Martinique post-électorale : Le retour de la politique ?

— Communiqué de «Révolution Socialiste» le journal du GRS —

Bien que les trois quarts du corps électoral aient ignoré les urnes, battant à nouveau les records d’abstention, les gislatives en Martinique amènent une nouvelle donne politique.

Depuis une date que peu de gens situent avec précision, la vie politique dans notre pays est stérilisée par une guerre de religions insipide entre P.P.M. et M.I.M., ou si on préfère entre Marie-Jeannistes et Letchimystes : disparition de tout débat politique hors des questions de gestion, alignement de toutes les composantes de chaque camp sur la position de chaque chef, examen de toutes les questions taraudant la vie quotidienne, non pas sous l’éclairage des idées mais à travers le prisme de la concordance avec la position du clan, et les intérêts de boutiques électorales.

Cette situation était le fruit de la combinaison de deux choses : un système électoral non démocratique (absence de proportionnelle intégrale) et de l’opportunisme évident d’une bonne partie du personnel politique. Le clou de cette situation a été l’alliance scabreuse des « patriotes » de plusieurs obédiences avec la droite la plus colonialiste au nom de « la nécessité d’évincer Letchimy et le P.P.M.

La défaite du « Gran sanblé » et de son chef Alfred Marie-Jeanne, inventeur de ce fameux « coup de génie » (!) met fin à cette période.

Bien des idées ou des pratiques de ces années illogiques ont du plomb dans l’aile. L’idée que le combat politique en France, que le clivage droitegauche, que tout cela n’a aucun sens aux colonies, s’est heurtée au réel : les un-e-s et les autres ont du se positionner sur les clivages traditionnels, les re-découvrir donc, et dans un ensemble touchant voilà tous nos élus qui déclarent, comme d’ailleurs leurs opposants vaincus, qu’ils siégeront à la NUPES ou au moins « à gauche » de l’assemblée.

La fin de la guerre de religions déjà citée devrait normalement aboutir à un retour du débat sur les grandes questions, même sil serait naïf de croire que les ambitions de carrière disparaîtront totalement derrière le débat d’idées.

Il est probable que le rapport des « élus de gauche » avec le mouvement social se fera plus fluide. La phraséologie si courante dans certains milieux « patriotiques » non présents dans les institutions, contre « les élu-e-s toutes tendances confondues » (sic) sera peut-être mise en sourdine.

Le mouvement prolétarien a tout à gagner au travers de ces différentes évolutions. Mais il est certain qu’une tâche ancienne se trouve aujourd’hui renouvelée pour les classes laborieuses : la tâche de « faire de la politique », de dépasser l’étroitesse qui consiste à ne faire que du syndical, du féministe, de l’associatif, au lieu de construire une politique indépendante axée sur ses propres intérêts, qu’ils soient syndicaux et féministes et associatifs, à court, moyen et long terme.

Cette conviction que nous n’avons de cesse de défendre, ne vient pas d’un a priori doctrinaire et dogmatique, mais d’un constat tiré de toute notre histoire.

Seul le mouvement ouvrier est capable de défendre jusqu’au bout non seulement ses propres intérêts, mais ceux de toutes les classes exploitées et de la société dans son ensemble, à condition que ce mouvement ouvrier prenne en charge l’ensemble des urgences d’aujourd’hui : urgence sociale, urgence décoloniale, urgence écologique, urgence féministe, urgence démocratique, urgence internationaliste.

Il est clair que les résultats obtenus au premier tour de ces élections par RÈSPÉ (1% dans la circonscription du Nord) ou par Combat ouvrier, montrent le chemin considérable qui reste à accomplir dans cette direction, même si nous devons prendre en compte l’insuffisance évidente du baromètre électoral.

 Redoubler d’effort dans la lucidité, l’initiative et l’ouverture, prendre sérieusement en compte les possibilités d’accélération de l’Histoire, tel est le mot d’ordre qui découle de toute la situation.

La France en instabilité politique amplifiée

Les élections législatives soulignent la crise du pouvoir en place. Avec 246 députés, Macron est loin d’obtenir la majorité absolue. Le système électoral bien agencé des présidentielles avait fait élire un président minoritaire. Les défaites de plusieurs figures de la Macronie (Ferrand, Castaner, Blanquer, Bénin, Bourguignon, Maracineanu, Montchalin, etc), témoignent du rejet qu’inspirent Macron et les siens.

L’actuelle Assemblée nationale illustre l’amplification de l’instabilité politique. Or, pour poursuivre la politique de ses premiers cinq ans et sa rage anti-NUPES, c’est à n’en pas douter sur sa droite que Macron va chercher des appuis avec la complicité des élu-e-s L.R., en durcissant encore plus sa politique.

La crise démocratique se renforce : très forte abstention, modes de scrutin déformant les votes, aucune forme de proportionnelle, campagnes électorales que le pouvoir rend inaudibles. Le réflexe de retrait est particulièrement marqué dans la jeunesse et dans les classes populaires, qui se sentent peu concernées.

Avec 89 députés, le Rassemblement national de Marine Le Pen élargit son implantation régionale en France. Les capacités de nuisance de l’extrême-droite sont considérablement amplifiées. La menace fasciste et raciste est bien là. Macron porte une lourde part de responsabilité, par sa politique dans ce dangereux phénomène.

Les scores de la NUPES marquent une dynamique positive à gauche. Ceci confirme le rejet « à gauche » de Macron, le refus des politiques néolibérales, l’aspiration à plus de justice sociale, d’écologie et de démocratie, voire d’un espoir dans un monde meilleur. Malgré les critiques, son soutien très critique et son implication auprès d’une partie des candidat-e-s, le N.P.A. en France se félicite que des millions de personnes ont exprimé leur colère contre Macron en votant la rupture avec le social-libéralisme.

Pour les combats de demain, nos camarades du N.P.A. veulent s’appuyer sur les dynamiques militantes d’une partie des candidatEs de la NUPES, avec lesquels ils ont travaillé lors des législatives. Ils disent, en exigeant une politique différente de celles de la bourgeoisie :

  1. Tout d’abord, pérenniser les collectifs prêts à mener les bagarres à venir face au néolibéralisme autoritaire.

  2. Défendre unitairement les retraites !

  3. Défendre la relance des services publics !

  4. Face au danger dextrêmedroite, urgence à construire des outils de résistance et d’organisation du camp social des classes populaires !

  5. Défendre les intérêts de la grande majorité de la population et la perspective dune autre société, libérée du capital et de ses désastres sociaux et écologiques !

  6. Construire ces prochains mois, cette gauche politique et sociale de combat !