Étiquette : Yves UNTEL PASTEL

« Ouvè zyé, pèp mwen ! », de Yves Untel Pastel

Avec une transposition en Martiniquais de l’écrivain guadeloupéen José Robelot.

Ouvè zyé, pèp mwen !

Ouvè zyé-w, pèp mwen
Ès ou pa wè yo ka kwazé-ou w jòdi
kon yè yo krazé papa-w maman-w?
Es ou pa wé sé sé menm-lan
ki mété pèp nou an tribilasyon yè
Sé yo menm ka malmennen w jodi ?
Nou anvi kwé ki sa chanjé
ki tjè bouwo vini méyè
ki sitiyasyon nou ké pli dous
Men eskè chyen ka tounen poul ?
Èskè sèpan ka fè vètè ?
Èskè agoulou sèléra pé fè dot yich
Ki agoula séléra ?
Manmay, tou patou moun èstintjé pèp blan
Pèp mounblan mandè é trapé répawasyon!
Gadé mannyè pèp nég
Ka trimen san trapé ayen !
Ès an zyé zéropéyen nou plis ki ayen ?
Ès nou pa chyen, ès nou pa kaka yenyen ?
É an zyé nou menm, ki sa nou yé ?
Mi nou ka fè bèbèl adan bèl lenj ki pa ta nou
Mi nou ka dansé adan gwan bal ki pa ta nou
Mi nou kwé nou sitwayen adan nasyon ki pa ta nou !

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Chlordécone

— Par Yves Untel Pastel

Chlordécone,
le peuple accuse,

L’état récuse

Chlordécone,
Nos terres distillent
La mort à petit feu

Le peuple suffoque
Halète, crache une braise

Cancéreuse

Des générations sacrifiées
Et personne au banc des accusés :
Le peuple accuse, l’État récuse !

Les prétoires sont sourds à toute plainte
Les juges en livrée de corbeau
Ricanent à l’énonciation des charges

Nulle doléance n’est recevable
Puisque les preuves s’évanouissent
À peine versées aux mains des greffiers

Et cependant, les hommes flétrissent
Leurs testicules s’atrophient
Le mal ronge du dedans
Émascule même les plus viriles

Et c’est tout un peuple
Qui agonise sous castration chimique
C’est tout un peuple qui attend
Un péril sans visage
Un tueur rampant
Dans un silence funeste

Et le grand mal porte

Ce nom barbare
CHLORDECONE

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Le nègre, le gibier des nations

— Yves Untel Pastel, écrivain-poète, Martiniquais de l’autre-bord —

Le nègre, le gibier des nations

Nègres de la terre,
Nègres de toutes terres
Nous sommes de ce peuple de damnés
Partout condamnés pour n’être
Que ce que nous sommes : nègres !
Nègres du monde, damnés de toute terre
Nous sommes ce troupeau de gibiers pourchassés
Bétails attaqués en leurs terres, braconnés, exilés ailleurs
Les lions féroces de partout nous traquent sans relâche
Que ces mangeurs de nègres soient des hommes blancs
Monstres à sang froid d’occident
Ou des tigres rampant venus du levant
Ou des panthères noires, ces autres nègres impériaux, impitoyables
Traîtres vénaux et avides, vassaux cupides et fratricides !
Nègres du monde, viande rouge, tranchée sur les étals mercantiles
Nous n’avons nulle part où trouver un juste repos
Nulle rivière fraîche ou apaiser nos soifs
Nulle paisible prairie où paître
Sans craindre d’être déchiquetés
Tous ces ports où nous échouons
Sont des portes qui donnent sur l’enfer
Des centres de rétention
Où notre chair est massacrée
Où notre âme est abreuvée de fiel
Où notre destin touche au chaos.

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Un jour mémorial

— Par Yves Untel Pastel, écrivain-poète, Martiniquais de l’autre-bord—

Un jour mémorial

Et l’homme noir fut couché
Et l’homme noir de lui-même se dressa
Et la barbarie cisela ses jambes
Et son esprit libre d’entrave
Se hissa par-dessus les nuées
Et sa rebelle dignité habita le temps
Tonnerre grondant depuis le flot des millénaires.
Et je suis la sève montante de cette humanité-là
Pollen, fragment de toute l’humaine essence
Et nul ne me tiendra dans les chaînes
Que l’on dissèque mon corps
Qu’on le broie dans milles étaux
Qu’on le pile, qu’on le vanne,
Qu’on l’émiette qu’on le disperse
Pour nourrir les champs de toutes les barbaries
Mon âme s’échappe par les dents des rouages infâmes
Mon âme s’évade comme l’air entre les mains de mes bourreaux.

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Bonne année à la Martinique…

et à chaque Martiniquaise et Martiniquais.

— Par Yves Untel Pastel, écrivain-poète —

Formuler des vœux de bonne année, nous oblige à poser un regard lucide sur notre Martinique aux mille défis. Parmi ces nombreux challenges, les principaux touchent

– à la restauration de la santé physique et morale du peuple ;

– à l’urgence d’un développement économique intégré, en même temps qu’un partage équilibré des biens économiques et sociaux.

