Né il y a 105 ans, l’anthropologue français honoré par le Doodle a inventé le structuralisme. Il fut l’un des scientifiques les plus influents au monde.
—Par Thibaut Danancher —
Claude Lévi-Strauss aurait dû fêter aujourd’hui ses 105 ans ! L’académicien a tout réussi, sauf l’année de son centenaire. Il meurt le 30 octobre 2009 à trois semaines de ses 101 ans. Google rend hommage jeudi à l’anthropologue et à l’ethnologue français. Un doodle est consacré à cette grande figure de la scène intellectuelle française. Il aura exercé une influence considérable sur les sciences humaines du XXe siècle. Philosophe de formation, ce pionnier du structuralisme, auteur de Tristes tropiques (1955), arpentait le monde pour en étudier les mythes. Précurseur dans le domaine de l’écologie, il a notamment oeuvré à la réhabilitation de la pensée primitive.
C’est ce « regard éloigné » et surplombant qui semble le mieux définir l’homme qui, jusqu’en octobre 2007, continuait à se rendre deux fois par semaine à son bureau du laboratoire d’anthropologie sociale au Collège de France. Il reconnaissait appartenir à un autre temps : « Mon oeuvre termine une époque ; elle est encore ancrée dans le XIXe siècle.

A l’heure où le gouvernement socialiste veut faire voter une loi de pénalisation des clients des prostituéEs, nous affirmons que la question n’est pas de prendre parti contre ou en faveur de l’abolition de la prostitution mais qu’il est nécessaire de prendre parti en tant que féministes. Parce que vouloir «abolir» la prostitution sans exiger, au préalable et avec le même aplomb, l’abolition de la pauvreté, de l’exploitation et du pillage du Sud par le Nord est au mieux une naïveté, au pire, une imposture. Or, ce gouvernement n’est pas naïf.
Méditant sur l’irrésistible tendance à la concentration du pouvoir financier cinq années après la crise des subprimes, le journaliste Nick Dunbar observait que si certains animaux dominants comme le requin, le rat, la guêpe survivront à l’espèce humaine, après avoir survécu aux météorites et aux extinctions massives, Goldman Sachs était probablement l’un de ces animaux (1). À court terme, le « remplacement » en 2012 de M. Papandréou, qui avait eu l’outrecuidance de songer à soumettre à référendum un plan européen d’austérité, par M. Papademos, ancien conseiller de la banque d’affaires, illustre bien le mécanisme de cette puissance tranquille. Cette radicale remise en cause du principe démocratique défini par Spinoza comme « l’union des hommes en un tout qui a un droit souverain collectif sur tout ce qui est en son pouvoir » (2) amène simultanément deux questions. Au-delà d’un constat d’une « dé-démocratisation » (3) coextensive à l’ultralibéralisme, le libéralisme politique, trésor commun à la gauche et à la droite démocratiques, est-il nécessairement imbriqué dans le libéralisme économique ?
Les historiens du futur qui se pencheront sur les premières décennies du XXIe siècle, y verront-ils un chapitre nouveau de l’histoire des progrès de la démocratie ? Cela n’a aujourd’hui rien d’évident. Certes, cet événement fascinant que l’on a nommé le « printemps arabe » a montré que le temps des révolutions démocratiques n’était pas définitivement révolu. Des régimes autoritaires et corrompus ont été balayés par des insurrections populaires. Entre l’insurrection et l’institution de régimes démocratiques, le chemin n’est cependant pas direct, l’exemple de la Révolution française l’atteste, qui nous incite à ne pas désespérer de l’issue de ces récentes révolutions.
Mesdames, Messieurs,
Ils sont en première ligne, alors que le pays s’enfonce dans le chaos. Près de 6.000 enfants ont été enrôlés dans des milices combattant en République centrafricaine, a déclaré vendredi 22 novembre à Genève un haut-responsable de l’ONU, dénonçant la spirale de la violence dans ce pays.
