— Par Sarha Fauré —
Chaque année, le 25 novembre, le monde rend hommage à celles qui ont payé de leur vie le simple courage de résister. Patria, Minerva et María Teresa Mirabal — « Las Mariposas » — ont été emprisonnées, torturées, violées, puis assassinées en 1961 pour avoir défié la dictature dominicaine. En 1981, des militantes latino-américaines ont choisi leur mémoire pour en faire un symbole universel : la lutte contre les violences faites aux femmes. Depuis 1999, cette date est reconnue par l’ONU comme Journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes.
Mais que commémorons-nous si, aujourd’hui encore, ces violences persistent partout ?
La violence machiste n’est ni un accident, ni un mal isolé. Elle est le produit d’un système — le patriarcat — qui discrimine, hiérarchise, exclut. Elle prive les femmes de leurs droits, compromet la santé, l’éducation, l’autonomie économique, la sécurité, et freine tous les progrès sociaux. Elle n’a rien d’inéluctable : c’est un choix politique de la laisser se perpétuer.
Et les chiffres nous rappellent l’urgence :
- En 2024 en France, plus d’un féminicide tous les trois jours, commis par un conjoint ou un ex-conjoint.
- 160 000 enfants victimes de violences sexuelles chaque année.
- Une femme en situation de handicap sur cinq violée au cours de sa vie.
- 8000 viols ou tentatives sur les lieux de travail chaque année, tandis qu’un tiers des femmes y subissent du harcèlement sexuel.
- Les femmes âgées, les femmes migrantes, sans papiers, trans, lesbiennes, bi, précaires, racisées, en situation de prostitution, sont en première ligne : les oppressions se cumulent, et les violences aussi.
- Et lorsque les victimes portent plainte, elles ne sont pas crues, les procédures sont interminables, les classements sans suite sont la norme, et le parcours judiciaire les brise une seconde fois.
Les violences se déroulent partout : à domicile, au travail, à l’école, dans les transports, les lieux de soin, les commissariats, les centres de rétention, les milieux artistiques, sportifs, politiques… Aucun espace n’est épargné. Et lorsque les associations, les premières à soutenir les victimes, voient leurs moyens diminuer, c’est toute la société qui abdique.
Des avancées sont possibles — la loi le prouve
En 2025, une réforme majeure a enfin inscrit dans le code pénal une évidence : sans consentement explicite, il y a agression sexuelle ou viol.
Le consentement doit être libre, éclairé, spécifique, révocable, et ne peut jamais être déduit du silence ou de l’immobilité, notamment en cas de sidération, d’emprise, d’alcool ou de drogues.
C’est une victoire obtenue par des années de mobilisation.
Mais une loi, aussi essentielle soit-elle, ne suffira pas sans les moyens pour l’appliquer.
Face à la montée de l’extrême droite : nos droits sont en danger
Partout où l’extrême droite progresse, les droits des femmes reculent. Sous couvert de « protection », elle instrumentalise les violences faites aux femmes pour servir des agendas racistes et fémonationalistes, ne s’indignant que lorsqu’elle peut désigner des boucs émissaires. Pendant ce temps, les femmes voilées sont agressées dans la rue, les militants féministes sont attaqués par des groupes fascistes, et les violences patriarcales dans toute leur complexité sont niées.
Nous refusons que nos luttes soient détournées, récupérées ou divisées.
Nous exigeons des actes, pas des discours
Les organisations féministes et syndicales réclament :
- Une loi-cadre globale contre les violences, à l’image du modèle espagnol ;
- 3 milliards d’euros pour une politique publique à la hauteur du drame que vivent les femmes et les enfants ;
- Une éducation complète à la vie affective, relationnelle et sexuelle dans tous les établissements ;
- Le rétablissement et l’augmentation des financements des associations qui accompagnent les victimes et mènent la prévention.
Sans prévention, sans éducation, sans moyens, les violences continueront.
Sans justice, les agresseurs continueront.
Sans mobilisation, le patriarcat continuera.
Nous ne renoncerons jamais
Tant que l’une d’entre nous sera menacée, tant qu’une seule femme subira la violence parce qu’elle est femme, nous lutterons.
Nous marcherons pour les femmes, pour les enfants, pour les personnes trans, pour toutes celles et ceux que le système veut invisibles.
Nous appelons à manifester partout le samedi 22 novembre 2025
Nous soutenons les mobilisations pour les droits des enfants et pour le Trans Day of Remembrance.
Parce que nos vies valent plus que leurs silences.
Parce que la liberté ne s’arrache qu’ensemble.
Parce que nous sommes des millions, et que nous n’arrêterons pas.
