Le Cégom (Collectif des Etats généraux de l’Outre-Mer) présente 6 chefs de revendication

Lors d’un entretien au ministère des outre-mers qui devait initialement se dérouler avec le ministre Victorin Lurel & s’est finalement, ce dernier s’étant excusé, déroulé lundi avec plusieurs de ses conseillers, le Cégom a présenté les six chefs de revendication formulés à l’attention du président de la République François Hollande sur la base de son dernier audit des politiques publiques conduites par l’État en direction des Français/es d’outre-mers, en matière de cherté de la vie, de chômage des jeunes, de santé, de culture, de discriminations & de soutien aux associations. Les conseillers de M. Lurel ont apporté des réponses précises à certaines propositions, soulignant l’entrée en vigueur progressive de la loi pour la régulation économique. Ils ont par ailleurs mis en avant un bilan d’étape encore confidentiel des 30 engagements pour les outre-mers présentés le 10 mars 2012 par M. Hollande, indiquant simultanément que les 137 mesures annoncées par l’État au terme des États généraux de l’outre-mer ne feraient pas l’objet d’un suivi par le présent gouvernement. Le Cégom, qui estime que ces 137 mesures engageaient l’État & regretterait un manque de considération pour les milliers de Français/es d’outre-mers – élu/e/s ou personnalités qualifiées – ayant œuvré à leur formulation, a pris acte de ces précisions. Soucieux d’exercer au mieux sa mission en relayant les attentes de ses adhérent/e/s & sympathisant/e/s, d’une part, ainsi que les positions des responsables des politiques publiques, d’autre part, il a souhaité qu’un prochain entretien permette d’évoquer ses revendications restées sans réponse, en matière de santé ou de discriminations. Le Cégom publie le détail de ses propositions & se trouvait représenté par son président Pierre Pastel & son porte-parole David Auerbach Chiffrin ainsi que Louise Garnier, correspondante régionale en Guadeloupe ; Anick Pastour, correspondante départementale en Essonne & conseillère municipale de Yerres ; Jean-Claude Gautry, correspondant départemental en Seine-&-Marne & maire de Paroy ; Luc Larbalétrier. – – – David Auerbach Chiffrin, porte-parole

I. CHERTÉ DE LA VIE ­

Les incertitudes qui pèsent sur un contrôle effectif des prix (qui soit doté de moyens suffisants puis rendu public), les inquiétudes face à la hausse du prix des billets d’avion (ainsi qu’à la baisse du nombre & du poids des bagages autorisés), l’absence de continuité territoriale satisfaisante & les menaces qui pèsent sur la pérennité des congés bonifiés restent des questions cruciales.

Le Cégom souhaite un plan d’ensemble contre la vie chère -qui mette l’accent sur les points suivants :

I.A. LA QUESTION DES TRANSPORTS, laquelle touche à l’ensemble des domaines dans l’ensemble des outre-mers :

I.A.1. La question d’une comparaison entre le budget des outre-mers & le coût de la continuité territoriale avec la Corse reste posée, ainsi que celle de «l’interdiction des vols aériens à vide» (qui nous est ainsi signalée) ;

I.A.2. Les dispositifs tarifaires en vigueur, en matière par exemple de deuil, sont peu connus & sont au reste peu lisibles & peu respectés ;

I.A.3. Plus ponctuellement, une distorsion de concurrence entre transporteur/e/s routier/e/s guadeloupéen/ne/s & martiniquais/es nous est signalée (au détriment de ces dernier/e/s), qui peut avoir un rôle dans la formation des prix aux Antilles, puisque le port de Jarry en Guadeloupe ne prévoit pas d’espace de stationnement pour que les camions en provenance de Martinique puissent procéder à leurs opérations de manutention, alors que le port de Fort-de-France en prévoit pour leurs homologues en provenance de Guadeloupe (comme en atteste une lettre du 2 octobre du préfet de Martinique à la Martiniquaise de stockage, «Mastock»);

