«L’art et la culture comme leviers de développement urbain»

Mardi 21 octobre à 18h30, table ronde à la B.U.

La B.U. (bibliothèque universitaire) du campus de Schoelcher a le plaisir d’accueillir les 2èmes rencontres Ville Caraïbe, co-organisées par la DEAL Martinique et le Centre de ressources Ville Caraïbe

Urbanistes, chercheurs, artistes, acteurs sociaux impliqués dans ces différents champs d’intervention en Martinique et ailleurs nous feront partager leurs analyses, retours d’expériences et visions d’avenirs.

Inscrivez-vous ! Les places sont limitées !!!

Quelques éléments pour débattre:

Dynamique culturelle et développement urbain

Synthèse du séminaire de recherche et débat

Philippe Chaudoir – Jacques de Maillard

L’Observatoire des politiques culturelles a organisé, en novembre 2003, un séminaire de recherche, d’observation et de réflexion en partenariat avec la DIV et la DDAT, avec l’appui de l’Association des directeurs des affaires culturelles des grandes villes de France. Il était structuré en deux parties distinctes et complémentaires. Les deux premiers jours, orientés sur la relation entre dynamique culturelle et développement urbain, ont tenté de rendre compte de recherches récentes ou en cours sur ce thème et de faire émerger de nouveaux questionnements. Les deux derniers jours, qui concernaient essentiellement les praticiens, ont marqué un temps de réflexion sur la relation entre le développement culturel et la politique de la ville, en questionnant, de manière sous­jacente, les dynamiques urbaines contemporaines.

Prenant acte de la multiplication des évaluations conduites dans le champ urbain depuis une vingtaine d’années, ses organisateurs souhaitaient permettre le débat à partir de recherches récentes posant la question du lien entre culture et développement urbain mais également construire des passerelles entre chercheurs et praticiens. Dans le détail, le premier séminaire s’est organisé autour de réflexions portant sur les espaces et les temporalités urbaines, sur les dispositifs et sur les enjeux contemporains au regard desquels la question culturelle est singulièrement remaniée. Le second s’est orienté vers une approche plus précise autour des dispositifs de la politique de la ville.

Si nous ne sommes pas sûrs que le séminaire a parfaitement répondu aux objectifs fixés (mais quel séminaire le pourrait ?), on ne peut que se féliciter de la vitalité des débats engagés à cette occasion. Aussi, en faire la synthèse en quelques pages tient de la gageure. Nous nous risquons cependant à l’exercice, même s’il est périlleux à deux mains, en essayant de tirer plusieurs fils conducteurs : les usages sociaux et institutionnels de la culture, les effets sociaux des actions conduites dans le domaine culturel, les enjeux démocratiques du développement culturel, la question de la culture dans la ville, et enfin, celle des mots pièges et du rapport entre chercheur et monde social. iLes usages sociaux et institutionnels de la culture urbaine

Au cœur des discussions est revenue, avec insistance, la question de la pluralité des conceptions de la culture. Claude Jacquier1, recensant les projets culturels dans les villes européennes, soulignait la diversité des formes d’expression (manifestations visibles dans l’espace urbain, grands équipements, approches ethnoculturelles valorisant les cultures d’origine, etc.) et l’importance de la reconnaissance de la pluralité des formes d’expression culturelle. Il en tirait d’ailleurs la conclusion que la France, si elle avait été novatrice en matière de croisement entre culture et développement social urbain, au cours des années 80, gagnerait à s’inspirer des projets portés dans de nombreux pays européens qui reposent bien souvent sur une approche élargie de ce qu’est la culture.

Cette question déborde sur la place et le rôle de la culture quand il s’agit de construire de la cohésion sociale. Dans quelle mesure la culture aide­t­elle à « faire société »? Questionnement qui renvoie au lien qui peut exister entre culture et lien social : s’agit­il de dimensions contradictoires ou complémentaires ? Si le séminaire n’a pas apporté de réponses définitives à ces questions, il a permis de mettre en exergue des positions différentes : à ceux qui craignent une instrumentalisation de la culture à des fins sociales répondent ceux qui regrettent que les objectifs culturels contaminent un certain nombre de projets d’insertion sociale, les positions des chercheurs s’alignant d’ailleurs bien souvent sur celles des acteurs sociaux. Autrement dit, on continue à éprouver quelques difficultés à légitimer le lien existant entre action sociale et culture.

