt sept comédiennes et cinq comédiens, quinze qui étrennent la salle de théâtre toute neuve du lycée Schoelcher, opération immobilière grandiose dont on peut contester l’utilité alors que le nombre des lycéens diminue en Martinique et sachant que, lors des travaux de la reconstruction du lycée, les élèves et leurs professeurs ont été recasés sans difficulté à proximité. Mais cela est une autre affaire, qui n’est pas notre affaire. Tous les amateurs de théâtre ne peuvent que se réjouir que cette salle existe, ceux en particulier qui ont fréquenté à un titre ou à une autre l’ancien théâtre du lycée avant que ce dernier ne soit détruit et reconstruit pour des raisons que la raison ignore peut-être, mais cela, encore une fois, n’est pas notre affaire. Dans l’ancien théâtre, devenu quelque peu vétuste faute d’entretien, des générations de lycéens se sont frottés à la comédie et certains y ont attrapé le virus de la scène au point de devenir des comédiens professionnels. Le signataire de ces lignes – lointain souvenir – y a même fait ses premières armes en tant que comédien amateur dans une troupe constituée par des professeurs (pas tous du lycée) sous la direction éclairée – et oui !

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« Patinage » de Damien Dutrait, m.e.s. Nelson-Rafaell Madel

Vendredi 28 avril 19h30 – Tropiques-Atrium – Salle Frantz Fanon

– Par Selim Lander —

Vu cette pièce devant un public de collégiens et cela ne pouvait mieux tomber tant elle paraît s’adresser en priorité au « jeune public ». Patinage qui ne cache pas certaines violences sociales ou intimes de notre temps, qui est faite en même temps pour divertir, se termine en effet sur une note moralisatrice qui ne fera pas de mal à une jeunesse souvent privée de boussole.

« Patinage » ? C’est l’obsession de la mère qu’elle transmettra pour un temps à sa fille. Car cette dernière, jalouse de la plus douée de sa petite classe d’apprenties patineuses, l’aura fait volontairement tomber, lui cassant la cheville au moment où débutait un concours. Il y a également un fils qui a disparu après que le père ait abandonné le domicile familial en emportant la caisse de l’entreprise. La mère est désormais malade, elle ne quitte pas son canapé, les yeux rivés sur sa télévision en vitupérant qu’elle veut voir davantage de retransmissions du patinage artistique. C’est sa fille, désormais mariée à une autre femme, qui s’occupe d’elle alors qu’elles sont incapables de communiquer.

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TOC TOC au TAC 28 avril 19h30

Vendredi 28 avril 2028 au T.A.C.

Une comédie décoiffante

Après deux années de crise sanitaire, de méfiance et de morosité, les Buv’Art, la troupe de théâtre de l’association l’Art Gonds Tout, ont choisi de tourner la page et de convoquer le rire en présentant la comédie de Laurent Baffie « TOC TOC » mise en scène par Marie ALBA.

Originale et drôle cette pièce met en présence six patients atteints de TOC (troubles obsessionnels compulsifs) dans la salle d’attente du célèbre docteur Stern, sommité mondiale, qui leur a donné rendez-vous mais qui tarde à venir…

Cinq comédiennes et deux comédiens endossent le rôle de patients atypiques victimes d’obsessions diverses et obligés de « ritualiser » leurs comportements. La combinaison obsession/compulsion les enferme dans une contrainte permanente qui devient leur propre vie.

Une comédie originale qui prendra bientôt la forme d’une thérapie de groupe autour d’une partie de Monopoly.

Choix de la metteuse en scène, Marie Alba, chaque personnage portera un signe distinctif de couleur rouge.

Le rouge est mis

Le rouge est associé au diable, au mal, à l’enfer… Il est aussi le symbole de la vie, de l’énergie de vie, de la beauté et de la séduction, de la passion, de la richesse et de la luxure.