HOMMAGE A ALAIN PLENEL
Les racistes ne s’y sont pas trompés : Christiane Taubira est de fait un symbole. Le propre des symboles est de capter les projections négatives, individuelles ou collectives, qui émergent des crises. Ce qui est injurié à travers elle ce sont les frustrations, douleurs, souffrances et impossibles, que la situation économique, sociale et sociétale, suscite en France. Cette réception est d’autant plus forte que ce symbole identifié par ces esprits malades se trouve au cœur de l’allégorie républicaine : la Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, garante des libertés, de la fraternité et de l’égalité pour tous, se trouve porteuse d’une différence visible. Dans une communauté traditionnelle, mono ethnique, mono religieuse, mono historique, le symbole concentre, rassure, exclue la différence. Ici, cet inattendu symbole proclame une constellation de différences : femme, noire, venue d’une périphérie, esprit rebelle, identité créole, mentalité progressiste, ouverte aux transformations du monde… Le symbole soudain bouscule, proclame une impérieuse diversité : les racistes n’en peuvent plus.
Allen Iverson, joueur le plus spectaculaire de la NBA il y a une dizaine d’années, a pris sa retraite dans l’anonymat. Le sport spectacle n’a pas aidé cet individu fragile à sortir de sa condition précaire
La ministre de la justice, Christiane Taubira, a été victime d’insultes racistes à répétitions. Ces attaques n’ont pas suscité, dans un premier temps, d’émotion particulière dans la classe politique. Assiste-t-on à une libération et une banalisation de la parole discriminatoire ? L’écrivain Patrick Chamoiseau, prix Goncourt 1992, s’inquiète de cette prégnance du discours d’extrême-droite. Mais le Martiniquais voit également dans cette outrance verbale, cet accès réactionnaire une raison d’espérer.
Le racisme est le propre de l’homme. C’est ainsi, il vaut mieux le savoir et faire en sorte qu’il ne progresse pas et qu’il soit combattu par la loi. Mais cela ne suffit pas. Il faut éduquer, démonter ses mécanismes, démontrer l’absurdité de ses bases et rester vigilant.
A quelques jours du 20 novembre, journée internationale des droits de l’enfant, il me parait opportun de rappeler les valeurs qui ont poussé la France à ratifier la convention internationale des droits de l’enfant moins d’un an après son adoption par l’ONU en 1989.
Un texte de l’écrivain allemand Hans Magnus Enzensberger, intitulé
INTERVIEW
Depuis longtemps, la France joue au bras de fer. Sa République contre sa société. Ses idéaux face à son quotidien. Deux forces opposées, en équilibre précaire, comme ces poignées de mains tenues en équerre par des biceps gonflés à bloc. La République, née de la révolution contre les privilèges, s’est dotée d’un triptyque impossible pour tordre le bras à la nature même des hommes : liberté, égalité, fraternité pour en finir avec la division, le rapport de force, l’assujettissement de l’autre. C’était sans compter l’homme derrière le citoyen. Cet insoumis refuse tous les diktats, et surtout ceux qui ambitionnent d’imposer de bons sentiments. Jamais, ni sous la terreur du Comité de salut public de ses débuts sanglants, ni après la tentative de Mai 68, la République ne parvint à l’égalité, la liberté et la fraternité.
Il les appelait les Bohémiens. C’étaient les Roms de son époque, pas mieux aimés ni mieux accueillis qu’aujourd’hui.
En 2001, un an avant sa mort, Pierre Bourdieu conclut son enseignement au Collège de France par une » esquisse d’auto-analyse « . Dans ce texte, pour éviter les pièges de l’illusion biographique, il appliqua à lui-même les catégories d’analyse qu’il avait mobilisées pour comprendre les autres, et en particulier Edouard Manet (1832-1883) auquel il avait consacré les cours des deux années précédentes (en librairie le 7 novembre). Entre la réflexivité de l' » auto-analyse » et l’étude de la révolution symbolique opérée par le peintre, la différence semble évidente. Pourtant, ne peut-on pas penser, avec Pascale Casanova, l’une des responsables de cette édition, que les cours sur Manet sont déjà un essai d' » autoportrait » par délégation ? Non pas que Bourdieu se compare à l’artiste qu’il admirait tant mais, peut-être, parce qu’il reconnaissait quelque chose de la tâche qu’il s’était donnée dans le geste d’un peintre qui retourna contre le système académique la maîtrise qu’il en avait acquise.