I.B. L’IMPLICATION DES RESPONSABLES POLITIQUES :

I.B.1. Un renforcement des contrôles administratifs en matière notamment de respect du droit de la concurrence doit enfin permettre un réel contrôle des prix ;

I.B.2. Un renforcement du contrôle politique voire populaire sur les sociétés d’économie mixte doit permettre un meilleur contrôle des impôts locaux & des tarifs en matière d’eau, de logement ou de traitement des déchets (la polémique nouée récemment autour des rémunérations étonnantes de la Semsamar le démontre) ;

I.C. UNE MEILLEURE INTÉGRATION DES OUTRE-MERS dans leurs marchés régionaux respectifs.

II. JEUNESSE EN DIFFICULTÉ ­

Nos jeunes se trouvent à la fois principaux auteurs & principales victimes d’une violence croissante dont les facteurs, notamment l’échec scolaire, l’usage & le trafic de drogue (voir les mesures n°78 & 94 annoncées au terme des Égom), ainsi que le chômage, doivent faire l’objet d’un traitement global.

Le Cégom demande un plan d’ensemble pour la jeunesse ultramarine en difficulté, outre-mers aussi bien que dans l’Hexagone -qui mette l’accent sur les points suivants :

II.A. L’APPRENTISSAGE AFFIRMÉ & MIEUX ÉVALUÉ DE LA LANGUE ANGLAISE, pour lequel nous souhaitons un plan quinquennal qui mette en avant des dispositifs nouveaux susceptibles de permettre un accès plus facile à cette langue, alors qu’une grande partie de la jeunesse ultramarine n’en a pas même une maîtrise minimale (la politique de la ville doit permettre de développer des cours de perfectionnement ou des formations à l’interprétariat passant par une approche vivante & ludique, afin par exemple de former des guides touristiques qui ne soient pas agrégés de l’université mais opérationnels, afin également de faciliter l’échange & le développement économique avec les États voisins de la France outre-mers en brisant l’isolement de la population) ;

II.B. LE DÉVELOPPEMENT DE L’ÉCONOMIE DU TOURISME, dont le rôle central est souligné, & incidemment le renforcement des contrôles administratifs propices au meilleur développement d’une filière touristique de qualité à tous les niveaux (en matière notamment d’hôtellerie, de restauration ou d’alimentation) ;

II.C. LE DÉVELOPPEMENT DE RÉPONSES NOVATRICES DES INSTANCES JUDICIAIRES aux auteurs d’actes de délinquance :

II.C.1. Une démarche soutenue par la politique de la ville est susceptible de permettre de préserver l’autorité de la justice, tout en permettant l’accompagnement & la sensibilisation des personnes concernées en matière d’alcool, de drogue ou de communication non-violente ;

II.C.2. Les démarches de formation des fonctionnaires de l’institution judiciaire aux langues régionales mériteraient d’être encouragées & démontreraient une volonté affirmée de rapprocher cette institution des populations locales, dans la perspective de conférer une efficacité plus grande à sa mission.

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III. CONDITIONS DE VIE & SANTÉ ­

L’État s’est engagé à réaliser une étude sur les conditions de vie des Français/es d’outre-mer, notamment en matière de santé (voir les mesures n°28 & 60 annoncées par l’État au terme des Égom). L’obésité, la drépanocytose, le diabète, l’alcoolisme, le sida ou le cancer de la prostate constituent des maux que les Français/es d’outre-mers connaissent avec une intensité notable.

