— Par Serge Letchimy —
Depuis le début de l’année, seize homicides ont été enregistrés en Martinique. Treize d’entre eux ont été commis par arme à feu. Ce n’est plus une série de faits divers : c’est une spirale de mort qui s’installe dans notre quotidien. Et pourtant, l’État regarde ailleurs. Combien de sirènes faudra-t-il encore entendre, combien de corps faudra-t-il couvrir d’un drap blanc avant que la République prenne la mesure de ce que vit la Martinique ? Nous sommes en guerre. Une guerre silencieuse, brutale, sournoise — celle que mène un narcotrafic devenu tentaculaire. Et cette guerre, nous ne pouvons plus la mener seuls.
La Martinique est aujourd’hui un point de transit stratégique pour la cocaïne venue d’Amérique du Sud à destination de l’Europe. Les cartels colombiens et vénézuéliens le savent. Ils exploitent nos failles : des ports insuffisamment contrôlés, des radars côtiers promis depuis vingt ans mais jamais installés, une coopération internationale encore trop timide. L’an dernier, seulement 1 400 conteneurs sur 188 000 ont été contrôlés par les douanes au Grand Port Maritime. 60% de la cocaïne saisie en France l’a été dans la zone Antilles-Guyane.