« Les Trois Mois Solidaires »

trois_mois_solidairesDossier présenté par l’Association « Tous Créoles ! »

La Martinique traverse une longue crise qui plonge sa population dans un état de « désenchantement » inquiétant. Cette crise est de plusieurs ordres :

  • Économique d’abord, avec un affaissement du PIB martiniquais qui se traduit par une baisse continue de compétitivité des entreprises et un niveau record de chômage : 22% de la population martiniquaise est sans emploi, près de 60% des jeunes de moins de 25 ans n’ont pas de travail.

  • Sociale aussi, avec un appauvrissement de toutes les structures qui permettaient jusque-là de fédérer les populations : jamais le monde associatif martiniquais n’a été aussi inoccupé et impuissant. Les clubs sportifs sont en panne, les associations culturelles sont à l’arrêt, les mobilisations bénévoles d’intérêt général sont de plus en plus rares.

  • Sociétale enfin, avec un regard fantasmé sur nous-mêmes, où nos différences deviennent aujourd’hui facteurs de clivage : voir d’abord ce qui nous différencie de l’autre pour mieux en faire un coupable, responsable de nos propres malheurs. Ils sont loin aujourd’hui, ces espaces de vie commune qui permettaient simplement de mieux se connaître pour mieux s’apprécier : il n’y a plus d’internat, ni de kermesse communale, ni de service militaire…

Les conséquences de cette crise sont visibles à l’œil nu, au détour de chaque quartier, à l’ombre de chaque abribus, ou encore dans les tristes rubriques de l’actualité locale : pauvreté, alcoolisme, drogue, violence… les maux de la société martiniquaise enflent chaque jour un peu plus.

Individualisme, fractionnement social, communautarisme, perte des valeurs communes, absence de repères, disparition du sens civique… le diagnostic est sans appel ! Il exige un traitement radical :

La mise en place du dispositif « Les Trois Mois Solidaires » ou TMS

L’objectif des « Trois Mois Solidaires » ou TMS est de donner à toute une classe d’âge de jeunes martiniquais l’opportunité de vivre ensemble et de partager des expériences communes au service de l’intérêt général, ceci pendant une période obligatoire de trois mois.

Une classe d’âge regroupe toutes celles et tous ceux qui sont nés dans la même année. Il ne faut pas confondre cette définition avec la tranche d’âge dans laquelle les TMS seraient effectués. À titre d’exemple, tous ceux qui sont nés en Martinique en 1995 (la classe d’âge 1995) et qui y résident, représentent un effectif annuel d’environ 5.600 individus, soit environ 1.400 individus par session trimestrielle.

L’objectif des TMS est d’amener tous les jeunes martiniquais de moins de 25 ans (hors dérogations particulières ou inaptitudes indiscutables) à faire l’expérience du vivre-ensemble, de la citoyenneté et de l’intérêt général.

Description sommaire des Trois Mois Solidaires ou TMS

Les Trois Mois Solidaires (TMS) ont pour ambition d’offrir aux jeunes l’opportunité de se former, de s’engager, de donner de leur temps à la collectivité et aux autres entre l’âge de 18 ans et l’âge de 25 ans.

Les TMS représenteraient la possibilité de vivre une expérience formatrice et valorisante en proposant un choix parmi une demi-douzaine de formations-socle (les « briques d’apprentissage ») et de nombreuses missions, dans des domaines très divers au sein des associations et organismes locaux.

Les TMS seraient un engagement obligatoire de trois mois continus au service de l’intérêt général. Pendant cette période, les jeunes ne seraient pas indemnisés, mais ils seraient nourris, logés (internat), vêtus, formés et encadrés. Ils disposeraient d’un uniforme permettant de gommer les éventuelles distinctions sociales. Bien entendu, les jeunes bénéficiaires du RSA, ou titulaires d’une bourse de l’enseignement supérieur, conserveraient tous leurs avantages pendant la durée des TMS.

Ces trois mois se dérouleraient sous le régime d’un internat encadré par des règles d’inspiration militaire : règlement et code de vie stricts, respect des horaires et des rituels communs, etc.

