Mois : septembre 2016

Archie Shepp à John Coltrane, cri du free et braises du blues

—- Par Fara C. —

jazz_lavillette_2016Pour le festival Jazz à la Villette, l’incandescente création en hommage à Coltrane, par l’astre Shepp, célèbre la mémoire et le chant-souffle visionnaire de Trane. Une colère plus que jamais nécessaire.

Le 10 août 1964 au soir, John Coltrane, saxophoniste et compositeur déjà reconnu comme un phare du jazz en mouvement, apprend que son protégé, Archie Shepp, enregistre enfin pour Impulse ! Il s’habille rapidement et débarque au studio sans avoir pris le temps d’enfiler ses chaussettes. C’est lui qui avait demandé cette session au boss du label Impulse !, Bob Thiele, resté jusque-là sourd aux appels du jeune Archie. Une autre figure de la culture afro-américaine a du flair et surtout de l’oreille. C’est l’écrivain LeRoi Jones, qui deviendra plus tard Amiri Baraka. Dans le texte du livret qu’il rédige alors, en 1964, pour Four For Trane, qui s’imposera comme un 33 tours emblématique d’Archie Shepp, il écrit : « Avant tout, Archie Shepp s’est très rapidement élevé, selon moi, au premier rang des saxophonistes ténors post-Trane. »
Archie Shepp gravera une bonne douzaine d’albums pour Impulse !

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Le labyrinthe théorique antisémite de Heidegger passé au crible de la critique

— Par Jérôme Skalski —

heidegger_&_le_golemHeidegger et le Golem du nazisme, de Maurice Ulrich. Éditions Arcane 17, 154 pages. 14 euros.

Pour qui s’aventure sur les chemins forestiers ­ Holzwege ­ que dessine la pensée de Martin Heidegger parmi la haute futaie de hêtres ou de pins de la philosophie allemande, les embûches sont nombreuses. Parmi elles, celles qu’il a lui-même dressées sur son passage. La méthode assure à ses prises de position théoriques la touche d’ésotérisme propice à attirer les esprits en manque de distinction ainsi que l’ambiguïté nécessaire à une pensée qui se camoufle pour mieux se dérober plutôt que de faire face à ses objecteurs. En publiant en cette rentrée son essai, Maurice Ulrich fait tout d’abord oeuvre utile en donnant aux non-spécialistes, aux jeunes lecteurs en particulier, l’indication de pistes critiques susceptibles de les détacher de l’atmosphère hypnotique des écrits du philosophe. L’auteur, qui se présente comme un non-professionnel en philosophie, prétend n’apporter d’originalité dans son propos qu’en tant que tel, en assumant le caractère personnel de son intervention, textes à l’appui.

« Les rapports de Heidegger au nazisme et à l’antisémitisme ne sont pas seulement une question de philosophie mais sont une interpellation adressée à chacun et à la conscience humaine », assène-t-il dès les premières pages de son ouvrage.

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La France « terre de partage »? De quel partage s’agit-il?

— Par Sylvie Meslien, Historienne, Enseignante d’Histoire-Géographie —

fillion_terre_de_partageCette intervention est une réaction à une partie du discours de François Fillon tenu le 28 août 2016 à Sablé sur Sarthe.

C’est un fait certain, par delà les clivages politiques derrière lesquels certains se cachent, il est des hommes qui pour justifier leur pensée nationaliste la plus primaire souhaitent renier des pans d’Histoire de la France sous des prétextes fallacieux. Ils souhaiteraient que soit effacées des manuels scolaires des pages qui selon eux ne participent pas à la grandeur de la France et dans lesquelles, ils ne se reconnaissent pas. Cette Histoire qu’ils renient, c’est la mienne, et j’exprime mon refus de la voir disparaitre des livres d’histoire des écoliers. Ce serait une nouvelle injure faite à toutes ses luttes entamées par mes ainés et mes compatriotes pour les y inscrire.

En cette période de crise économique et sociale, l’actualité expose chaque jour un retour en arrière : le refus de l’acceptation de l’autre et de sa culture : pourtant cet « autre » que l’on rejette contribue et a contribué à la réussite de la France.

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Un été 2016, sur la route des festivals

— par Janine Bailly —

JVilarGPhilippeSur notre route, il y eut tout d’abord Avignon l’incontournable, son Festival In tout empreint de gravité pour nous parler de notre histoire et de notre humanité, en une programmation éclectique qui fit la part belle aux pièces données en langues originales sur-titrées. Aux nombreux articles déjà parus sur le présent site, je n’ajouterai que notre émerveillement à retrouver la Carrière Boulbon, lieu magique où, à la belle étoile, s’égrenèrent, dans la douceur de la nuit provençale, les cinq heures du Karamazov de Jean Bellorini. Du roman, traité en tragédie, le metteur en scène a choisi de mettre en lumière les questions essentielles qui hantent l’œuvre de Dostoïevski. Sur des rails circulent des cages de verre qui sont le lieu d’affrontements familiaux, et qui donnent à cette adaptation la dimension d’un huis-clos enflammé et cruel.