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Le Marché de l’art s’installe à la Fondation Clément

– par Selim Lander – Dans la Pinacothèque, la nouvelle salle de la Fondation Clément, cet écrin qui magnifie les œuvres qui y sont exposées, vient de s’ouvrir pour trois mois une exposition-vente réunissant trente-huit artistes caribéens, dont un bon nombre de Martiniquais. Autant dire que les habitants de l’île sont en pays de connaissance. Chacun aura plaisir à retrouver ses artistes favoris et à mieux faire connaissance avec d’autres. Mais la Fondation Clément étant visitée par de nombreux touristes venus d’un peu partout dans le monde, cette exposition est encore une merveilleuse occasion pour les artistes invités de se faire connaître urbi et orbi et, puisqu’il s’agit d’un marché, d’étendre le cercle de leurs collectionneurs par-delà les mers.

 

 

Cette exposition est consacrée à la peinture. Seuls trois artistes peuvent être rattachés à la sculpture, quoique ne travaillant ni la pierre ni le bois : Ernest Breleur est présent avec deux caissons de la série « Paysages célestes », Robert Manscour avec ses personnages de verre et Karine Taïlamé avec une pièce de joaillerie. Chez les peintres, le figuratif domine, l’art abstrait n’a plus la vogue d’antan.

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« Cette guerre que nous n’avons pas faite » : une allégorie d’Aimé Césaire

Vendredi 14 & samedi 15 avril 2023, à 19h30, au T.A.C.

— Par Selim Lander —

Beau succès que cette interprétation par Hervé Deluge de la pièce de Gaël Octavia, même si l’assistance pour la première au Théâtre municipal de Fort-de-France était moins fournie qu’elle ne l’a été dans d’autres circonstances. On la souhaite encore plus nombreuse pour les deux représentations suivantes car le texte est formidablement écrit et construit ainsi que superbement mis en scène et interprété. Gaël Octavia n’en est pas à son coup d’essai en tant qu’auteure de théâtre, sa pièce intitulée Congre et Homard qui fait s’affronter deux hommes est un bijou, pas au sens de quelque chose de joli mais d’un modèle de construction de l’intrigue. Quant à Hervé Deluge, il est un comédien courageux qui s’engage à fond dans ses projets et l’interprétation est à sa mesure. S’étant également chargé de la mise en scène, il a judicieusement pris le parti d’illustrer la pièce avec des projections – sur le socle à l’antique dont le comédien ne bougera pas pendant tout le spectacle – qui renforcent le côté humoristique d’une pièce dont le sujet est par ailleurs fort sérieux, voire douloureux, en particulier pour les spectateurs martiniquais.

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Aperçus du festival « Ceiba » (mars 2023)

– Par Selim Lander –

Ceiba ? Un « genre » (famille) d’arbres de ce pays (fromager, kapokier, mapou rouj, bois coton) comme le rappelle opportunément le directeur de Tropiques Atrium, puissance organisatrice, dans son édito en forme de poème. Onze spectacles (théâtre, danse, musique et même opéra) qui se sont déroulés tantôt à l’Atrium tantôt sous le chapiteau installé dans la commune de Saint-Esprit. Nous avons déjà dit ici-même tout le bien que nous pensions de l’adaptation des Noces de Mozart sous forme réduite mi opéra-mi théâtre (1), il n’est donc pas nécessaire d’y revenir, pas davantage que sur la pièce de théâtre Chasser les fantômes vue lors du dernier festival d’Avignon (2). Nous voudrions simplement exprimer brièvement notre ressenti à propos des autres spectacles du festival auxquels nous avons pu assister.

Danse : Näss (les gens)

Peut-être le sommet de ce festival. Le chorégraphe, Fouad Massoud, est franco-marocain et c’est au Maroc qu’il a passé son enfance. Il a intitulé sa pièce en hommage au groupe Nass el Ghiwane (les gens bohèmes), qui ont popularisé la culture gnawa dans les années (19)80, les Gnawa étant une confrérie religieuse qui mêle l’islam et des pratiques animistes importées de l’Afrique subsaharienne.

