Loi immigration : Bruit et fureur, mais rien de régler pour le futur !

— Par Jean-Marie Nol économiste —

Après l’adoption à une très large majorité de la loi immigration, le président Emmanuel Macron a déclaré que la France a « un problème d’immigration » mais n’est pas « dépassée ». A notre sens, il a grandement tort sur ce point ,   car le ver est déjà dans le fruit. Et puis le temps ne joue pas en faveur d’un apaisement sur la question migratoire. Bien au contraire, c’est cette problématique de l’immigration qui risque de conduire à  l’enchaînement de l’instauration d’un régime autoritaire en France.

Le professeur Stephen Smith  spécialiste des études africaines, auteur de « La Ruée vers l’Europe » pense que « L’immigration sera le sujet brûlant de la prochaine décennie ». Sa principale thèse avance que le développement économique de l’Afrique alimente les migrations massives vers l’Europe et en d’autres termes  l’idée est que la jeune Afrique y compris le Maghreb  va submerger le Vieux Continent parce qu’elle serait soumise à un « rouleau compresseur démographique » alimenté par le développement économique et la fécondité très élevée au sud du Sahara et ailleurs sur l’ensemble du continent. Stephen Smith rappelle que : « Toutes les régions du monde ont migré. En Europe il y avait 300 millions d’habitants et 60 millions en sont partis, dont 40 millions vers les Etats-Unis notamment après les grandes famines qui ont sévi en Europe et particulièrement en Irlande. L’Afrique ne fait que reproduire des scenarii qui ont eu lieu en Europe et en Amérique latine. Et il est évident que l’Europe va faire face à une migration très forte depuis l’Afrique, c’est inévitable ». L’effet de cette immigration sur nos sociétés, qu’on y voie un risque majeur de déstabilisation ou une opportunité pour les naïfs, est déjà notable. Démographie, économie, sociologie, mode de vie, toutes les sphères de la vie en commun se trouvent concernées au premier chef par un phénomène aux facteurs complexes, économiques et politiques. Paradoxe, alors que les acteurs et commentateurs politiques devraient porter sur lui un regard froid, c’est sans doute le sujet contemporain traité de la façon la plus approximative et la plus hérissée d’affects. C’est regrettable, car pour espérer y répondre sérieusement, et poser dès à présent des gardes fous, il faut d’abord en connaître les ressorts et se livrer à une analyse prospective sur ce sujet brûlant et qui peut même devenir incandescent dès la fin de cette décennie. Nous pensons sans risque de nous tromper que malheureusement le danger est en effet énorme et que les conflits d’ordre sociétaux actuels ne s’arrêteront pas voire s’amplifieront avec les mutations  technologiques et sociologiques de la société. Le dérèglement climatique n’arrangera rien à l’affaire de la situation de tension géopolitique actuelle.  Pire il exacerbera les inimitiés entre nations et les milliers voire millions de réfugiés climatiques causeront nombre de désordres et de nuisances. Tout cela déclenchera une vague de  xénophobie et le rejet de l’autre…  Face à la chienlit prévisible, nul doute que l’on assistera à un raidissement du pouvoir politique pour reprendre le contrôle de la situation par le biais de la violence légitime…. Et là réside le danger de l’autoritarisme. 

Depuis ces temps derniers, plusieurs éléments de langage distillés dans les médias atteste de la véracité de mon hypothèse de travail du surgissement probable en France d’un régime autoritaire. Alors, faudrait -il s’inquiéter d’un recul des libertés en France et qui pourrait incarner cette nouvelle forme d’autoritarisme ? 

Environ 2,6 milliards de personnes, soit plus d’un tiers de la population mondiale, vivent dans un régime autoritaire dont la grande majorité habitent en Chine et en Russie. Il convient au préalable de saisir ce qu’on entend si communément par autoritarisme. Selon l’essayiste Juan Linz, cinq conditions sont nécessaires à l’éclosion d’un régime politique autoritaire : la dépolitisation des populations, l’absence d’un droit de vote non pris en compte, des pouvoirs non contrôlés, concentrés entre les mains de peu de personnes et la restriction des libertés individuelles. La France retient à bien des égards aujourd’hui bon nombre de ces critères. L’idée que nos systèmes, inventés au XVIIIe siècle, pourraient résister sans changement drastique à cette crise politique et économique n’est pas crédible, compte tenu de l’ampleur des mutations auxquelles la politique doit aujourd’hui faire face. Selon certains sociologues et politistes, la France offre des « signes inquiétants » d’une tentation autoritaire, et c’est le pays occidental le moins bien immunisé contre une telle dérive. Alors que, dans de nombreux pays occidentaux, les opinions adhèrent de moins en moins aux valeurs de la démocratie et que les régimes illibéraux se multiplient, la France est-elle également en situation de céder à la tentation autoritaire ? 