Le Cégom demande la réalisation de l’enquête publique annoncée sur les conditions de vie des Français/es d’outre-mers, notamment dans l’Hexagone, ainsi qu’un plan global sur leurs conditions de vie & leur santé -qui mette l’accent sur les points suivants :

III.A. LA PRÉVENTION DES DIFFÉRENTS MAUX qui, par l’intensité avec laquelle on les trouve parmi les Français/es d’outre-mers, leur sont spécifiques et, incidemment, l’aspect culturel de leur rapport à la médecine & au soin :

III.A.1. En matière médicale, des comportements conduisant à consulter le système de soin à un stade avancé de symptômes ou à cesser les traitements dès la diminution de ces symptômes semblent significativement plus fréquents parmi nos compatriotes des outre-mers, comme devrait le confirmer l’enquête précitée : nous souhaitons ainsi un plan quinquennal de prévention & d’éducation au bien-être & à la santé qui prévoie notamment, en partenariat avec les communes d’outre-mers, le développement de parcours de santé encadrés par des médiateur/e/s de santé ;

III.A.2. En matière d’alcoolisme, de diabète ou d’obésité, la bière ou les sodas sont souvent moins chers que l’eau : des mesures fiscales pourraient les taxer au bénéfice d’une politique de prévention & d’éducation au bien-être & à la santé ;

III.A.3. En matière de sida (syndrome de l’immunodéficience acquise), les États généraux des PVVIH (personnes vivant avec le virus de l’immunodéficience humaine) parmi les populations ultramarines en France, prévus par le plan national de lutte contre le VIH/sida & les IST (infections sexuellement transmissibles) 2010/2014, doivent être soutenus par le ministère des outre-mers & la délégation interministérielle pour l’égalité des chances des Français/es d’outre-mers ;

III.B. LE DÉVELOPPEMENT DES NOUVELLES TECHNOLOGIES & notamment l’expérimentation en matière de télémédecine, singulièrement en Polynésie française dont les cinq archipels couvrent un territoire aussi vaste que l’Europe ;

III.C. LE LIEN ENTRE SANTÉ & CHAÎNE ALIMENTAIRE (de la dispersion aérienne des pesticides jusqu’à leur traitement final dans le cycle de l’eau).

IV. MÉMOIRE & CULTURE ­

Les Français/es d’outre-mer, notamment dans l’Hexagone, devraient retrouver une politique d’accompagnement de leurs associations qui œuvrent pour la prise en compte globale & nationale de leur histoire & de leur culture, afin d’assurer la cohésion sociale la meilleure.

Le Cégom demande un plan d’ensemble relatif à la mémoire de l’esclavage & à la diffusion des cultures ultramarines, ainsi que la nomination par voie de circulaire de responsables du suivi de ce plan au niveau des préfectures de région -qui mette l’accent sur les points suivants :

IV.A. L’ÉDUCATION DES ENFANTS avec notamment l’instauration d’une heure par semaine d’enseignement des langues & cultures régionales au niveau de l’école primaire & du collège ;

IV.B. LE SOUTIEN À LA PRODUCTION & À LA DIFFUSION, sur le plan national & notamment dans les médias nationaux comme France 2, des œuvres des artistes & professionnel/le/s issu/e/s des Français/es d’outre-mers ainsi que la réaffirmation de la mission assignée à France Ô de promouvoir l’histoire & la culture des Français/es d’outre-mers -en respectant l’équilibre des trois océans ;

IV.C. UN DÉVELOPPEMENT RAISONNÉ DE L’ÉCONOMIE DU TOURISME & notamment la création de centres culturels comparables au centre néo-calédonien Jean-Marie Tjibaou dans les cinq archipels de la Polynésie française, pour laquelle le Cégom identifie une urgence spécifique.

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V. LUTTE CONTRE LE RACISME & LES DISCRIMINATIONS ­

Le discours du 10 septembre du premier ministre Jean-Marc Ayrault au Camp des Milles a laissé espérer une relance des Copec (commissions pour la promotion de l’égalité des chances & la citoyenneté), ainsi qu’une politique plus digne à l’égard des sans-papiers, notamment des ressortissant/e/s de pays appartenant à la Francophonie (dont les ancêtres ont versé leur sang sous l’uniforme français au cours des deux dernières guerres mondiales, afin que la France préserve sa liberté & ses valeurs).