Mais Avignon, c’est aussi le Festival Off ; la ville enguirlandée d’affiches plus ou moins jolies, porteuses de titres plus ou moins heureux ; les prospectus que l’on vous brandit à chaque détour du chemin, jouets du mistral quand il se lève ; la litanie en vogue, censée allécher le client, et qui oscille entre « c’est hilarant, réjouissant », « c’est original et poétique », ou encore « venez, vous verrez, je fais tous les rôles », tant il est vrai que dans cette jungle aux centaines de troupes chacun est arrivé bardé d’un espoir un peu fou.

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Fillon, à l’aise dans le cambouis identitariste !

— Par Gilbert Pago —

cambouis_identitaireA Sablé-sur-Sarthe, ce dimanche 28 août, l’ancien premier ministre, François Fillon, candidat à la candidature présidentielle aux primaires de la droite et du centre s’est est pris aux programmes scolaires dont il pense le plus grand mal. Ce faisant, il s’intéressait à ce qui nous importe.

Ecoutons l’argumentaire : Il s’insurge contre les enseignements qui apprennent aux élèves à avoir « honte » de leur pays : la France. Il se mobilise afin de « retrouver la confiance dans notre patrie » et de « revoir l’enseignement de l’Histoire à l’école primaire ».
Il s’insurge contre le fait que les enseignants sont  » obligés d’apprendre aux enfants à comprendre que le passé est source d’interrogations » car « Faire douter de notre Histoire ! Cette instruction est honteuse ! ».
Puis il se met à expliciter ce dont il s’agit.

Ecoutons ce qu’il assène : « Non, la France n’est pas coupable d’avoir voulu faire partager sa culture aux peuples d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du nord ». « Non la France n’a pas inventé l’esclavage !

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Les Troglodytes de la Martinique

— Par Roland Tell —
troglodyteToute personne développe en elle ce que lesAméricains appellent un « belief system » , c’est-à-dire un système de croyances, de valeurs, et de convictions, qui se révèle dans son comportement individuel, aussi bien dans le domaine religieux, que dans ses particularismes culturels et politiques. À cet égard, la différenciation est essentielle, pour former, à la Martinique, une communauté démocratique, sachant rester solidaire et ouverte. C’est pourquoi chaque Martiniquais s’efforce de se comporter en citoyen responsable, cherchant à maintenir le lien interne de la communauté de vie.
Hélas, hélas, les querelles politiciennes incessantes donnent plutôt l’impression de vivre dans une société double : celle du pouvoir régional, quel qu’il soit, et celle des postulants au pouvoir à venir! La politique martiniquaise ne repose nullement sur des bases éthiques. Il suffit de considérer, encore une fois, les racines du pouvoir actuel à la Collectivité Territoriale. De quelle source proviennent-elles ? D’une morale du minimum électif, qui a perdu le sens de l’équité politique, du « belief system » , donc des vraies valeurs idéologiques. Ce faisant, elle accomplit une oeuvre de démolition des fondements solides, sur lesquels s’édifie la démocratie.

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Professeurs? Quelques raisons majeures de faire grève le 8 septembre prochain?

greve_8_septembre_2016Le SNES appelle à la grève contre la réforme des collèges le 8 septembre prochain.
Il n’appartient pas au secrétaire sortant de la FSU d’analyser la stratégie défendue par tel ou tel syndicat de sa fédération. Par contre le secrétaire de la fédération, ancien secrétaire départemental du SNES, ancien secrétaire du SNES du lycée Schœlcher, ancien professeur au même lycée, président de l’association des consommateurs et des citoyens de la Caraïbe et membre fondateur de Sauver Les Lettres se doit de rappeler à tous, public et personnels les enjeux de cette grève ; car jamais les conditions non été aussi favorables – présidentielles obligent – pour contraindre le gouvernement à suspendre une réforme qui va à l’encontre de l’intérêt des élèves, des parents et des personnels.
Quel parent n’a pas constaté que la réforme des rythmes scolaires dans le 1er degré n’engendre que fatigue pour les enfants et leurs parents ? Pour quel résultat puisque parallèlement, on fait en CM2 ce qu’on faisait avant en CE2 voire CE1 ?!
Mais le gouvernement a décidé de passer en force, au mépris des personnels qu’on voudrait voir se passer au cou la corde qui les pend.

