« L’obèse n’est pas embauchable parce qu’il est jugé fainéant »

— Par Fabiola Dor …
Le monde du travail est impitoyable avec les personnes en surpoids. Du recrutement à la négociation salariale, les salariés victimes de grossophobie nous racontent leurs discriminations.
Dans l’imaginaire collectif, les beaux réussissent mieux que les autres.

“Avant d’arriver sur le marché du travail, je subissais déjà une grossophobie quotidienne mais j’ai vite appris à passer outre les commentaires des cons. En revanche, quand j’ai commencé à chercher un emploi, j’ai très mal vécu qu’on doute de mes compétences à cause de mon poids”, confie Gabrielle Deydier, auteure de On ne naît pas grosse, un livre basé sur ses expériences personnelles.

Caraïbe. Les femmes de plus en plus obèses 

Dans cet ouvrage publié en 2017, l’auteure espère briser les tabous sur la grossophobie. Elle partage des anecdotes humiliantes avec les professionnels de santé, les enseignants ou encore les recruteurs. “À la fin d’un entretien, un employeur m’a dit que mon QI n’est pas proportionnel à mon IMC, rapporte-t-elle. Autre exemple : lors d’un entretien, le recruteur m’a demandé d’aller chercher le candidat. À ma grande surprise, quand j’ai annoncé que c’était moi, au lieu de me serrer la main comme il l’a fait les autres candidats, il m’a tapé sur l’épaule”, dans un geste de condescendance, se souvient l’auteure. Après des études de cinéma à Sciences Po, décrocher un stage devient le parcours du combattant pour Gabrielle Deydier. “J’ai envoyé plus de 400 CV quand mes camarades en ont envoyé une dizaine”.

D’après une étude sur la perception des discriminations dans l’emploi publié par le Défenseur du droit et l’organisation internationale du travail publiée (OIT), en 2016 : une femme obèse à huit fois moins de chance d’être embauchée qu’une femme qui ne l’est pas. Trois fois moins pour un homme en surpoids.

Les beaux réussissent-ils mieux ?

Dans les éditions plus récentes de l’étude de l’OIT, ce critère n’est plus pris en compte. Pour Delphine Tharaud, juriste et experte dans les discriminations, “le manque de données en dit long sur le tabou. La grossophie en milieu pro existe, mais personne n’en parle. C’est d’ailleurs très difficile d’obtenir gain de cause pour les victimes”, constate-t-elle. Une chose est sûre : “Les femmes sont beaucoup plus discriminées que les hommes et elles subissent en plus des commentaires sexistes”.

Pourquoi est-il si difficile de décrocher un boulot quand on s’habille dans les rayons grandes tailles ? Les stéréotypes ont la peau dure. Dans l’imaginaire collectif, “les personnes obèses ont une personnalité faible”, explique Jean-François Amadieu, sociologue et auteur de la Société du Paraître. Dans ce livre publié en 2016, il s’intéresse aux poids de l’apparence physique dans la société et notamment au travail…

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