— Par Janine Bailly —
Comment représenter sur scène la violence, dans l’intime et l’universel
En juin 2018, Thomas Ostermeier crée à la Schaubühne de Berlin la pièce Histoire de la violence ; il met en scène le texte qu’il a co-signé avec l’écrivain Édouard Louis à partir du roman autofictionnel de ce dernier. Depuis, le spectacle s’est donné à maintes reprises, en différents lieux, et c’est au festival d’Almada qu’il fait donc escale en ce mois de juillet 2025.
Adapter cette oeuvre complexe relevait de la gageure, tant elle est polyphonique, qui donne sur un seul et même événement des perspectives différentes. Le récit, éclaté, se construit peu à peu, et sans ordre chronologique, suivant en cela la pensée erratique du protagoniste principal, Édouard qui, victime d’une violente agression sexuelle, est encore sous l’effet du traumatisme vécu. Mais le point de vue est aussitôt double, puisque l’on entend Clara narrer à son mari l’histoire que son frère Édouard lui a confiée. Si dans le roman ce dernier écoute, en embuscade derrière la porte, la façon parfois fallacieuse dont elle rapporte les faits – Édouard mentalement la corrige – il est à noter qu’ici, prenant une place de choix, Clara peut entrer en interaction avec les autres personnages.

En 2020, alors que partout en Europe s’éteignaient une à une les manifestations culturelles estivales, la ville d’Almada au Portugal maintenait contre vents et marées son Festival International de Théâtre, sur les deux rives douces du Tage, et sous la conduite de Rodrigo Francisco, son vaillant capitaine. Si en raison de la pandémie l’adjectif “international” s’avérait alors superflu, trois troupes étrangères seulement ayant pu faire le voyage, l’été 2021 voit la renaissance d’un événement qui, auprès de troupes portugaises issues de diverses villes – Almada, Lisbonne, Faro, Porto –, présente, dans un même élan enthousiaste, celles venues
Texte d’Édouard Louis, m.e.s. et jeu Stanislas Nordey.
Dans Qui a tué mon père, Édouard Louis décrypte les mécanismes de domination qui broient les êtres et leurs relations.