Théâtre-cinéma. Le théâtre sous l’œil inquisiteur de la caméra

— Par Marie-José Sirach —

Festen, un spectacle où les acteurs jouent en direct en même temps que leur image est retransmise sur un écran géant. Simon Gosselin

Cyril Teste met en scène Festen, d’après le film emblématique de la nouvelle vague danoise de Thomas Vinterberg. Du théâtre-cinéma, du théâtre filmé enthousiasmant.

Il y a bientôt vingt ans, Festen, écrit et réalisé par un cinéaste danois peu connu, venait bousculer les règles de la cinématographie et remportait le prix du jury au Festival de Cannes. Avec, entre autres, Lars von Trier, Thomas Vinterberg est à l’origine du mouvement Dogme 95 dont les préceptes conjuguent sobriété, aridité et improvisations. Vingt ans plus tard, Cyril Teste met en scène au théâtre Festen dans un dispositif où le plateau de théâtre est aussi un plateau de cinéma ; où les acteurs jouent en direct en même temps que leur image est retransmise sur un écran géant ; où la caméra explore le temps, le champ et le hors-champ, induisant un effet vertigineux pour le spectateur, qui passe d’un registre à l’autre sans temps mort. Il y a de la prouesse, de la virtuosité dans cette maîtrise d’exception d’une partition sans cesse mise en abîme, dans les déplacements d’acteurs filmés au plus près, dans ces plans-séquences époustouflants, dans ces décors qui se déploient sous nos yeux. La dynamique technique ainsi à l’œuvre permet de distinguer les points de vue des personnages, de vibrer au fil de leurs émotions, d’observer les échanges à voix feutrées dans les autres pièces de cette maison bourgeoise, invisibles au premier plan mais visibles par le filmage qui renferme de lourds secrets de famille.
Cyril Teste croise les arts pour transcender l’art théâtral

D’aucuns pourraient objecter que nul besoin de caméra pour avoir l’intuition du malaise palpable entre chaque réplique dans ce huis clos étouffant. Mais Cyril Teste ne s’en contente pas, bien décidé à croiser les arts pour transcender l’art théâtral. Dans Nobody, de Falk Richter, qui racontait l’aliénation moderne au travail, Cyril Teste déjouait de la même manière les codes théâtraux à l’œuvre. Festen participe de cette même démarche artistique et signe une nouvelle réussite…

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