L’ex-otage français Thierry Dol a déclaré mardi que ses trois années de captivité aux mains d’Aqmi ont été très difficiles mais qu’il s’agissait d’une « épreuve de la vie ». Thierry Dol, 32 ans, qui s’exprimait à Niamey après trois années de séquestration dans le Sahel par al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), était vêtu d’un habit vert pâle et d’un turban bleu-mauve, et portait une barbe noire fournie.
Elle fut toujours bruyante. Aujourd’hui, on peut encore entendre, sur un certain nombre de marchés, la voix des camelots. Elle est agaçante, mais inoffensive. Lorsque la révolution industrielle lança le coup d’envoi de la consommation de masse, la réclame passa au régime industriel. Dans les milieux qui se prenaient pour l’élite, on tint longtemps pour vulgaire de se vanter soi-même, ou de vanter ses produits. Le fait que le secteur ait rebaptisé son activité « publicité » n’a pas amélioré sa réputation.
Né au Cameroun, Achille Mbembe enseigne l’histoire et les sciences politiques à l’université de Witwatersrand à Johannesburg en Afrique du Sud et à Harvard aux États-Unis. De passage en France, où il a fait ses études, à l’occasion de la sortie de son dernier ouvrage Critique de la raison nègre (La découverte), il réagit à l’actualité des flux migratoires en Europe. Son essai lumineux décode en effet magistralement ces forces obscures qui, entre crise et repli, traversent aujourd’hui nos sociétés mouvantes.
Nous, cinéastes, artistes, hommes et femmes de culture d’Haïti et du monde, sommes particulièrement sensibles aux souffrances de nos frères et sœurs sous quelque latitude qu’ils se trouvent.
Les faits sont là et on ne peut que les constater. Selon les derniers sondages, 45% des électeurs de gauche sont pour la suppression du droit du sol. L’écrasante majorité soutient la politique de Valls. Ce qui restait au PS de protestation conte cette droitisation (Harlem Désir en tête) rentre dans les rangs. A Marseille, Patrick Mennucci traite Samia Ghali d’ « Arabe ». A droite, des dirigeants de l’UMP proposent de supprimer le droit du sol, principe fondamental de la république française. Hier sur LCP, un dirigeant de ce parti affirme en toute tranquillité qu’enseigner « nos ancêtres les gaulois » était la meilleure façon d’intégrer les indigènes. Cela ne choque plus grand monde. Il faut donc se rendre à l’évidence : s’il y a toujours existé en France une opinion xénophobe et raciste, celle-ci était tout de même contrôlée par quelques principes républicains. Aujourd’hui, les digues ont sauté. Le national populisme triomphe dans l’Hexagone. Tout est désormais possible.
C’était en 1986, et déjà Ulrich Beck parlait de paupérisation civilisationnelle en expliquant que la dynamique historique ne serait pas celle de la sécurisation pour tous, mais bien plutôt de la démocratisation du risque. Certes, les clivages entre précaires et ceux qui ne le sont pas sont toujours présents, mais l’émergence des risques systémiques, invisibles, radioactifs, cumulatifs, a brisé la ligne de partage. « Ce que nous a appris la contamination radioactive, c’est que c’en est fini de l’autre, fini de nos précieuses possibilités de distanciation. On peut exclure la misère, on ne peut plus exclure les dangers de l’ère nucléaire. C’est là leur nouvelle force culturelle et politique. Leur pouvoir est le pouvoir du danger qui abolit toutes les zones de protection et toutes les différenciations de l’âge moderne. » La société du risque mondialisée, c’est cela : le « big business » de notre insécurisation, réelle ou supposée. Il n’est pas impossible que l’enseignement du risque systémique nous fasse entrevoir les vieilles réalités sociales (comme la migration de la misère) comme désormais inextricables. « La France doit prendre sa part de la misère du monde, mais n’a pas vocation à accueillir toute la misère du monde », dit un ministre de l’Intérieur, citant un ancien premier ministre.