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Gouverner c’est prévoir

– Par Michel Herland –

[Article repris de France Antilles Martinique, 2 mars 2023]

Dans un entretien publié dans France Antilles le 27 janvier 2023, le professeur Justin Daniel revient sur « l’Appel de Fort-de France » lancé lors de la Conférence des présidents des régions ultrapériphériques de l’Union européenne, Huguette Bello, présidente de la Région Réunion, Ary Chalus, président de la Région Guadeloupe, Serge Letchimy, président de la Collectivité territoriale de Martinique, Guy Losbar, président du Département Guadeloupe, Louis Mussington, président de la Collectivité de Saint-Martin, Ben Issa Ousseni, président du Conseil départemental de Mayotte et Gabriel Serville, président de la Collectivité territoriale de Guyane, le 16 mai 2022. Cet « appel solennel » mentionnait trois orientations :

« – Refonder la relation entre nos territoires et la République par la définition d’un nouveau cadre permettant la mise en œuvre de politiques publiques conformes aux réalités de chacune de nos régions,
– Conjuguer la pleine égalité des droits avec la reconnaissance de nos spécificités, notamment par une réelle domiciliation des leviers de décision au plus près de nos territoires,
– Instaurer une nouvelle politique économique fondée sur nos atouts notamment géostratégiques et écologiques. 

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Première « Déblosaille » poétique à Saint-Esprit

— Par Selim Lander —

En préfiguration du deuxième festival de poésie organisé par l’association Balisaille au mois de mai prochain, une réunion bien sympathique, à laquelle était conviés tous les amateurs de la chose poétique, a eu lieu dimanche 19 mars. Ce fut d’abord l’occasion de rendre hommage à quelques poètes et poétesses locaux souvent injustement oubliés, disparus depuis peu pour la plupart, qui ont chanté la Martinique dans leurs œuvres, ses joies et ses peines. En voici la liste qui, fatalement, ne parlera pas de la même manière à tous nos lecteurs :

Gilbert Gratiant  (1895-1985)
Ina Césaire (1942-)
Georges Devassoigne (1931-2015)
José Le Moigne  (1944-)
Marie-Magdeleine Carbet (1902-1996)
Nelly Martin ( ?-?)
Rose-Eliane Landès (1955-2010)
Guylaine Avenel alias Clo-Dja ( ?-?)

« Heureux ceux qui sont mort pour la terre charnelle », écrivait Péguy dans le poème Ève (1913). Il écrivait aussi « Heureux ceux qui sont morts dans ce couronnement / Et cette obéissance et cette humilité ». Si Péguy parlait des soldats morts pour la patrie, le poète qui glorifie son pays dans ses vers (sans cacher pour autant ses revers) ne mérite-t-il pas lui aussi un tel éloge ?

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Ouverture de la Pinacothèque et de l’exposition Roberto Diago à la Fondation Clément

— Par Selim Lander —

Jusqu’ici les œuvres de la Collection Clément, qui se comptent par centaines, n’étaient exposées qu’en très petit nombre dans la Case à Léo ou au hasard des expositions consacrées à tel ou tel artiste. L’ouverture de la Pinacothèquei, magnifique bâtiment d’expositions de plus de 500 m² au sol, permet d’en présenter un choix bien plus large. Les œuvres visibles actuellement le sont jusqu’au 10 avril, après quoi elles laisseront la place à d’autres, et ainsi de suite, ce qui permettra de découvrir au fil du temps les richesses de cette collection. La sélection actuelle ne laisse pas de place au doute, Bernard Hayot est un grand collectionneur au goût très sûr. Aucun doute également quant au talent des artistes martiniquais et plus largement caribéens qu’il a fait entrer dans sa collection. Le visiteur se régalera de découvrir nombre de pièces remarquables. Découvrir ou redécouvrir puisque, comme déjà noté, certaines œuvres ont déjà été montrées dans le cadre des expositions consacrées à tel ou tel ou dans des expositions collectives.

Parallèlement, les visiteurs pourront continuer d’admirer les peintures délicates d’Yves Marie de Malleray et ce jusqu’au 26 marsii et de faire plus ample connaissance avec l’artiste Roberto Diagoiii puisque quelques-unes de ces œuvres figuraient déjà dans l’exposition Buena Vista en 2018.