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Corinne Mencé-Caster :  » j’ai fait de mon mieux… »

mence_casterLettre ouverte de Corinne Mencé-Caster (ex-Présidente de l’Université des Antilles au 1er septembre 2016)
Il n’est pas toujours simple de dire au revoir, ni même de prendre la décision de s’interrompre, d’arrêter. C’est pourtant ce que j’ai pris le parti de faire, à l’aube de cette rentrée universitaire 2016-2017, qui aurait été ma quatrième en tant que présidente de l’Université. Cette décision, je l’ai mûrie et réfléchie, et je vous l’annonce, certaine d’avoir vraiment accompli tout ce qu’il était en mon pouvoir d’accomplir, dans le temps et les conditions qui m’étaient impartis.
J’estime, en effet, avoir fait ce que je pouvais faire, compte tenu des circonstances qui ont entouré ma mandature, et sur lesquelles je crois inutile de revenir ici.
Les statuts de l’université étant votés à l’unanimité, il me semble aujourd’hui important de permettre à l’établissement de se mettre en conformité avec eux, ce qui suppose la tenue d’élections renouvelant son conseil d’administration et son conseil académique le plus rapidement possible. La nouvelle équipe de gouvernance, issue de ces élections, pourra alors négocier avec le Ministère, un contrat pour les cinq ans conforme à sa vision et à son projet, pour les cinq ans à venir, et le mettre en oeuvre pendant la durée de son mandat.

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De la gratuité de l’école en Martinique

— Par A3C —

ecole_pub_grat_laik_oblig-1Au moment où s’opère la rentrée des classes, et où les parents s’arrachent les cheveux devant les listes sans fin de matériel demandé aux élèves, où même du papier d’imprimante par paquets de 500 feuilles est réclamé par les professeurs des écoles y compris dans les toutes petites classes, il faut bien rappeler à tous et à toutes le principe républicain de gratuité de l’école :

Le principe de gratuité de l’enseignement public, posé dès 1881 pour le premier degré a été érigé en principe constitutionnel par le préambule de la Constitution de 1946. Il exige que les activités d’enseignement qui se déroulent dans les établissements scolaires publics ne soient pas à la charge des parents d’élèves. Il s’agit d’un principe absolu, qui concerne, pendant toute la durée de la scolarité, l’ensemble de la prestation d’enseignement, c’est-à-dire, l’enseignement proprement dit, les activités obligatoires liées à cet enseignement et la fourniture du matériel collectif nécessaire à cet enseignement.
Code de l’éducation (articles L. 132-1 et L. 132-2)

http://eduscol.education.fr/cid48578/principe-de-gratuite.html

Le corollaire de cette gratuité suppose qu’aucune activité obligatoire ne peut être payante.

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L’Îlet aux sorcières, des contes pour petits et grands

– par Janine Bailly –

luneQu’elle fut belle, cette dernière après-midi de vacances, quand avant de reprendre, un peu nostalgique, le chemin de l’école, on a pu rêver encore et voguer dans l’imaginaire sous la houlette de Jean l’Océan ! Comme un sursis accordé, comme un dernier voyage immobile au pays des arbres et des sorcières, qui hantent les nuits noires et les forêts profondes.

C’est à la mairie de Sainte-Luce qu’en ce mercredi nous étions conviés au spectacle de la Compagnie Car’Avan, dans le cadre des animations rendues possibles par les subventions de la Direction des Affaires Culturelles (représentée ce jour par Madame Anny Désiré). Les plus petits, assis par terre au devant de la salle, les plus grands sagement disposés sur les chaises, ont fait un public attentif aux contes originaux fleurant bon l’enfance, dans ses joies, ses bonheurs et ses peines, dans ses peurs ancestrales aussi. Et si quelques bambins, trop jeunes peut-être pour une écoute tranquille, ont quelque peu déstabilisé le début de la représentation, la douce autorité, le savoir-dire et le charisme du conteur ont su faire jouer la magie de l’instant.

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Crépuscule du tourment, de Léonora Miano.

leonora_miano_crepusculeCrépuscule du tourment, de Léonora Miano. Grasset, 286 pages, 19 euros.

De nos jours, quelque part en Afrique subsaharienne, au Cameroun peut-être, quatre femmes s’adressent successivement au même homme : sa mère, la femme à laquelle il a tourné le dos parce qu’il l’aimait trop et mal, celle qui partage sa vie parce qu’il n’en est pas épris, sa sœur enfin.
À celui qui ne les entend pas, toutes dévoilent leur vie intime, relatant parfois les mêmes épisodes d’un point de vue différent. Chacune fait entendre un phrasé particulier, une culture et une sensibilité propres. Elles ont en commun, néanmoins, une blessure secrète : une ascendance inavouable, un tourment identitaire reçu en héritage, une difficulté à habiter leur féminité… Les épiphanies de la sexualité côtoient, dans leurs récits, des propos sur la grande histoire qui, sans cesse, se glisse dans la petite.
D’une magnifique sensualité, ce roman choral, porté par une langue sculptée en orfèvre, restitue un monde d’autant plus mystérieux qu’il nous est étranger… et d’autant plus familier qu’il est universel.

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La presse en parle :
Le Monde
« Crépuscule du tourment » de Léonora Miano, une œuvre féministe et postcoloniale
Par Françoise Alexander (Contributrice Le Monde Afrique)
S’efforcer d’affronter la réalité en face, dans toute son épaisseur, dans ses moindres recoins, fussent-ils peu engageants, quand bien même nous dévoileraient-ils la part sombre de nous-mêmes.

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