Chlordécone : les députés en commission reconnaissent la responsabilité de l’État

— Par Sabrina Solar —

Malgré les réserves exprimées par la majorité présidentielle, les élus de l’Assemblée nationale ont accordé leur premier feu vert le mercredi 14 février à une proposition de loi socialiste visant à reconnaître la responsabilité de l’État dans le scandale du chlordécone aux Antilles. Porté par le député guadeloupéen Elie Califer, ce texte à forte portée symbolique sera débattu dans l’hémicycle le 29 février, jour dédié aux propositions socialistes.

M. Califer propose d’inscrire dans la loi la reconnaissance explicite par la République française de sa responsabilité dans les préjudices sanitaires, écologiques, et économiques causés par l’utilisation du chlordécone en Martinique et en Guadeloupe. L’objectif primordial de la proposition de loi est la dépollution des terres et des eaux contaminées par cette molécule, ainsi que l’indemnisation des victimes, mettant en lumière les conséquences sur les générations futures.

Le chlordécone, qualifié de « bombe sanitaire », a été largement utilisé dans les bananeraies des Antilles entre les années 1970 et 1990, malgré son interdiction aux États-Unis dès 1975. Le député souligne les ravages persistants de ce pesticide, contaminant les sols et l’eau des Antilles françaises bien après son interdiction.

Le texte a reçu le soutien d’une coalition des oppositions, mais la majorité présidentielle, tout en reconnaissant l’ampleur des dommages, a émis des réserves. Le groupe Renaissance a critiqué la proposition de loi comme étant simplement « symbolique », arguant que la responsabilité de l’État doit être établie par décision de justice. Une suggestion de réécriture du texte en proposant une reconnaissance « de la part de responsabilité » de la République a été émise mais retirée en attendant le débat dans l’hémicycle. Le MoDem a qualifié la proposition de loi socialiste de « déclaratoire ».

En commission, les députés ont approuvé la proposition de loi reconnaissant la responsabilité de l’État dans le scandale sanitaire du chlordécone. Le texte d’Elie Califer sera étudié fin février à l’Assemblée nationale, marquant une avancée significative dans la reconnaissance officielle de la responsabilité de l’État dans cette affaire.

Le chlordécone, utilisé entre les années 1970 et 1990 dans les bananeraies des Antilles, a été autorisé en France jusqu’en 1993, bénéficiant d’une dérogation. Bien que des juges d’instruction aient prononcé un non-lieu début 2023 dans l’enquête sur l’empoisonnement des Antilles au chlordécone, les parties civiles, indignées, ont annoncé faire appel, soulignant la nécessité de justice et de reconnaissance des préjudices subis par les populations et les territoires affectés.