Jean-Durosier Desrivières vous ouvre ses archives
N°1 : Entretien avec Maryse Condé

L’écrivain guadeloupéen, Maryse Condé, présidait le jury d’une soutenance de thèse à l’Université des Antilles et de la Guyane quand (un jour et un mois de l’année 2004), entre deux séances de travail, elle a voulu en toute sympathie nous dire sa perception de ce pays – Haïti – qui aurait pu être un phare dans la Caraïbe actuelle, selon elle.
Jean-Durosier Desrivières : Quel regard projetez-vous sur l’histoire d’Haïti ?
Maryse Condé : L’histoire d’Haïti pour un caribéen concerné est d’abord un sujet de fierté. Il y a la version que l’on connaît : des esclaves qui se rebellent pour arriver à l’indépendance. Mais ensuite, c’est une cause de tourment quand on voit tous les problèmes d’Haïti qui ne sont pas résolus, quand on voit une série de dictatures, le retournement d’un pouvoir que l’on croyait libéral, le pouvoir d’Aristide, dénoncé par ceux-là même qui l’ont soutenu. Finalement Haïti est une sorte de Janus à deux faces : d’un côté les choses agréables et admirables ; de l’autre côté des choses qui affligent et qui font beaucoup de peines.

À l’angle des rues parallèles, Gary Victor • Vent d’ailleurs • ISBN 978-2911412233 • 2003.
Le jury du 13e prix Carbet de la Caraïbe, présidé par Edouard Glissant, s’est retrouvé au soir du vendredi 20 décembre à l’Atrium de Fort-de-France, salle Frantz Fanon, pour honorer, face à un public dirait-on sélectif, la dernière parution de Frankétienne : H’éros-Chimères. Ce titre résumerait « de manière profonde et provocatrice les horreurs qui bornent nos horizons ; les tourments et les fantasmes qui peuplent l’imaginaire des humanités contemporaines ». L’auteur reçoit ce prix comme un hommage rendu à la créativité féconde du peuple haïtien qui compte tant de « guerriers de l’imaginaire ». Tout se serait joué entre mise en scène de l’artiste, proximité visible avec le jury et son « jeu/je » parfois morbide et lassant.
«Vous ferez un jour de la politique?» «Ah non, ça, jamais! Papa Aimé a assez donné.» La réponse claque, sans hésitation aucune, de la part d’Ina et de Michèle. Il est vrai qu’avec cinquante-six ans de mandat à la mairie de Fort-de-France et quarante-sept (de 1946 à 1993) à l’Assemblée nationale, Aimé Césaire a largement acquitté la quote-part républicaine de la famille. En revanche, le tribut césairien aux lettres et aux arts ne s’est pas interrompu avec le patriarche. Au contraire. Les six enfants d’Aimé et de Suzanne, dite «maman Suzy», ont tous choisi d’œuvrer dans le monde de l’esprit.