Les Français ne croient-ils plus à la démocratie ? C’est la question qu’on peut se poser à la lecture des réactions suite à l’adoption de la loi immigration et d’un sondage Ifop, sur le regard des Français sur l’exercice du pouvoir, commandé par un média. Un résultat inquiétant ressort en particulier. Face à la défaillance du pouvoir politique, près de 41% des Français sont favorables à l’établissement d’un « pouvoir autoritaire » capable « d’éviter le déclin » et de « réformer en profondeur la politique  migratoire de la France « . Quand bien même cela signifierait moins de contrôle démocratique… Un comble dans la patrie de Montesquieu, qui a théorisé la séparation des pouvoirs. Aujourd’hui, le scénario d’un régime autoritaire  le plus probable en France s’avère être le suivant : Il ne s’agirait pas de dictature, mais d’un système où, à la différence de la post-démocratie, la façade serait remaniée : les élections existent mais la compétition électorale est restreinte ; les libertés (d’expression, d’association, d’aller et venir, de la presse…) sont amoindries par des lois liberticides ; la justice est moins indépendante… C’est la pente qu’ont pris en Europe, les Hongrois, les Polonais, les Turcs, l’Italie et dernièrement encore les pays – bas et qu’on retrouve ailleurs, en Equateur, au Venezuela et en Argentine par exemple. En Asie du Sud-Est, plusieurs régimes démocratiques sont allés ou vont, par une libéralisation très contrôlée, vers un tel modèle : je pense à Singapour et au Philippines, deux pays où les droits y sont restreints. En Europe de l’Ouest et en Amérique du Nord, c’est la France qui offre le plus de signes indiquant que ce scénario est possible. C’est un système dans lequel, en apparence, rien ne change : des élections libres continuent d’être organisées, la justice est indépendante, les droits individuels sont respectés. La façade est la même, mais la souveraineté réelle est ailleurs. Les décisions sont prises par les directions de grandes firmes, les acteurs des marchés, les agences de notation, ou par des organes technocratiques dépendants  du gouvernement… 

Au vu de l’évolution des mœurs de notre société, cela n’est pas totalement surprenant. Depuis une dizaine d’années, les pays occidentaux font face à de profonds changements sociopolitiques et au développement de mouvements et de discours rejetant les systèmes politiques en place et la classe politique traditionnelle. Ces dynamiques, autrefois seulement perceptibles dans les enquêtes d’opinion, se sont matérialisées par des succès politiques et électoraux toujours sur la base de références sous-jacentes à l’immigration, comme le référendum du Brexit (2016), le mouvement Tea Party et l’élection de Trump (2016), l’arrivée au pouvoir de coalitions radicales en Europe : en Pologne (2015), en Serbie (2017) et en Hongrie (2010), en Italie (2022), au Pays-Bas (2023) 

Au-delà de ces exemples très médiatiques, une triple vague de fond plus silencieuse est à l’œuvre dans tous les pays occidentaux : une diminution nette de l’adhésion des opinions occidentales aux valeurs de la démocratie identifiée par les politologues, une « autocratisation » effective des régimes occidentaux et une forte demande d’ordre, de fermeté, et d’autorité mise en lumière par les différentes crises migratoires en Méditerranée par plusieurs instituts d’études.

En Europe, nous sommes déjà engagés dans cette direction. Déjà les autorités compétentes en France ne souhaitent pas que l’intelligence artificielle soit trop contrôlée en dépit des mises en garde de la commission européenne. La technologie de surveillance numérique, telle que la reconnaissance faciale ou le détecteur à émotion, progresse dans les régimes autoritaires mais aussi dans les démocraties en Europe et en Amérique du Nord, au point que l’on bascule vers des sociétés d’ultra-surveillance. Dans les démocraties, ces technologies peuvent être utilisées à des fins légitimes par des forces policières ou par le pouvoir politique. Et même si elles sont par ailleurs souvent encadrées par des limites juridiques, (dans ce cas nos données seront anonymisées et leur usage reposera sur le principe du consentement ), mais rien ne dit que ce dispositif ne perdurera pas dans le temps. Aussi bien, ces technologies peuvent être utilisées à d’autres fins, telles qu’une surveillance généralisée du citoyen, comme le pratique actuellement la Chine avec son système de crédit social, voire dans un but amoral, comme outil de répression politique et de violation des droits humains. Ne va-t-on pas vers des sociétés liberticides ? 

Une chose est sûre c’est que l’adoption de la loi immigration ne réglera aucun des problèmes de fond posée par la crise migratoire notamment la problématique actuelle de l’insécurité, mais pourrait être la braise qui couve sous le feu d’un incendie incontrôlable. En effet, dans le corpus de la loi des digues semblent avoir été construites contre certaines catégories de migrants en situation régulière et irrégulière, mais le principal problème subsiste en l’état car il provient de certains étrangers radicalisés déjà présents sur le territoire français et surtout par le comportement  de certains jeunes français d’origine étrangère des générations suivantes. Et là le gouvernement est confronté à une situation explosive de nature quasiment impossible à régler sans ordre et autorité. La question des banlieues va s’avérer être la quadrature du cercle. En ce domaine le pire n’est  pas derrière nous, mais devant nous.

Et cela n’engage naturellement que moi. Quoiqu’il en soit de ces sombres prévisions d’avenir, il devrait y avoir immanquablement des dommages collatéraux et c’est pourquoi j’appelle nos compatriotes hexagonaux et Antillais vivant en France hexagonale, certains dans un petit cocon soyeux mais o combien trompeur, à la plus grande vigilance…Après tout, dorénavant, il faudra se le tenir pour dit, les mauvais augures venant de la France hexagonale seront peut être de funestes présage pour la Guadeloupe et la Martinique». C’est dit !

 » Pousyè paka lévé san van. »

Il n’y a pas de fumée sans feu.

Jean-Marie Nol économiste