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« Guten Tag, Madame Merkel »

Les 8 & 9 mars 2023 à 19h 30 au T.A.C.
— Par Selim Lander —

Qui en France peut se targuer de connaître Madame Merkel (née en 1954, désormais retraitée), celle dont on a pu dire, pourtant, qu’elle était « la femme la plus puissante du monde » mais qui a toujours voulu préserver sa vie privée ? Puissante, certes, elle le fut pendant les seize années (2005-2021) où elle fut la chancelière allemande, puissante comme l’économie de son pays, longtemps premier exportateur mondial et qui se bat désormais avec les Etats-Unis pour la deuxième place derrière la Chine. Nous savons d’ailleurs, même si ce n’est pas dit dans la pièce que lui consacre Anna Fournier que l’objectif premier de sa politique fut de conforter la puissance économique de son pays, sans autre morale que celle de l’intérêt. D’où son attitude systématiquement bienveillante à l’égard de la Chine et de la Russie.

À la fin de la pièce, Angela Merkel fera d’ailleurs contrition à propos de ses relations avec Poutine. Pas cependant en ce qui concerne son attitude lors de l’attitude de la dette grecque (2005), lorsqu’elle contribua par son intransigeance à mettre la Grèce à genoux.

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Opéra : « Les Noces » en Martinique

—Par Selim Lander —

Cela faisait plaisir de voir la grande salle de l’Atrium bien remplie pour un spectacle musical qui nous change des chanteuses et chanteurs dits sans doute à juste titre populaires mais dont les mélodies, il faut bien le reconnaître, ne vont pas chercher bien loin. La présence de tant de spectateurs pour Les Noces de Figaro est la preuve, si besoin était, qu’il existe en Martinique un public non négligeable pour la « grande musique. N’y a-t-il pas d’ailleurs sur notre île une tradition pour l’art lyrique, de Christiane Eda-Pierre à Fabrice Di Falco ? Tout cela pour dire que nous attendons davantage de spectacles du même genre. Sans doute ai-je dû déjà écrire quelque chose de semblable : bis repetita placent.

Ne rêvons pas : déplacer une troupe et un orchestre d’opéra au complet pour interpréter les Noces comme cela se fait à Paris ou à Aix-en-Provence serait financièrement totalement déraisonnable. On ne dira pas pour autant que ce qui nous fut donné à voir fut un spectacle au rabais, d’ailleurs monté par un metteur en scène d’originaire de la Martinique et pas seulement puisqu’il y a effectué toute sa scolarité, de l’école primaire de Trénelle jusqu’au lycée Schoelcher avant de s’envoler pour la capitale.

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Le Désir dans l’art

— Par Selim Lander —

« Nous n’étions que des hommes, il ne saurait y avoir de victoire,
le désir, juste, jusqu’à l’engloutissement », Laurent Gaudé.

La dernière parution de la revue annuelle Recherches en Esthétique est titrée « Le désir ». Que ce dernier soit le moteur de l’artiste, nul ne le niera, mais faut-il pour autant accepter le jugement de Laurent Gaudé (qui n’est d’ailleurs pas repris dans ReE, il constitue la dernière phrase de son roman Écoutez nos défaites) ? Toute l’histoire de l’art ne témoigne-t-elle pas en effet de « victoires » ou tout au moins de succès éclatants ? Sans doute à ceci près que l’œuvre n’est plus à proprement parler l’art, c’est l’objet inanimé que l’artiste a laissé derrière lui. Elle n’est certes pas complètement morte puisqu’elle vit encore dans le regard du spectateur mais l’on n’est plus à ce moment-là dans l’art au sens premier (du latin ars, artis) qui est avant tout action. Au sens le plus général, il est en effet selon le TLF, « l’ensemble de moyens, de procédés conscients par lesquels l’homme tend à une certaine fin, cherche à atteindre un certain résultat ».

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Une histoire de la colonisation de l’Indochine

— Par Michel Herland —

Le bilan de la colonisation restera toujours controversé entre ceux qui vantent plutôt ses mérites, les progrès qu’elle a apportés en matière technique et dans le domaine du droit et ceux qui insistent au contraire sur la violence qui s’est exercée sur les hommes et les femmes colonisés et sur leur culture. L’ouvrage récemment publié de Ho Hai Quang est un plaidoyer uniquement à charge contre la colonisation de l’Indochine et plus précisément de la Cochinchine, la partie sud du Vietnam actuel englobant Saigon (Ho Chi Minh Ville) et le delta du Mékong. Disons tout de suite que ce n’est pas parce qu’il ne considère qu’un seul côté des choses que cet ouvrage devrait être disqualifié par les tenants du bilan globalement positif de la colonisation. Car l’auteur fait preuve d’historien et les faits sont têtus. Aucun jugement de valeur n’accompagne d’ailleurs les éléments qu’il verse au dossier. Comme Marx, dont il se réclame dans cet ouvrage, H. H. Quang constate simplement que le développement du capitalisme s’est accompagné de procédés que nous qualifierions aujourd’hui de barbares.

