« Les esclaves ne feront pas la fête dans notre village » : des vidéos montrent la violence du système des castes au Mali

— Par Pariesa Young Suivre —

Un groupe de personnes qui célébraient le jour de l’indépendance du Mali a été brutalement attaqué le 28 septembre dans la région de Kayes, dans l’ouest du pays. Pieds et poings liés, des habitants considérés comme des « esclaves » ont été publiquement humiliés. Ces violences, qui ont fait un mort et plusieurs blessés, soulignent la persistance du système « d’esclavage par ascendance », malgré l’abolition du travail forcé et de la servitude dans le pays.

Plusieurs vidéos amateur ont documenté l’enchaînement des événements, le 28 septembre, dans le village de Souroubiré, dans l’ouest du Mali, où les castes sociales traditionnelles sont toujours la norme. L’esclavage a été interdit au Mali en 1905, mais les descendants d’anciens esclaves sont toujours étiquetés comme tels, les enfants héritant du statut “d’esclave” par leur mère.

Ce 28 septembre, la journée avait pourtant commencé dans la joie, avec une fête commémorant l’indépendance du Mali organisée par les descendants d’esclaves, quelques jours après la date de l’indépendance malienne, le 22 septembre, afin d’éviter d’interférer avec une fête organisée par des « nobles » plusieurs jours auparavant. La célébration avait été organisée par des membres de l’Association contre la domination et l’esclavage (ACDE), une association anti-esclavagiste malienne. Mais elle s’est poursuivie dans la violence, le sang et l’humiliation lorsqu’un groupe de personnes se considérant comme des “nobles” ont attaqué ceux considérées comme “esclaves”.

En raison de la violence des vidéos, la rédaction des Observateurs a choisi de n’en diffuser que des captures d’écran

Les membres de la caste des “esclaves” sont régulièrement privés de leurs droits et humiliés, et pendant les fêtes dans la région de Kayes. Les “nobles” s’attendent par exemple à ce qu’ils abattent les animaux et cuisinent pour eux en vertu de leur statut jugé inférieur. La rédaction des Observateurs de France 24 s’était rendue au Mali en 2019 pour rencontrer des victimes de ce système.

« Les nobles ont commencé à arriver de toutes parts, essayant d’empêcher notre fête »

Seydou (pseudonyme) était présent à la fête dans le village de Souroubiré, quand les “nobles” sont arrivés.

Nous voulions organiser une fête, d’une durée de 12 heures, à partir du 28 septembre. Il y avait beaucoup de gens de l’association contre l’esclavage.

On voyait des patrouilles autour de la célébration, et nous leur avions montré le papier de la municipalité qui nous donnait l’autorisation d’organiser l’événement. Un homme est venu à la fête, a demandé à voir les organisateurs et nous a dit d’arrêter notre musique. Nous l’avons fouillé et avons trouvé un pistolet dans sa poche, que nous avons emmené à la mairie comme preuve qu’on cherchait à venir blesser ou tuer nos membres.

Après cela, les nobles ont commencé à arriver de toutes parts, essayant de nous empêcher de faire notre fête. Ils avaient des bâtons et des machettes. Ils ont dit : “Personne ne bouge” et:  “Les esclaves ne feront pas de fête dans notre village”. Nous avons arrêté notre musique. Ils ont commencé à lancer des pierres en direction de la fête et ont blessé des personnes. Ils avaient des fusils et ont tiré en l’air pour nous faire peur.

 

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