Le Cégom demande :

V.A. L’INTÉGRATION des représentant/e/s régionaux du Cégom aux différentes Copec & la nomination de l’un/e de ses représentant/e/s nationaux au CPMHE (Comité pour la mémoire & l’histoire de l’esclavage), afin d’œuvrer à la cohésion sociale & civique de l’ensemble de nos compatriotes, par la prise en compte & le respect les meilleurs de leurs différentes origines ;

V.B. UNE POLITIQUE PLUS DIGNE À L’ÉGARD DES PERSONNES SANS­PAPIERS (singulièrement à Mayotte & en Guyane) & notamment le rattachement de l’Ofpra (Office français de protection des réfugiés & apatrides) au ministère des affaires étrangères ;

V.C. L’AFFIRMATION, PAR VOIE LÉGISLATIVE OU RÉGLEMENTAIRE OU DE CIRCULAIRE, DU RESPECT DÛ PAR LES EMPLOYEURS AUX CARACTÉRISTIQUES CAPILLAIRES des personnes d’ascendance africaine ou caribéenne qui trop souvent encore, dans les entreprises ou la fonction publique, se voient contraintes de raser leurs cheveux ou de les lisser au moyen de produits toxiques & onéreux : le défenseur des droits a fermé d’autres voies par une décision du 9 janvier 2012, prise dans l’affaire opposant Air France à un steward d’origine ivoirienne, Aboubakar Traoré (Dominique Baudis y a repris l’argumentaire patronal en soutenant qu’il ne s’agissait «pas d’une affaire de discrimination» car ce dernier lui aurait donné une dimension «identitaire» en refusant de raser ou défriser ses cheveux, manquant ainsi une opportunité de suivre l’exemple donné par son homologue étatsunien, l’EEOC, le 19 avril 2006 déjà) -le ministre des outre-mers Victorin Lurel a signé, le 10 mai 2012 à l’issue des cérémonies de la Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage & de leurs abolitions, une première pétition de soutien à M. Traoré.

Cf. 4 mai 2012 / 28 janvier 2013 –Dossier de presse «Hair France, touche pas nos racines ! (Hair France, hands off our roots !)», par le Comité international de soutien à M. Aboubakar Traoré | Int’l Committee of Support for Mr Aboubakar Traoré

www.tjenbered.fr/2012/20120407-96.pdf [fr|en]

VI. SOUTIEN PUBLIC AU CÉGOM & AU TISSU ASSOCIATIF ULTRAMARIN ­

L’action du Cégom, qui assure notamment une mission de suivi des Égom (États généraux de l’outre-mer) que l’État s’était engagé à assurer, a un coût. Notamment, la réalisation de notre audit 2012 peut être évaluée à 30.000 €. Par ailleurs, le Cégom, afin d’assurer au mieux ses missions de développement du lien social entre l’ensemble de nos compatriotes, doit pouvoir proposer des réunions publiques décentralisées.

Le Cégom demande :

VI.A. UN SOUTIEN POLITIQUE & FINANCIER À SA DÉMARCHE D’UTILITÉ PUBLIQUE, qui consiste notamment à relayer les demandes & besoins de la société civile auprès de l’opinion publique & de l’État mais aussi à diffuser vers celles-là les informations portées à son attention par celui-ci ;

VI.B. L’ADMISSION du Cégom au CNVA (Conseil national de la vie associative) ;

VI.C. PLUS LARGEMENT, UN STATUT DU BÉNÉVOLE qui permette notamment aux demandeur/e/s d’emploi d’exercer une responsabilité associative, gage bien souvent d’une insertion sociale maintenue, sans perdre le bénéfice de leur indemnité, & qui facilite également leur accès à la VAE (validation des acquis de l’expérience) au titre de leur expérience associative.

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Pour le Cégom, LE BUREAU NATIONAL :

Pierre PASTEL, président national

David AUERBACH CHIFFRIN,l premier vice-président, secrétaire général

Rose-Hélène FONTAINE, trésorière nationale

Anick PASTOUR, secrétaire générale adjointe