— Par Serge Romana —
-Tribune- Ma soeur, car nous le sommes par nos parents qui ont souffert de l’esclavage, j’ai lu attentivement la lettre que tu as adressée au Président Hollande et il me vient ces quelques réflexions et une invitation.
Le constat est clair et me semble juste :
1) le Président Hollande, en déclarant le 27 janvier 2015, au mémorial de la Shoah, que « la Shoah est le plus grand crime le plus grand génocide jamais commis » hiérarchise les crimes contre l’Humanité et participe lui aussi à la concurrence des mémoires. C’est désolant et regrettable. Cela entretient chez nous le ressentiment et arme les extrémistes.
2) On parle plus des victimes de la Shoah que de celles de l’esclavage colonial et cela nous fait mal ?
Pourquoi ?
Peut-être parce que la Shoah s’est déroulée au milieu du 20e siècle et que le souvenir de ce génocide est encore prégnant en France ?
Peut-être parce qu’il existe toujours des survivants pour raconter Auschwitz ?
Peut-être parce qu‘Auschwitz est vivant, que l’on peut voir les valises, les cheveux, les jouets des personnes gazées et que nos moulins sont en ruine ?

Sont désormais disponibles en français les analyses et les théories du grand sociologue allemand visant à développer une typologie historique des systèmes d’autorité et de coercition.
–Pierre Bourdieu est mort il y a dix ans. Et à la manière qu’on a eue en France d’enfouir sa pensée, d’en relativiser la portée (ce qui dit assez bien son caractère encombrant, sa lucidité si brûlante qu’on préfère la soustraire à la vue) ou de ne pas véritablement s’en saisir (et à ce jeu, politiques et écrivains ont été aussi experts les uns que les autres), je me dis parfois qu’il est mort de nombreuses fois depuis.
Hugues Lagrange, l’auteur du «Déni des cultures», publie un essai passionnant sur la vie des immigrés du Sahel en Ile-de-France, qui fait un singulier écho à la guerre du Mali. Entretien.