Cette interrogation portant sur les usages sociaux et institutionnels de la culture dans la ville renvoie à trois questions différentes : les rapports entre l’individuel et le collectif, entre le passé et le présent, entre l’institutionnel et le culturel. La culture peut être utilisée aujourd’hui, à l’instar des projets culturels à visée sociale (mise en place d’ateliers d’écriture avec des chômeurs de longue durée par exemple) analysé par Stéphanie Pryen 2, comme vecteur d’expression individuelle et de reconnaissance de soi comme personne (d’une capacité à dire « je »). Cette importance donnée à l’individu était également présente dans la communication de Virginie Milliot3 qui, analysant comment la culture avait été sollicitée dans la politique de la ville, soulignait le fait que la culture y a souvent été vue comme favorisant un processus de reconstruction de soi pour des individus touchés par la désaffiliation, avec des effets escomptés en terme d’estime de soi. Nous reviendrons sur les effets de ce processus d’individualisation un peu plus loin. Mais la culture peut être également, de façon à la fois complémentaire et concurrente, vecteur d’identification collective. La pratique du graff, analysée par C. Guinchard, pose de façon privilégiée cette question de l’articulation entre individuel et collectif : la présence d’autrui y est fondamentale, il est important de mettre des graffs là où il y en a d’autres. Il y a une logique d’échange de regards dans les différentes réalisations. F. Raffin souligne également la dimension collective de l’engagement artistique au sein d’un lieu en friche (l’Usine à Genève), où l’engagement culturel est considéré comme un moyen de construction de sa vie. Les règles collectives de fonctionnement de ce lieu sont en constante discussion dans une sorte de cogestion associant les différents membres. Ce qui est apparu en même temps dans le débat, c’est la dimension conflictuelle de ces « collectifs culturels » : opposition entre « posses »4 en ce qui concerne le graff, débats récurrents dans la gestion des squats culturels, conflits qui font à la fois la vitalité et la fragilité de ces mouvements culturels.

Lire Plus => https://sites.univ-lyon2.fr/iul/%28Dynamique%20culturelle%20et%20developpement%20urbain.pdf

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Valérie Sauter, doctorante :

 La mobilisation de l’art et de la culture dans le cadre de projets de développement urbain et de régénération urbaine est un phénomène largement observé depuis les années quatre-vingt. La culture et l’art émergent ainsi comme outils clés dans l’arsenal de régénération et de promotion d’un lieu.
Dans mon travail de thèse je m’intéresse plus particulièrement à la mobilisation des lieux de production artistique (ateliers et studios). Alors que de nombreux projets urbains sont orientés vers la présentation et la consommation de l’art et de la culture (équipements et événements culturels prestigieux, projets d’art public), les lieux de production artistique ont jusqu’à peu été associés à des espaces plus ou moins marginaux ou alternatifs. Si plusieurs projets montrent maintenant une tentative réfléchie de recentrer la production artistique au cœur de la ville, les caractéristiques de ces lieux de production artistique planifiés en projet urbain, leurs conditions d’apparition, leurs rôles dans les politiques urbaines et leurs publics cibles sont encore mal connus. Ceci alors que l’on constate un engouement grandissant de la part des politiques publiques pour les lieux « créatifs », et que les quartiers ou clusters dits « créatifs » se multiplient depuis le début du XXIe siècle.
Dans cette recherche, et à l’aide de méthodes qualitatives, je m’attache donc à comprendre la place des lieux de production artistique dans les politiques urbaines contemporaines. L’analyse des cas des villes de Nantes et de Zurich me permet de mieux appréhender les rôles et valeurs de ces lieux dans l’aménagement urbain.
http://www2.unine.ch/cms/lang/fr/pid/2786