– au redressement moral et spirituel qui nous renvoie à la réhabilitation de nos valeurs communautaires d’intégrité, de solidarité et d’unité transmises par nos anciens.

Nous souhaiter ensemble Bonne Année, c’est accepter de tout faire pour mettre en œuvre, toutes les forces inexploitées de changement, afin de dresser notre Pays-Martinique face aux grandes marées de 2023.

Cependant, les forces dites du changement en Martinique ne seront que celles de la continuité et du Statu quo, voire de l’immobilisme dommageable, si la vérité et le courage politique devaient faire défaut. Je n’évoquerai qu’un seul de ces urgents changements à mettre en œuvre : le bon usage, la bonne gestion de nos ressources collectives, en particulier nos terres.

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On meurt en mon île !

— Par Yves Untel Pastel —

On meurt énormément en mon île
On meurt en hécatombes ordinaires, absurdement
On meurt en rafale fatale en folie de mitraille délirant
On meurt pour rien, on meurt pour tout
On meurt de rien, on meurt de tout,
On meurt banalement de chose grave
De causes criminelles impunément
On meurt sous silence
À la petite roulette des fléaux venus d’ailleurs
Tacitement à l’agrément des notables complotant
On meurt à la grande roulette des exterminations
Des génocides sanitaires,
Des empoisonnements alimentaires
On meurt détrempés en des cocktails létaux
Décimés à petits feux discrets inavouables
On meurt bouches cousues d’attentats larvés
Contre un peuple idiot qu’on éradique méthodique
On meurt de ses mauvais coups permis

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Esclavage, réconciliation sans complaisance

— Par Yves Untel Pastel, ethnologue, poète, auteur-compositeur. —

Sur nos terres brisées aux mille souffrances
Abreuvés de rancœurs, en mal d’espérance

Nous voilà tous convoqués, noirs békés et sang-mêlé
Au chevet d’une mémoire en nécrose purulente

Nous voilà aux abois d’une réconciliation hâtive
Rêvant d’une nation arc-en-ciel guérie de son passé

Mais n’allons pas, à pas pressés, absoudre le grand mal
Sans bien sonder les cœurs après les outrages de l’orage

Il n’y aura pas de réconciliation de complaisance
Il n’y aura pas de réconciliation vaine et au rabais

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Traite et esclavage : un jour férié nécessaire pour unr appropriation mémorielle collective

— Par Yves Untel-Pastel, Ethnologue, Poète, Auteur-Compositeur —

Un crime collectif, une responsabilité collective

De mille façons nous devons le redire : Il faut « Un jour férié » pour honorer la mémoire de nos ancêtres africains réduits en esclavage pendant quatre siècles ! De l’an 1 400 à l’an 1 800 de notre ère. C’était hier. Tous les grands peuples du moment y ont pris leur part, y ont trouvé bénéfices et intérêts. Ce fut un crime collectif dont nul ne peut se dédouaner. Des fortunes se sont bâties sur des millions de morts et un continent entier disloqué, l’Afrique. Les grandes nations d’aujourd’hui y ont trouvé le sang de leur grandeur. Elles en jouissent encore, et leurs peuples profitent des fruits de leurs développements. Tant de peuples oublieux. Qu’ils furent européens, arabes, africains. Toutes les grandes religions et toutes les obédiences du moment ont admis et couvert l’inadmissible, musulmane, chrétienne, juive, animistes, athées. C’est l’histoire de l’Orient et de l’Occident. C’est l’histoire des Africains et des Européens, c’est l’histoire de l’Afrique, c’est l’histoire de toute l’Europe, c’est l’histoire de la France et de tous les Français sans exception, c’est la souffrance de tous les descendants d’esclaves africains de part le monde, celui des Antillais qui peinent à trouver une juste place dans l’histoire de France aux heures des mémoires fondamentales.

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Une photo qui interroge

— Par Yves Untel Pastel,ethnologue, poète et auteur-compositeur —

Bonjour Madame Pau LANGEVIN,

Cette réaction à la présente photo prise alors que vous êtes dans une importante réunion de travail en Martinique, ne vient pas alimenter un effet de mode. A l’heure de la démocratie participative, toutes les occasions peuvent être propices à faire progresser notre vivre ensemble en terre française.

Madame La Ministre, voici un instantané très parlant. Ce n’est pas là un cliché caricatural. C’est au contraire une cristallisation de ce qui se fait et s’est fait depuis toujours. Cela est édifiant à plus d’un point. Vous vivez en direct cet héritage millénaire de la discrimination et de la domination blanche dans sa plus naturelle expression ! Vous n’y êtes pour rien !

Mais devant une telle évidence de l’exclusion des Noir(e)s d’outre-mer de la gestion des choses qui les intéressent, je sais, ou tout du moins, j’espère que votre voix peut s’étonner et certainement s’indigner.
Peut-être, habitée de cette grande profession de foi du président François Hollande, pouvez-vous exiger la traduction concrète du fameux « LE CHANGEMENT C’EST MAINTENANT » dans le temps présent de votre ministère.

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