Avignon 2022 : Portrait de Raoul « Qu’est-ce qu’on entend derrière une porte ouverte? »

De Philippe Minyana, m.e.s.. Marcial Di Fonzo Bo, avec Raoul Fernandez

— Par Michèle Bigot —

Raoul est devant nous, seul en scène et presque nu sous nos yeux, en dépit des habits, costumes et étoffes bigarrées dont il se plaît à se couvrir. Elegant, souple, quasi félin, il danse, il chante, il vocalise: « parler » n’est pas le terme qui convient pour qualifier le son musical de ses paroles. Est-ce un homme, une femme? Un trans? Tout cela ensemble ou tour à tour. Mais sa présence charme, non moins que son chant. Raoul vient du Salvador. C’est une reine, une diva, une tragédienne, en perruque, en robe et en chansons. Sa mère, Mama Betty lui a enseigné la couture, lui a communiqué le goût du chant et du costume. Raoul rêve de Paris. Il débarque un jour dans la capitale de la couture. Costumière de théâtre, il rencontre Copi. Habilleuse à l’Opéra, il rencontre Noureev. Mais voici que Stanislas Nordey le fait passer des coulisses à la scène. Il faut dire qu’il a pratiqué le français en apprenant tout Molière par coeur. On l’entend déclamer Le Misanthrope, avec quelle verve! Sa gestuelle, son élocution, son ryhme, ses intonations, tout est convaincant. Raoul est taillé pour être une vraie tragédienne et le rôle de Phèdre lui va aussi bien que celui du travesti bouffon. En bref, c’est un véritable acteur, incarnant la magie du théâtre. Il lui suffit de dérouler quelques étoffes colorées, d’endosser le costume et la perruque et voici que la magie du théâtre opère sous nos yeux. Son chant est poignant, sa parole envoûtante, son geste théâtral sans jamais être vulgaire. Jouer et chanter est sa seconde nature, ou plutôt sa vraie nature.

En bref, un spectacle abouti, soigné et parfaitement réussi, un petit bijou de spectacle, un hymne à la scène, de quoi ouvrir avec bonheur un fesrival de théâtre.

Michèle Bigot