Un référendum sur l’indépendance de la Martinique ? Chiche !

Par Yves-Léopold Monthieux —

Raphaël Confiant souhaite que soit organisé un referendum sur l’indépendance de la Martinique. Le sujet est aujourd’hui opportun où dans une incontestable léthargie populaire, se développe un activisme aux couleurs de la violence, celles du drapeau rouge-vert-noir, en pleine promotion. Quoi de plus normal pour un indépendantiste, serait-on tenté de se dire ? A moins qu’il ne s’agisse d’une pure provocation intellectuelle de la part du polémiste qui nous habitués à cette forme d’agilité de l’esprit. Votre serviteur avait écrit qu’en défendant l’article 74 en 1970, Alfred Marie-Jeanne se dirigeait vers la perte de la consultation électorale et de l’élection de la région qui allait se tenir 3 mois plus tard. Ce qui fut fait, ouvrit la porte à Serge Letchimy, et fit sortir l’écrivain de ses gonds. Ayant retrouvé son calme, mais toujours adepte des challenges hasardeux, Confiant fait monter de plusieurs crans la barre de l’échec.

Mais prenons-le au mot. Rejoignons-le et sortons de l’hypocrisie. Ecartons les demi-mesures institutionnelles et sortons de la situation d’entre-deux où ceux qui ne cessent de vouer aux gémonies d’autres qui prononcent le mot « métropole », en prennent eux-mêmes promptement l’usage, dès l’instant qu’ils sentent monter le fumet des « fonds d’Etat ».

Cessons de tergiverser pendant 20 ans pour savoir s’il faut d’un 73 ou d’un 74, d’une petite ou d’une grande dose d’autonomie, d’un peu ou d’un peu beaucoup de responsabilités, d’une autonomie supposée étape, étant ainsi assurés que par l’un ou l’autre de ces 2 articles de la constitution :

(1) la recherche du juste milieu sera toujours sujet à controverses, donc aux vaticinations dont nous sommes friands,

(2) nous resterons toujours sous le parapluie de la continuité territoriale de Dame Fortune, La France,

(3) nous garderons intact le bouc émissaire, Léta fwansé, pour justifier nos inconséquences diverses et variées. Ô combien !

(4) le fonds de commerce de l’esclavage et le discours de la réparation pourra continuer à prospérer jusqu’à plus soif.

Dès lors que l’autonomie martiniquaise se définit par rapport à des considérations nationalistes, de drapeau national et de rupture, et non pas à des ambitions de bonne gestion et de prise en main de ses problèmes, elle se révèle, en fait, comme un système hypocrite d’appartenance à la France. Paraître être dehors en se bombant le torse tout en restant dedans en tendant la sébile. Un statut d’appartenance comme un autre auquel on tient comme à la prunelle des yeux, qui ne changera en rien la situation actuelle et, pour ceux qui pensent que la Martinique est encore une colonie, en rien cette forme de colonie.

Cessons de proclamer des projets politiques fumeux et qui, dans la perspective angoissante de leur échec, s’en vont faire des moulinets en Fwans, dans l’espoir que cet échec annoncé, vu de l’électeur martiniquais, portera la responsabilité de l’Etat fwansé.

« Il arrive un moment dans l’histoire d’un peuple où il doit savoir se montrer adulte », dit fort justement Raphaël Confiant. Ceux qui depuis nan ni nan nan appellent les Martiniquais à faire peuple, comme s’ils avaient peine à le croire eux-mêmes, pourrait par ce geste adulte démontrer la pertinence de cette notion de peuple martiniquais.

 

Fort-de-France, le 19 novembre 2019

Yves-Léopold Monthieux