— Par Marie Ozier-Lafontaine —
Dans la salle d’attente d’un cabinet de gynécologie, en Martinique, les patientes se surprennent à s’arrêter. À lire. À ressentir. L’artiste et poétesse Nadia Burner y présente BLEU, une exposition intense, organique, qui plonge dans les blessures du féminin et dans la mémoire collective caribéenne.
Le bleu des hématomes, le bleu des mers, celui des silences et des cris étouffés. Tout au long de ce parcours intimiste, Nadia Burner donne corps à ce qu’on ne dit pas, ou plus : la douleur des mères, l’oppression des femmes, les combats trop souvent tus. “J’ai voulu qu’ici, dans cet espace si symbolique, les femmes puissent se reconnaître, se rappeler que le combat n’est jamais fini”, confie-t-elle.
Deux séries se répondent, chacune composée de linogravures et de vers créés pour l’occasion. La première, autour des marches blanches, rend hommage aux mères d’enfants disparus. Une armée de conques de lambi, en linogravure, rythme les murs — motif de deuil et de transmission. Chaque gravure est accompagnée de poèmes ciselés, autant de voix têtues contre l’effacement.
Suspendue au centre, une conque véritable, brutale, crie dans le vide, comme ces marches silencieuses qui résonnent face à l’indicible.