— Par Roland Sabra —
« Et Dieu ne pesait pas lourd » de Dieudonné Niangouna, jeu et m.e.s. de Frédéric Fisbach
Ce soir là sous le chapiteau de Tropiques-Atrium installé au Saint-Esprit deux pièces qui sur des registres totalement différent mettent le théâtre sur la sellette. Tout d’abord « Et Dieu ne pesait pas lourd » de l’auteur, metteur en scène et comédien congolais Dieudonné Niangouna, un monologue qu’il écrit à la demande de son ami l’acteur et metteur en scène français Frédéric Fisbach en souvenir d’une soirée bien arrosée au cours de laquelle la colère et la rage les emportent et les confortent dans leur détestation mutuelle d’un monde qui va droit dans le mur. « Mets tout ça noir sur blanc » lui dit-il. Niangouna ne dit rien. Il n’a jamais écrit pour un blanc. Huit mois plus tard Fisbach reçoit en offrande un cadeau somptueux, un texte flamboyant, volcanique, épique, baroque, échevelé, vertigineux, insolent à la structure gigogne, tendue entre récit tragique de Phèdre et fantaisies délirantes d’un comédien de stand-up. C’est l’histoire d’Anton, acteur dit-il, né à Grigny dans les années 60, qui raconte ou invente sa vie rocambolesque mais qui avant tout cherche à sauver sa peau face à des geôliers, flics-espions des services secrets ou djihadistes réels ou fantasmés peu importe.

« Je m’appelle Anton. Je suis né une première fois à la fin des années 60 à Grigny, dans une barre d’immeubles. J’ai grandi là-bas, entre la bande de l’escalier et le ventre de ma mère. J’ai voulu être acteur, je suis parti aux USA, où je me suis enfermé dans une cave avec un poète. La CIA m’a coincé, je suis parti en mission en Afrique, dans le désert. J’ai été fait prisonnier aux mains d’islamistes radicaux puis des djihadistes. Puis j’ai été délivré par un service secret, mais enfermé à nouveau, pour me faire cracher tout ce que je savais. Qu’est-ce que je savais ? Ça a duré presque trente ans, et chaque fois comme une mort et une nouvelle naissance. Je m’appelle Anton et je suis devant vous, je ne sais pas grand-chose mais j’ai des choses à dire. »