Le premier mois serait consacré à l’acquisition de compétences techniques et sociales. Les deux mois suivants seraient dédiés à l’engagement concret dans des missions d’intérêt général ; ils pourraient être effectués auprès d’associations, de collectivités territoriales ou d’établissements publics (musées, collèges, lycées…). Au terme de ces trois mois, le « Jeune Solidaire» obtiendrait un diplôme gradué de 1 à 3 selon son niveau d’excellence, qu’il pourrait revendiquer dans son CV.

Les principes généraux de ce dispositif en seraient l’obligation et l’internat permettant d’atteindre l’objectif de brassage des populations ; ils seraient assortis d’exceptions à définir : inaptitudes, enfants à charges, risque de perdre son emploi, par ex.

Mois 1 : créer un groupe cohérent et soudé + acquérir des compétences

La vie en internat serait organisée autour de 3 temps : pratiques sportives, apprentissages, tâches communes (entretien des locaux, des jardins, etc.)

Les apprentissages concerneraient essentiellement des apports pratiques qui peuvent « faire tremplin » ; ainsi par exemple, le jeune aurait le choix entre plusieurs « briques d’apprentissage » avec obligation d’en prendre 2 au minimum : la conduite automobile, les gestes de premiers secours, les bases de l’Internet, les bases de l’anglais, les bases de l’enseignement civique et moral, etc.

Journée type mois 1 :

  • 6h : Réveil

  • 7h : Réfectoire

  • 8h-10h : Sport

  • 10h-12h30 : Apprentissage

  • 12h30-13h30 : Réfectoire

  • 14h-16h : Apprentissage

  • 16h-18h : Atelier réflexion/conférences-débat

  • 18h-19h : Détente

  • 19h : Réfectoire + jeux de société

  • 21h30 : Coucher

L’acquisition des compétences se ferait par le biais d’encadrants professionnels, aidés chaque fois que cela sera possible, par des « Jeunes Solidaires Qualifiés » disposant de la compétence requise, jouant ainsi le rôle de tuteurs.


Mois 2 et 3 : mettre ces compétences au service de la communauté

Pendant les deux derniers mois, les « Jeunes Solidaires » mettraient leurs compétences au service de la communauté martiniquaise à travers les milieux associatifs de l’île (clubs sportifs, associations humanitaires, culturelles, environnementales…), les collectivités territoriales ou certains établissements publics.

Ils deviendraient une ressource offerte à ces organisations pour leur permettre de réaliser leurs projets : nettoyages des sites remarquables, encadrements des courses sur route, nettoyage des fonds marins, enlèvement des algues sargasses, fleurissement des villes, collectes alimentaires, aides aux personnes âgés, soutiens scolaires…

Journée type mois 2 et 3 :

  • 6h : Réveil

  • 7h : Réfectoire

  • 8h-12h30 : Sport (ou vie associative)

  • 12h30-13h30 : Réfectoire

  • 14h-18h : Vie associative (ou sport)

  • 19h : Réfectoire + jeux de société

  • 21h30 : Coucher

En résumé, les TMS apporteraient une réponse concrète à chaque jeune martiniquais, en lui offrant une expérience forte de vie partagée et d’engagement citoyen au service de l’intérêt général, tout en redonnant de l’oxygène au monde associatif local. Ils permettraient d’abattre les cloisons entre communautés, de redonner de la fierté aux « laissés pour compte » et de réveiller l’esprit de solidarité, de partage et de fraternité.

Un tel projet nécessite bien évidemment une mobilisation des élus et de l’État, notamment par la voie législative.

Pour la Commission sociétale de l’association « Tous Créoles ! » :

  • Éric DÉDÉ, directeur informatique, chef du projet TMS

  • Édouard ANCET, principal de collège honoraire

  • Livie PIERRE-CHARLES, inspectrice hon. de l’Éducation nationale
  • Emmanuel de REYNAL, chef d’entreprise

  • Alex SCHOLASTIQUE, ingénieur logistique

Martinique, septembre 2015