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« Le Vent du nord dans les fougères glacées » de Patrick Chamoiseau 

— par Michel Herland —

Après plusieurs ouvrages relevant de près ou de loin du genre de l’essai, Patrick Chamoiseau renoue ici avec le roman qu’il semblait avoir abandonné depuis une dizaine d’années. Roman, certes, et roman créole comme les précédents mais tout autant récit fantastique, voire ésotérique en raison des nombreuses références à la physique la plus moderne et la moins accessible au commun des mortels. Le personnage central nommé Boulianno, au centre de tous les propos puis d’une quête à travers la nature martiniquaise mais qui n’apparaîtra jamais, est un maître conteur qui a disparu de la contrée où il exerçait ses talents et laissé désemparés ses nombreux admirateurs.

« Kisé ou pé koupé mé ke ou pé pa fann ? » (qu’est-ce que tu peux couper mais pas fendre ?), c’est avec de semblables devinettes que Boulianno apostrophait son auditoire. Tout cela, après avoir entendu de sa part et réfuté maintes réponses pour le surprendre davantage par une fausse bonne réponse, un chemin de traverse qui le conduira ailleurs : « La rosée du matin, fout !, qui fait vapeur avant le chauffé du soleil, ne peut ni se couper ni se fendre, mes zammi ! 

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L’Art comme action

— Par Selim Lander —

Au-delà du truisme apparent, L’art comme action, le nouvel ouvrage collectif dirigé par Dominique Berthet soulève bien des questions passionnantes. « Truisme » puisqu’il ne peut y avoir d’art sans action, aussi spontanée (le dripping), minimaliste (les monochromes) ou éphémère (lorsque l’œuvre est anéantie par le feu comme chez Christian Jaccard interrogé par D. Berthet) soit-elle. Au commencement il y a donc le geste de l’artiste, source d’un plaisir (celui de la création) mêlé d’inquiétude (l’artiste se confronte au public, il se « compromet » selon le mot de Richard Conte, p. 37). Dès que l’artiste vise un certain public, il entend exercer sur lui une influence, lui plaire ou lui déplaire, le convaincre éventuellement, ce qui ouvre sur les problématiques de l’engagement. C’est là aussi une forme d’action, esthétique, morale ou politique appelant la ré-action du public. Mais il faut encore compter avec des actions plus physiques que celles de l’artiste occupé à créer dans son atelier (d’autant que nombre d’artistes contemporains se contentent de concevoir et laissent la réalisation à des « art-isans »).

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Yves Marie de Malleray à la Fondation Clément

– Par Selim Lander —

Pour encourager davantage les amateurs d’un art d’autrefois (voir Rosa Bonheur exposée dernièrement au musée d’Orsay) poussé à la perfection, nous reproduisons ce que nous écrivions ici-même en 2015 :

Yves Marie de Malleray est un peintre et graveur délicat. Ses tableaux représentent des paysages de nature sous des cieux chargés de nuages, de sombres mornes qui tombent dans une mer aux reflets vert émeraude, des oiseaux de nos îles, quelques animaux de la savane africaine.

Chez cet artiste, la précision du dessin et du pinceau n’empêche pas mais contribue plutôt à créer dans nombre de ses toiles, même – ou plutôt surtout – lorsqu’il peint des paysages familiers, une atmosphère onirique. Etroitement fidèle à la réalité, il n’invente pas moins un autre monde, situé ailleurs, peut-être sur une autre planète demeurée à l’état sauvage. Cela tient surtout à l’éclairage, pour les marines, à une attitude ou un regard lorsqu’il peint un oiseau. Il y a également de l’orientalisme dans certains de ses grands formats et cela est moins dû au motif, parfois ouvertement oriental, qu’à une manière qui évoque alors directement l’art de l’ancienne Perse.

