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Réflexions sur la nation et la République

— Par Kenjah —

kenjah-etat-nation-2La confusion, entretenue en France depuis trois siècles, entre la nation et la République est la matrice la plus propice à tous les amalgames. Depuis la Révolution, la tradition politique française fait le grand écart entre une construction ethnique de la nation et une conception universaliste de la République. Ce grand écart, fondé dans l’expérience coloniale et l’exploitation d’un empire mondialisé, s’incarne dans le concept d’État-nation, dans lequel les principes universels de la République sont soumis aux impératifs de la domination ethnique et de l’exclusion des différences.

Il faut renoncer à toute illusion de voir les Français « de souche » réformer cet imaginaire revendiquant ses racines judéo-chrétiennes et une mission civilisatrice lui conférant une forme prétendue de supériorité essentielle. Qui pourra faire obstacle à cette volonté de rétrécissement, à ce choix du plus étroit ? Plus que jamais, la France est face à elle-même et à son destin.

Un vent de pogrom et de ratonnade se lève sur la France. Je ne m’imposerai pas à ceux qui me rejettent et me relèguent dans leurs marges. Me revendiquant enfant de la République, je ne me reconnais pas dans cette nation arrogante et aveugle, même quand elle se veut de bonne foi, comme un entraîneur de football.

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Aimé Césaire à Marseille : la diversité dans l’impasse…

—Par Kenjah —
cesaire-carteFace à la nécessité de changer de logiciel social, face aux défis de la mondialisation, du réchauffement climatique et des migrations de la misère, la France se réfugie dans un nationalisme ethnique annonciateur d’un retour vers le futur des crispations qui ont jalonné l’histoire du XXème siècle. La montée du Front National de Marine Le Pen en est l’indice le plus flagrant, Marseille et la Région PACA le laboratoire le plus pertinent. Pour l’heure, nous n’en sommes qu’aux prémices symboliques, mais le réveil sera dur pour ceux qui croient encore que le principe de laïcité protège leur droit à la différence dans la République. Car il faut le répéter, la conception laïque du FN est une conception ethnique, excluante et exclusive : parmi les Français non originaires d’Europe, seuls ceux qui acceptent de renier leur culture, de s’aliéner et de s’assimiler à la francité gallo-romaine, auront droit de cité. Stéphane Ravier, sénateur-maire FN du 14ème arrondissement de Marseille depuis quelques mois, vient d’en donner une énième illustration. Aimé Césaire, symbole parmi les symboles d’une autre conception de la France, en est le prétexte.

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L’émerveil potager.

par Kenjah

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 Madame Poule prend la plume

Auteur Jacqueline Labbé
Editeur Thot Eds
Date de parution 08/03/2011
ISBN 2849212032

Il se pourrait que le dernier opus de Jacqueline Labbé, « Madame Poule prend la plume », passe pour un livre de « contes » (comme on dit parfois pour ces auteurs retombés en enfance et qui béatifient leur innocence artificielle d’un plat moralisme), Mme Labbé étant connue pour ses bwabwa et sa simplicité. Il se pourrait même que ce petit ouvrage de 120 pages passe pour un bouquin de plus, au sein d’une production antillaise pléthorique, mais ô combien inégale. C’est là, qu’à mont tour, il me faut prendre la plume. Pour dire, « Attention, petite merveille ! ». Le coup du fakir qui tient son naja et ne le lâche plus. Un pur plaisir de lecteur flâneur. Entre du Bach et du Max Cilla, avec des plages de Fall Frèt et de Féfé Maholany, Mona et Chico Jehelman tout semblés, itou Hurard et Barrel en léger fond… Quelque chose d’inclassable, qui relève autant de l’anthropologie que de la poésie.

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« Eloge de la servilité ». L’écrier, la nuit A tous les Quashie

 

L’écrier, la nuit


A tous les Quashie



Eloge de la servilité. Là où loge la servilité. Non pas son bwabwa pitoyable, l’ancêtre esclave dérespecté dans son maintien et sa retenue, mais la résidence coloniale, au cœur (au corps, an kò’y menm) de nos élites. Déloger la servilité. La tracer, la traquer, la détraquer, tout à trac. Kri ! Est-ce que la cour dort ? Car il était temps de la réveiller de ce cauchemar académique et liturgique qui creuse nos renoncements, et notre abandon au pillage plutôt qu’à la Parole.

 

Ce qui habite Monchoachi c’est le cri. Monchoachi n’écrit pas, il é-crie (yékri) il est cri. Le cri est souffle, il est mantra, il est Nom. Kriyé c’est nommer. Le cri est Création (criation). Il figure un lieu, possiblement habitable et partageable, que nul ne possède en propre (malgré que les lieux communs soient toujours des noms propres). Le cri vient de l’envers des choses, il vibre sa vérité, et d’un saut nous révèle (i ka fè nou soté !). Poétique de l’événement, co-naissance à ce qui vient dans la fatalité tragique, ignorant l’inconnu qui déborde de toute sa grandeur (sa ou pa konnèt gran pasé’w).

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