L’Eau à tout prix…

— Par Florent Grabin de l’Asso PUMA —

L’Eau, ce ‘’don du ciel’’, est un élément indispensable à la vie, bizarrement très méconnu par le grand public. Pour certains, elle doit être livrée gratuitement au consommateur, pour d’autres, cette livraison au robinet est trop chère. Ce qu’il faut retenir c’est que la production de l’Eau est un MÉTIER, et nécessite un service qui évidemment se paye.

En Martinique, la ressource en Eau provient principalement des rivières du Grand Nord, puis elle est captée pour être ‘’lavée’’ de tout ce qu’elle aura charrié sur son passage (alluvions, polluants de tous ordres, oligo-éléments, et bien d’autres composants…).

Ce qui est assez curieux, c’est que les périmètres de sécurité des captages ne sont pas, à ce jour, mis en place comme l’exige la loi sur l’eau.

Le prix de l’eau.

Dire que le prix de l’eau est plus élevé en Martinique qu’en France hexagonale, relève de la plus grande farce, d’autant plus que l’on fait comprendre à la population que c’est le Fermier (entreprise chargée de la production d’eau du robinet) qui fixe et module le tarif, ce qui est entièrement faux ; cependant il n’est pas tenu compte de la configuration topographique de notre territoire très vallonné qui impose un pompage électrique pour remplir les réservoirs avant la distribution, contrairement au niveau national qui fonctionne majoritairement par gravité.

Lors des urgences, les coûts d’approche, particulièrement par avion, viennent renchérir toute opération de maintenance. Lancer cette comparaison est incongru et a pour unique objectif de jeter en pâture les fermiers à la vindicte populaire ; pourtant ceux-ci ne font que collecter les fonds pour les collectivités.

Le prix de l’eau est fixé par nos Maires, validé par leurs représentants dans les Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI), ces tarifs sont présentés pour avis aux membres des Commissions Consultatives des Services Publics Locaux (CCSPL). La qualité est contrôlée par les Services de l’État.

Dans le tarif indiqué, nous retrouvons :

1/ les charges de fonctionnement,

2/ les investissements pour le renouvellement du réseau ;

malheureusement à la lecture des éléments comptables qui nous sont remis, on peut constater le très inquiétant train de vie de certains services, ce qui réduit considérablement la modernisation du réseau, qui appartient aux EPCI.

La composition du prix d’1m3 (soit mille litres) est de 63,39 % pour le Fermier, 22,72 % pour les collectivités(EPCI), 9,63 % pour les organismes publics (ODE) et de 2,77 % de taxes (Etat), 1,5 % (CTM) dont l’octroi de mer. Pour tout changement tarifaire lors d’un contrat, il faut un avenant et le contrôle de la légalité, ce qui n’est pas simple.

Tout Fermier reste un prestataire de service et répond à un marché, dans ces conditions nous ne comprenons pas pourquoi de nombreux élus font croire à la population que ces entreprises font remonter leurs bénéfices vers leur siège social à Paris. Ou bien il y a une méconnaissance des règles du marché, ou bien il y a une volonté de tromper la population, afin de parvenir à terme à une assemblée unique de l’Eau ; l’exemple de l’échec de la fusion Département-Région et d’ODYSSI, devrait nous amener à y réfléchir.

L’Eau à tout prix…

En mai 2009, la canalisation d’adduction majeure d’eau potable de 800 mm de diamètre transportant l’eau depuis l’usine de traitement de Vivé vers plus de 60 % de la population, a connu pour la deuxième fois une rupture au Quartier Séguineau au Lorrain. Suite à cet incident, une conduite provisoire a été installée pour six mois par la SME, seule compétente financièrement et techniquement dans ce type de prestation ; malheureusement une fois de plus, nous n’avons pas fait mentir notre réputation : ce ‘’provisoire’’ a aujourd’hui dix ans.

Cette situation est l’une des causes du manque d’Eau dans la distribution, du fait de l’étranglement qui réduit de plus de 50 % le passage de l’eau dans cette zone, sans oublier les très nombreuses fuites et la présence du bio-film à l’interface des tuyaux. Dans ces conditions, il est urgent de programmer la modernisation de tout le réseau de distribution de l’Eau de la Martinique.

Malgré l’énorme préjudice causé à sa propriété, Monsieur Bernard BALLY a donné immédiatement par écrit à la Madame la Présidente du Conseil Général, toutes les autorisations de passage pour faciliter les travaux, ainsi que son accord de la vente de l’emprise pour la servitude de passage. Ces propositions ont été validées par la Présidente.

Nous, PUMA, accompagnés d’un pool d’ingénieurs de différentes disciplines, avons assisté ce propriétaire afin d’obtenir une bonne prestation de réparation. Malheureusement, l’équipe technique de cette collectivité, convaincue d’avoir le monopole du savoir, nous en a tenu rigueur et a dressé des plans contenant de nombreuses faiblesses ; le résultat ne s’est pas fait attendre : les travaux ont été stoppés.

Nous devons nous interroger sur ce fait récurent : dans de très nombreuses collectivités, certains de nos cadres, très grassement payés, ne parviennent pas à mobiliser les moyens nécessaires pour l’exécution des opérations. Preuve en est : nos élus sont toujours en quête de faire intervenir les services de l’État et des spécialistes extérieurs.

Est-ce à dire que nous avons un problème de compétence dans nos institutions ?

Le consommateur va-t-il toujours en faire les frais, en payant, toujours payer, sans que l’on ne veuille lui rendre des comptes ?

La nouveauté dans cette opération de réparation de Séguineau, c’est que nos ‘’pense-petits’’ ont préféré renoncer :

1/ à des travaux de moins de 100 mètres de long,

2/ au payement de la servitude de passage de l’eau,

3/à l’indemnisation du propriétaire pour le préjudice qu’il a subi,

Ils ont choisi de faire passer le long de la route, sur plus de 2 km le tuyau concerné, pour un coût 10 fois supérieur. Nous nous interrogeons sur cette démarche très onéreuse, qui inévitablement, mettra à mal toute l’économie de ce secteur lors des travaux.

Nous adressons donc la demande expresse à nos décideurs de respecter les engagements signés et de nous éviter dorénavant ce bricolage permanent dans l’aménagement de notre Martinique.

Pour l’association écologique PUMA

Le Président

Florent GRABIN