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Isabel Tronçon : l’art abstrait à la Bibliothèque Schoelcher

—- Par Selim Lander —
Se confronter à une œuvre abstraite est toujours une expérience intime. Certes, cela est vrai de tous les arts puisque ceux-ci, dès lors qu’ils nous touchent, nous font découvrir une part de nous-même que nous ignorions. Mais tandis que l’art figuratif impose d’emblée une forme et un sens, orientant fatalement notre propre perception, l’art abstrait, comme la musique, nous laisse d’emblée indécis, nous contraint à l’interprétation et cela est encore plus vrai de l’abstraction lyrique, celle pratiquée par Isabel Tronçon, que de l’abstraction géométrique.

Interpréter, ici, signifie moins décrypter l’histoire que – peut-être – raconte le tableau que d’entrer en nous-même pour chercher quels sentiments ils éveillent. Une expérience se situant quelque part entre l’introspection et la méditation voire le rêve éveillé.

À en croire Guy Mamès dont un texte accompagne l’exposition, I. Tronçon se reconnaîtrait dans la Poétique de la relation glissantienne. S’il est évidemment difficile de le vérifier sur la base de tableaux qui ne véhiculent par définition aucun message explicite, on comprend aisément qu’une artiste qui se trouve transplantée en Martinique depuis sa Normandie natale puisse être séduite par une philosophie mettant en avant sous le terme créolisation l’enrichissement inhérent au croisement des cultures.

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Un stage d’écriture avec Lyonel Trouillot

— Par Selim Lander —

L’association Balisaille a organisé à la médiathèque de Saint-Esprit un stage d’écriture poétique animé par Lionel Trouillot, écrivain haïtien internationalement connu dont l’œuvre multiforme – romans, poèmes, essais – a été couronnée de plusieurs prix.

Une vingtaine de participants se sont retrouvés tous les soirs de semaine ou presque, plus un samedi, du 18 au 28 janvier, bravant courageusement pour ceux qui se trouvaient éloignés de Saint-Esprit les difficultés de la circulation. Une écrasante majorité de femmes parmi les participants, les hommes étant sans doute moins nombreux de nos jours à posséder à la fois l’envie et la capacité de s’exprimer avec des mots et ceux qui néanmoins le sont étant davantage attirés par d’autres formes que la poésie au sens strict, terme quelque peu suranné à leurs yeux. La poésie qui pourtant, de nos jours, n’a plus vraiment de règle.

On pouvait le vérifier en assistant ce samedi 28 janvier, jour de clôture du stage, à la « restitution » orale des « travaux » des participants, travaux parmi lesquels l’on n’a repéré aucun texte conforme à ce que l’on entendait par « poésie » à l’époque où les vieilles personnes comme l’auteur de ce compte-rendu fréquentaient les bancs des écoles.

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La Peur en lecture – samedi 21 janvier

Le 21 janvier 2023 à 18h30 au CDST, Saint-Pierre

Par L’ART GONDS TOUT

Lire pour faire découvrir le bonheur des textes

Lire pour le plaisir et pour donner l’envie de lire

Le ministère de la Culture invite les associations et les lieux culturels partout en France et Outremer à consacrer une fois dans l’année une manifestation à la lecture. En 2023, les dates retenues vont du 19 au 22 janvier 2023. Un thème est suggéré : la peur !

Le samedi 21 janvier, l’association culturelle L’ART GONDS TOUT, en partenariat avec le CDST à Saint-Pierre, invite les amoureux de la littérature comme tous ceux qui ont le goût des belles histoires pour des lectures à plusieurs voix suivies d’une discussion avec le public.

Il y a peur et peur, d’où toute une gamme de réactions possibles, des simples frissons à la terreur la plus abjecte. Certains la recherchent pour le plaisir, d’autres sont paralysés devant elle, d’autres y voient une source de méditation, d’autres enfin la prennent comme une motivation pour (ré)agir.

On ne passera pas en revue en une seule soirée tous ces aspects.

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